COMITÉ DES PRODUITS

GROUPE INTERGOUVERNEMENTAL SUR LA BANANE ET SUR LES FRUITS TROPICAUX

Première session

Gold Coast (Australie), 4-8 mai 1999

LE MARCHÉ DE LA BANANE "BIOLOGIQUE" ET DE LA BANANE DU COMMERCE ÉQUITABLE

Table des matières


I. INTRODUCTION

1. Ce document résume les résultats de deux études conduites récemment par le Secrétariat: la première sur la banane biologique, la seconde sur la banane du commerce équitable. Il traite les deux études de façon séparée et passe en revue, dans chaque cas, la situation actuelle du marché, ses perspectives d'expansion et les conséquences éventuelles pour les petits et les moyens producteurs.

II. LE MARCHÉ DE LA BANANE "BIOLOGIQUE"

2. Une banane est certifiée biologique lorsqu'elle est produite selon des normes nationales à base juridique (reposant généralement sur les lignes directrices publiées par la Fédération internationale des mouvements d'agriculture biologique) sous le contrôle d'un organisme indépendant de certification (voir CCP: BA/TF 99/CRS.5). Dans le cas de la banane, les normes ont généralement été établies dans les pays d'importation.

3. Sur le marché du détail, le total des ventes mondiales de produits biologiques a été estimé à plus de 10 milliards de dollars E.-U. en 19971. Plus de cent pays, dont un nombre important de pays en développement, ont des productions certifiées biologiques. Au cours des 15 dernières années, les ventes de produits biologiques ont connu, sur les principaux marchés, une croissance annuelle estimée à plus de 20 pour cent.

4. Quant à la banane biologique, les ventes n'ont progressé que récemment et elles concernent encore de très faibles volumes. Selon une enquête2 réalisée dans ce secteur, les importations mondiales de bananes biologiques fraîches auraient été d'environ 27 000 tonnes en 1998, alors que les importations totales de bananes se montaient, quant à elles, à plus de 11 millions de tonnes. Les importations progresseraient néanmoins d'environ 30 pour cent par an. Les principaux débouchés sont la Communauté européenne et les Etats-Unis, mais le Japon et le Canada importent également des volumes non négligeables de bananes biologiques. Le principal pays fournisseur est la République dominicaine, suivie de plusieurs autres pays d'Amérique latine (Mexique, Colombie, Honduras et Costa Rica) et des Philippines.

A. SITUATION ACTUELLE DU MARCHÉ

Communauté européenne

5. Dans la Communauté européenne, les échanges de produits alimentaires biologiques étaient estimés en 1997 à 4,5 milliards de dollars E.-U., soit moins de 2 pour cent des ventes totales de produits alimentaires. La Communauté n'en reste pas moins le marché le plus important pour les produits biologiques. En 1997, les importations de bananes biologiques fraîches avoisinaient les 10 000 tonnes tandis que les estimations relatives à 1998 fluctuent entre 11 000 et 13 000 tonnes. Les importations de bananes biologiques transformées sont estimées à 5 000 tonnes par an pour la purée de banane et à quelques centaines de tonnes pour la banane séchée3.

6. Le principal fournisseur de la Communauté européenne est la République dominicaine, qui a assuré plus de 80 pour cent des importations européennes en 1998, avant les graves dommages aux plantations infligés par l'ouragan George. La Colombie est le deuxième fournisseur, avec des exportations estimées à 2 000 tonnes par an. Quant à Israël, il fournit environ 1 000 tonnes de bananes par an selon un schéma plus saisonnier, mais le volume des exportations a baissé4 au cours des dernières années.

7. Sur le marché européen, entre 40 et 50 pour cent des bananes biologiques sont consommées en Allemagne où les ventes ont dépassé 6 000 tonnes en 1998. Cinq importateurs au moins opèrent dans le secteur de la banane biologique, qui est distribuée par les boutiques d'alimentation naturelle et par les principales chaînes de supermarché, ces dernières assurant plus de 50 pour cent des ventes.

8. La seconde place est occupée par le Royaume-Uni dont la consommation de bananes biologiques est estimée à 3 000 tonnes pour 1998. Le marché a connu une expansion rapide grâce au rôle prépondérant joué par les grandes chaînes de supermarché. La banane biologique y est considérée comme un produit de luxe et elle se vend à un prix élevé, mais les supermarchés et les importateurs affirment que la demande dépasse largement l'offre.

