COMITÉ DES PRODUITS

GROUPE INTERGOUVERNEMENTAL SUR LA BANANE ET
LES FRUITS TROPICAUX

Première session

Gold Coast (Australie), 4-8 mai 1999

MÉTHODES DE TRAITEMENT PHYTOSANITAIRE DES EXPORTATIONS DE FRUITS TROPICAUX ENVISAGÉES EN REMPLACEMENT DU BROMURE DE MÉTHYLE

Table des matières

I. INTRODUCTION

II. HISTORIQUE

III. TRAITEMENTS DE REMPLACEMENT DU BROMURE DE MÉTHYLE

IV. CONCLUSIONS


I. INTRODUCTION

1. Dans le présent document, le Secrétariat tente, pour la première fois d'évaluer les incidences économiques des traitements de remplacement du bromure de méthyle pour les exportations de fruits tropicaux. Cette étude porte notamment, lorsque les informations correspondantes sont disponibles, sur l'efficacité des traitements et l'importance des investissements à envisager pour les mettre en place. L'absence des données nécessaires à la réalisation d'une analyse économique systématique des traitements de remplacement, visant notamment à déterminer le niveau des exportations de fruits tropicaux susceptible de justifier de tels investissements, ainsi que les coûts et avantages monétaires et sociaux qui s'y rapportent, a constitué le principal obstacle rencontré dans le cadre de cette étude. En outre, il n'y a pas eu suffisamment de temps entre les sessions (12 mois) et les moyens disponibles ont été trop limités pour réaliser une étude approfondie, de telle sorte que l'analyse présentée ci-après s'appuie exclusivement sur des sources d'information secondaires. Si le Sous-Groupe décide qu'une analyse approfondie est nécessaire, il faudrait alors convenir d'arrangements appropriés, notamment des accords de coopération avec des institutions et des experts nationaux, ainsi que des visites sur place, de façon à pouvoir recueillir les données requises.

II. HISTORIQUE

2. Le bromure de méthyle est un fumigant utilisé à l'échelle industrielle depuis plus de 40 ans afin d'éliminer les parasites tels que les bactéries, les champignons, les virus transmissibles par le sol, les insectes, les mites, les nématodes et les rongeurs. Le bromure de méthyle est un gaz inodore et incolore; les caractéristiques de ce produit chimique polyvalent lui confèrent un vaste éventail d'applications, en particulier comme produit de traitement standard de toutes sortes de fruits tropicaux exportés. Toutefois, en 1992, il a été inscrit sur la liste du Protocole de Montréal en tant que substance nocive pour la couche d'ozone, ce qui a conduit certains pays à en limiter l'utilisation, dans le but d'en arrêter à terme la production.

3. Les parties au Protocole de Montréal, lors de leur neuvième réunion en septembre 1997, ont décidé, pour les pays développés, d'appliquer une réduction de 25% de la production et de la consommation, (sur la base des niveaux atteints en 1991), à partir du 1er janvier 1999, puis une baisse de 50% à compter du 1er janvier 2001, suivie d'une réduction de 70% à partir du 1er janvier 2003, et enfin, une élimination complète au 1er janvier 2005. Un gel de la production et de la consommation (sur la base des niveaux de 1991) avait été appliqué à partir du 1er janvier 1995. Certains pays développés ont accéléré l'élimination du bromure de méthyle (le Danemark et la Suède ont décidé de l'éliminer complètement en 1998, l'Autriche en l'an 2000 et la Communauté européenne dans son ensemble, ainsi que les Etats-Unis, en l'an 2001). Quant aux pays en développement, une réduction de 20% de la production et de la consommation (fondée sur les niveaux moyens observés pendant la période 1995-1998) doit s'appliquer à partir du 1er janvier 2005, avant l'élimination complète prévue pour 2015. Un gel aux niveaux de 1995-1998, doit s'appliquer à partir du 1er janvier 2002.

