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Ce n’est plus comme d’habitude dans le plus grand port de pêche d’Europe


En pleine pandémie de COVID-19, le port de Vigo, en Espagne, s’efforce de maintenir la chaîne de valeur de la pêche

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Normalement très actif, le plus grand port de pêche d'Europe - Vigo, en Espagne - vit des jours anormalement calmes. Le port est toujours ouvert, mais il doit se battre pour poursuivre ses activités pendant la pandémie COVID-19. ©FAO/Miguel Riopa

03/04/2020

Presque tous les jours, à 4h30 du matin, alors que la plupart des gens dorment encore, le plus grand port de pêche d'Europe - Vigo, en Espagne - est déjà en pleine activité.

En temps normal, des cris émanent de la multitude de travailleurs qui déchargent les conteneurs de poissons des navires amarrés sur le site de débarquement. Ils transportent ces poissons divers et variés vers une série d’ateliers de préparation sur place, où les conteneurs sont empilés en hauteur. A son poste de travail, maniant des couteaux aiguisés, une main d’œuvre qualifiée coupe et prépare les filets de poisson avec brio et en un temps record.

Dans les halles portuaires, des étiquettes de traçabilité avec codes-barres sont apposées sur chaque carton, indiquant clairement l'espèce de poisson, la méthode de capture et la zone de pêche de la FAO dans laquelle il a été pêché.

Et, alors que l’obscurité de la nuit entoure de silence cette ville côtière galiciennes, les grandes halles du port, elles, sont remplies à ras bord et transformées en espaces bruyants où les commissaires-priseurs concurrents crient dans leurs mégaphones. Ils chantent les prix en espagnol et en galicien, essayant d'inciter les clients à acheter les poissons empilés dans les cartons qui les entourent. Leurs mots se perdent dans la cacophonie des offres qui résonnent dans les salles alors que la foule se fraie un chemin autour des conteneurs chargés des richesses de la mer.

"La ville de Vigo vit pour son port", estime Corina Porro, déléguée de Vigo pour le gouvernement régional de Galice, en Espagne. "Une nuit à Vigo, c’est forcément le labeur dans les marchés aux poissons… C’est ça, la vie de Vigo, notre ville."

Mais aujourd’hui, nous ne vivons pas une époque normale.

En cette nouvelle ère de COVID-19 et de la nécessité de s'éloigner physiquement, qu'advient-il de cette ruche d'activités quotidiennes – les images, les odeurs, les sons et les mouvements incessants - qu'est le plus grand port de pêche d'Europe ?

L'Espagne est l'un des pays qui a été le plus touché par l'épidémie de COVID-19. C'est également le pays qui consomme les plus grandes quantités de poissons et de fruits de mer en Europe, avec environ 42,8 kilogrammes par habitant par an. 

Parmi les pays européens, l'Espagne consomme les plus grandes quantités de poissons et de fruits de mer. Cependant, en temps de crise, les comportement des consommateurs changent et les chaînes de valeur sont affectées. Le marché du poisson frais a été fo

Maintenir l’activité

Pour garantir que les aliments parviennent aux consommateurs, qui sont en grande partie mis en quarantaine chez eux, les chaînes d'approvisionnement doivent être maintenues. Par conséquent, le port de Vigo continue d'être opérationnel, tout en protégeant la santé et le bien-être de ses travailleurs tout au long de la chaîne de valeur de la pêche. Mais ce n'est pas une mince affaire.

"Nous avons adopté, dans la mesure du possible, la technologie du télétravail... de cette façon, nous n'avons pas réduit le personnel, même si nous avons réduit drastiquement sa présence dans les locaux du port. Cela fonctionne raisonnablement bien", décrit Enrique López-Veiga, président de l'autorité portuaire de Vigo. "Il y a très peu de travailleurs présents sur place, donc les exigences de distance interpersonnelle sont respectées. L'hygiène et le nettoyage constant sont également indispensables [pour être en conformité avec les nouvelles réglementations]".

"Le plus grand défi consiste à maintenir le port de Vigo pleinement opérationnel, en particulier en ce qui concerne le marché du poisson frais. Il s'agit d'une opération quotidienne, car le poisson congelé dépend moins de la commercialisation et du stockage au jour le jour".

Une consommation en crise

Partout dans le monde on se bat comme à Vigo. Toutes les chaînes de valeur de la pêche sont impactées. Le poisson fournit plus de 20 % de l'apport moyen en protéines animales par habitant pour 3 milliards de personnes, plus de 50 % dans certains pays moins développés, et c'est l'un des produits alimentaires les plus commercialisés au monde. L'impact sur les moyens d’existence des communautés de pêcheurs, la sécurité alimentaire, la nutrition et le commerce, en particulier dans les pays qui dépendent fortement du secteur de la pêche, devrait donc être important.