9. En France, les ventes annuelles de bananes biologiques sont estimées à un peu moins de 2 000 tonnes. La Suède, elle aussi, semble être un débouché important pour la banane biologique (environ 1 500 tonnes par an).

Etats-Unis et Canada

a) Etats-Unis

10. Aux Etats-Unis, selon les estimations, les ventes de denrées alimentaires biologiques auraient atteint quelque 4,2 milliards de dollars E.-U. en 19975. Depuis 1990, le taux de croissance annuel varie entre 20 et 25 pour cent.

11. En ce qui concerne les bananes biologiques fraîches, on estime que les importations ont été de 7 500 à 8 000 tonnes en 19966, et de 11 000 tonnes en 1998, soit 0,3 pour cent de la consommation totale de bananes. Les principaux fournisseurs sont la République dominicaine et le Mexique, avec des parts de marché respectives de 50 et de 40 pour cent. Les 10 pour cent restants proviennent essentiellement du Honduras.

b) Canada

12. Au Canada, en 1997, les produits alimentaires biologiques ont représenté 1 pour cent des ventes totales de produits alimentaires. Les Etats-Unis fournissent l'essentiel des bananes biologiques importées par le Canada, qui sont en fait originaires de la République dominicaine, du Mexique et du Honduras. Les importations totales de bananes biologiques ont été estimées à 1 800 tonnes en 19987.

Japon

13. Selon les estimations, les échanges de produits alimentaires biologiques sur le marché japonais se chiffraient à environ 1 milliard de dollars E.-U. en 19978. Ces produits sont généralement vendus dans les coopératives de consommateurs, les boutiques conventionnelles et les grandes surfaces. On estime à 2 700 tonnes les bananes biologiques importées en 19979, soit 0,3 pour cent du marché japonais de la banane. Les principaux fournisseurs du Japon sont les Philippines et l'Australie, mais une partie des bananes provient également du Mexique.

B. PERSPECTIVES DU MARCHÉ

14. Les ventes de bananes biologiques devraient continuer à progresser sur tous les principaux marchés. Le facteur limitant est l'insuffisance de l'offre, due aux nombreuses contraintes affectant la production de bananes biologiques dans nombre de pays tropicaux (voir paragraphe 20).

15. Aux Etats-Unis, les perspectives d'accroissement ultérieur des ventes de bananes biologiques sont excellentes. Les ventes de ce produit ont progressé à un rythme annuel supérieur à 20 pour cent. De plus, les principaux fournisseurs sont géographiquement très proches. Pour autant que les problèmes de l'offre soient résolus, la part du marché des bananes biologiques pourrait aisément rejoindre celle détenue par les produits biologiques frais (1,7 pour cent en moyenne), ce qui représenterait un volume d'environ 60 000 tonnes par an.

16. De même, dans la Communauté européenne, il y a une forte demande de bananes biologiques, en particulier dans les principales chaînes de supermarché en Allemagne, au Royaume-Uni et en France. D'autres pays enregistrent les mêmes tendances (Pays-Bas, Danemark, Autriche, Belgique, Suède). Selon diverses sources, les produits alimentaires biologiques pourraient assurer, à l'horizon 2006, quelque 10 pour cent de l'ensemble du marché alimentaire des pays européens10. Compte tenu de la part actuelle du marché des fruits et légumes biologiques, la banane biologique pourrait rapidement représenter 1,5 pour cent (45 000 tonnes) de la consommation communautaire totale de bananes.

17. Au Canada, un programme mis en œvre par le Centre de recherche pour le développement international (CRDI) tente de développer les importations d'une variété de banane FHIA II (Mona Lisa) résistante à la cercosporiose noire cultivée selon un mode de production biologique au Costa Rica11. Après la pomme, la banane est le fruit le plus populaire au Canada, avec une consommation annuelle de 13 kg par habitant. Un fort accroissement de la consommation de bananes biologiques semble possible.

18. Au Japon également, un potentiel important semble exister pour le créneau de la banane biologique. Les ventes de produits alimentaires biologiques ont augmenté de 20 pour cent par an depuis la moitié des années 80. Selon les spécialistes du secteur, si les bananes biologiques étaient mises en vente à un prix ne dépassant pas de 20 pour cent celui des bananes conventionnelles, 20 pour cent des consommateurs les achèteraient12.

