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Empêcher que l’histoire de l’alimentation ne tombe dans l’oubli


Comment les Systèmes Ingénieux du Patrimoine Agricole Mondial préservent les traditions

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Le programme Systèmes ingénieux du patrimoine agricole mondial (SIPAM) de la FAO reconnaît les paysages remarquables et les pratiques exemplaires qui ont résisté à l’épreuve du temps, qui s’adaptent au changement climatique, qui préservent la biodiversité et protègent l’environnement tout en garantissant la sécurité alimentaire des populations locales. ©Zhongshan Luo

17/04/2018

Nous parlons souvent de l'avenir de l'alimentation, mais que dire de son histoire? Dans notre vie quotidienne, nous ne réalisons pas toujours que certains de nos aliments de base proviennent de traditions agricoles extraordinaires qui sont profondément ancrées dans nos cultures et notre identité.

La production alimentaire a évolué et s'est améliorée de façon spectaculaire au fil du temps. Pourtant, certains des anciens modes de production de cultures ont beaucoup à nous apprendre sur la protection de l'environnement, sur la durabilité et sur l'adaptation aux effets du changement climatique. La conservation des ressources naturelles et le développement durable de l'agroécologie ne sont pas seulement des techniques visant à conserver ce que la terre nous a donné, ce sont également des façons de concevoir la manière dont les humains interagissent avec la nature. Il y a des communautés aux quatre coins du monde qui ont toujours pensé de cette façon, en utilisant leurs terres et en planifiant leurs activités agricoles en conséquence.

Le programme Systèmes Ingénieux du Patrimoine Agricole Mondial de la FAO vise à reconnaître et à préserver ces traditions qui combinent agriculture et patrimoine, durabilité et moyens de subsistance, sensibilité environnementale et adaptation aux effets du changement climatique. Actuellement, il existe 50 sites désignés dans 20 pays dans le monde. Cinq d'entre eux ont été nommés en 2018, y compris les premiers sites en Europe.

Voici trois denrées alimentaires dont l’histoire est fascinante et que le programme contribue à préserver:

1. Riz

Le riz est une culture extrêmement importante pour de nombreux pays dans le monde. Il constitue l’aliment de base principal de plus de la moitié de la population mondiale, l’Asie étant la principale région productrice et consommatrice. Toutefois, au cours de ces dernières années, le riz est également devenu un aliment de base important dans toute l'Afrique. Il est donc logique qu’un élément si important des régimes alimentaires et des vies de ces populations ait une histoire et une culture riches.

Rien qu’en Chine, il y a 5 sites de production rizicole que la FAO a reconnu comme étant des systèmes ingénieux du patrimoine agricole. L'un de ces systèmes sont les Rizières en terrasse des Hani de Honghe.Dans la province chinoise du Yunnan, le peuple Hani vit et travaille sur ces terres depuis plus de 1 300 ans.

Les Hani ont construit de superbes terrasses, couvrant 70 000 hectares de terre, sur les flancs escarpés de la montagne et y sont parvenus sans réservoirs d'eau. Le peuple Hani utilise et gère les ressources hydriques locales de manière innovante et efficace. Les terrasses ne sont pas uniquement une tradition agricole, elles constituent également une manière innovante et durable de cultiver des paysages complexes.

Les rizières en terrasse existent dans de nombreux pays et deux autres pays possédant des rizières en terrasses ont été reconnus comme abritant des systèmes ingénieux du patrimoine agricole: les rizières en terrasses irriguées de Gudeuljang, à Cheongsando, Corée et les rizières en terrasses de Ifugoa aux Philippines.

Nos denrées alimentaires et nos boissons, comme le riz et le thé, ont une longue histoire à laquelle nous n’avons peut-être jamais pensé ou que nous n’avons pas appréciée à sa juste valeur. L’histoire du thé commence il y a environ 5 000 ans alors que celle du riz commence bien avant, il y a 10 000/14 000 ans Gauche: Rizières en terrasses dans les régions montagneuses du sud de la Chine. ©Jiae Song Droite: Agrosystème traditionnel du thé Hadong en République de Corée. ©La région de Hadong, République de Corée

2. Thé

Le thé est la deuxième boisson la plus populaire après l'eau. Il fait également partie des plus vieilles puisqu’il a été consommé pour la première fois il y a environ 5 000 ans. Pour pousser, le thé a besoin de conditions particulières: un climat chaud et humide, une quantité spécifique de précipitations annuelles, des sols acides, un certain degré de pente et une altitude ne dépassant pas les 2 000 mètres. Cela signifie que le thé ne peut être cultivé que dans un nombre limité de sites dans le monde. Cela signifie également qu’il est très sensible aux changements climatiques.

