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Comment les produits à base de karité permettent aux Ghanéennes d’améliorer leurs moyens d’existence


Les produits durables représentent une source de revenus prometteuse et une nouvelle activité commerciale viable susceptible de remplacer l’abattage des arbres.

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Une formation organisée par la FAO a marqué un tournant pour Rita, fabricante de produits à base de karité. Aujourd’hui, elle emploie d’autres femmes rurales et plaide pour la mise en place de moyens d’existence durables susceptibles de compenser la déforestation dans sa région. © KANBAOCU/Clifford Amoah Adagenera

29/01/2021

«Je devais avoir trois ans quand j’ai perdu ma mère et je n’ai pas eu le temps de la connaître», raconte Rita Adibamoli Abarjawe, une jeune mère célibataire de 29 ans résidant dans le district de Kassena Nankana au Ghana. « J’ai grandi dans le stress et les crises financières. Il m’est même arrivé d’avoir à peine de quoi manger.»

Après la mort de sa mère, Rita a été élevée par son père et sa belle-mère, petits agriculteurs tous les deux. En vieillissant, ceux-ci n’ont plus été capables de continuer à travailler sur leur exploitation et, dès l’âge de 24 ans, Rita s’est retrouvée en charge de la famille. Elle devait aussi pourvoir aux besoins de sa fille de 3 ans et de son propre frère et de ses enfants.

Pour «joindre les deux bouts», elle a commencé à aider sa belle-mère à produire du beurre de karité. La fabrication de beurre de karité est un savoir-faire qui se transmet souvent de génération en génération, et il est fréquent que les agricultrices fabriquent ce produit pour leur propre ménage et pour se procurer des revenus. Dans le cas de Rita, cependant, la découverte de cette activité commerciale lui a permis d’acquérir les connaissances et l’élan nécessaires au lancement d’une nouvelle entreprise, qui s’est avérée être une précieuse source de revenus pour sa famille.

Une petite entreprise de fabrication de savon

Après avoir appris les bases du métier, Rita a adhéré à sa coopérative locale où elle a été choisie pour participer à une formation sur la fabrication de savon organisée par l’union coopérative Kassena Nankana Baobab Cooperative Union (KANBAOCU), une organisation s’occupant des produits forestiers locaux et active notamment dans les filières du baobab et du karité. Financée par le Mécanisme forêts et paysans de la FAO, la formation qui s’adressait aux jeunes portait sur les techniques de fabrication de savon à partir du karité et visait à encourager les jeunes femmes à se lancer dans l’entrepreneuriat.

Le Mécanisme forêts et paysans a aidé les membres de KANBAOCU à rendre le commerce du karité plus durable grâce à l’évaluation du risque climatique et à la conduite de diverses activités d’adaptation au climat, comme la plantation d’arbres, la mise en place de systèmes d’agroforesterie alliant arboriculture, cultures et élevage, le compostage organique pour améliorer la fertilité des sols et la rétention d’humidité, et la diversification des cultures pour introduire des variétés résistantes à la sécheresse.

La formation sur la fabrication de savon a eu lieu en pleine pandémie mais, lorsque les restrictions de déplacement ont été allégées, Rita et les autres stagiaires ont lancé leurs propres entreprises. Rita a commencé par vendre ses produits à des magasins de détail, à des ménages et sur les marchés locaux dès leur réouverture.

«La formation m’a permis de créer une source de revenus en pleine pandémie de COVID-19», se félicite Rita. «J’ai suivi la formation parce qu’il fallait que je m’établisse, que j’aide ma famille et que je paye les frais scolaires de ma fille.»

La jeune entrepreneuse a monté son affaire avec 68 dollars puisés dans ses économies et, moins de deux mois plus tard, elle empochait un juteux bénéfice.

«C’est la preuve qu’il existe, en particulier pour les jeunes femmes, des possibilités de création d’entreprises», estime Rita, «maintenant, mon objectif est de fabriquer des produits cosmétiques de qualité à base de karité et de baobab, à la fois pour le marché local et pour le marché international.»