C. CONSÉQUENCES POUR LES PRODUCTEURS DE BANANES

19. Compte tenu des exigences supérieures en terme de main-d'œvre et de l'intérêt d'utiliser des cultures intercalaires ou des systèmes agricoles mixtes, la production de bananes biologiques semble être a priori adaptée aux petites et moyennes exploitations agricoles. En théorie, elle pourrait améliorer la viabilité économique de certaines petites bananeraies qui ne sont pas en mesure de concurrencer au niveau international les grandes unités de production. Selon le marché étudié, la différence de prix au détail peut varier de 50 à 200 pour cent. Quant à la différence payée aux producteurs, elle est substantielle mais plus difficile à estimer. D'après les spécialistes du secteur, le prix moyen FOB de la caisse de bananes biologiques débarquée en Europe (18,14 kg) est de 11 dollars E.-U., contre 8 dollars E.-U. pour les bananes non biologiques.

20. Toutefois, la production et l'exportation de bananes biologiques sont entravées par de nombreuses contraintes. L'obstacle majeur est de loin la prévalence de la cercosporiose noire dans de nombreux pays producteurs de bananes. Jusqu'ici, aucun traitement biologique efficace n'a encore été trouvé pour combattre cette maladie fongique. La recherche est actuellement orientée vers la création de variétés résistantes. La fertilité des sols représente un autre obstacle important13. La pourriture du collet pose encore des problèmes, notamment lorsque le transport est long, mais plusieurs solutions ont été trouvées pour réduire son incidence. De façon plus générale, une réorientation vers la production biologique implique souvent une réorganisation du système d'exploitation agricole. Au cours de la période de transition, les coûts peuvent être excessivement élevés pour les agriculteurs disposant de peu de ressources14. Les fournisseurs doivent encore réaliser des progrès pour satisfaire la demande des supermarchés en termes de régularité et d'homogénéité des livraisons. Enfin, les différences entre pays au niveau des normes relatives aux produits biologiques peuvent aussi représenter une contrainte.

21. Les problèmes logistiques continuent de constituer une barrière significative entravant l'exportation des bananes biologiques. Les volumes sont généralement faibles et les frais de transport sont donc plus élevés. Pour les expéditions, il faut généralement attendre le départ des navires frigorifiques et des conteneurs transportant des bananes non biologiques. Les pays en dehors des voies régulières de transport de bananes sont encore plus lourdement pénalisés.

22. Vu la forte demande provenant des supermarchés, il semble que les contraintes soient moins nombreuses en ce qui concerne la demande. Cependant, les détaillants affirment qu'une forte baisse des prix est impérative si l'on veut que l'accroissement de la part de marché des bananes biologiques ne se limite pas à quelques points de pourcentage15.

III. LE MARCHÉ DE LA BANANE DU COMMERCE ÉQUITABLE

23. Il n'y a pas de définition unique, reconnue à l'unanimité, du commerce équitable (également appelé commerce alternatif). Pour ses partisans, il s'agit d'une façon d'aider les petits producteurs des pays en développement à améliorer leur qualité de vie en leur proposant des relations commerciales plus rentables et plus stables, Les critères utilisés pour déterminer si une relation commerciale est "équitable" sont dépourvus de base juridique, à la différence des produits biologiques, et varient généralement d'une organisation de commerce alternatif à l'autre. Toutefois, les composantes essentielles du commerce équitable peuvent être résumées comme suit:

En ce qui concerne le commerce équitable des bananes, plusieurs critères sociaux et environnementaux ont été établis par l'organisation FLO (Fair Trade Labeling Organization)16 (voir CCP: BA/TF 99/CRS.6). En fixant des critères relatifs au prix d'achat minimum et en éliminant la plupart des intermédiaires, le mouvement du commerce équitable cherche à aider les producteurs à obtenir une part plus importante de la valeur ajoutée du produit, à l'image des supermarchés des pays développés qui tentent d'augmenter leur marge bénéficiaire en achetant directement auprès des producteurs.

