Mrigal est cultivé principalement comme une composante de systèmes de polyculture de carpes en étang, en Inde et Bangladesh, les principaux pays producteurs. En la République démocratique populaire lao, en Thaïlande, au Viet Nam, au Pakistan, au Myanmar et au Népal mrigal est aussi utilisé comme l’une des principales composantes en systèmes de polyculture de carpes. Mrigal est normalement cultivé avec les deux autres carpes indiennes - catla (
Catla catla) et rohu (
Labeo rohita). Il est aussi cultivé en systèmes de culture composés de carpes qui incluent les trois carpes indiennes ainsi que deux carpes chinoises - la carpe argentée (
Hypophthalmichthys molitrix) et la carpe herbivore (
Ctenopharyngodon idellus) - et la carpe commune (
Cyprinus carpio). Se nourrissant sur le fond, mrigal est généralement stocké au taux de 20-30 pour cent du total des espèces stockées dans le cas de la culture de trois espèces, tandis qu’en culture de six espèces mrigal ne constitue qu’environ 15-20 pour cent. En Inde, la carpe est cultivée dans environ 900 000-1 000 000 ha d’étangs et de bassins (plans d’eau qui sont généralement plus grands qu’un étang mais d’une superficie inférieure à 10 ha) de propriété privée ou communautaire. Au Bangladesh cependant, la carpiculture se pratique principalement en petits étangs traditionnels, dont seulement environ 16 pour cent sont exploités en système semi intensif.
Approvisionnement en juvéniles
Dans tous les pays producteurs, la production en masse d’alevins de mrigal en écloserie par reproduction induite répond à presque toute la demande en alevins, bien que la collecte en rivière se pratique encore dans certaines petites régions. Mrigal ne se reproduisant pas en eaux confinées, des injections d’extrait pituitaire et d’autres formules commerciales sont nécessaires. Ces dernières années, l’on a utilisé avec succès de la gonadotropine purifiée de saumon et des antagonistes de la dopamine tels que Ovaprim, Ovatide et Wova-FH. Lorsque de l’extrait pituitaire est utilisé, les femelles sont injectées avec une dose stimulante de 2-3 mg/kg suivie d’une seconde dose de 5 à 8 mg/kg six heures plus tard; les males reçoivent une seule dose de 2-3 mg/kg au moment de la seconde injection de la femelle. Lorsque des formules synthétiques sont utilisées, une simple dose de 0,4-0,5 ml/kg (femelles) ou de 0,2-0,3 ml/kg (males) est administrée. Mrigal produit généralement de 100 000 à 150 000 petits alevins/kg. L’écloserie circulaire chinoise est le système le plus utilisé. Dans ce système, les géniteurs sont stockés à la densité de 3-5 kg /m
3, avec un rapport femelle:male de 1:1 en poids (1:2 en nombre). Les œufs fertilisés sont obtenus après 6-8 heures et sont transférés vers le bassin d’éclosion à la densité optimale de 700 000-800 000/m
3. La circulation de l’eau est continue et les œufs y sont maintenus pendant 72 heures au cours desquelles les embryons se développent en petits alevins d’environ 6 mm.
Elevage de fingerlings
Nurserie
Les alevins de trois jours sont élevés en nurserie pour une période de 15-20 jours jusqu’à ce qu’ils atteignent la taille de 20-25 mm. Cela se fait normalement en petits étangs de terre de 0,02-0,1 ha, bien que des bassins en briques ou en béton soient aussi utilisés dans certaines régions. La densité de stockage varie généralement de 3-10 millions/ha en étangs de terre et 10-20 millions/ha en bassin. Bien que la monoculture soit recommandée en nurserie, les fermiers élèvent souvent mrigal avec les deux autres carpes indiennes. Dans ce cas la croissance et la survie de mrigal sont meilleures que pour les deux autres espèces. Les autres mesures de gestion incluent la fertilisation organique et l’apport d’un mélange de son de riz et de tourteau (1:1 en poids) comme aliment supplémentaire. Le taux de survie est normalement de 30-50 pour cent. Une bonne préparation d’un étang de nurserie comprend le contrôle des poissons prédateurs et des insectes Les fermiers négligent souvent ces contrôles ce qui résulte en une faible production d’alevins. Un autre facteur limitant est l’absence d’un aliment commercial ce qui force les fermiers à utiliser le mélange conventionnel son-tourteau.
