Tigré: il reste très peu de temps pour empêcher l’insécurité alimentaire d’atteindre des niveaux inquiétants

Il faut d’urgence aider les agriculteurs à ensemencer leurs champs dans les semaines à venir

©FAO/Michael Tewelde

Agriculteurs équipés de masques de protection et portant des sacs de semences reçus de la FAO dans un centre de distribution, dans le village de Mai-Mekden (région du Tigré, en Éthiopie), en mai 2021.

©FAO/Michael Tewelde

22/06/2022

Rome – S’ils ne reçoivent pas de toute urgence une aide de la part de la communauté internationale pour ensemencer leurs champs, les agriculteurs de certaines régions du nord de l’Éthiopie risquent fortement de manquer la principale période des semis (de juin à août), ce qui aurait pour effet de détériorer la sécurité alimentaire déjà précaire de la région.

Au vu des prévisions pluviométriques favorables, cette saison représente une occasion cruciale et offrant un bon rapport coût-efficacité d’améliorer les disponibilités alimentaires dans la région. La plupart des agriculteurs du Tigré ont fini de préparer leurs terrains et attendent le début des pluies. Toutefois, l’accès limité aux intrants agricoles, en particulier aux engrais et aux semences, fait peser une lourde menace sur la saison.

La FAO et les partenaires du Groupe de l’agriculture cherchent à mobiliser dans l’immédiat 96 millions d’USD, afin de tirer parti de l’offre limitée dans le temps du Gouvernement éthiopien, qui leur propose d’acheter des engrais à prix coûtant.

Ces derniers mois, la FAO et ses partenaires ont mobilisé 11 millions d’USD, ce qui leur a permis de satisfaire seulement 10 pour cent des besoins en engrais. Il leur manque donc encore 85 millions d’USD.

La FAO et ses partenaires cherchent également des solutions pour rendre accessibles aux agriculteurs 60 000 tonnes d’engrais et de semences produites au niveau local (soit 4 000 tonnes de semences, ou 8 pour cent des besoins totaux). Compte tenu du laps de temps très court qu’ont les exploitants pour semer (de fin juin à août), la priorité absolue devrait être accordée aux engrais, qui doivent être appliqués trois à quatre semaines après l’ensemencement.

«On ne saurait assez souligner l’importance d’appuyer la production alimentaire au Tigré. Il est très peu probable que la région puisse produire suffisamment de nourriture pour sa population si elle n’a pas les semences et les engrais dont elle a besoin. Chaque dollar investi aujourd’hui dans la production alimentaire aura un effet multiplicateur et permettra de produire 4 à 7 dollars de nourriture. En revanche, il sera bien plus onéreux d’apporter une aide alimentaire à un stade ultérieur», a expliqué M. David Phiri, Représentant par intérim de la FAO pour l’Éthiopie. «En parallèle, la FAO s’efforce d’accroître le soutien financier, matériel et technique apporté dans d’autres zones touchées par le conflit, comme Amhara et Afar. Il est certes bien plus aisé d’accéder à ces zones, mais l’appui matériel n’est pas suffisant», a-t-il ajouté.

Si un appui est prêté à temps pour la période des semis de la campagne Meher, les familles pourront récolter et consommer des aliments de base d’ici octobre 2022. Ces récoltes permettraient aux familles d’avoir assez de nourriture pour au moins six mois et, dans le meilleur des cas, permettraient à un grand nombre de ménages d’avoir assez jusqu’à la prochaine récolte et d’avoir un excédent à vendre. Les légumes produits hors saison renforceraient la sécurité alimentaire des familles.

Sans les intrants nécessaires, les prochaines récoltes ne seront pas disponibles avant octobre 2023, ce qui prolongera d’une année la période de soudure et fera croître les besoins humanitaires sur le plan alimentaire.

«Nous entrons dans une période des semis cruciale. Nous avons très peu de temps pour empêcher la faim d’atteindre un niveau critique en appuyant la production locale et en évitant une éventuelle augmentation des besoins humanitaires sur le plan alimentaire au cours de l’année à venir», a dit M. Rein Paulsen, Directeur du Bureau des urgences et de la résilience de la FAO. «Une bonne période des semis facilitera également les efforts de relèvement et le retour durable des familles déplacées et permettra d’approvisionner les zones urbaines.»

En 2021, les agriculteurs du Tigré ont produit 900 000 tonnes d’aliments de base, ce qui représente 40 pour cent de la production habituelle et équivaut à sept ou huit mois des besoins annuels en céréales de la région. Face au manque d’assistance humanitaire et d’approvisionnement commercial, les cultures pluviales et les cultures irriguées de légumes sont essentielles à la survie des familles rurales du Tigré, notamment de quelque 1,8 million de personnes déplacées à l’intérieur du pays, dont environ 60 pour cent vivent dans des communautés d’accueil.

En 2021, les agriculteurs ont pu produire ces volumes car ils avaient accès à des semences améliorées et à des engrais fournis par le Gouvernement et les partenaires du Groupe de l’agriculture.

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