24. Le commerce équitable des denrées alimentaires a démarré au début des années 70 avec la canne à sucre et le café. Les produits du commerce équitable sont généralement importés par les organisations de commerce alternatif et vendus dans des magasins spécialisés non conventionnels. L'introduction, en 1998, du label "commerce équitable" marque une étape décisive: cette étiquette est délivrée aux importateurs par des organisations indépendantes, qui vérifient que les pratiques commerciales sont conformes à leurs critères du commerce équitable. Depuis lors, les produits alimentaires portant ce label peuvent également être mis en vente dans les filières de commercialisation conventionnelles (grandes surfaces y compris). Cela a permis une forte expansion du marché des produits alimentaires du commerce équitable, lesquels incluent à présent le café, le cacao, le thé, la banane et le miel. La banane est le seul fruit frais commercialisé à grande échelle selon la démarche du commerce équitable.

A. SITUATION ACTUELLE DU MARCHÉ

25. D'après la Fédération internationale du commerce alternatif (IFAT), le chiffre d'affaires mondial du commerce équitable est d'environ 400 millions de dollars E.-U.

Europe occidentale

26. Dans la Communauté européenne et en Suisse, le mouvement du commerce équitable est bien développé et structuré. Une enquête publiée en 1998 par l'Association européenne du commerce équitable (EFTA) révèle que cette forme de commerce intéresse 70 importateurs, 3 000 "magasins du monde" et 50 chaînes de supermarché dans 14 pays européens17. Le chiffre d'affaires pour les ventes au détail a été estimé à plus de 230 millions de dollars E.-U., dont 140 millions correspondent à des denrées alimentaires (60 pour cent).

27. Dans chaque pays, il n'existe qu'un seul label `commerce équitable' et qu'une seule organisation habilitée à le délivrer. En 1996, des organisations non gouvernementales se sont unies pour mettre en place la FLO , organisation non gouvernementale ayant fonction de coordinatrice à l'échelle internationale et qui tient le registre des producteurs certifiés pour chaque type de produit. Quelques organisations de commerce alternatif importent des bananes du commerce équitable sans recourir aux labels de la FLO, mais leur volume d'importation est faible.

28. Plus de 5 opérateurs importent en Europe des bananes portant le label "commerce équitable". Le premier importateur est Agrofair, une entreprise mixte formée par "Solidaridad", organisation non gouvernementale des Pays-Bas, et par des producteurs de pays en développement. Cette entreprise a été l'une des premières à importer aux Pays-Bas des bananes de ce type et elle assure aujourd'hui plus de 60 pour cent des importations de bananes du commerce équitable en Europe. Les principaux fournisseurs sont des coopératives agricoles en Equateur, en République dominicaine et au Costa Rica, ainsi qu'une exploitation agricole privée au Ghana. Deux importateurs vendent des bananes biologiques originaires de la République dominicaine portant le label `commerce équitable', essentiellement en Allemagne. Les prix au détail des bananes du commerce équitable dépassent en moyenne de 20 pour cent ceux des bananes conventionnelles de premier choix, à l'exception de la Suisse où les prix sont analogues (voir paragraphe 45).

Tableau 1: Importations en Europe occidentale de bananes portant le label "commerce équitable" (en tonnes)

Pays

Pays-Bas

Suisse

Allemagne

Belgique

Danemark

Suède

Total

Label
(FLO)

Max Havelaar

Max Havelaar

TransFair

Max Havelaar

Max Havelaar

Rättvisemarkt

 

Importations
1997

5 800

6 300

-

180

230

 

12 510

Pays

Pays-Bas

Suisse

Allemagne

Belgique

Danemark

Suède

Total

Importations
1998

5 200

7 500

3 042

849

725

50

17 366

a) Pays-Bas

29. La banane du commerce équitable est vendue sur le marché des Pays-Bas depuis novembre 1996. Soutenue par une importante campagne publicitaire, son introduction a connu un succès immédiat, sa part du marché dépassant 10 pour cent en quelques mois18. Depuis lors, celle-ci est descendue à environ 5 pour cent, mais c'est tout de même la part la plus élevée détenue par un produit du commerce équitable aux Pays-Bas. La Fondation Max Havelaar affirme que cette baisse est à attribuer à plusieurs facteurs, tels que le coût élevé des licences d'importation (voir paragraphe 45), les problèmes logistiques et la désorganisation de la production à cause des conditions météorologiques difficiles en 1998.

b) Suisse

30. La Suisse n'est pas un débouché commercial important pour la banane (elle en a importé 74 000 tonnes en 1997). Cependant, la consommation par habitant est l'une des plus élevées d'Europe. La banane du commerce équitable détient une part substantielle du marché (10 pour cent); elle est distribuée dans les principales chaînes de supermarché (Coop Schweiz et Migros).

c) Allemagne

31. En Allemagne, Banafair, organisation de commerce alternatif, importe des bananes du commerce équitable depuis la moitié des années 80 (entre 500 et 1 000 tonnes par an). Les importations de bananes portant l'étiquette TransFair ont débuté en avril 1998. On compte actuellement plusieurs importateurs de bananes du commerce équitable qui approvisionnent le marché allemand. Les volumes commercialisés ont atteint 3 000 tonnes en 1998, soit à peine 0,3 pour cent de la consommation totale de bananes. La banane du commerce équitable a subi des revers sur le marché allemand à cause des problèmes au niveau de l'offre, causés notamment par les mauvaises conditions météorologiques en Equateur qui ont compromis la production.

d) Belgique, Danemark et Suède

32. Cela fait quelques années que plusieurs opérateurs alternatifs importent à petite échelle des bananes du commerce équitable en Belgique (Oxfam), au Danemark et en Suède. Les premières bananes portant le label "commerce équitable" sont arrivées fin 1997 sur le marché de ces pays. Jusqu'à présent, les résultats n'ont pas été à la hauteur des attentes (voir tableau 1). En Suède, les seules bananes commercialisées avec le label "commerce équitable" sont produites selon les méthodes de l'agriculture biologiques et originaires de la République dominicaine.

Autres marchés

33. Au Japon, Alter Trade Japan, organisation de commerce alternatif, importe depuis 1989 des bananes du commerce équitable. Environ 2 000 tonnes de bananes de ce type, originaires de l'île de Negros (Philippines), auraient été importées en 1998.

34. Aux Etats-Unis et au Canada, les importateurs alternatifs se sont surtout concentrés jusqu'ici sur les produits artisanaux. Certains vendent toutefois du café. Jusqu'à présent, aucune banane portant un label "commerce équitable" agréé par la FLO n'a été commercialisée.

B. PERSPECTIVES DU MARCHÉ

Europe occidentale

35. La publication d'une enquête de la Commission européenne sur la demande potentielle de bananes du commerce équitable a provoqué un regain d'intérêt pour ce produit19. Ainsi, les bananes du commerce équitable seraient achetées par au moins 10 pour cent des consommateurs de la communauté si les prix étaient semblables à ceux des bananes conventionnelles et par 7,5 pour cent des consommateurs si la différence à payer était de 10 pour cent. Ces pourcentages correspondent respectivement à des volumes de 400 000 et 300 000 tonnes. L'enquête révèle par ailleurs que les pays scandinaves et du Bénélux, le Royaume-Uni et l'Allemagne sont les pays ayant le plus grand potentiel en termes de sensibilisation des consommateurs au commerce équitable et de volonté d'acquérir ces produits.

36. Les premiers résultats obtenus sur les marchés hollandais et suisse corroborent partiellement les conclusions de l'enquête. Dans les deux pays, peu après l'introduction des bananes du commerce équitable, leur part du marché avait déjà dépassé 10 pour cent. De même, on attend une hausse lente mais régulière des ventes au Danemark et en Belgique. Toutefois, il sera nécessaire de déployer des efforts plus importants pour la promotion et la publicité du produit.

37. En Allemagne, les perspectives sont mitigées. Les consommateurs sont fortement sensibilisés à la question du commerce équitable (40 pour cent) et plus de 15 pour cent d'entre eux ont déjà acquis des produits résultant de cette démarche. Toutefois, les ventes de bananes du commerce équitable pourraient être entravées par le fait que les chaînes de supermarché semblent être plus intéressées par la mise en vente de bananes "bio".

38. Les perspectives sont plutôt bonnes au Royaume-Uni. Quelque 40 pour cent des consommateurs sont sensibilisés à la question du commerce équitable et 20 pour cent ont déjà acheté des produits de ce type. Les produits portant le label "Fair Trade Mark" sont vendus dans toutes les grandes chaînes de supermarché. En 1999, la Fondation Fair Trade prévoit d'introduire sur le marché du Royaume-Uni des bananes du commerce équitable provenant des îles du Vent.

