FAO en République démocratique du Congo

Des orientations politiques de réduction des pertes après récolte dans les filières céréales et légumineuses disponibles en RD Congo.

26/04/2017

Une trentaine d’experts du monde agricole, les représentants de la Confédération paysanne du Congo (COPACO), de la Confédération nationale des producteurs agricoles du Congo (CONAPAC) et des délégués des Agences des Nations Unies basées à Rome (FAO, FIDA et PAM) ont donné le 6 avril 2017, à Kinshasa, des orientations politiques, techniques et stratégiques et des recommandations pour la réduction des pertes alimentaires en RD Congo. C’était au terme d’un atelier auquel le Secrétaire Général à l’Agriculture, Pêche et Elevage, le Dr Léopold Mulumba et le Représentant a.i de la FAO, Monsieur Alexis Bonte ont personnellement participé.

Pertes après récolte une menace mondiale

Les pertes enregistrées tout au long des chaînes d’approvisionnement, de la récolte à la commercialisation, ont un impact négatif significatif sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle et les moyens d’existence des populations les plus vulnérables. Et dans un environnement où l’on projette la population à 9,1 milliards d’ici 2050, les études montrent la nécessité d’une augmentation de 70% de la demande alimentaire. Or, les études menées par la Banque mondiale en collaboration avec la FAO, estiment au niveau mondial les pertes totales des produits alimentaires à 1,3 milliards de tonnes/an. En Afrique subsaharienne elles sont évaluées à 48 milliards US/an alors que ces mêmes pertes pourraient combler les besoins alimentaires annuels de 48 millions de personnes.

La RD Congo  n’est pas épargnée

Pour une population estimée à 75 millions de personnes (Banque centrale, 2014) le nombre des populations rurales vivant de l’agriculture est estimée à 45 millions de personnes (soit 60%). Alors que la production agricole moyenne d’un paysan est estimée à  88 kg/an, la production totale est de 27 millions de tonnes/an. Or, les pertes alimentaires au niveau de la RDC sont évaluées à 30% de la production totale. Ce qui équivaut à 6 millions de tonnes, évaluées à 2 milliards de dollars US/an. Cela  représente plus de la moitié du budget national.

Pourtant, la consommation générale de la population congolaise tourne autour de 15 millions de kg/jour. Toutes ces pertes alimentaires peuvent  couvrir 16 jours de consommation de toute la population congolaise. Elles représentent 8000 hectares de terres arables perdues par an. Ce qui représente en valeur 3 ans du budget combiné des ministères de la Santé, de l’Agriculture, Pêche et Elevage, de l’Education et du Développement rural, selon les statistiques de la Banque centrale pour 2014.

Nécessité de réduire les pertes après récolte

Conscients de l’impact négatif des pertes alimentaires sur le revenu et la sécurité alimentaire du paysan, les Etats de l’Union Africaine se sont engagés, à travers la déclaration de Malabo, à réduire les pertes alimentaires à l’échelle de 50% d’ici 2025. Et c’est pour contribuer à cet objectif que s’inscrit l’action des Agences des Nations Unies basées à Rome, la FAO, le FIDA et le PAM, en étroite collaboration avec le ministère congolais de l'Agriculture, Pêche et Elevage à travers la mise en œuvre en trois ans du projet conjoint « Intégration des initiatives pour la réduction des pertes alimentaires pour les petits producteurs dans les zones à déficit alimentaire», Financé par le Gouvernement Suisse.

Le Secrétaire Général de l’Agriculture regrette que cet engagement soit encore peu pris  en compte dans les politiques et programmes de développement de notre pays. « Il est nécessaire de s’engager résolument à mettre en place des stratégies et des interventions techniques de réduction des pertes après récolte, à travers des reformes importantes, au-delà, des pratiques actuelles en termes de nouvelles politiques, programmes et initiatives efficaces allant dans le sens de l’engagement pris à Malabo », a précisé le Dr Léopold Mulumba.

Pour le Représentant de la FAO, les Agences des Nations Unies basées à Rome restent disposées à accompagner la RDC dans ses efforts de développement agricole. « Cet atelier va permettre au pays de disposer d’une note d’orientation politique pour la réduction des pertes alimentaires englobant des stratégies nécessaires pour y parvenir », a renchérit Alexis Bonte.

Note d’orientations politiques

En se basant sur  une étude des pertes alimentaires le long des chaînes d'approvisionnement de maïs et de riz effectuées dans le cadre du même projet, les participants ont discuté des causes des pertes après récolte en RDC et ont proposé une série de recommandations politiques et techniques visant à les surmonter. Une note d’orientation politique, préparée et partagée avec les participants avant l'atelier a abouti aux recommandations suivantes :

  • Consolidation de la Communauté des Praticiens

(i) Procéder à l’inventaire des bonnes pratiques (y compris les technologies) de récolte et de post-récolte locales et au partage de ces connaissances afin de permettre l’établissement et la vulgarisation des normes de qualité; (ii) Renforcer la participation des experts locaux aux plateformes d’échange, particulièrement à la Communauté des Praticiens; (iii) Promouvoir la recherche scientifique axée sur les innovations paysannes validées et renforcer les capacités techniques et financières des services de l’Etat en charge de la vulgarisation et du suivi. 

  •  Capitalisation et dissémination des résultats des évaluations sur le terrain et des pilotes

(i) Renforcer, structurer et assurer la promotion des organisations paysannes de producteurs à se doter d’infrastructures et équipement collectifs; (ii) Promouvoir les technologies adaptées aux conditions locales et encourager les entreprises privées/artisans locaux à les rendre disponibles auprès des petits producteurs; (iii) Assurer la vulgarisation des bonnes pratiques en utilisant des approches (champ école paysan et club d’écoute DIMITRA) ou autres outils de communication (vidéos, TV, document, théâtre, téléphone, enregistreur, radio communautaire); (iv) Renforcer les activités commerciales en encourageant la contractualisation entre les producteurs, les fournisseurs de technologies et les acheteurs des produits agricoles; en primant les entreprises privées qui auront réussi à vendre leur technologie chez les petits producteurs agricoles ; en créant un Système d’Information sur le Marché agricole (SIM) et organisant la filière autour de centrales d’achat accessibles et assurant la qualité des produits.

  • Soutien à l’élaboration de cadres politiques et réglementaires

(i) Intégrer la gestion des PAR dans les politiques et programmes à venir (politique agricole durable, PNIA); (ii) Augmenter le budget national alloué à l’agriculture; (iii) Appliquer les facilités fiscales, douanières et administratives sur l’importation d’intrants et d’équipements agricoles et l’exportation des produits agricoles contenues dans la loi sur les principes agricoles de 2012;

Un groupe de travail restreint interministériel va travailler sur la révision de la note d’orientation politique avant de la soumettre au processus de la validation.