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Des filets de sécurité pour les travailleuses du secteur des pêches en Colombie


La protection sociale renforce l’indépendance économique des femmes du secteur, ainsi que leur sécurité

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En Colombie, les platoneras, des vendeuses de poisson, ont une longue histoire. Elles jouent un rôle crucial dans la société car elles fournissent la population en produits de la mer nutritifs. Elles sont si importantes qu’une journée leur est dédiée en décembre à l’échelle nationale. ©ConectadosColombia

05/05/2023

C’est le petit matin dans la ville côtière de Buenaventura. Alors que le soleil se lève sur l’un des ports les plus actifs de la Colombie, le son du Marimba de Chonta retentit dans les rues tandis que les pêcheurs et les travailleurs de la pêche partent au travail.

Sandra Gómez Montaño, une femme de 55 ans qui transforme des produits de la pêche, fait partie des 400 000 habitants de la ville. Comme la majorité de la population, elle vit du secteur des pêches.

Chaque jour, elle achète du poisson frais aux femmes appelées platoneras en raison des grands plats (platones) qu’elles portent traditionnellement sur la tête. Cette tradition afro-colombienne se transmet de génération en génération, et ces femmes sont fières de leur héritage et de leur rôle dans la société.

«Les platoneras jouent un rôle très important», explique Sandra, qui travaille en étroite collaboration avec les vendeuses de poisson et transforme les poissons frais en des produits nutritifs pour la population.

Les platoneras et les femmes qui transforment les produits de la pêche sont un maillon crucial de la filière locale et permettent aux familles de bénéficier de produits importants sur le plan nutritif.

Le secteur des pêches fait partie de l’héritage familial de Sandra, car sa mère était platonera. Néanmoins, elle reconnaît qu’il pose d’importantes difficultés: les revenus des femmes travaillant dans ce secteur sont généralement très bas et peuvent fortement varier d’un mois à l’autre .

De plus, si les travailleuses du secteur des pêches ont accès au système de santé public, elles sont exclues des programmes de protection sociale, comme environ 70 pour cent des travailleurs colombiens. Trop souvent, elles n’ont pas de pension de retraite ou d’allocation chômage, ce qui les rend encore plus vulnérables sur le plan matériel et alimentaire.

Dans le cadre du projet SOCPRO4FISH, qui bénéficie de financements de l’Agence norvégienne de coopération pour le développement, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et l’Institut colombien de recherche marine et côtière (INVEMAR) travaillent pour que les platoneras soient mieux armées sur le plan entrepreneurial, augmentent leurs revenus et aient davantage accès aux dispositifs de protection sociale. 

Les travailleuses du secteur des pêches sont un maillon important de la filière. Pourtant, elles sont exclues des programmes de protection sociale, comme environ 70 pour cent des travailleurs colombiens, ce qui les rend encore plus vulnérables sur le plan

«SOCPRO4FISH vise à favoriser l’inclusion économique et renforcer la résilience et la sécurité matérielle des pêcheurs et des travailleurs du secteur des pêches face aux crises et à leurs répercussions», explique Heysel Calderón, coordinatrice nationale du projet pour la FAO. «Il est très important de comprendre que la protection sociale est un moyen efficace pour lutter contre la pauvreté et l’insécurité alimentaire. Elle permet également de favoriser le développement rural et la gestion durable des pêches.»

Jusqu’ici, environ 100 platoneras et travailleuses du secteur des pêches ont suivi la formation, qui a également permis de les sensibiliser au système de retraite public et de les aider à entrer en contact avec l’administration pour bénéficier des prestations sociales colombiennes.

La protection sociale est un élément indispensable pour parvenir à une croissance inclusive et durable et éradiquer la pauvreté. Pourtant, d’après l’Organisation internationale du Travail, plus de la moitié de la population mondiale, en particulier les femmes, n’en bénéficie pas. En moyenne, la protection sociale des femmes est de 8 pour cent inférieure à celle des hommes. En Colombie, l’État a tenté de combler cet écart avec des prestations non contributives, mais la couverture et le niveau des prestations reste faible.

La situation est encore pire dans le secteur des pêches, car la plupart des programmes ne prennent pas en compte la réalité du terrain et manquent souvent de souplesse pour répondre aux besoins du secteur. Les activités de pêche artisanale sont souvent informelles, irrégulières et saisonnières, ce qui implique que les travailleurs ne sont pas toujours couverts par la législation réglementant l’emploi formel, et complique leur participation au système de protection sociale national.

«Afin de remédier à cette situation, davantage de projets doivent porter sur l’élargissement des programmes de protection sociale, avec notamment des dispositifs à destination des pêcheurs et des travailleurs du secteur des pêches, qui s’adaptent aux crises et tiennent compte des inégalités femmes-hommes», explique Daniela Kalikoski, fonctionnaire technique principale de la FAO pour SOCPRO4FISH.

La protection sociale est un élément indispensable pour parvenir à une croissance inclusive et durable et éradiquer la pauvreté. Dans le cadre du projet SOCPRO4FISH, la FAO et ses partenaires œuvrent à ce que les travailleurs du secteur des pêches soient mieux armés sur le plan entrepreneurial et aient davantage accès aux dispositifs de protection sociale. © FAO

En Colombie, la FAO et ses partenaires ont créé un groupe interinstitutionnel sur la protection sociale dans le secteur des pêches et de l’aquaculture, appelé GIPRO. Le groupe réunit des représentants de l’État, des secteurs privé et public, des pêcheurs et des travailleurs du secteur des pêches dans l’optique de favoriser les échanges et la prise de mesures concrètes afin d’améliorer l’accès aux programmes de protection sociale.

Si les travailleuses du secteur des pêches obtiennent une plus grande sécurité matérielle et un meilleur accès au système de santé public, elles pourront développer leur activité et préparer l’avenir.

«Désormais, nous nous sentons soutenues car ce filet de sécurité nous ouvre de nombreuses perspectives», assure Sandra. «Nous nous sentons reconnues. Maintenant, je peux faire beaucoup de choses.»

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