Production d’alevins
Les alevins du système de nurserie sont ensuite élevés jusqu’à la taille de grand alevins (80-100 mm; 5-10 g). L’on utilise généralement des étangs de terre de 0,05 à 0,2 ha de superficie. Mrigal est stocké dans la proportion d’environ 30 pour cent avec d’autres espèces de carpe pour une densité totale de 200 000-300 000/ha. Alimentation et fertilisation sont similaires à celles de la phase de nurserie mais varient en fonction de l’intensité de l’élevage et de la productivité naturelle. La survie au cours de ce stade varie généralement de 60 à 70 pour cent, celle de mrigal étant supérieure à celle de catla et de rohu. L’élevage dure 2-3 mois, après lesquels les grands alevins sont transférés vers les systèmes de production de grossissement.
Techniques de grossissement
Le grossissement de mrigal en systèmes de polyculture se fait en étangs de terre. Les pratiques de gestion incluent normalement le contrôle des poissons sauvages et des prédateurs avec des produits chimiques ou des extraits de plantes; l’empoissonnement de grands alevins à la densité totale de 4 000-10 000 alevins/ha; la fertilisation avec des déchets organiques tels que fumier de bétail ou fientes de volaille et des engrais inorganiques; l’alimentation supplémentaire avec un mélange de son de riz/blé et tourteau; suivi de l’état de santé du stock et gestion de l’environnement. La période de croissance dure généralement un an au cours duquel mrigal atteint le poids d’environ 600-700 g. La production est normalement de 3-5 tonnes/ha/an et mrigal y contribue pour environ 20-25 pour cent.
Le manque de grands alevins d’une taille adéquate en quantité suffisante est le facteur le plus limitant, forçant les fermiers à stocker leurs étangs avec des alevins trop petits. Le prix élevé des aliments commerciaux et des ingrédients alimentaires contraint souvent les fermiers à ne pas nourrir les poissons suffisamment, limitant ainsi la production.
Mrigal est aussi l’une des importantes composantes du système de carpiculture en eauxusées pratiqué sur plus de 4 000 ha en West Bengal, Inde. Dans cette forme de culture, caractérisée par de multiples empoissonnements et de multiples récoltes de poissons de plus de 300 g, de l’eau usée de premier traitement est déversé dans les étangs comme apport principal. Même sans alimentation supplémentaire, ce système produit 2-3 tonnes/ha/an. En présence d’une alimentation supplémentaire, la production peut atteindre 4-5 tonnes/ha/an.
Techniques de récolte
L’habitude de mrigal de se déplacer sur le fond empêche sa récolte efficiente par filet traînant, l’engin de pêche le plus utilisé en carpiculture. Une récolte complète n’est possible que par drainage. Ces difficultés de récolte font que mrigal est l’espèce la moins aimée des fermiers parmi les trois espèces de carpe indienne. Des éperviers sont souvent utilisés pour des récoltes partielles en petits étangs.
Manipulation et traitement
Mrigal est commercialisé surtout à l’état frais dans les marchés locaux. Cependant, en Inde, l’on transporte souvent sur de longues distances en camionnettes calorifugées des carpes mrigal mélangées à d’autres carpes dans de la glace pilée (rapport 1:1) dans des caisses rectangulaires (60 cm x 40 cm x 23 cm) en plastique. A présent, il n’y a pratiquement pas de transformation, ni d’ajout de valeur après récolte dans les pays producteurs. Au cours de ces récentes années, une petite quantité de carpes indiennes est exportée vers le Moyen Orient, étripées et congelées.
Coûts de production
En général, les carpes sont des espèces de faible valeur dont le prix de vente chez le producteur est moins de 1 USD/kg; l’utilisation d’intrants importants comme alevins, engrais et aliment supplémentaire, en plus des coûts de main d’œuvre, est maintenue au minimum. En polyculture de carpes, l’alimentation supplémentaire représente plus de 50 pour cent du coût total de production; pour augmenter les profits, il est donc très important de gérer judicieusement cette alimentation. En systèmes extensifs, pour un niveau de production de 2-3 tonnes/ha, le coût de production est d’environ 0,30 USD/kg, alors que ce coût augmente jusqu’à 0,5-0,6 USD/kg en système semi intensif, où le niveau de production espéré est de 4-8 tonnes/ha.