Food and Agriculture Organization of the United NationsFood and Agriculture Organization of the United Nations

Un Rwandais visionnaire cultive des pommes de terre suspendues dans l’air.


Des systèmes aéroponiques novateurs aident à surmonter certains problèmes agricoles de longue date.

Share on Facebook Share on X Share on Linkedin

Un mode de culture novateur, hors sol, pourrait permettre d’augmenter la production alimentaire de manière durable au Rwanda. ©FAO/Teopista Mutesi

27/11/2020

L’agriculture est ancrée dans la culture du peuple rwandais. En effet, le secteur emploie environ 67 pour cent de la population rwandaise et les terres arables s’étendent sur plus de 1,56 million d’hectares.

Cependant, la population rwandaise devrait passer de 10,5 millions en 2012 à 16,9 millions en 2032 et, en parallèle, la demande de nourriture devrait s’envoler. Par ailleurs, la superficie des terres arables devrait diminuer en raison de l’expansion urbaine constante que connaît le pays. Les innovations agricoles qui assurent une plus grande productivité dans des espaces plus réduits sont indispensables pour que le secteur agricole rwandais continue de répondre aux besoins alimentaires du pays. Découvrez un nouveau mode de culture hors sol qui nécessite moins d’eau: l’aéroponie.

L’aéroponie est un mode de culture ayant une faible incidence sur le climat, où les racines sont suspendues dans l’air et poussent dans un milieu humide. Les plantes, exclusivement cultivées hors sol, sont aspergées d’eau et d’une solution nutritive. Cette technique permet aux agriculteurs de maîtriser l’humidité, la température, le pH et la conductivité de l’eau à l’intérieur de la serre.

À la rencontre du pionnier 

Lorsqu’il a entendu parler de l’aéroponie pour la première fois, Apollinaire Karegeya a compris que cette technique pouvait permettre d’accroître la production alimentaire, et ce de manière durable. Apollinaire est issu d’une famille de cultivateurs de pommes de terre, qui ont toujours pratiqué l’agriculture traditionnelle. Il savait que la faible productivité des cultures due aux conditions climatiques ne permettait pas de subvenir de façon fiable aux besoins alimentaires de la population locale. Apollinaire désirait ardemment acquérir des compétences et des connaissances nouvelles qu’il pourrait utiliser pour améliorer le fonctionnement de son exploitation.

«J’ai commencé à contacter des partenaires publics qui collaboraient avec les agriculteurs du pays. Un jour, l’un d’entre eux m’a proposé de suivre une formation en Europe. C’est à cette occasion que j’ai découvert l’aéroponie», explique-t-il.

«Cette technique hors sol m’a stupéfait. Elle permet de prévenir les maladies et d’accroître la productivité. À la fin de cette semaine de formation, j’étais convaincu que la réussite serait au rendez-vous.»

Innovation, innovation, innovation!

Avec le soutien d’organismes publics et de ses partenaires, Apollinaire a démarré la culture aéroponique de la pomme de terre sous serre en 2015 et reste depuis un pionnier de l’aéroponie au Rwanda. Grâce à cette technique, il multiplie maintenant les plants de pommes de terre, dont certains sont destinés à être plantés dans sa ferme et d’autres à être vendus à des agriculteurs pour qu’ils les plantent sur leur exploitation. Apollinaire cultive environ 2 500 plantules dans sa serre et obtient des pommes de terre en deux mois et demi.

«Je fais trois cycles de culture par an car il n’y a pas de rotation. Lorsque les nutriments sont bien maîtrisés, le rendement est assuré. Ce n’est pas le cas pour la culture en plein champ, qui est soumise aux aléas de la nature», dit-il.

Dans les systèmes aéroponiques, les graines sont «plantées» dans des morceaux de mousse placés dans de minuscules pots, qui sont exposés à la lumière à une extrémité et à une brumisation nutritive à l’autre. © FAO/Teopista Mutesi

Quand Apollinaire a commencé à utiliser cette technique, il avait encore beaucoup à apprendre.

«Les tubercules issus de l’aéroponie sont conservés pendant quatre mois avant d’être transférés en pleine terre. Je ne disposais pas d’installations de stockage, si bien qu’au cours du processus certains plants pourrissaient», a expliqué Apollinaire.

En 2018, la FAO a mis en œuvre un projet financé par l’Union européenne qui visait à améliorer les moyens d’existence des petits producteurs participant aux chaînes de valeur des racines et tubercules. Le projet avait pour objectif de rendre la production plus efficiente et de mettre les petits exploitants en relation avec les marchés nationaux et régionaux.

Grâce à ce projet, Apollinaire a été formé aux nouvelles techniques de stockage des pommes de terre et à la collaboration avec les institutions financières afin de stimuler davantage sa nouvelle activité. Il a appris à conserver les plants de pommes de terre dans des boîtes lorsqu’ils sont prêts à être mis en terre, afin qu’ils reçoivent suffisamment d’air en attendant d’être récupérés par les acheteurs.

Convaincre les Rwandais d’adopter ce nouveau mode de culture

La culture hors sol est une nouveauté pour de nombreux Rwandais, aussi Apollinaire a-t-il dû relever le défi de faire évoluer les mentalités. Grâce à l’aide et à la formation de la FAO, il a commencé à utiliser les médias, notamment la radio, la télévision, les journaux et les sites web, pour faire passer le message. 

«La formation m’a incité à utiliser les radios locales pour faire connaître mon activité et les systèmes aéroponiques. À partir de ce moment, la demande de plants a augmenté de façon exponentielle. Je reçois de nombreux agriculteurs qui me demandent de les aider à mettre en place ce type de système», dit-il en souriant.

Ses clients sont à présent tellement nombreux qu’il tente d’encourager davantage de personnes à adopter les méthodes aéroponiques et à produire des plants en vue d’approvisionner les agriculteurs rwandais.

Apollinaire inspecte les plantules dans la serre. Chacune produit entre 30 et 50 pommes de terre. © FAO/Teopista Mutesi

Apollinaire a également formé son fils de 20 ans à l’aéroponie, ainsi que 42 autres agriculteurs rwandais. Comme de plus en plus d’agriculteurs entendent parler des nouvelles techniques agricoles dans les médias, il pense que la production alimentaire va augmenter. À terme, les agriculteurs pourront utiliser l’aéroponie pour d’autres types de culture, comme celle des légumes.

«La population rwandaise ne cesse de croître. Nous devons réfléchir à des technologies qui permettent d’augmenter la quantité de nourriture que nous produisons. Les dernières innovations sont en train de changer l’image de l’agriculture. Davantage de jeunes sont attirés par l’agroalimentaire parce que ce n’est plus un secteur éreintant», a-t-il déclaré.

Compte tenu de l’accroissement démographique et de l’expansion urbaine au niveau mondial, on a précisément besoin de méthodes agricoles novatrices pour redynamiser le secteur agricole. En encourageant davantage d’agriculteurs à suivre l’exemple d’Apollinaire, nous pouvons accroître la sécurité alimentaire pour tous, d’une manière durable et en limitant l’incidence sur le climat.

Liens utiles

Pour en savoir plus