III. TRAITEMENTS DE REMPLACEMENT DU BROMURE DE MÉTHYLE

4. La liste des traitements de remplacement du bromure de méthyle figure au tableau 1. Les indications suivantes sont fournies le cas échéant: description, produits traités, efficacité, dépenses d'investissement et coûts d'utilisation. La présente analyse porte sur les principales exportations suivantes de fruits tropicaux: avocats, papayes, mangues, litchis, ananas, goyaves, longanes, durions, ramboutans, chérimoles, caramboles, fruits de la passion et sapotilles. L'exportation de ces fruits revêt une importance économique pour de nombreux pays, notamment l'Australie, l'Inde, l'Indonésie, la Malaisie, les Philippines, la province chinoise de Taïwan, la Thaïlande et beaucoup d'autres pays d'Afrique, d'Asie, d'Amérique latine et des Caraïbes. Ces fruits sont susceptibles d'être infestés par une gamme étendue de parasites, notamment les parasites internes et externes, les lépidoptères, les acariens, et les charançons, mais les principaux dégâts sont dus à la mouche des fruits.

Tableau 1. Traitements susceptibles de remplacer l'utilisation du bromure de méthyle

Traitement

Description

Efficacité

Dépense d'investissement

Coût d'utilisation

1. Dibromure d'éthylène

Fumigant

Lié à des cas de cancer et donc pratiquement éliminé

   

2. Iodure de méthyle

Rapidement détruit par le rayonnement ultraviolet et par conséquent non considéré comme une menace pour la couche d'ozone. Il est néanmoins utilisé en tant que produit biocide semblable au bromure de méthyle.

Les essais réalisés en 1997 par le département de l'agriculture des Etats-Unis ont mis en évidence son efficacité contre la mouche des fruits des Caraïbes sur les goyaves et les papayes. Des essais se déroulent actuellement pour déterminer les doses minimales nécessaires pour obtenir la conformité aux règlements de protection phytosanitaire.

   

Tableau 1 (suite). Traitements susceptibles de remplacer l'utilisation du bromure de méthyle

3.Bains chimiques

Traitement approuvé pour la lutte contre les mouches des fruits australiennes.

Accepté par la Nouvelle Zélande pour le traitement des importations de fruits d'Australie. Constitue par conséquent un précédent pour des importations similaires en provenance d'autres pays.

10 000 $E.-U.

 

4. Désinfestation par réfrigération

Après avoir été refroidis à 0° les fruits sont maintenus à cette température pendant 13 à 16 jours.

Utilisée essentiellement pour les fruits provenant de régions au climat tempéré

Possibilité d'utilisation d'une installation d'entreposage frigorifique existante

Coût très élevé en énergie, comme dans le cas des traitements par la chaleur.

5. Bains d'eau chaude

Plonger dans l'eau chaude à une température d'environ 50°C.

Identique à celle de la méthode par air chaud comprimé. Tous les traitements par la chaleur réduisent sensiblement la durée de conservation.

120 000 $E.-U. Exige également un entreposage frigorifique.

Coût très élevé en énergie.

6. Traitement par air chaud comprimé

Actuellement utilisé pour les exportations de mangues et de papayes.

Traitement particulièrement efficace sur les phases immatures de la mouche des fruits.

160 000 $ E.-U. L`utilisation d'une installation d'entreposage frigorifique est également essentielle

Coût très élevé en énergie.

7. Traitement de chauffage à la vapeur

Analogue au traitement par air chaud comprimé, mais le chauffage à la vapeur utilise l'humidité.

Voir ci-dessus

Voir ci-dessus

Voir ci-dessus

8. Atmosphère contrôlée

Contrôle de la température et du taux d'humidité ainsi que des teneurs en oxygène, en azote et en dioxyde de carbone.

En cours d'expérimentation pour les mangues.

   

9. Irradiation

Le rayonnement ionisant traverse les produits alimentaires sans laisser de résidus

La plupart des traitements par irradiation à des fins phytosanitaires ne détruisent pas les parasites, mais empêchent leur apparition (par exemple, les mouches des fruits) ou entraînent leur stérilité.

Environ 5 millions de $E.-U.

200 000 $E.-U. sur 10 ans (avec un taux d'actualisation de 10%) et en supposant une tarification du traitement à raison de 0,20 $E.-U. par kg, le seuil de rentabilité de ce traitement se situe approximativement à 5 000 tonnes par an.