Rita a organisé un cours sur la fabrication du savon, pour elle-même et pour d’autres membres de sa coopérative, afin que tous puissent faire passer leurs entreprises à la vitesse supérieure. © KANBAOCU/Clifford Amoah Adagenera

Une démarche respectueuse de l’environnement

Le commerce du karité est bénéfique non seulement pour les moyens d’existence des femmes mais aussi pour l’environnement. Le Ghana a perdu environ un quart de son couvert forestier entre 1990 et 2005 et, au rythme de 1,89 pour cent par an, la déforestation s’accélère encore. Pour s’attaquer à ce problème, le Mécanisme forêts et paysans et KANBAOCU détournent les communautés locales de l’abattage des baobabs et des arbres à karité pratiqué pour obtenir du charbon de bois et des produits ligneux, en leur proposant une manière différente et plus durable de tirer parti de ces précieuses ressources.

Les produits vendus par Rita sont confectionnés à partir des fruits, des noix, des gousses et des graines oléagineuses de l’arbre à karité et du baobab. Les arbres doivent être vigoureux et en bonne santé pour fournir ces fruits et ces noix, ce qui justifie un peu plus qu’on les protège et que l’on veille à la pérennité de l’approvisionnement en matières premières.

Rita est devenue aujourd’hui une farouche avocate pour la mise en place de moyens d’existence durables au profit des femmes rurales et pour la réduction de l’abattage incontrôlé du baobab et de l’arbre à karité. Avec une partie des économies gagnées grâce à son entreprise, elle a organisé pour elle‑même et les autres membres de la coopérative une formation de deux jours sur la fabrication de savon, animée par KANBAOCU. Son objectif est de donner un coup de fouet à son activité en apprenant à fabriquer d’autres produits à base de karité, comme le shampooing, et elle a invité les autres membres du groupe à participer à la formation afin qu’ils puissent eux aussi enrichir leurs compétences.

Le nouvel objectif de Rita (première à droite sur la photo) est de vendre ses produits sur le marché international. © KANBAOCU/Clifford Amoah Adagenera

Renforcer les capacités entrepreneuriales des communautés locales

L’un des principaux obstacles empêchant les femmes et les petits agriculteurs de monter des entreprises locales ou d’investir dans leurs exploitations agricoles est le manque de capitaux. Avec un financement de la FAO, KANBAOCU a expliqué à ses membres l’intérêt des coopératives de crédit et les a informés sur les associations villageoises d’épargne et de crédit. Les membres ont donc décidé de créer une coopérative de crédit où tant les groupements que les individus sont susceptibles d’ouvrir un compte d’épargne. Les membres peuvent également poser leur candidature pour obtenir des prêts appelés crédit et éducation, ce qui signifie qu’ils reçoivent une éducation de base sur les plans d’épargne et l’utilisation productive des fonds. Grâce à leur participation au réseau des coopératives de crédit, les membres accèdent plus facilement aux financements destinés aux investissements dans l’agriculture et peuvent éviter les taux d’intérêt élevés proposés par d’autres banques. En leur qualité de membre de KANBAOCU et de leur coopérative de crédit, ils accèdent aussi plus facilement aux aides financières publiques liées au COVID-19 et aux prêts à faible taux d’intérêt leur permettant de développer leurs entreprises.

De meilleurs moyens d’existence, une meilleure planète

Les revenus supplémentaires tirés de la nouvelle entreprise de fabrication de produits à base de karité ont considérablement aidé sa famille, mais Rita se réjouit plus particulièrement des réactions positives des acheteurs qui applaudissent son savon parce qu’il les aide à apaiser des maladies de peau comme l’eczéma. Elle espère maintenant agrandir son entreprise et acheter une machine pour couper le savon, ce qu’elle fait aujourd’hui manuellement. Enfin, elle désire développer son entreprise afin de pouvoir employer davantage de membres de sa communauté et, à terme, accéder au marché international.

Le Mécanisme forêts et paysans, un partenariat mis en place en 2012 entre la FAO, l’Institut international pour l’environnement et le développement, l’Union internationale pour la conservation de la nature et AgriCord, vise à renforcer les organisations paysannes et les organisations de femmes en milieu rural et à protéger les paysages locaux. En promouvant des moyens d’existence durables et en améliorant la résilience des communautés locales face au changement climatique, le Mécanisme forêts et paysans contribue à construire un avenir plus prospère et plus vert.

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