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Les technologies de pointe aident les pays à remporter la bataille contre le criquet pèlerin.


La FAO et ses partenaires créent des technologies de pointe afin de détruire les organismes nuisibles.

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Face aux invasions massives de criquets qui frappent l’Afrique de l’Est, le Yémen et l’Asie du Sud-Ouest, la FAO, en collaboration avec ses partenaires et ses donateurs, a élaboré un ensemble de technologies de pointe afin de révolutionner la détection, la surveillance et la lutte. ©FAO/Luis Tato

06/05/2021

Pour les agriculteurs peu méfiants, les criquets pèlerins sont un ennemi redoutable. Ces organismes nuisibles dévastateurs ont un appétit vorace, se multiplient rapidement, parcourent jusqu’à 150 kilomètres par jour et sont capables de détruire de vastes superficies de cultures et de pâturages sur leur passage. 

Au cours de l’année écoulée, ces insectes insidieux se sont abattus par vagues sur l’Afrique de l’Est, le Yémen et l’Asie du Sud-Ouest dans des essaims comptant jusqu’à 80 millions d’individus par kilomètre carré.

La menace qui pèse sur l’agriculture et la sécurité alimentaire est immense et il faut endiguer ce fléau de toute urgence.

Pour résoudre ce problème, la FAO, en collaboration avec ses partenaires et ses donateurs, a élaboré un ensemble de technologies de pointe qui ont révolutionné la détection, la surveillance et la lutte, afin d’aider les pays concernés à maîtriser les invasions acridiennes. 

En utilisant les données climatiques et les prévisions météorologiques, la FAO joue un rôle de premier plan dans la lutte contre les criquets depuis des dizaines d’années. Sa tablette eLocust3, que les équipes de terrain du monde entier utilisent pour recueillir des données essentielles qu’elles communiquent au Service d’information sur le criquet pèlerin, est une innovation sans précédent qui permet à la FAO ainsi qu’aux autorités nationales de suivre les déplacements des criquets et d’avoir un temps d’avance sur eux. 

«Cette tablette est vraiment la Rolls-Royce de nos outils de collecte de données», a déclaré Keith Cressman, fonctionnaire principal de la FAO chargé des prévisions relatives au criquet pèlerin.

Cependant, bien que cette tablette soit déjà utilisée dans 20 pays, la demande a explosé après la dernière invasion et il n’y avait pas suffisamment de temps pour former les agriculteurs et les éleveurs pastoraux. La FAO se battait sur plusieurs fronts et devait déployer des moyens drastiques pour lutter contre ce fléau. 

«Nous sommes constamment à la recherche de technologies à exploiter et à adapter pour en faire des outils innovants qui nous permettraient d’améliorer nos prévisions et l’alerte rapide», indique M. Cressman.

La modification novatrice des technologies existantes afin de trouver les essaims de criquets pèlerins et de lutter contre ceux-ci a été un facteur clé de la réussite. À gauche/en haut: ©FAO/Luis Tato À droite/en bas: ©Joost Bastmeijer

Outils de communication à distance

En janvier 2020, des essaims de criquets pèlerins de la taille de Paris ou de New York envahissaient la Corne de l’Afrique, région déjà touchée par la pauvreté et l’insécurité alimentaire. Ces ravageurs pouvant se multiplier 20 fois par génération, chaque jour qui passait rendait la lutte plus difficile.

Pressé par le temps, M. Cressman s’est tourné vers des chercheurs du programme PlantVillage de l’Université d’État de Pennsylvanie, qui fournit des solutions technologiques aux agriculteurs et avait créé une application permettant à la FAO de suivre un autre ravageur agricole dangereux, la chenille légionnaire d’automne.

«Plutôt que de réinventer la roue, autant utiliser leurs compétences avec les technologies existantes et adapter cette application pour l’utiliser contre les criquets», a fait observer M. Cressman.

En moins d’un mois, les développeurs et lui-même ont créé une application pour smartphone facile d’utilisation afin de permettre à tout le monde, même aux personnes peu formées, de recueillir des données concernant les criquets pèlerins sur le terrain. Cependant, tous les agriculteurs n’ont pas de téléphone et de nombreuses régions de l’Afrique de l’Est sont totalement isolées de tout réseau. La FAO s’est donc associée également à Garmin, fournisseur mondial de GPS, pour modifier un transmetteur de données par satellite qui permettrait de résoudre les problèmes de connectivité dans les régions sans réseau.

Bien que la FAO reçoive actuellement jusqu’à 2 500 enregistrements de données par jour, près de 25 pour cent de ces données sont inutilisables ou incorrectes. C’est pourquoi elle s’est encore une fois tournée vers PlantVillage pour utiliser l’intelligence artificielle afin de repérer et de supprimer rapidement les données non désirées. L’équipe de la FAO chargée de l’action contre le criquet pèlerin transmet ensuite ces données aux équipes responsables de la lutte au sol et dans les airs pour que celles-ci puissent connaître rapidement l’emplacement des essaims avant de les cibler et de les tuer.