10. Divers. Voir document CCP: BA/TF 99/CRS.8.

       

5. Parmi les autres méthodes envisageables, qui ont été ou sont actuellement expérimentées, les plus prometteuses dans le cas des fruits tropicaux semblent être les traitements par la chaleur (bain, vapeur et air comprimé) et le paraffinage. D'autres traitements sont acceptés dans la partie continentale des Etats-Unis (à savoir les traitements par irradiation et par réfrigération), mais uniquement pour les fruits provenant d'Hawaï. Les informations fournies ci-dessous se rapportent à la situation des deux principaux marchés des fruits tropicaux qui ont une expérience étendue en matière de lutte contre les parasites et les maladies, le Japon et les Etats-Unis.

a) Méthodes de remplacement existantes

6. Le Japon accepte les importations de fruits en provenance des pays suivants, à condition qu'elles aient fait l'objet des traitements indiqués: mangues importées de la province chinoise de Taïwan, des Philippines, de Thaïlande, d'Australie et de Fidji, traitées par la chaleur; caramboles de Floride, ayant fait l'objet d'un traitement par réfrigération de 15 jours pour l'élimination de la mouche des fruits des Caraïbes; papayes exportées d'Hawaï et des Philippines, ainsi que les mangues des îles du sud du Japon traitées à l'air chaud et humide (traitement à l'air chaud et à la vapeur) afin d'éliminer la mouche méditerranéenne, le puceron du melon et la mouche orientale des fruits. Les litchis importés de Chine font l'objet d'un traitement mixte à la vapeur et par réfrigération, pour éliminer la mouche orientale des fruits.

7. Les Etats-Unis acceptent les traitements par immersion dans l'eau chaude de mangues susceptibles d'être infestées par la mouche méditerranéenne des fruits, pour les importations du Mexique, des Caraïbes, ainsi que de l'Amérique centrale et de l'Amérique du Sud. Les caramboles exportées de Hawaï vers la partie continentale des Etats-Unis peuvent être traitées par réfrigération afin d'éliminer les mouches des fruits. Il est possible d'irradier les papayes, les caramboles et les litchis provenant de Hawaï en guise de traitement phytosanitaire pour les expéditions à destination de la partie continentale des Etats-Unis. Cette disposition est limitée à cette catégorie particulière d'expéditions en provenance de Hawaï. Actuellement, aucun autre pays n'a adopté l'irradiation en guise de traitement phytosanitaire. Le paraffinage des chérimoles pour l'élimination des parasites est accepté dans le cas des importations provenant du Chili.

b) Méthodes de remplacement potentielles

8. Le traitement par la chaleur (par exemple, par immersion dans l'eau) a été envisagé pour éliminer certaines espèces de mouches des fruits infestant les goyaves, les caramboles, les mangues et les papayes, en particulier la mouche de la papaye que l'on trouve du Mexique au Brésil. Des traitements par la chaleur sont en cours de mise au point à Hawaï pour les mangues et les litchis comme pour les ramboutans, avec utilisation conjointe du dioxyde de soufre préalablement au traitement par la chaleur, afin de conserver la coloration rouge. Pour les litchis, d'après les résultats d'un test ayant utilisé 100 000 larves de mouches méditerranéennes (l'espèce et la forme la plus résistante de mouche des fruits infestant les litchis d'Hawaï), la sécurité phytosanitaire exigeait un traitement d'au moins 16 jours au détriment néanmoins de la qualité des fruits. La pratique de l'emballage sous film pour lutter contre la mouche des fruits est possible dans le cas des exportations de papaye et de divers fruits tropicaux. Un traitement par emballage sous film des goyaves, des caramboles et des mangues, est actuellement à l'étude.

IV. CONCLUSIONS

9. Les règlements applicables aux traitements des fruits tropicaux sont généralement complexes et souvent difficiles à comprendre et à mettre en œvre, ce qui conduit parfois à s'interroger sur leur utilité véritable. Le manque de personnel qualifié et de ressources techniques est un handicap pour les pays exportateurs désireux de connaître les exigences du marché importateur et de s'y conformer.

