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Les holothuries stimulent la bioéconomie à Zanzibar


Nouveaux moyens d’existence, les holothuries sont porteuses d’un nouvel espoir

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Lorsqu’elles sont élevées de manière durable, les holothuries peuvent renforcer la biodiversité et les moyens d’existence à Zanzibar. ©FAO/Natalie Kapinga

07/01/2020

Les algues marines sont un produit précieux pour les 25 000 agriculteurs de Zanzibar qui en dépendent, et dont 80 pour cent sont des femmes. Mais les changements climatiques provoquent une hausse des températures, avec de lourdes conséquences sur nos océans. La hausse de température des eaux est une vraie menace pour la production d’algues marines, car elle inhibe leur croissance et les rend sensibles aux bactéries. La récolte de ces algues marines, que ces femmes exploitantes effectuent et qui est destinée essentiellement à l’exportation, n’est plus fructueuse.

La seule solution est de s’aventurer dans les eaux plus froides et beaucoup plus profondes, mais les algues marines qui s’y trouvent ont parfois été détériorées par des courants plus forts et la plupart des agriculteurs ne savent pas nager. Et ce n’est pas le seul obstacle: en raison de la chute des cours mondiaux des algues marines, ces agriculteurs travaillent six heures par jour pour gagner seulement 1 000 shillings tanzaniens – soit 0,44 USD – en échange des deux kilos qu’ils parviennent habituellement à récolter.

Dans ce contexte difficile, la FAO a imaginé une alternative en introduisant un nouveau moyen d’existence et en formant des femmes, déjà qualifiées pour travailler dans l’océan, à l’élevage d’holothuries.

Les holothuries: un aliment délicat et lucratif

Parmi les espèces d’holothuries, il en est une appelée Holothuria scabra qui n’est peut-être pas jolie mais qui est lucrative. Selon sa qualité, ce filtreur gris rapporte actuellement aux agriculteurs jusqu’à 100 USD par kilogramme une fois séché. Ce produit est fort demandé sur le marché asiatique car la pollution croissante des eaux peu profondes de l’Asie de l’Est a entraîné la raréfaction des holothuries dans la région. C’est pourquoi la Chine cherche à en importer.

Les holothuries sont importantes à d’autres égards également. Les scientifiques ont découvert qu’elles contiennent des composés bioactifs qui peuvent servir à des fins médicinales. Elles jouent également un rôle central dans la recherche sur la façon dont le microbiome gastro-intestinal des créatures marines favorise la régénération des cellules intestinales et améliore le système immunitaire. Les microbiomes sont constitués de microbes, dont font partie les bactéries, les virus et les champignons, qui sont essentiels pour la santé intestinale.

Ces petites créatures présentent en outre des avantages pour l’environnement. Si elles sont élevées de manière durable, elles stimulent la biodiversité dans la région, en aspirant puis en excrétant les matières mortes et rejetées sur le fond marin, un processus vital pour le maintien de la santé des prairies sous-marines et des récifs coralliens. Cet aspect est fondamental pour l’écotourisme.

Photo de gauche: Les holothuries, pas très séduisantes mais lucratives. Photo de droite: La FAO apprend aux femmes et aux hommes de la région à élever les holothuries de manière durable. Photos: ©FAO/Christabel Clark

Adaptabilité et faible entretien

Les holothuries juvéniles issues du frai peuvent être prélevées par les agriculteurs et placées dans des enclos protégés, où elles sont nourries jusqu’à ce qu’elles soient assez grosses pour être récoltées. L’adaptabilité de l’élevage de ces créatures tient au fait qu’elles nécessitent relativement peu d’entretien, pourvu que la profondeur et l’emplacement soient adéquats, que les enclos soient sûrs et que les prédateurs soient tenus à distance.

Pour aider les communautés locales à tirer profit de cette nouvelle possibilité, la FAO a fourni un appui technique et dispensé une formation en aquaculture et technologie de l’élevage par l’intermédiaire de l’écloserie marine de Zanzibar. Pendant trois jours, 60 cultivateurs d’algues marines, pour la plupart des femmes qui connaissent parfaitement la vie marine locale et qui sont habituées à travailler dans l’océan, ont suivi la formation de la FAO dans une baie de la côte Est de Zanzibar. Les stagiaires n’ont pas hésité à se mouiller et ont appris par des sessions pratiques à installer des enclos pour les holothuries qui permettent aux juvéniles de se développer dans des conditions optimales.

Depuis la mort de son mari, la survie de la famille de Mwanasha, une mère de cinq enfants originaire de l’île d’Uzi, dépend de la culture des algues marines. Cette formation lui a apporté énormément, et elle est aujourd’hui convaincue que l’élevage d’holothuries peut offrir une nouvelle source de revenus à la région.

Une autre participante à la formation, Mwenaisha Makame, a souligné l’importance de l’élevage d’holothuries pour l’avenir: «J’ai appris beaucoup de choses importantes pendant cette formation, et j’aimerais vraiment élever des holothuries et cultiver des algues marines pour augmenter mes revenus. J’espère qu’un jour, ma fille et mon fils voudront le faire eux aussi.»

L’écloserie marine de Zanzibar bénéficie du soutien financier de l’Agence coréenne de coopération internationale. Grâce à l’expertise technique de la FAO, le centre devrait stimuler l’économie bleue à Zanzibar, et peut-être en Tanzanie continentale, en produisant différentes espèces marines dont le chano, les holothuries et des crabes de vase. Le projet est d’avoir une écloserie capable de fournir des millions de semences aux aquaculteurs locaux et régionaux pour encourager le développement de l’aquaculture.

La production d’algues marines diminue en raison du changement climatique et du réchauffement des eaux. La FAO apprend aux femmes de la région à élever des holothuries à la place, ce qui leur offre une nouvelle source de revenus. ©FAO/Christabel Clark

Un modèle agricole aux nombreux avantages

En étroite collaboration avec Blue Ventures, une ONG qui possède une vaste expérience de la création d’élevages durables d’holothuries, la FAO aide les communautés à diversifier leurs activités agricoles et de pêche afin de maintenir un revenu stable.

Timothy Klückow, un expert de terrain du programme d’aquaculture de Blue Ventures qui dirige la formation au nom de la FAO, explique: «L’élevage d’holothuries est l’un des rares modèles d’aquaculture que je connaisse qui a un impact positif net. La réintroduction de ces animaux dans les zones surexploitées ne fait que des gagnants.»

«Les holothuries sont non seulement plus résilientes et tolèrent mieux le réchauffement des eaux que les algues marines cultivées ici, mais elles sont aussi des ingénieurs écosystémiques essentiels et ceci profite aux habitants, tout comme la hausse de revenu qu’ils obtiennent grâce à la vente des animaux adultes.»

Le marché des holothuries est solide et représente de nombreux avantages à l’échelle locale: il réduit la dépendance à l’égard de la pêche côtière en déclin, il permet aux populations de s’adapter aux effets des changements climatiques et il valorise les ressources biologiques disponibles localement. Tous ces éléments sont essentiels pour construire de solides bioéconomies locales et contribuer à la réalisation des objectifs de développement durable.

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