Il y a trois systèmes de production de thé que la FAO a désigné comme étant des systèmes ingénieux du patrimoine agricole: L’agrosystème traditionnel de production de thé Pu’er en Chine, l’agrosystème de production de thé Hadong à Hwagae-myeon en Corée et leSystème intégré thé-herbe à Shizuoka au Japon. Ce dernier, le système thé-herbe, nous montre comment le fait de maintenir la biodiversité et de préserver les écosystèmes peut en réalité optimiser la production agricole.

Au Japon, la préfecture de Shizuoka constitue la plus grande région productrice de thé du pays. Le thé rapporte environ 31,9 milliards de YEN (soit environ 298 millions d’USD) par an et presque 80 pour cent des agriculteurs de la région sont tributaires du thé pour leur revenus. «Chagusaba» est une pratique agricole qui consiste à maintenir les herbages autour des champs de thé; ces herbages servent ensuite pour le paillage qui améliore la qualité du thé. Les hommes assurent l’entretien de ces zones Chagusaba depuis plus de 10 000 ans. Ce système est un parfait exemple de la codépendance mutuellement bénéfique. Les prairies semi-naturelles de cette zone abritent plus de 300 espèces différentes; pourtant, avec la modernisation de la société et de l'agriculture, ces prairies sont de plus en plus négligées et la biodiversité est en train de disparaître à un rythme alarmant.

Soutenir cette tradition Chagusaba signifie protéger la biodiversité des terres. Les versants des montagnes du Japon sont une mosaïque de champs Chagusaba et de champs de thé qui crée un paysage époustouflant et qui atténue l’érosion des sols et arrête le ruissellement des engrais. Les herbages augmentent également l’activité microbienne dans le sol contribuant ainsi à fabriquer des engrais naturels. Le thé ainsi obtenu possède un arôme distinct et est de couleur vert foncé. La manière de transformer le thé japonais dans cette région est devenue une tradition à travers le Japon.

Les dattes, qui sont une source d’énergie concentrée, ont permis aux hommes de survivre lors des traversées des vastes déserts ou de vivre dans des endroits secs et reculés. ©West Siwa Development Project

3. Dattes

Peu de cultures sont aussi intimement liées à l’histoire humaine que le palmier dattier. En effet, le palmier dattier a permis aux hommes de survivre lors des traversées des vastes déserts ou de simplement vivre dans des endroits secs et reculés. Les dattes sont un concentré d’énergie et pouvaient facilement être stockées et transportées pendant les longs voyages dans les déserts. Les palmiers dattiers servent de refuge pour des espèces sauvages et d’habitat pour les populations du fait de l’ombre qu’ils fournissent pour se protéger du désert torride et des vents. Même si les transports modernes et le commerce international signifient que désormais, même les régions les plus reculées ont accès à d’autres types de denrées alimentaires, les dattes sont demeurées un élément important des régimes alimentaires et des cultures d’un grande partie de la région Proche Orient et Afrique du Nord.

Désignés comme sites ingénieux du patrimoine agricole dans les Émirats arabes unis (UAE), les Oasis de dattiers palmiers de Al Ain et de Liwa sont des zones importantes de ressources génétiques pour le dattier palmier et pour les anciens systèmes d’irrigation «Aflaj» qui ont permis de produire des dattiers palmiers dans des conditions environnementales difficiles. L'ancien système Aflaj était constitué de canaux artificiels en surface et souterrains qui étaient utilisés pour recueillir les eaux souterraines, de source et de surface et pour les transporter, par gravité, jusqu’à un lieu donné. Leur source est le puits mère, qui alimente le canal principal par gravité. Toutefois, les systèmes Al Ain Aflaj sont désormais largement complétés par l'eau souterraine pompée.

Il existe environ 200 variétés de palmiers dattiers aux UAE. Le pays occupe la septième place des pays producteurs de dattes dans le monde et représente 6 pour cent de la production mondiale de dattes. Al Ain et Liwa sont au centre de la production de dattes de la nation.

La FAO les reconnaît, ainsi que d’autres oasis, parce qu'elles ont contribué à façonner les paysages des régions désertiques et permis à des communautés de s’y établir. Le palmier dattier, par le passé et à l’heure actuelle, joue un rôle important dans les moyens de subsistance et les cultures de ces pays. D’autres oasis exceptionnelles ont été reconnues comme étant des systèmes ingénieux du patrimoine agricole: Le système d’oasis dans les Montagnes de l’Atlas au Maroc, le système d’oasis de Ghout en Algérie, l’ Oasis de Gafsa en Tunisie ainsi que le système de production de dattes de l’Oasis de Siwa en Égypte.

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Liens utiles

En préservant les pratiques et les cultures traditionnelles, nous protégeons également la biodiversité et reconnaissons certains des sites incroyables qui ont perduré malgré les conditions difficiles, le changement climatique et la modernisation. Le programme reconnaît les traditions, les cultures et la diversité écologique tout en supportant le développement économique et social qui se traduit par des moyens de subsistance stables et décents.

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