Outre les défis à relever dans le secteur de la pêche, la crise a également affecté le comportement des consommateurs et ce qu'ils achètent. Cela est particulièrement visible dans un pays comme l'Espagne, où la consommation de poisson est élevée.

"En raison des restrictions de mouvement, les clients ne vont plus sur les marchés, ce qui diminue la demande de poisson frais, notamment pour les produits à prix élevé comme les crustacés et les coquillages. Ce sont des produits que les consommateurs abandonnent rapidement en cas de crise", explique Mme López-Veiga. "Cela entraîne une baisse générale des prix payés aux producteurs, en particulier au secteur de la pêche artisanale et à petite échelle".

"Nous sommes heureux de constater les efforts impressionnants déployés par Vigo pour maintenir ses chaînes d'approvisionnement en produits de la pêche opérationnelles en ces temps difficiles", déclare Audun Lem, directeur adjoint du Département des pêches et de l'aquaculture de la FAO. "Les chaînes de valeur des pêches sont extrêmement longues, complexes et internationales, même en temps ordinaire. Nous apprécions les efforts extraordinaires entrepris dans le monde entier pendant la crise actuelle pour maintenir les chaînes d'approvisionnement ouvertes et pour faire en sorte que des poissons et des produits de la mer sains, composante essentielle de régimes alimentaires nutritifs, parviennent au consommateur final".

Le port de Vigo a travaillé main dans la main avec la FAO pour devenir un "port bleu", conjuguant durabilité environnementale et préservation des moyens d’existence de ceux qui travaillent dans le secteur. ©FAO/Miguel Riopa

Durable et solidaire

Grand défenseur de la pêche à petite échelle, le port de Vigo s'est efforcé, ces dernières années, d'innover et de promouvoir son rôle de "port bleu", en se concentrant sur la conservation de l'environnement marin, tout en améliorant les conditions socio-économiques et de travail de ceux dont l’existence dépend du port et de ses activités.

Vigo s'est associé à la FAO et à d'autres ports du monde entier pour créer un réseau de ports bleus durables, afin de se soutenir mutuellement via par exemple l'échange d'informations et la formation internationale dans des domaines tels que l'inspection des pêches.

En temps de COVID-19, ce réseau et cette collaboration portuaire permettent de partager les expériences en matière de réponse à la crise et, éventuellement, de rebondir une fois la crise résolue. 

Selon Mme López-Veiga, le port tire déjà les leçons de cette crise : "Nous pensons que le chemin parcouru par le port de Vigo, en matière de transparence, de traçabilité, de qualité et de durabilité, qui implique un degré élevé d'informatisation et de contrôle des systèmes, a facilité la mise en œuvre des mesures extraordinaires auxquelles nous sommes aujourd'hui confrontés. Cela réaffirme notre conviction de continuer à avancer dans cette voie à l'avenir".

Liens utiles

Le plus grand port de pêche d'Europe finira par résonner à nouveau avec ses activités et ses mouvements incessants. Vigo et son réseau de ports bleus contribueront à construire une chaîne de valeur de la pêche plus forte et plus résistante dans le monde entier.

Au milieu d'une crise de cette ampleur, les problèmes semblent souvent insurmontables, et la solidarité et le sens de la communauté peuvent être essentiels pour surmonter les difficultés à garantir la continuité de la chaîne alimentaire. Selon Mme López-Veiga, le soutien de la communauté a été essentiel pour permettre au port de mener à bien ses opérations au cours de ces semaines difficiles. "Au fil du temps, les parties prenantes sont de plus en plus conscientes de la nécessité de l'autodiscipline et de la solidarité. En ce sens, nous, à Vigo, pouvons être fiers de la façon dont les choses évoluent dans la communauté portuaire, qui reflète ce qui se passe dans tout le pays".

La FAO aide les pays à faire face à cette pandémie COVID-19. En fournissant des recommandations politiques sur divers domaines liés à l'alimentation et à l'agriculture et en offrant un portail pour partager les stratégies et les politiques nationales, la FAO s'efforce de garantir que les impacts de COVID-19 sur les secteurs de l'alimentation et de l'agriculture ne retombent pas uniquement ou irrévocablement sur les plus pauvres et ceux qui souffrent de l'insécurité alimentaire. La FAO veille à ce que ces voix soient entendues et se tient aux côtés des pays dans l’élaboration de leurs réponses pendant cette période difficile.

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