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La terre vue du ciel


Grâce à des enquêtes sur le terrain et à des satellites, les agriculteurs et agricultrices du Malawi améliorent la gestion de leurs cultures et sont aidés plus rapidement en cas de catastrophe

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Un projet conjoint de la FAO et du programme Harvest de la NASA associe des images satellite et les données issues d’enquêtes de terrain au sein d’une application mobile. Ces données facilitent l’organisation des secours en cas de catastrophe et permettent aux exploitants et exploitantes agricoles du Malawi et de Namibie d’améliorer la production alimentaire. ©NASA Harvest/Christina Justice

13/11/2023

Par le passé, dans le monde agricole, on consultait le ciel nocturne pour déterminer le moment de l’ensemencement ou de la récolte. Aujourd’hui, à l’ère de l’information, on ne compte plus sur la position des étoiles pour se renseigner mais sur des satellites et des applications mobiles conçus par l’être humain. Le recours à ces outils novateurs aide les agriculteurs et les agricultrices à améliorer la production alimentaire. Ils permettent aussi aux pouvoirs publics de prendre des décisions de principe plus éclairées et peuvent jouer un rôle précieux en cas de catastrophe en contribuant à orienter les secours pour qu’ils parviennent plus rapidement aux personnes qui en ont besoin.

Par l’intermédiaire de son Système mondial d’information et d’alerte rapide sur l’alimentation et l’agriculture (SMIAR), l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) s’est associée au Global Food Security and Agriculture Consortium de l’Administration des États-Unis pour l’aéronautique et l’espace (NASA), aussi appelé Harvest, afin d’améliorer les estimations relatives aux rendements agricoles, de proposer des solutions d’évaluation des cultures adaptées au contexte et de contribuer à l’organisation d’interventions rapides en cas de catastrophe.

Financé par l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), ce projet inauguré en 2021 conjugue des données d’enquête recueillies directement sur les terres au moyen d’une application mobile et des images satellite des mêmes terrains, prises depuis l’espace. Les deux ensembles de données alimentent ensuite des modèles d’apprentissage automatique qui produisent des cartes détaillées des terres cultivées et permettent de mieux comprendre les conditions de culture.

Cette alliance de sources de données terrestres et satellite est déterminante dans les pays comme le Malawi et la Namibie, où les petites exploitations sont majoritaires dans certaines régions, raison pour laquelle il est difficile pour les satellites de délimiter à eux seuls le périmètre des champs.

Ces cartes montrant des terres cultivées au Malawi ont été élaborées à l’aide des modèles d’apprentissage automatique du programme Harvest de la NASA et des données recueillies sur le terrain. Les zones de couleur bleu clair correspondent aux terres agric

Dans le sillage du cyclone Freddy

Au Malawi, la FAO et le programme Harvest, coordonné par l’université du Maryland, ont tiré parti des outils numériques et des outils fondés sur la télédétection produits dans le cadre du projet pour fournir une évaluation rapide des crues dues au passage du cyclone tropical Freddy en mars et avril 2023.

Pendant la tempête, qui a fait plus de 500 morts et entraîné le déplacement d’environ 565 000 personnes, il est tombé l’équivalent de six mois de précipitations en six jours à peine. Et comme si la situation n’était déjà pas assez grave, le système météorologique a frappé le pays à la fin de la saison humide, lorsque les niveaux des cours d’eau étaient déjà hauts.

L’évaluation, menée par le Ministère de l’agriculture du Malawi avec le soutien technique des agents de la FAO présents dans le pays et du programme Harvest, a recueilli des données dans 2 095 champs de 11 districts différents dans le sud du territoire.

Quatre-vingt-six pour cent des agricultrices et agriculteurs interrogés ont signalé des inondations sur leurs terres cultivées. Plus d’un quart d’entre eux ont perdu des stocks alimentaires en raison des crues, et près de 40 pour cent ont indiqué avoir perdu du bétail. Selon la quasi-totalité des personnes interrogées, le produit de la récolte actuelle ne suffira pas à répondre aux besoins des ménages d’ici à la prochaine récolte, en avril 2024.

