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Faire la lumière sur les zones d’ombre des océans


Un guide illustré de la FAO enrichit notre connaissance des poissons de l’océan Atlantique.

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Un guide illustré de la FAO aide les scientifiques et les chercheurs à identifier les poissons de la zone mésopélagique de l’océan, située entre 200 et 1 000 mètres de profondeur. © Rich Carey /shutterstock.com

22/12/2020

Bien en dessous de la surface de l’océan Atlantique, des objets brillants glissent dans des profondeurs d’un noir d’encre. En regardant de plus près, on distingue clairement un groupe de lanternules, poissons très particuliers qui tiennent leur nom de la faculté remarquable qu’ils ont de produire de la lumière.

Les lanternules ont de minuscules organes dits photophores dans lesquels il se produit une réaction chimique qui dégage une lumière d’origine biologique. Ces poissons vivent dans l’un des plus grands écosystèmes de la planète: la zone mésopélagique de l’océan, située entre 200 et 1 000 mètres de profondeur. Souvent, les lanternules se rassemblent en bancs, se serrant les unes contre les autres pour former des couches si compactes qu’elles peuvent réfléchir les faisceaux émis par les sonars. Pendant de nombreuses années, les océanographes ont pris ces couches de poissons pour le fond de l’océan!

Cette idée fausse n’est qu’un exemple parmi d’autres et montre à quel point il est important de connaître les formes de vie qui peuplent les profondeurs des océans. Rassembler des connaissances sur les créatures marines est un moyen de contribuer à une exploitation durable des ressources océaniques et à la protection du milieu marin.

C’est la raison pour laquelle le Programme EAF-Nansen, mis en œuvre par la FAO, a rédigé un guide d’identification entièrement illustré consacré aux poissons mésopélagiques de l’Atlantique Centre et de l’Atlantique Sud-Est. Cet ouvrage approfondi présente en détail 126 espèces de lanternules et 426 autres espèces de poissons vivant dans cette zone. Il est l’aboutissement du travail d’une équipe mondiale d’experts, de taxinomistes et de scientifiques et d’un illustrateur scientifique. Son élaboration ne représente qu’une partie des travaux de recherche consacrés aux ressources et écosystèmes océaniques que réalise le Programme.

Ces illustrations tirées du guide – Sternoptyx pseudodiaphana (à gauche) et Hygophum taaningi (Myctophidae Taning) (à droite) – représentent deux types d’espèces de poissons mésopélagiques vivant dans les profondeurs de l’océan Atlantique. © FAO

Pourquoi les poissons mésopélagiques sont-ils si importants?

Bien qu’ils vivent habituellement dans des profondeurs allant de 200 à 1 000 mètres, les poissons mésopélagiques se rapprochent de la surface de l’océan peu avant le coucher du soleil pour se nourrir, avant de replonger pour échapper aux prédateurs. Ils contribuent ainsi à la «pompe biologique», processus par lequel le carbone présent dans l’air est transporté vers les profondeurs océaniques. C’est l’une des différentes manières dont les océans captent et stockent le dioxyde de carbone atmosphérique. Sans cette pompe, la concentration de CO2 dans l’atmosphère serait deux fois supérieure à son niveau actuel. L’importance des poissons mésopélagiques n’est donc pas négligeable!

D’après plusieurs études récentes, les poissons mésopélagiques seraient le plus grand groupe de vertébrés au point de vue de la biomasse. Le secteur de la pêche a donc commencé à s’y intéresser et envisage de s’en servir comme nouvelle source de farine et d’huile de poisson. Il importe donc de bien comprendre ces espèces pour veiller à ce que l’intensification éventuelle de leur exploitation se fasse selon des méthodes durables et éviter de possibles répercussions négatives.

Plan serré du poisson mésopélagique Argyropelecus gigas (hache d’argent), étudié par les scientifiques. © Paul Clerkin

Le pouvoir des connaissances

L’identification exacte des espèces doit être le fondement de toute activité de recherche. Or, dans le cas des poissons mésopélagiques, cette tâche se révèle ardue en raison, d’une part, des légères différences qui existent entre les espèces et au sein de celles-ci et, d’autre part, de leur fragilité, qui fait qu’ils sont facilement endommagés dans les filets. Ce manuel a pour objet de remédier à ces difficultés.

Début 2019, les scientifiques à bord du navire de recherche du Programme EAF-Nansen, le Dr Fridtjof Nansen, ont pu mettre le guide à l’essai au cours d’une campagne de recherche sur les poissons mésopélagiques menée au large des côtes namibiennes. Le Dr Fridtjof Nansen appartient à l’Agence norvégienne de coopération pour le développement (Norad) et a ceci de particulier qu’il est le seul navire de recherche au monde à battre le pavillon des Nations Unies. Il est exploité par la FAO et l’Institut norvégien de recherche marine. Depuis 1975, il explore les zones océaniques les moins étudiées de la planète et aide les pays à rassembler les données scientifiques indispensables à une gestion durable de la pêche grâce à ses technologies de pointe.

Cette campagne de recherche était l’occasion d’améliorer le guide d’identification sur la base des données d’expérience des scientifiques.

Edoardo Mostarda, spécialiste de la pêche et de la biodiversité à la FAO et rédacteur scientifique du manuel, explique que «le manque d’outils permettant d’identifier des espèces de poisson peu connues mais importantes au plan écologiques au large des côtes de l’Afrique de l’Ouest fait obstacle au travail qu’accomplissent les scientifiques locaux pour faire en sorte que leurs ressources halieutiques soient gérées de façon durable. C’est pour combler ce manque que nous avons créé ce guide.»

Après y avoir apporté quelques ajustements, l’équipe a bouclé l’ouvrage, que les scientifiques peuvent à présent se procurer en ligne et en version papier.

Malgré des années de recherche scientifique, l’immensité des profondeurs océanique a encore beaucoup de secrets à nous révéler. En contribuant, depuis plus de quarante ans, à l’identification des ressource marines et au développement durable de la pêche, le Programme AEP-Nansen favorise l’amélioration de la sécurité alimentaire des populations et des pays côtiers. Nos océans et leurs écosystèmes resteront peut-être un mystère pendant plusieurs décennies encore, mais nous devons essayer d’en savoir le plus possible à leur sujet afin d’être mieux armés pour les protéger dans l’intérêt des générations futures.

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