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Au Paraguay, la culture d’une plante sacrée contribue à bâtir un avenir respectueux de l’environnement


Savoir ancestral et culture du maté au service de l’accélération des progrès accomplis dans la lutte contre le changement climatique

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Les peuples autochtones Ava Guaraní dans l’est du Paraguay récoltent depuis longtemps les feuilles du maté qui servent, en infusion, à produire une boisson caféinée particulièrement appréciée. Comme le maté est de moins en moins répandu en milieu naturel, cette communauté plante de nouveaux arbustes, avec l’appui de la FAO, afin de préserver l’environnement ainsi que les moyens de subsistance. ©FAO/Cristian Palacios

15/02/2024

Depuis des générations, les ancêtres d’Ariel Benitez – les Ava Guaraní, l’un des peuples autochtones vivant dans l’est du Paraguay – récoltent les feuilles vertes d’un arbuste, le maté, qui sont utilisées pour réaliser une infusion caféinée particulièrement appréciée en Amérique du Sud et ailleurs dans le monde. Mais le changement climatique a changé la donne, car le maté, dont les feuilles étaient traditionnellement récoltées dans son milieu naturel, est de moins en moins répandu. À Ka’atymiri San Francisco, à environ 230 kilomètres de la capitale Asuncion, Ariel et d’autres membres de sa communauté font désormais pousser de jeunes plants pour assurer leur récolte.

Plus de 1 500 plants ont été associés à d’autres essences indigènes qui sont importantes pour l’écosystème local et qui sont utilisées traditionnellement à d’autres fins (alimentation et santé).

«Ils [les arbustes] s’adaptent et poussent très bien. On voit bien qu’ils se développent sur un sol qu’ils connaissent», indique Ariel.

Les initiatives s’inscrivent toutes dans le projet PROEZA («Pauvreté, reforestation, énergie et changement climatique»), qui est mis en œuvre par le Gouvernement paraguayen avec l’appui de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et du Fonds vert pour le climat (FVC).

Ce projet de fixation du carbone vise à contribuer au reboisement de la région, à favoriser la nutrition des communautés autochtones et à les aider à accroître leurs revenus. Les familles utilisent les équipements et les machines qui leur ont été distribués et tirent parti d’une assistance technique utile à la plantation des arbustes et à l’entretien de leurs cultures.

«[L]e maté est une plante sacrée que nous consommons et que nous utilisons pour ses vertus médicinales naturelles», explique Ariel, dont la communauté est composée d’environ 25 familles. «Il est toujours présent lors des cérémonies religieuses.»

Désormais chef de la communauté, Ariel venait de naître lorsque sa famille s’est installée au milieu de 600 hectares de forêts et de yerbales (zone propice au développement du maté) dans le district de Capiibary (département de San Pedro).

La communauté reproduit depuis longtemps les techniques ancestrales que les peuples autochtones Ava Guaraní utilisaient avant que les Espagnols ne s’installent au Paraguay. Ces techniques, qui reposent sur la connaissance des cycles de la lune pour la taille et la récolte, le contrôle naturel des organismes nuisibles et des maladies et la conservation des sols, sont fiables et respectueuses de l’environnement.

Mis en terre en mai 2022, les jeunes plants de maté seront matures et pourront être récoltés dans quatre ans. D’après l’expérience acquise dans d’autres parties du pays, ils pourront, à ce stade, être exploités pendant plus de 60 ans. Grâce à un rendement moyen de 5 000 kg/hectare au Paraguay, les producteurs peuvent en tirer un revenu brut moyen de 1 100 USD par hectare et par an, ce qui représente un montant significatif pour les familles types de cette communauté.

Il est également important de noter que l’association du maté à d’autres essences, à l’abri de leur couvert végétal, contribue de manière notable à la préservation des forêts naturelles.

La communauté autochtone tire profit de la forêt à plusieurs égards (alimentation, santé et sources de revenus), mais le changement climatique et les activités humaines mettent en péril cet environnement. Le projet PROEZA vise à reboiser cette zone et à mettre en place des activités forestières durables qui permettent aux familles d’améliorer leurs revenus. ©FAO/Cristian Palacios

Un supermarché naturel

Les infusions de maté à l’eau chaude ou à l’eau froide sont consommées au quotidien dans les pays où la présence des Guaraní est répandue, comme le Paraguay. Cette plante appelée Ilex paraguariensis sous son nom scientifique est de plus en plus exportée vers d’autres pays aux quatre coins du globe et est principalement commercialisée sous forme de thé énergisant.

Le maté est loin d’être la seule ressource de la communauté d’Ariel. «La forêt, c’est notre supermarché. On y trouve tout ce qu’il faut: des remèdes, des aliments, des animaux sauvages, des fruits, etc.», indique Treli Gabriela Fernández, la partenaire d’Ariel, qui ajoute qu’ils sont déterminés à protéger et à développer les parcelles restantes de forêt. Pour y parvenir, ils appliqueront les savoir-faire traditionnels des anciennes générations et les transmettront à leurs quatre enfants, qui ont actuellement entre 3 et 12 ans.

«Nous sommes désormais exposés à des chaleurs extrêmes et à des vents très intenses, mais comme il reste encore un peu de végétation, nous en souffrons moins», explique Treli. «Le changement climatique nous désole, car il y a de moins en moins d’arbustes.»

Le projet PROEZA est utile à de nombreux égards pour le milieu naturel et présente de multiples avantages sur les plans environnemental, économique et culturel pour les communautés autochtones (création de possibilités de revenus, réduction des émissions de gaz à effet de serre, régénération des forêts, renforcement des pratiques spirituelles).

Le projet vise à mettre à profit les connaissances et les techniques ancestrales des peuples autochtones Ava Guaraní et à faire en sorte que les récoltes soient durables et respectueuses de l’environnement et assurent la protection à long terme des forêts et des populations qui vivent dans cet environnement. ©FAO/Cristian Palacios

Les hommes et les femmes de la communauté autochtone Ava Guaraní de Ka’atymiri San Francisco partagent les travaux agricoles. Selon eux, les périodes les plus difficiles sont celles où la production alimentaire est insuffisante à certains cycles de l’année ou celles où ils subissent des intempéries météorologiques. Pour aider cette communauté à y faire face, le projet PROEZA vise également à encourager la production de denrées alimentaires (haricots, maïs, pastèques, melons et manioc). Ainsi, les familles peuvent consommer ces produits et en tirer des revenus.

Même s’il reste beaucoup d’efforts à déployer pour développer le couvert forestier, notamment renforcer l’application de la législation environnementale, les communautés commencent à bénéficier des retombées positives du projet.

Les accomplissements de la communauté autochtone de Ka’atymiri San Francisco et les initiatives qu’elle mène actuellement en ce qui concerne la culture du maté montrent que l’intégration de l’agriculture dans son milieu naturel et son association à des savoirs ancestraux permettent de bâtir un mode de développement plus durable et plus respectueux de l’environnement.

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