Séismes en Türkiye: plus de 20 pour cent de la production alimentaire perdue selon les premières évaluations

Rome – L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) renforce ses opérations en vue d’aider les populations rurales frappées par les tremblements de terre en Türkiye et en République arabe syrienne à maintenir et à rétablir la production alimentaire de base, tout en s’employant à évaluer les dommages agricoles et à surveiller les incidences indirectes et à long terme.  

Les séismes dévastateurs ont secoué le sud de la Türkiye et le nord de la République arabe syrienne le 6 février dernier. Les premières évaluations de leur impact en Türkiye montrent que le secteur agricole a été gravement endommagé, notamment la production végétale et animale, la pêche et l’aquaculture, de même que les infrastructures rurales dans les zones touchées.  

Plus de 20 pour cent de la production agricole turque a été endommagée 

En Türkiye, les séismes ont durement frappé 11 provinces agricoles d’importance, touchant 15,73 millions de personnes et plus de 20 pour cent de la production alimentaire du pays. La région ravagée par les tremblements de terre, connue comme le «croissant fertile» de la Türkiye, représente près de 15 pour cent du produit intérieur brut agricole et contribue pour presque 20 pour cent aux exportations agroalimentaires du pays. 

Plus du tiers de la population dans les provinces les plus touchées habite dans des zones rurales et vit de l’agriculture. La perturbation des chaînes d’approvisionnement et les difficultés financières compliquent la situation des familles rurales qui peinent à s’approvisionner en intrants productifs en raison d’un accès et de moyens financiers insuffisants, ce qui les empêche de satisfaire leurs besoins fondamentaux. 

Il ressort des premières évaluations que le secteur agricole a subi des dégâts considérables, les dommages étant chiffrés à 1,3 milliard de dollars et les pertes à 5,1 milliards de dollars selon les estimations préliminaires. Les dommages correspondent au coût de remplacement ou de réparation des biens matériels et des stocks totalement ou partiellement détruits, tels que les infrastructures agricoles, le bétail et les récoltes. Les pertes, quant à elles, correspondent aux incidences des dommages sur les plans économique et productif, comme la réduction des disponibilités alimentaires et l’augmentation des prix des denrées alimentaires du fait de la perte des récoltes stockées. 

Outre les bâtiments effondrés, les structures du secteur alimentaire rendues inutilisables ou encore les cultures et les installations de stockage endommagées, les tremblements de terre ont frappé de grandes régions d’élevage, détruisant les étables et causant des pertes et des blessures chez les animaux. Le manque d’abris, la pénurie d’aliments pour animaux et l’interruption de la production de vaccins ont accru les risques de fièvre aphteuse et suscité des inquiétudes quant à la détérioration des conditions d’élevage. La production de poisson a également été compromise puisque la catastrophe a endommagé 34 exploitations aquacoles et trois ports de pêche et entraîné la disparition de plusieurs espèces de poissons essentielles. Les petits pêcheurs et aquaculteurs subiront par ailleurs d’importantes pertes de revenus, eux qui sont dans l’impossibilité de reprendre leurs activités.  

La FAO intensifie ses interventions et réitère son appel 

L’accès aux intrants agricoles s’est détérioré dans la région, et de nombreuses activités dans les secteurs de l’agriculture et de l’élevage ont été interrompues en raison des pertes de main-d’œuvre et des pénuries. Cette situation précaire soulève d’autres inquiétudes à l’approche de la saison des récoltes estivales. 

«Planter avant que les pluies cessent est notre seule chance d’obtenir une récolte abondante pour l’année à venir, compte tenu des dégâts subis par nos canaux d’irrigation et nos infrastructures agricoles. Nous avons besoin d’engrais maintenant, avant qu’il ne soit trop tard», a affirmé Mesut Ozer, un exploitant de la ville de Nurdağı, dans la province de Gaziantep. 

La FAO a besoin d’urgence de 112 millions de dollars pour fournir un soutien immédiat et à long terme aux familles et aux communautés tout entières touchées par les séismes en Türkiye. Cette somme comprend 25 millions de dollars au titre de l’appel éclair des Nations Unies pour la Türkiye lancé en février afin de fournir rapidement une assistance en espèces et une aide à l’élevage et à l’agriculture à 900 000 personnes vivant en milieu rural.  

À ce jour, la FAO n’a réuni que 1,5 million de dollars par l’intermédiaire de son Fonds spécial pour les activités d’urgence et de relèvement et de ses ressources internes. Grâce à ce financement, l’Organisation a mis en place des interventions immédiates pour sauvegarder les moyens de subsistance, lesquelles consistent notamment à fournir une aide pécuniaire, à remettre en état les infrastructures endommagées au niveau des ménages, à distribuer des produits alimentaires pour le bétail et à procurer des intrants de qualité.  

«Il reste peu de temps pour effectuer les semis. Nous devons soutenir d’urgence nos agriculteurs en leur fournissant des engrais et des semences», a déclaré Viorel Gutu, Coordonnateur sous-régional de la FAO pour l’Asie centrale et Représentant de la FAO en Türkiye. «C’est la seule chance que nous ayons de maintenir les niveaux de production agricole cette année. Nous devons également fournir de la nourriture aux animaux pour faire en sorte qu’ils restent en bonne santé et qu’ils demeurent productifs.» 

L’évaluation des dommages et des pertes en République arabe syrienne est en cours et sera rendue publique prochainement, de même que le plan et la stratégie d’intervention de la FAO.