10. Du point de vue des pays importateurs qui figurent également parmi les exportateurs, le coût de l'importation accidentelle d'un parasite peut se traduire par une perte notable de parts de marché lorsque le parasite s'établit et que les produits exportés par le pays en question sont censés provenir d'une zone de prévalence faible ou nulle du parasite. D'après les informations fournies par le Comité des technologies de remplacement du bromure de méthyle (MBTOC, Methyl Bromide Technical Options Committee), créé dans le cadre du Protocole de Montréal, le coût des mesures de lutte ou d'éradication mises en œvre pour faire face à un parasite importé peut aller de 5 millions à 100 millions de $ EU par an, plusieurs années durant. Pour ces raisons, un grand nombre de parasites retiennent toute l'attention des autorités phytosanitaires des pays importateurs, lesquelles exigent fréquemment un traitement de désinfestation obligatoire préalablement à toute exportation. Or, tout traitement de désinfestation doit recevoir l'autorisation officielle des organismes de réglementation de chaque pays, sur la base de données scientifiques, de façon à garantir une fiabilité adéquate de son niveau d'efficacité.

11. Dans la plupart des cas, les opérations de désinfestation dans le pays d'origine ou à l'arrivée ont utilisé le bromure de méthyle. Au cours des 40 dernières années et jusqu'au début des années 1990, les traitements de remplacement du bromure de méthyle n'ont guère été pris en considération. De nombreuses autres techniques de désinfestation ont été mises au point, mais aucune d'entre elles n'a été jugée adaptée au traitement à quai d'un vaste éventail de produits de base. Idéalement les traitements de remplacement du bromure de méthyle, appliqués "à l'entrée" d'un pays, doivent être de courte durée et pouvoir être mis en œvre sur place. Le traitement à l'entrée du pays reste l'un des principaux cas où le remplacement du bromure de méthyle sera difficile.

12. Certains pays en développement s'inquiètent d'une limitation éventuelle des importations de fruits tropicaux frais traités au bromure de méthyle par les pays qui procèdent à l'élimination progressive de ce fumigant. Cette situation rendrait sans effet la période de grâce de 10 ans (jusqu'en 2015).

13. La décision quant à l'acceptabilité d'un traitement de désinfestation repose avant tout sur des considérations économiques, logistiques et techniques. La mise au point de traitements de désinfestation efficaces qui n'affectent pas véritablement les possibilités de commercialisation du produit concerné est une priorité majeure. Aussi est-il judicieux de définir d'autres méthodes de traitement présentant un bon rapport coût-efficacité et de les tester préalablement à l'élimination du bromure de méthyle sur les principaux marchés. Le Sous-Groupe souhaitera peut-être promouvoir une analyse exhaustive des autres possibilités de traitement. Il convient à cet égard de déterminer les possibilités d'acceptation d'une autre méthode en comparant les coûts et les avantages du bromure de méthyle à ceux des autres options, y compris l'option "absence de traitement". Pour qu'une autre méthode soit adoptée, il faut impérativement qu'elle soit commode à appliquer, que son efficacité puisse être justifiée, qu'elle soit efficace en fonction de son coût (en fonction du coût du matériel et du coût d'utilisation) et qu'elle produise des niveaux de résidus acceptables.

14. Tel qu'indiqué dans l'introduction, si le Sous-Groupe décidait de mener une analyse approfondie, il conviendrait alors de conclure des arrangements appropriés, notamment d'organiser des consultations avec le Comité des technologies de remplacement du bromure de méthyle; des accords de coopération avec des institutions et des experts nationaux spécialistes des fruits tropicaux seraient nécessaires. Par conséquent, le Sous-Groupe souhaitera peut-être élaborer un questionnaire destiné à obtenir les informations de base concernant les installations habituelles, notamment en matière d'infrastructures et de coûts (coût d'investissement et coût d'utilisation) et conseiller à ses membres de communiquer au Secrétariat le nom des correspondants désignés dans leurs pays respectifs.