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L’agriculture de conservation permet aux agriculteurs indonésiens de transformer en terres cultivables des terres marginales de mauvaise qualité


De meilleures techniques agricoles aident à lutter contre l’érosion et les inondations, tout en accroissant les rendements et les revenus.

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Depuis qu’il a suivi une formation de la FAO sur les techniques d’agriculture de conservation, Seferinus We’e, agriculteur, garde ses chèvres dans des enclos, ce qui lui permet de collecter leur fumier et de l’utiliser comme engrais biologique. ©UNIC Jakarta/ Miklos Gaspar

03/04/2023

Quel est le lien entre une formation universitaire et du fumier? L’agriculture de conservation, vous répondront Seferinus We’e et Krensensiana Nasa. En participant à un projet soutenu par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et ses organisations non gouvernementales (ONG) partenaires, ce couple d’agriculteurs de l’île bucolique de Florès, dans l’est de l’Indonésie, a réussi à multiplier par trois et demi ses rendements et ses revenus.

Grâce à la création de terrasses et à la culture intercalaire, Seferinus We’e et Krensensiana Nasa ont mis fin à l’érosion de leur terre, située à Nangaroro, sur une colline escarpée qui surplombe l’océan Indien. En utilisant le fumier des animaux domestiques comme engrais biologique sur leurs parcelles d’agriculture de conservation, ils ont fait passer le rendement de leurs cultures de maïs de 2 à 7 tonnes par hectare. Et c’est à cette quantité de maïs supplémentaire, qu’ils revendent contre argent comptant, qu’ils doivent le lien entre fumier et éducation: leurs deux aînés sont désormais inscrits à l’université à Jakarta.

«Financièrement, nous n’aurions jamais pu nous le permettre», déclare Seferinus, leur père, qui pratiquait par le passé l’agriculture de subsistance. Lui et Krensensiana cultivent désormais des patates douces, des haricots, du maïs et des légumes-feuilles, tels que le pakchoï, qu’ils destinent à la vente.

«Non seulement notre nourriture est garantie toute l’année, mais nous bénéficions de surcroît d’un revenu régulier», explique Krensensiana. Créer des terrasses sur les pentes abruptes de leur terrain n’a pas été facile, mais ces efforts ont porté leurs fruits.

Toutes les techniques ainsi utilisées relèvent de ce que l’on appelle l’agriculture de conservation, un système agricole qui permet de prévenir les pertes de terres arables tout en régénérant les terres dégradées. Ce système, qui repose sur le maintien d’une couverture permanente du sol, une perturbation minimale de celui-ci et la diversification des espèces végétales, favorise la biodiversité et les processus biologiques naturels, ce qui conduit à une utilisation plus efficace de l’eau et des nutriments, ainsi qu’à l’amélioration et à la pérennisation de la production agricole.

Krensensiana Nasa et son fils travaillent sur leurs terres en terrasses, qui génèrent 3,5 fois plus de revenus grâce aux techniques d’agriculture de conservation qu’ils appliquent. ©UNIC Jakarta/ Miklos Gaspar

Passer à plus vaste échelle

Les autorités agricoles locales ne sont pas en reste. Depuis 2023, l’agriculture de conservation est promue par la FAO dans plusieurs villages par l’intermédiaire d’un partenaire de mise en œuvre local, la Foundation for Partnership with Independent Farmers. Le Bureau de l’agriculture local a désormais rendu cette technique accessible à tous les agriculteurs cultivant des terres marginales dans la région.

«Les résultats sont très impressionnants, et nous avons décidé de déployer la méthode dans tout le district au moyen d’agents de vulgarisation», indique Oliva Monika, Cheffe du Bureau du Ministère de l’agriculture du district de Nagekeo.

Le district de Nagekeo compte environ 21 000 agriculteurs, dont environ 10 pour cent travaillent sur des terres marginales. C’est le cas lorsque le terrain est trop escarpé, comme à Nangaroro, où les précipitations glissent sur les pentes naturelles et entraînent la perte du sol fertile situé en partie haute, ou lorsque le terrain est complètement plat, et que l’eau de pluie n’a aucun endroit où s’écouler, ce qui transforme en zones humides ce qui pourrait être de riches étendues agricoles.

C’est cette dernière situation que vit Amandus Buiu, petit agriculteur de Wolowae, qui ne pouvait jusqu’à présent planter que du riz sur sa parcelle souvent inondée d’un demi-hectare, plutôt que du maïs ou des produits horticoles, qui coûtent plus cher.

Le terrain plat d’Amandus est maintenant doté de petits canaux de drainage qui guident l’excès d’eau de pluie que le sol ne peut pas absorber vers le ruisseau voisin. Grâce à ces techniques, Amandus a pu diversifier ses plantations. Il pratique la culture intercalaire de maïs et de haricots, où les deux espèces s’apportent mutuellement l’ombre, l’humidité et l’engrais naturel (provenant des feuilles tombées au sol) nécessaires pour toutes deux prospérer. Dans l’intervalle, Amandus a conservé une rizière au bout de sa parcelle, dans la partie la plus proche du ruisseau. «Je suis toujours en train d’expérimenter pour trouver l’équilibre des cultures qui fonctionnera le mieux», explique-t-il.

La culture intercalaire de maïs et de haricots ainsi que la mise en place de petits canaux de drainage ont permis à Amandus Buiu de transformer ce qui n’était autrefois que terres inondées en exploitation productive. ©UNIC Jakarta/ Miklos Gaspar

Soutenir les agriculteurs, préserver l’environnement

L’aide apportée était vraiment nécessaire à Nagekeo, qui fait partie de la province des petites îles de la Sonde orientales, l’une des cinq régions les moins développées d’Indonésie. La plupart des provinces en question sont agricoles, et faire sortir les agriculteurs de l’agriculture de subsistance pour qu’ils génèrent des revenus est un objectif clé du gouvernement, explique Wayan Tambun, Directeur de projet de la FAO en Indonésie. «Les méthodes que nous et nos partenaires locaux aidons les agriculteurs à mettre en œuvre préservent la terre et les ressources, tout en augmentant les rendements et les revenus», dit-il.

Dans une autre zone marginale, Rendubutowe, où l’altitude élevée a pour conséquence que les précipitations sont beaucoup plus faibles, les partenaires de la FAO, à savoir World Neighbors et le Bureau de Vredeseilanden en Indonésie, ont proposé aux agriculteurs l’idée de créer des terrasses et d’utiliser des haies pour retenir le sol et l’eau, mais aussi de planter des arbres, afin de limiter les ruissellements pendant la saison des pluies et les pénuries d’eau pendant la saison sèche. Les agriculteurs sont ainsi passés d’une agriculture sur brûlis et d’une culture itinérante à une agriculture permanente. Grâce à ces nouvelles pratiques, le sol de nombreuses zones bénéficie désormais d’une couverture forestière qui offre une protection naturelle contre l’érosion et les inondations, assure un stockage du carbone et fait naître de nouvelles sources d’eau.

«Avant, notre terre était stérile et infertile et ne pouvait être cultivée que cinq à sept mois par an», explique l’agriculteur Antontius Pati. Vingt-cinq ans plus tard, son exploitation comporte des terres étagées en terrasses, ainsi que des espaces plantés d’acajous et de gmelinas, dont les graines et le bois de chauffage sont aussi commercialisables.

«Avant, après trois récoltes, je devais déplacer l’exploitation sur un nouveau terrain, car le sol n’était plus fertile», raconte-t-il. «Mais avec l’aménagement en terrasses et l’utilisation de feuilles de légumineuses comme engrais vert, ma récolte n’a cessé d’augmenter». Sa «forêt familiale», comme il l’appelle, garantit que le ruisseau local ne s’assèche jamais et que le sol conserve son humidité toute l’année.

«Hériter de terres marginales n’est plus une malédiction», ajoute Seferinus, qui à présent peut même envisager d’effectuer un voyage en dehors de la province. «Maintenant que nos aînés sont à Jakarta, nous espérons pouvoir aller leur rendre visite».

Les techniques de l’agriculture de conservation permettent aux petits exploitants d’adopter des pratiques plus efficaces, susceptibles de réduire les pertes de récoltes et d’offrir des rendements plus élevés. La FAO s’emploie, en coopération avec le Gouvernement indonésien, à étendre l’utilisation de ces techniques à l’échelle nationale.

Cet article relatant des exemples réels a été réalisé en collaboration avec Miklos Gaspar, du Centre d’information des Nations Unies (CINU) à Jakarta (Indonésie).

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