Détection aérienne 

Un appel téléphonique en provenance de l’une des aires de conservation de la faune et de la flore sauvages du Kenya a également permis une autre avancée technologique. Sur proposition d’un garde forestier, la FAO a adapté au suivi des criquets pèlerins un système numérique, appelé EarthRanger, permettant de suivre les déplacements des animaux.

M. Cressman a travaillé avec l’entité qui a développé EarthRanger, la fondation philanthropique Vulcan, pour l’adapter spécifiquement à la surveillance aérienne et à la lutte antiacridienne. 

Au plus fort de l’intervention, la FAO s’est associée à 51 Degrees, qui a eu recours à cet outil pour coordonner 28 avions dans la Corne de l’Afrique aux fins des opérations de surveillance et de lutte, de sorte que les pilotes disposent des informations précises dont ils avaient besoin pour cibler les criquets en mouvement. Cette technologie s’est révélée si efficace dans les opérations de lutte antiacridienne au Kenya que la FAO a vite étendu son utilisation à l’Éthiopie et à la Somalie.

«Auparavant, nous travaillions à tâtons. Grâce à EarthRanger, nous pouvons suivre l’itinéraire exact de l’avion et voir où il a pulvérisé les pesticides. Cela nous a permis d’utiliser plus efficacement les avions et de mener des opérations de lutte antiacridienne plus performantes. Je suis sûr que c’est un facteur majeur qui a contribué à freiner la recrudescence des ravageurs.»

La FAO collabore également avec des chercheurs de l’Administration nationale des océans et de l’atmosphère des États-Unis, du Bureau météorologique du Royaume-Uni et de l’Université de Cambridge afin de trouver de nouvelles manières d’améliorer les stratégies de surveillance, de prévision et de lutte antiacridienne.

La FAO s’est associée à 51 Degrees pour adapter spécifiquement un outil aux opérations de surveillance aérienne et de lutte antiacridienne, de sorte que les pilotes disposent des informations précises dont ils avaient besoin pour cibler les criquets en mouvement. ©FAO/Sven Torfinn

Amélioration de la surveillance à l’ère spatiale

Les satellites sont peut-être l’outil le plus susceptible de changer la donne dans la lutte contre le criquet pèlerin. La pluie étant un élément essentiel de la reproduction acridienne, la FAO utilise deux satellites pour repérer les précipitations et la végétation qui pourraient être favorables à la reproduction des criquets.

«On dirait de la science-fiction, n’est-ce pas?», s’enthousiasme M. Cressman.

Un troisième satellite, qu’il surnomme le «Graal en matière de suivi des criquets pèlerins», peut même détecter l’humidité du sol sous la surface de la Terre, qui permet à la femelle de pondre des œufs.

«Il ne s’agit pas seulement de l’humidité à la surface du sol, mais également à environ 15 centimètres sous la surface, soit la profondeur à laquelle les femelles pondent leurs œufs», explique-t-il. 

La FAO collabore avec la NASA, l’Agence spatiale européenne et le Centre commun de recherche de la Commission européenne afin d’améliorer la technologie des satellites. 

Les données provenant des satellites sont transmises en temps réel sur des téléphones portables, des tablettes et d’autres appareils afin que les pays puissent mobiliser leurs équipes de lutte antiacridienne et prendre des mesures immédiates pour éliminer les essaims de criquets. 

Remporter la bataille

Grâce à ces opérations, l’ampleur de l’invasion de criquets pèlerins a largement diminué en Éthiopie, au Kenya et en Somalie. En Afrique de l’Est, les opérations de lutte ont permis d’éviter la perte de 4 millions de tonnes de céréales et de 800 millions de litres de lait, pour un montant total de 1,56 milliard d’USD, tout en protégeant la sécurité alimentaire de 36,6 millions de personnes.

«Bien que la situation se soit améliorée et que les essaims soient désormais peu nombreux au Kenya et plus rares et plus petits en Éthiopie et en Somalie, la recrudescence du criquet pèlerin n’est toujours pas terminée», a fait observer Cyril Ferrand, chef de l’équipe de la FAO chargée de la résilience en Afrique de l’Est.

«Nous sommes maintenant en pleine saison des pluies et, bien que les précipitations soient inférieures à la moyenne, les conditions sont en train de devenir plus favorables à la reproduction des criquets pèlerins. Il est donc primordial de maintenir un haut niveau de surveillance.»

La menace a également diminué au Yémen, mais de petits essaims sont apparus récemment en Iraq, en Jordanie, au Liban et en Syrie.

La FAO a remporté de nombreuses batailles contre le criquet pèlerin, mais cette guerre n’est pas encore terminée.

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