Dialogue méditerranéen sur la crise alimentaire: le conflit renforce l’argumentation en faveur d’une transformation des systèmes agroalimentaires

Le Directeur général de la FAO participe aux côtés de plusieurs dizaines de ministres à un sommet consacré à la hausse des prix des produits alimentaires, des engrais et des carburants

©FAO/Alessandra Benedetti

Le Directeur général de la FAO, M. Qu Dongyu, avec le Ministre italien des affaires étrangères Luigi Di Maio

©FAO/Alessandra Benedetti

08/06/2022

Rome – Considérant la situation mondiale «très compliquée», le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), M. Qu Dongyu, a exhorté les pays méditerranéens à œuvrer de concert pour atténuer les risques qui pèsent sur la sécurité alimentaire, lesquels ont été encore aggravés par la guerre en Ukraine.

«Nous devons faire en sorte que notre système mondial d’échanges commerciaux de produits alimentaires reste ouvert, et veiller à ce que les exportations agroalimentaires ne soient ni restreintes, ni taxées», a-t-il déclaré aujourd’hui lors du Dialogue ministériel méditerranéen sur la crise alimentaire. Ce sommet organisé par le Ministre italien des affaires étrangères Luigi Di Maio a réuni des ministres et des représentants des gouvernements de plus de 24 pays.

M. Qu a défini quatre grands axes autour desquels il conviendrait d’articuler la coopération: i) un investissement plus important dans les pays qui sont gravement touchés par la hausse actuelle des prix des produits alimentaires; ii) une réduction des pertes et du gaspillage alimentaires; iii) une meilleure utilisation, plus efficiente, des ressources naturelles, notamment de l’eau et des engrais; et iv) une attention portée aux innovations technologiques et sociales susceptibles de réduire de manière significative les dysfonctionnements des marchés agricoles.

«L’insécurité alimentaire et les prix élevés pourraient devenir un facteur d’instabilité», a averti le Directeur général. «Il est grand temps de transformer les systèmes agroalimentaires afin de les mettre au service des populations, de la paix et de la prospérité, en collaborant dans le cadre de partenariats».

«Tous les agriculteurs, quelle que soit leur taille, doivent pouvoir recourir à des outils de gestion des risques afin de préserver leur production et leur chaîne d’approvisionnement, et il faut en parallèle une protection sociale plus solide et une assistance ciblée sur les personnes les plus touchées par la crise», a-t-il ajouté.

M. Luigi di Maio a ouvert le Dialogue en déclarant que la faim avait rarement figuré si haut dans les priorités des pouvoirs publics et en mettant en avant l’importance des systèmes agroalimentaires durables.

«Nous connaissons la pire crise alimentaire de ces dernières décennies», a déclaré Svenja Schulze, la Ministre allemande de la coopération économique et du développement et coprésidente du sommet.

Les récoltes de demain

Les participants sont convenus que les prix élevés des engrais et des carburants – deux intrants agricoles essentiels – étaient des questions qu’il fallait traiter d’urgence eu égard à la sécurité alimentaire mondiale.

«L’augmentation du prix de l’énergie et des engrais met en péril la prochaine récolte mondiale», a indiqué M. Qu. «Le fait de ne pas pouvoir accéder aux intrants agricoles essentiels engendre des risques particuliers pour les pays où la faible fertilité naturelle des sols impose souvent de recourir à des engrais chimiques pour produire des denrées alimentaires».

La région méditerranéenne englobe 22 pays qui se répartissent sur trois continents et qui présentent une diversité de ressources naturelles, de traditions agricoles et de potentiels de production. «Les activités agricoles procurent de nombreux moyens d’existence, et certains pays ont un secteur agricole vigoureux, mais de nombreux autres doivent importer des céréales pour nourrir leur population; on a constaté dans la plupart des pays de la région une tendance à la hausse des importations alimentaires pour satisfaire la consommation intérieure, et ce, avant même la guerre en Ukraine», a expliqué le Directeur général.

Une grande partie de ces importations venait d’Ukraine, mais, compte tenu des contraintes logistiques actuelles, il est difficile d’acheminer la production des agriculteurs ukrainiens jusqu’aux marchés internationaux. Il faut du temps pour trouver d’autres sources d’approvisionnement, et cette solution implique des coûts de transport plus importants – une charge supplémentaire alors que l’indice FAO des prix des produits alimentaires a atteint un record absolu en mars de cette année, et s’est maintenu depuis à des niveaux très élevés.

M. Qu a indiqué que la FAO a proposé la Facilité de financement des importations alimentaires pour soutenir la balance des paiements des pays à faible revenu les plus dépendants de ces importations. Il a encouragé les Membres de la FAO à appuyer ce plan et a invité les institutions financières internationales à le prendre en main.

Par ailleurs, les solutions durables nécessitent des efforts concertés à l’appui de la transformation des systèmes agroalimentaires. Le Directeur général a indiqué que les responsables de l’élaboration des politiques disposent aujourd’hui d’éléments de langage communs pour formuler les prochaines feuilles de route. «Nous devons travailler ensemble pour améliorer la production, la nutrition, l’environnement et les conditions de vie, en ne laissant personne de côté... Faisons de notre mieux.»

«Il est primordial d’accroître durablement la productivité et la production agricoles», a-t-il précisé. «La réduction des pertes et du gaspillage alimentaires recèle un grand potentiel et fait l’objet d’un large consensus. Il est également essentiel d’utiliser l’eau et les engrais de manière plus efficiente et efficace, notamment dans la région méditerranéenne, qui offre des possibilités non négligeables de développer des intrants de substitution comme l’ammoniac vert», a-t-il ajouté.

M. Qu a félicité le Gouvernement italien pour sa conduite avisée en ces temps difficiles. Il a participé à un bref point de presse aux côtés de M. Di Maio, qui a insisté sur le fait que la sécurité alimentaire restait l’une des priorités politiques fondamentales de son pays. Ils ont tous deux mis en avant l’appui mondial apporté à cette question, comme en témoigne la signature l’année dernière, avant que la guerre éclate en Ukraine, de la Déclaration de Matera, dans laquelle les membres du G20 se sont engagés à agir pour éliminer la faim.

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