FAO en République démocratique du Congo

Environ 22 millions de personnes en insécurité alimentaire en RD Congo

Photo _Carte des résultats du18ème cycle d’analyse du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC) /Paul Busambo
26/10/2020

La FAO appelle à une intervention urgente du gouvernement et autres partenaires techniques financiers pour assister les congolais en zones de crise

La situation de la sécurité alimentaire est très préoccupante en RD Congo, avec environ 22 millions de Congolais qui sont en situation d’insécurité alimentaire. Ces résultats issus du 18ème cycle d’analyse du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC) ont été présentés le jeudi 15 octobre 2020, à Kinshasa, par le Groupe de travail technique (GTT), en présence du Ministre de l’Agriculture, des Représentants de la FAO et du PAM, de la société civile, des délégués des différents ministères et des autres parties prenantes impliquées dans le secteur de la sécurité alimentaire dans le pays.

Le Représentant de la FAO, Aristide Ongone Obame, s’est réjoui de la franche collaboration entre  les parties prenantes ayant abouti aux résultats d’analyses présentés, tout en rassurant que la FAO et le PAM ne ménageront aucun effort pour soutenir techniquement et financièrement les analyses IPC en RDC. «Mon souhait est que ces résultats puissent rencontrer la ferme volonté des décideurs à prendre de bonnes décisions en faveur des Congolaises et des Congolais en situation de vulnérabilité », a-t-il renchérit.

A son tour, le ministre de l’Agriculture, Joseph Antoine Kasonga Munkuta, a assuré que le gouvernement congolais s’engage à ce que la RDC ne soit plus comptée parmi les pays avec un taux élevé de malnutris, d’ici quelques années. « Un plan de relance agricole est déjà mis en place. Il englobe 18 cultures et dont les quatre principales qui sont déjà inscrites dans le programme volontariste, à savoir, l’obligation de produire du riz, de maïs, de manioc et de haricot en premier lieu et les restes vont suivre » a-t-il expliqué.

Comprendre le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC)

L’IPC a été établi depuis 2007 comme un outil qui détermine l’état de la sécurité alimentaire en RDC en cartographiant les populations et les zones les plus affectées. Il s’agit d’un ensemble d’outils et de procédures qui permettent de classifier la sévérité de l’insécurité alimentaire et fournit des connaissances concrètes utiles à la prise de décision.

En effet, les populations de ces zones vulnérables ont besoin d’une assistance pour sauver des vies et restaurer les moyens d’existence des communautés fragilisées par des facteurs endogènes et exogènes au secteur de la sécurité alimentaire et de la nutrition.  Pour rappel, la FAO apporte un appui substantiel à l’ensemble des Groupes de travail technique dénommé (GTT) de l’IPC de nombreux pays,  particulièrement en RDC, et assume la responsabilité du secrétariat technique du Groupe aux côtés de la présidence assurée par le ministère de l’agriculture.

Résultats issus du 18ème cycle : IPC aigu en RDC

Les analyses du 18ème Cycle de l’IPC, allant de juillet à décembre 2020, ont couvert 23 provinces sur 26 que compte le pays, 85 territoires sur 145, 9 villes (Goma, Bukavu, Beni, Butembo, Mbuji-Mayi, Kananga, Kalemie, Zongo, Gbadolite) et 9 communes de la ville de Kinshasa (sur 25 communes) soit un total de 103 unités analysées.

Les résultats de ces analyses indiquent que 13 territoires ont été classifiés en phase d’urgence ou phase 4 de l’IPC et 68 en phase de crise ou phase 3 de l’IPC. Sur les 66,6 millions de personnes vivant dans les zones analysées, les résultats montrent que 21,8 millions sont confrontées à un niveau élevé d’insécurité alimentaire aiguë équivalent à la phase 3 et 4 de l’IPC, représentant ainsi 33% de la population analysée. Sur le nombre de personnes en insécurité aigue,   5,7 millions sont en situation d’urgence équivalent à la phase 4 de l’IPC.

Les personnes vulnérables touchées par l’insécurité alimentaire aiguë se retrouvent principalement dans les provinces de l’Ituri (soit 47%), du Tanganyika (45% des populations localisées dans 5 territoires sur 6), du Kasaï Central et du Kasaï représentant respectivement 44% et 43% de la population analysée. Par ailleurs, les zones classifiées en urgence (phase 4 de l’IPC) sont Kabongo (Haut-Lomami), Djugu et Mahagi (Ituri) ; Dimbelenge et Dibaya (Kasaï Central), Tshilenge (Kasaï Oriental) ; Fizi et Kalehe dans le Sud Kivu; et enfin, Kabalo, Kalemie, Manono, Moba et Nyunzu (Tanganyika).

Les facteurs aggravants de la situation de la sécurité alimentaire et nutritionnelle

La présence de groupes armés dans les provinces de l’Ituri, Nord-Kivu, Sud-Kivu, Maniema et Tanganyika a entraîné un important déplacement de populations et la fragilisation de leurs moyens d’existence.

Les mesures de restriction du COVID-19 prises par le gouvernement central pour limiter la propagation de la pandémie, notamment, la fermeture de toutes les frontières terrestres et aériennes, les restrictions des mouvements, d’une part, entre la capitale, épicentre de la pandémie et les provinces du pays et d’autre part, entre provinces affectées par la pandémie ainsi que les mesures de distanciation sociale ont eu un impact les activités agricoles et le commerce entre entités entrainant la hausse des prix des denrées alimentaires avec comme conséquences la réduction des moyens d’existence des populations rurales. Selon les moyennes provinciales, à cause du COVID-19, entre 61% et 86% des ménages des zones rurales ont une consommation alimentaire faible ou limite. Ces résultats sont corroborés par les enquêtes SMART de la nutrition, conduites en 2020, qui indiquent que cinq zones de santé (ZS) ont un taux de Malnutrition aiguë globale (MAG) supérieur à 10%.Il s’agit de Minembwe dans le Sud-Kivu, Manono et Ankoro dans le Tanganyika, Basankusu dans l’Équateur) et Bukama dans le Haut-Lomami. Deux autres zones ont une MAG supérieure à 15%, celle de Kamina et Bikoro.

Les actions recommandées

Au vu de la dégradation des moyens d’existence des ménages du fait des conflits, des aléas climatiques et d’autres facteurs spécifiques ; au regard des impacts liés au COVID-19 ; en vue de soutenir les populations potentiellement affectées, il est recommandé de, (i) fournir une assistance alimentaire immédiate pour accompagner les populations les plus vulnérables et les personnes à besoin spécifique dans la restauration de leurs moyens d’existence; (ii) mettre en place de programmes qui assurent un appui à la production agricole d’urgence et restaurer les moyens d’existence, renforcer les systèmes de production, particulièrement dans les zones affectées par les ravageurs des cultures; (iii) améliorer l’utilisation alimentaire et son impact sur la nutrition, en facilitant l’accès des populations à des sources d’eau potable.

L’urgence de la situation nécessite de prendre des mesures drastiques afin d’éviter d’aggraver la situation de l’insécurité alimentaire en RD Congo.