39. La commercialisation de bananes du commerce équitable semble s'annoncer plus difficile dans le sud de l'Europe où peu de consommateurs sont sensibilisés au commerce alternatif.

Etats-Unis et Canada

40. Aux Etats-Unis, la Fondation TransFair prévoit de lancer sur le marché, en 1999, des bananes du commerce équitable.

41. Au Canada, l'initiative Fair Fruit, groupe appuyé par l'Institut de recherche sur le développement durable, tente d'introduire des bananes du commerce équitable en Colombie britannique, en partenariat avec Oxfam Canada. A long terme, le Canada pourrait représenter un créneau commercial important vu la consommation élevée de bananes par habitant.

C. CONSÉQUENCES POUR LES PRODUCTEURS DE BANANES

Opportunités pour les producteurs de bananes, surtout les petits exploitants

42. Pour les producteurs des pays en développement, le fait de nouer des relations commerciales avec des importateurs alternatifs des pays industrialisés offre une série d'avantages. Les prix plus élevés et plus stables, conjugués à des relations commerciales durables, pourraient leur permettre d'améliorer leur revenu et de faire des investissements à plus long terme (voir CCP: BA/TF 99/CRS.6). Dans certains cas, dans le cadre de relations plus transparentes, les importateurs alternatifs aident les associations de producteurs, en particulier celles regroupant les petits agriculteurs, à accéder au crédit, à l'assistance technique et aux informations commerciales.

Contraintes et enjeux

43. Plusieurs études indiquent que le développement substantiel et à long terme du secteur des bananes du commerce équitable passe nécessairement par trois conditions de base: les bananes doivent être de la même qualité que les bananes conventionnelles de premier choix; elles doivent être facilement disponibles dans les principaux magasins alimentaires; et les consommateurs doivent avoir la garantie qu'elles se conforment aux critères du commerce équitable. La transparence, un système de certification indépendant et des mécanismes de contrôle sont donc requis. Etant donné que le terme "commerce équitable" n'est ni défini avec rigueur, ni juridiquement protégé20, il est nécessaire d'harmoniser et d'unifier les critères du commerce équitable, processus complexe dans lequel la FLO s'est déjà engagée. Une autre contrainte potentielle est l'instabilité des prix de la banane sur le marché de détail des pays importateurs, caractéristique qui est susceptible de pénaliser les importateurs alternatifs dans la mesure où ces derniers garantissent un prix d'achat minimum à leurs fournisseurs.

44. Les importateurs de bananes du commerce équitable attirent l'attention sur l'importance des contraintes logistiques. Les problèmes de transport devraient être moins aigus lorsque les importateurs dépasseront un certain volume leur permettant d'occuper un espace plus important sur les navires frigorifiques des lignes régulières.

45. Selon le secteur, la nécessité d'acheter des licences d'importation est le facteur qui freine le plus l'accroissement des ventes de bananes du commerce équitable dans la CE. Définis comme opérateurs "récemment installés" dans le régime d'importation de bananes de la Communauté européenne, les importateurs de bananes du commerce équitable sont en concurrence avec tous les autres opérateurs "récemment installés"pour partager les 8 pour cent de licences disponibles pour cette catégorie d'opérateurs. Pour 1999, l'allocation la plus récente était de seulement 276 tonnes par opérateur "récemment installé"21. Par conséquent, les importateurs de bananes du commerce équitable sont obligés d'acheter des licences à d'autres opérateurs, ce qui représente un surcoût de plus de 30 pour cent du prix CAF de la banane. D'après la Fondation Max Havelaar, cela explique pourquoi, en Suisse, pays n'exigeant aucune licence pour importer des bananes, les bananes du commerce équitable et celles dites conventionnelles sont vendues au même prix.

IV. CONCLUSIONS

46. Même si elles partagent plusieurs caractéristiques (en particulier, la recherche d'une plus grande durabilité de l'industrie bananière), la banane biologique et la banane du commerce équitable sont confrontées à des enjeux différents.