Il importe de noter que l’obtention de ces données granulaires, qui aurait auparavant demandé plusieurs semaines, n’a pris que quelques jours. En cas de crise, la vitesse et la précision ainsi permises peuvent faire toute la différence pour les opérations de secours et les interventions.

«Les résultats de l’évaluation de terrain ont permis d’apprécier avec précision les incidences du cyclone Freddy en donnant aux pouvoirs publics les informations nécessaires au déploiement rapide de secours dans les zones sinistrées et auprès des populations les plus démunies», a déclaré M. Jonathan Pound, un économiste de la FAO qui travaille avec le SMIAR.

Mode de fonctionnement

Pour recueillir les données de base sur lesquelles se fondent les évaluations rapides comme celles-ci, des agents du Ministère de l’agriculture, formés en ligne par la FAO et la NASA Harvest, ont récupéré des données sur le terrain grâce à une application mobile. Connectée au GPS de sorte à marquer l’emplacement exact du champ, l’application, dont la prise en main est très intuitive, permet aux responsables locaux de recueillir des informations en se déplaçant à pied entre les rangées de végétaux. Étant donné qu’elle fonctionne également hors ligne, l’application réduit les coûts et donne à ses utilisateurs une certaine marge de manœuvre puisqu’ils peuvent télécharger les données ultérieurement.

Chaque champ est balisé à l’aide de coordonnées GPS et catégorisé en fonction du type de végétaux qui y est cultivé. On peut également y associer une multitude d’autres informations agricoles. Ces données sont par la suite utilisées pour entraîner des modèles d’apprentissage automatique qui détectent les terrains agricoles et les types de cultures à partir des images obtenues par satellite pour en faire des cartes en haute résolution.

En Namibie, où a sévi la sécheresse en 2023, l’application mobile a permis à des responsables locaux et à des spécialistes de la vulgarisation agricole de réaliser 4 500 enquêtes, au lieu des 600 qui auraient été menées à bien sur papier. Abordable et précise, cette méthode réduit également les délais de traitement étant donné que toutes les informations sont saisies selon un modèle normalisé.

Outre l’importante accélération des activités et la réduction des coûts, «elle a pour atout d’améliorer sensiblement la qualité des données recueillies», a affirmé M. Samuel Kirichu, agent de la FAO en poste dans le bureau de pays du Malawi.

Cela vaut particulièrement pour les petits agriculteurs et agricultrices qui ne connaissent pas toujours précisément les dimensions de leurs exploitations. Forts de ces données plus précises sur leurs terres, ils peuvent adapter le recours aux intrants comme les semences et les engrais, ce qui permet d’éviter le risque de fertilisation excessive tout en réduisant les coûts.

D’après Mme Christina Justice, coresponsable de la sécurité alimentaire et de l’alerte rapide pour le programme Harvest, les données ainsi recueillies contribuent en outre à repérer l’apparition d’éventuelles menaces pour les cultures, comme les sécheresses et les maladies. En outre, disposer d’une «première estimation des rendements plusieurs mois avant la récolte est incroyablement utile» puisque ces informations permettent d’améliorer la planification de toute la chaîne d’approvisionnement agroalimentaire.

Outre l’intérêt qu’elles présentent pour les interventions en cas de catastrophe, les données d’estimation des rendements recueillies dans le SMIAR sont incroyablement utiles aux agriculteurs et agricultrices, puisqu’elles permettent d’améliorer la planification de l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement agroalimentaire. ©NASA Harvest/Christina Justice

Ces estimations sont particulièrement importantes en cette campagne agricole, étant donné que les récoltes au Malawi devraient souffrir des incidences du phénomène El Niño.

«Selon les prévisions, cette saison sera marquée par des conditions arides favorisées par El Niño, et il est donc plus crucial que jamais de suivre les récoltes de près et de disposer de ces données au plus tôt», a expliqué M. Pound.

Dans un avenir proche, la FAO et le programme Harvest de la NASA comptent fournir aux ministères de l’agriculture du Malawi, de Namibie et du Kazakhstan de premières estimations de rendements pour 2023-2024. Des travaux sont aussi en cours pour poursuivre la mise au point d’enquêtes d’évaluation des cultures fondées sur l’application mobile et étendre le projet à d’autres pays.

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