EAF-Nansen Programme

Les dernières campagnes de recherche de 2022 font la lumière sur l'état des stocks de petits pélagiques transfrontaliers en Afrique

22/12/2022

Le renforcement des capacités est une partie importante des campagnes de recherche sur le Dr Fridtjof Nansen. Ici, les scientifiques discutent des procédures d'échantillonnage dans le laboratoire de poissons. © IMR

Las Palmas, Tenerife, 16 décembre 2022 - Le Programme EAF-Nansen a terminé avec succès deux campagnes de recherche visant à étudier les stocks transfrontaliers de petits poissons pélagiques au large de la côte ouest de l'Afrique. Les petits poissons pélagiques sont l'une des ressources les plus importantes de la région, fournissant nourriture et sécurité de l'emploi à des milliers de personnes.

De juillet à décembre, le navire de recherche (N/R) Dr Fridtjof Nansen a passé 118 jours en mer, rassemblant au total 80 scientifiques et techniciens de 16 pays, dont des scientifiques locaux de Namibie, d'Angola, du Sénégal, de Gambie, de Mauritanie, du Maroc, du Libéria et de Côte d'Ivoire, afin de recueillir des données et des informations qui serviront à évaluer ces stocks et à fournir des conseils scientifiques sur la manière de les gérer durablement.

«Comprendre ces espèces transfrontalières qui se déplacent au-delà des frontières nationales est une tâche difficile», a déclaré Merete Tandstad, coordinatrice du Programme EAF-Nansen, qui a expliqué que les données des campagnes de recherche du Programme constituent depuis des années l'épine dorsale des évaluations régionales des pêches.

Deux expéditions, un objectif

Dans le but d'augmenter l’étude régionale des ressources pélagiques, le N/R Dr Fridtjof Nansen s'est d'abord rendu dans les eaux au large de la Namibie et de l'Angola, couvrant une partie importante du grand écosystème marin du courant de Benguela (BCLME) qui est une zone d’upwelling riche en ressources.

«L'écosystème du courant de Benguela est l'une des zones océaniques les plus productives au monde en raison de ses caractéristiques spécifiques caractérisées par la remontée d'eaux froides et riches en nutriments», a déclaré Maik Tiedemann, chercheur à l'Institut norvégien de recherche marine (IMR), et l'un des responsables de la campagne. «L’eau qui remonte des profondeurs contient de grandes quantités de nutriments qui stimulent la croissance du phytoplancton à la surface, lequel soutient la chaîne alimentaire de l'écosystème de Benguela», a-t-il expliqué.

Ensuite, le navire a étudié les ressources de petits pélagiques au large des côtes de la Gambie et du Sénégal, de la Mauritanie et du Maroc. Cette campagne s'inscrit dans la continuité d'une série de campagnes menées dans cette région depuis 1996, fournissant aux autorités locales des informations essentielles sur les ressources en poissons pélagiques. Dans cette région, le grand écosystème marin du courant des Canaries (CCLME), qui s'étend de la côte atlantique du Maroc vers le sud jusqu'à l'archipel des Bijagos en Guinée-Bissau et vers l'ouest jusqu'aux îles Canaries (Espagne), est un écosystème extrêmement important en termes de productivité et possède la plus grande production halieutique de tous les grands écosystèmes marins (GEM) africains, avec des captures annuelles variant entre 2 et 3 millions de tonnes.

Au cours de ces campagnes qui visent à évaluer l'état des stocks de petits poissons pélagiques commercialement importants dans les deux GEM, des espèces spécifiques sont ciblées. Cependant, dans les deux zones, différentes espèces de chinchards, de sardines et de sardinelles, ainsi que l'anchois européen, sont toutes importantes pour les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire des populations, les économies et la vie marine. Pour cette raison, les scientifiques participants à l’étude ont travaillé dur pour collecter des données de haute qualité nécessaires aux indices d'estimation de la biomasse de ces espèces.   

«Nous évaluons les espèces cibles par le biais d'un échantillonnage acoustique, afin d'obtenir des informations sur la distribution et la taille des stocks», a déclaré Kathrine Michalsen, chercheuse principale de l'IMR et responsable de la campagne dans les eaux angolaises. «Les chaluts sont utilisés pour collecter des échantillons à partir desquels nous recueillons des données biologiques telles que la longueur, le poids, le sexe et la maturité», a-t-elle ajouté.

Avoir une meilleure connaissance des ressources halieutiques et de l'environnement

La pollution plastique est un défi pour la durabilité des ressources marines, et les microplastiques sont largement répandus dans le monde. Ici, des scientifiques du Sénégal et de la Gambie prélèvent des échantillons d'un chalut Manta pour étudier la présence de microplastiques. © IMR

Si les ressources halieutiques constituaient une priorité essentielle, d'autres aspects ont également été abordés afin d'améliorer les connaissances sur la composition et la diversité des stocks et des habitats pélagiques, et de mieux connaître l'environnement dans lequel ils se trouvent, notamment la présence de débris marins.

Un vaste échantillonnage a été réalisé le long de la côte sud de l'Angola à l'aide de divers filets à plancton. La campagne ayant eu lieu au milieu de la période d'upwelling, les filets ont capturé beaucoup de plancton, de larves et d'œufs de poissons.

«Au total, environ 13 000 larves de poissons ont été triées et identifiées au niveau taxonomique le plus bas possible, et nous sommes fiers d'avoir pu fournir les premières données sur l'ichtyoplancton en Angola», a déclaré Stamatina Isari, scientifique grecque de l'IMR spécialisée dans la taxonomie du zooplancton et de l'ichtyoplancton, qui a dirigé l'équipe chargée du plancton durant l’étude.

Un autre aspect important des campagnes de recherche est la formation et l'acquisition d'expérience dans les techniques de recherche marine pour les scientifiques locaux. Au cours de l'une des étapes de la campagne, six doctorants du Maroc et du Sénégal ont présenté leurs études sur des sujets allant du phytoplancton et du zooplancton aux crabes envahissants, en passant par la surveillance de la pollution et la prévision des glissements de terrain, ou encore l'étude du changement climatique au cours des derniers siècles et décennies.

«Les présentations ont été une excellente occasion de recevoir des commentaires précieux sur nos projets et de mettre en pratique nos compétences en matière de présentation, ce qui est un élément important pour réussir en tant que scientifique», a déclaré Fatou Tabane du Centre de recherche en écotoxicologie et sécurité environnementale de Dakar, au Sénégal. Le responsable de la campagne, Dave Boyer, a ajouté: «Et les scientifiques à bord du navire ont pu découvrir de nouveaux sujets, même ceux qui participent à la recherche internationale depuis des décennies ont été initiés aux problèmes concrets que ces jeunes Africains sont déterminés à résoudre.».

Les données collectées seront présentées dans un rapport de campagne et utilisées pour des rapports et des articles scientifiques, dans le cadre du Plan scientifiquedu Programme EAF-Nansen. Les résultats contribueront également à la Convention sur le courant de Benguela (BCC), une initiative par laquelle l'Angola, la Namibie et l'Afrique du Sud cherchent à relever les défis du BCLME et renforcent la gestion des pêches, ainsi qu'à la FAO et au Comité des pêches pour l'Atlantique Centre-Est (COPACE), qui fournit des avis scientifiques sur la gestion des stocks de petits pélagiques.

En savoir plus sur les trois autres campagnes qui ont eu lieu en 2022: