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Au Pérou, la cogestion permet aux pêcheurs de préserver les mangroves et les ressources du milieu océanique


Les communautés associent leurs efforts à ceux des pouvoirs publics pour préserver l’environnement et les moyens de subsistance.

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Des communautés péruviennes coopèrent avec les autorités locales pour gérer les écosystèmes marins exceptionnels qui constituent leur environnement et dont dépendent leurs moyens de subsistance. L’Initiative pour les pêches côtières (IPC) de la FAO, qui bénéficie du soutien du Fonds pour l’environnement mondial (FEM), a donné à la communauté les moyens de surveiller les écosystèmes qui l’entourent de façon durable et productive. ©FAO/ PNUD

08/06/2023

Jhon Puse Arroyo a pratiqué toute sa vie la pêche traditionnelle au gériocrabe rouge dans la réserve nationale de mangroves de Tumbes, qui s’étend sur près de 3 000 hectares le long du littoral péruvien, près de la frontière avec l’Équateur.

«C’est mon père qui m’a appris ce métier, il gagnait sa vie dans les mangroves pour subvenir aux besoins de toute la famille, soit ma mère et mes six frères et sœurs», explique Jhon. 

Aujourd’hui âgé de 40 ans, Jhon n’est plus seulement pêcheur de gériocrabes rouges, il est également vice‑président du Consortium des mangroves du nord-est du Pérou, qui regroupe des organisations de pêcheurs. 

Le Consortium est un moteur du changement au service de la durabilité et de la biodiversité de la réserve nationale de mangroves de Tumbes, laquelle est également un site pilote de l’IPC. Cette initiative, dont l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) assure la coordination, bénéficie d’un financement du FEM.

Les mangroves s’étendent en bordure de l’océan. Elles font office de puits de carbone, de filtres à eau et de protections naturelles contre les tempêtes et l’érosion. Elles abritent également une riche biodiversité: moules de mangrove, blanches, hérons, fourmiliers, algues, abeilles pollinisatrices, etc.

Ici, au Pérou, les mangroves hébergent aussi de nombreuses espèces de crustacés et de mollusques, comme les gériocrabes rouges et les palourdes dites «concha negra», que l’on trouve dans la boue entre les racines de palétuviers. Ces espèces constituent des sources de nourriture et des moyens de subsistance essentiels pour les pêcheurs et les travailleurs de la pêche comme Jhon et d’autres membres de sa communauté. 

Jhon remarque cependant une évolution dans les mangroves. «Autrefois, nous ne passions que trois ou quatre heures dans les mangroves [pour trouver la quantité de crabes dont nous avions besoin], aujourd’hui il faut compter cinq à six heures [pour récolter la même quantité]», explique-t-il.

Les ressources s’amenuisent. Depuis 15 ans, la hausse de la température des eaux, les précipitations excessives, les eaux de ruissellement des exploitations agricoles locales et la pollution des villes voisines réduisent la quantité et la biodiversité de la faune et de la flore présentes dans les mangroves.

«Il y a une différence entre la mangrove d’autrefois et celle d’aujourd’hui. Nous voulons, en tant que communauté, que l’écosystème de la mangrove redevienne ce qu’il était à l’époque de nos parents et de nos grands-parents», déclare Jhon.

Les ressources s’amenuisent depuis une quinzaine d’années. Désormais, la communauté et les pouvoirs publics surveillent et gèrent leurs ressources marines de plus près, en veillant à préserver les écosystèmes tout en faisant en sorte que la population con

La cogestion au service de la durabilité, aujourd’hui et demain

Afin de préserver et de restaurer leurs ressources naturelles dont l’importance est vitale, les pêcheurs du Consortium ont conclu un accord de 20 ans avec le SERNANP, organisme national chargé des zones protégées, dont l’objet est la cogestion de la réserve nationale de mangroves de Tumbes.

«Cet accord est le premier de ce type jamais passé avec des associations de pêcheurs, et sa signature marque une étape importante dans la conservation et fera date pour le pays», déclare Rosa Garcia, directrice de la réserve nationale de mangroves de Tumbes.

Selon les termes de l’accord, les membres du Consortium surveillent et gèrent leurs ressources, entretiennent la biodiversité et le couvert forestier, et exploitent une entreprise d’écotourisme et une unité de transformation de produits de la mer. 

Ils mènent également des campagnes pédagogiques et participent à la recherche scientifique en vue de reconstituer les stocks d’espèces épuisées, en collaboration avec l’Université nationale de Tumbes et Incabiotec, un laboratoire privé de biotechnologie axé sur le développement durable.

Grâce aux connaissances qu’ils ont accumulées au fil des ans dans le cadre d’ateliers de renforcement des capacités qu’organise à leur intention l’équipe de l’Initiative pour les pêches côtières, ils ont acquis les compétences requises en matière commerciale, environnementale, managériale et scientifique pour cogérer le site.

Jhon Puse (à gauche), vice-président du Consortium des mangroves du nord-est du Pérou, souhaite que les mangroves recouvrent l’état qui était le leur à l’époque de ses parents et de ses grands-parents. La cogestion profite aux communautés locales, favorise le développement régional, préserve la biodiversité et protège les ressources marines. © Consorcio Los Manglares del Noroeste del Perú/ H.Preciado

Au Pérou, l’IPC est mise en œuvre par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), sous la direction du Ministère de l’environnement et avec la participation du Ministère de la production et des autorités régionales de Tumbes et de Piura. 

Jhon affirme que les pêcheurs constatent déjà la différence.

«Nous savons maintenant que nous pouvons introduire dans les mangroves des larves de palourdes concha negra élevées en laboratoire et qu’elles s’adapteront et se développeront», explique Jhon. «Nous avons mené cette recherche sur un site pilote de l’IPC dans la réserve et avons constaté que la population de concha negra était en augmentation.»

Le suivi et la surveillance participatifs doivent s’appuyer sur des organisations communautaires solides qui gèrent les écosystèmes en collaboration avec les pouvoirs publics. Ces organisations ont acquis leurs compétences en matière de gestion des écosystèmes dans le cadre d’ateliers de renforcement des capacités organisés au fil des ans par l’équipe de l’Initiative pour les pêches côtières, explique-t-il. 

«Ce modèle de gestion inclusive nous semble le plus viable dans la durée», déclare Marco Arenas, qui dirige l’unité d’exploitation fonctionnelle de la gestion participative au SERNANP. 

«Il profite aux communautés locales, accompagne le développement régional et préserve la biodiversité», explique-t-il. «Ce n’est qu’en ouvrant des perspectives aux communautés locales que nous pourrons assurer la conservation.»

La Journée mondiale de l’océan est un moment important qui permet de mesurer à quel point nos ressources marines sont essentielles pour de nombreuses communautés. 

«Pour la Journée mondiale de l’océan, nous affirmons que le plus important est la volonté de préserver nos mers et nos mangroves. Chaque pêcheur doit s’impliquer au niveau individuel», affirme Jhon.

«Les mangroves sont synonymes de vie pour chacun d’entre nous, c’est pourquoi nous devons les préserver», ajoute-t-il.

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