Food and Agriculture Organization of the United NationsFood and Agriculture Organization of the United Nations

L’agrotourisme promeut les aliments traditionnels aux Palaos


Faire progresser l’égalité des genres et protéger l’environnement grâce à l’agrotourisme dans les petits États insulaires en développement (PEID)

Share on Facebook Share on X Share on Linkedin

L’agrotourisme peut contribuer à faire vivre les usages alimentaires et agricoles traditionnels des Palaos, renforcer leur dimension culturelle et offrir un avantage économique en les valorisant auprès des visiteurs. © FAO

10/06/2022

Rose Ongalibang montre une poudre mauve dans un petit sac. «C’est de la farine de taro» explique l’affable retraitée chez elle à Babeldaob, la plus grande île des Palaos.

Le taro, reconnaissable à ses feuilles en forme de cœur, est une plante cultivée traditionnellement par les Palaosiennes sur des terrains qui bordent les rivages de ce petit pays du Pacifique. Cette plante, exploitée pour sa racine riche en amidon, est depuis toujours un symbole de richesse et un objet d’échange dans les cérémonies. Elle est aussi un élément essentiel des plans que les Palaos élaborent en vue de faire du tourisme un secteur plus durable, plus respectueux de l’environnement et où les femmes et les hommes interviennent sur un pied d’égalité.

La communauté Slow Food que Rose et plusieurs de ses voisines ont créée l’an dernier illustre la manière dont le programme national de chaînes de valeur touristiques durables est mis en œuvre avec l’aide de la FAO. Pour les membres de cette communauté, c’est là une occasion de remettre à l’honneur la culture traditionnelle du taro, tout en trouvant à ce produit des usages inédits et novateurs.

Traditionnellement, les Palaosiens consomment le taro simplement bouilli et servi en accompagnement du poisson pêché dans l’océan tout proche. Cependant, Rose explique que, «lors d’un atelier récent, [elles ont] fait des pâtes, des nouilles, de la sauce pour les pâtes, des biscuits, du pain et des brownies» avec de la farine de taro et ont appris comment conditionner au mieux les produits. «Cela représente un véritable potentiel», résume-t-elle. Parallèlement, Rose et ses amies du groupement s’emploient à ramener le tourisme dans un village ancien et ses potagers de taro, qui avaient été abandonnés.

Le tourisme est le premier moteur de l’économie des Palaos, même si le nombre de visiteurs s’est fortement réduit sous l’effet de la pandémie de covid-19. Ce pays de Micronésie est déterminé à reconstruire en mieux à l’aide de ce projet aux multiples volets. Au nombre des éléments auxquels la FAO apporte son appui, il y a une évaluation de la chaîne de valeur du tourisme, centrée sur la participation des femmes, une base de données sur les aliments patrimoniaux et leurs modes de transformation, un inventaire de la diversité agroécologique et culturelle locale et des ateliers de formation destinés aux producteurs dont le thème est l’amélioration de la nutrition.

Ce programme de chaînes de valeur touristiques durables bénéficie de l’appui du Partenariat de la montagne de la FAO ainsi que du sous-programme intitulé Autonomisation des femmes dans les systèmes alimentaires et renforcement des capacités locales et de la résilience des PEID dans le secteur agroalimentaire, lequel est financé par plusieurs partenaires fournisseurs de ressources dans le cadre du Mécanisme multidonateurs flexible de la FAO.

Les autres partenaires d’exécution étant Sustainable Travel International et Slow Food International, l’un des éléments essentiels du programme est un calculateur de carbone, au service de l’objectif des Palaos qui consiste à faire du pays la première destination au monde pour le tourisme à neutralité carbone. Ce calculateur permettra aux visiteurs de déterminer l’empreinte carbone de leur voyage, de contribuer financièrement à sa compensation au niveau local grâce à des sites consacrés au piégeage du carbone, mais aussi de soutenir la production alimentaire durable.

Lukes Isechal, Directeur par intérim du Bureau des ressources marines, déclare: «Nous disposons déjà d’un réseau de zones protégées, notamment la baie de Ngermeduu, qui est un vaste estuaire bordé de mangroves. Selon moi, ce site est celui qui se prête le mieux au piégeage du carbone.»