47. En ce qui concerne la banane biologique, l' enjeu primordial est lié à la production. Même si la demande du marché est importante, la banane biologique occupera une simple niche de marché tant que les contraintes considérables de la production ne seront pas surmontées (surtout les aspects ayant trait à la cercosporiose noire et à la fertilité des sols). A cet égard, elle pourrait offrir d'excellentes possibilités aux petits et moyens producteurs des pays où la cercosporiose noire est absente ou moins fréquente (par ex., la République dominicaine, les îles du Vent, le sud du Brésil). Néanmoins, les autres obstacles liés à la production et au transport devront trouver une solution (par ex., lorsqu'il n'y a pas de départs de navires frigorifiques directs transportant des bananes vers l'Europe ou l'Amérique du Nord). Enfin, des recherches supplémentaires s'imposent sur les méthodes permettant de maintenir la fertilité du sol, de lutter contre les maladies et les ravageurs et d'introduire éventuellement de nouvelles variétés résistant aux maladies.

48. Quant à la banane du commerce équitable, les problèmes au niveau de l'offre disparaissent progressivement, l'obstacle principal restant la commercialisation. Des investissements supplémentaires en matière de communication s'avèrent nécessaires pour faire comprendre aussi bien aux consommateurs qu'aux détaillants que les prix plus élevés sont justifiés. Contrairement aux critères de la production biologique, qui sont étayés par des preuves scientifiques, les critères sociaux auxquels les opérateurs du commerce équitable ont recours ne font pas l'unanimité et leur acceptation au niveau international risque d'être plus difficile. Les efforts actuellement déployés par la FLO (Fair Trade Labeling Organization) pour harmoniser les critères et les labels sont importants, si l'on veut améliorer la visibilité et la crédibilité des bananes du commerce équitable.

V. ACTIVITÉS PROPOSÉES

49. En tant que seule et unique instance intergouvernementale s'occupant des questions de commerce de la banane, le Groupe pourrait jouer un rôle utile pour:

50. En ce qui concerne la banane biologique, le Groupe pourrait suivre et analyser les faits nouveaux en matière de production, de commerce et de politiques dans ce secteur et faciliter l'échange d'informations.


1 Kortbech-Olesen, R. (1998) Export Potential of Organic Products from Developing Countries, Conférence IFOAM, Mar del Plata, Argentine.

2 Sauvé, E. (1998). The global market for organic bananas, INIBAP, Montpellier, France.

3 Sauvé, Ibidem.

4 Eurofruit (1997). Israeli growers extend their range. Octobre 1997.

5 OTA (1998) 1998. Organic Manufacturer market survey, Organic Trade Association, Greenfield, MA, E.-U.

6 Buley et al. (1997). Exporting organic products: marketing handbook, Protrade, GTZ, Eschborn, Allemagne.

7 Sauvé (1998), op. Cit.

8 Kortbech-Olesen, ITC (1998), op. Cit.

9 AMPO (1997), "Bananas to change the world", Japan Asia Quartely Review, Vol. 24, No. 2, pages 12-16, Tokyo, Japon.

10 USDA (1998). The European Organic Food Market, Foreign Agricultural Service, mars 1998, Washington D.C.

11 Sauvé, E. & Edwardson, W. (1998), Bringing new bananas to the Canadian Market, International Development Research Institue, Ottawa, Canada.

12 Hamilton-Bate, C. (1996) Organic bananas get lift from Japan, Asiafruit, juillet-août 1996.

13 Van Elzakker, B. (1998) Survey on trade in organic bananas, unpublished paper, Agro Eco Consultancy, Bennekom, Pays-Bas.

14 Bainbridge et al. (1997). Potential for fair trade and organic bananas from the Caribbean, Natural resources institute, Chatham, Royaume-Uni.

15 Buley et al. (1997), op. Cit.

16 FLO (1997) Fair trade banana criteria, Fair Trade Labelling Organizations International, International Banana Register, Bonn.

17 EFTA (1998) Facts and figures on the fait trade sector in 16 European countries, Maastricht, Pays-Bas.

18 Eurofruit (1997). EU goes for fair trade bananas, octobre 1997.

19 Commission européenne (1997). Attitudes of EU consumers to fair trade bananas. The Common Agricultural Policy, Directorate-General for Agriculture, Bruxelles.

20 Fassa, R. (1998). Rapport sur le commerce équitable. Commission du développement et de la coopération, document de séance, Parlement européen, Strasbourg, France.

21 Journal officiel des CE (1998), Série L, numéro 333, décembre, Bruxelles.