Rose Ongalibang (photo ci-dessus) et ses voisines ont créé une communauté Slow Food, qui se penche sur de nouveaux usages possibles du taro. La culture traditionnelle du taro peut aussi devenir une attraction touristique. À gauche: © FAO; à droite: © FAO/

La contribution des femmes aux chaînes de valeur

Comme l’explique Rose, tout le monde n’a pas grandi en immersion dans les traditions qui se rattachent au taro. «Nous apprenons. C’est nouveau pour moi. Je ne descendais pas souvent à la parcelle de taro quand j’étais jeune, et si je m’y trouvais parfois, je n’y prêtais pas attention.»

Jennifer Koskelin Gibbons, de l’association des Amis du Sanctuaire marin national des Palaos, analyse l’intérêt de cette démarche: «En permettant à ces usages traditionnels de subsister, nous apportons deux choses: la première est leur durabilité intrinsèque. La deuxième est le fait de contribuer à renforcer notre culture en veillant à ce que la propriété intellectuelle que constitue le savoir-faire des pêcheurs et des cultivateurs se transmette entre les générations, mais aussi de la valoriser aux yeux des visiteurs, en leur disant: voici comment nous avons vécu pendant des générations, si vous visitez les Palaos, vous êtes conviés à y prendre part.

Les Palaosiens s’enorgueillissent de leur société matrilinéaire, où les femmes exercent un grand pouvoir. Cependant, les inégalités continuent de prévaloir dans certains domaines. «Il est important de créer des espaces où [les femmes] puissent se parler et échanger, et de reconnaître les inégalités qui entravent leur capacité de développer leur potentiel pleinement», explique Alejandra Safa, spécialiste des questions de genre à la FAO. Parmi les problèmes soulevés par les femmes figurent la difficulté d’obtenir des prêts bancaires, d’acquérir des titres de propriété foncière et de gérer leur lourde charge de travail au quotidien, précise-t-elle.

Le projet vise à renforcer la contribution des femmes aux chaînes de valeur durables en les aidant à acquérir de nouvelles compétences, à obtenir un meilleur accès au financement et à mieux négocier leurs rôles au sein de la famille et de la communauté.

Il est capital que l’initiative sur le tourisme apporte une aide aux familles vulnérables, notamment aux ménages ayant à leur tête une mère célibataire. «Nous devons aider ces [agriculteurs] à faire ce qu’ils ont toujours fait, mais comment mettre en valeur ces activités au point d’en faire une expérience attrayante pour quelqu’un venant d’ailleurs?», explique Ann Kitalong, consultante en environnement et chercheuse sur les questions de genre.

Le projet de la FAO étant axé sur les PEID et la création de chaînes de valeur touristiques durables, l’expérience des Palaos ne peut manquer de produire des enseignements précieux pour les autres petits États insulaires du monde entier. © FAO

Réduire la dépendance à l’égard des importations

L’une des priorités importantes pour les Palaos est de réduire la dépendance à l’égard des importations alimentaires, qui représentent jusqu’à 90 pour cent de la consommation du pays. C’est là une réalité qu’un grand nombre de PEID ont en commun. Les Palaos se sont fixé pour objectif de produire la majeure partie des aliments qu’ils consomment d’ici à 2025.

«Depuis que la pandémie mondiale a débuté, il y a deux ans, nous ne parlons que de sécurité alimentaire», dit Rose, évoquant l’inquiétude suscitée par les perturbations que peuvent subir les approvisionnements alimentaires par bateau. Le projet de la FAO étant axé sur les PEID et la création de chaînes de valeur touristiques durables, l’expérience des Palaos ne peut manquer d’être riche d’enseignements dont pourront profiter les autres petits États insulaires disséminés dans les océans de la planète. Le Coordonnateur du projet du Partenariat de la montagne l’affirme: «Le but est d’articuler le tourisme et les systèmes alimentaires du pays et c’est ce que nous aimerions faire aussi dans d’autres pays.»

Liens utiles

Pour en savoir plus