FAO en République démocratique du Congo

Les communautés locales au cœur du reboisement participatif dans la province du Sud-Ubangi en République démocratique du Congo

Mme Annie Nubea en train d’arroser les plantules dans la pépinière de Boboyo ©Serge Mopasa
22/07/2024

Dans les provinces du Nord et du Sud-Ubangi, les conséquences de la déforestation, notamment la raréfaction des produits forestiers non ligneux, nuisent significativement à la production agricole et à l’alimentation des populations locales. Depuis 2016, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a lancé une ambitieuse initiative d’agroforesterie au profit de ces provinces, dans le cadre d’un programme de résilience conjoint avec le Programme alimentaire mondial, intitulé « Renforcement des chaînes de valeur des petits exploitants agricoles en République démocratique du Congo ». Ce programme a été financé à hauteur de 10,6 millions d’USD par le Gouvernement de Norvège. L’objectif principal est de restaurer la couverture forestière dans la région de l’Ubangi, tout en renforçant la production agricole des populations. Ceci par le biais d’une approche participative, plaçant les communautés locales au cœur de la mise en œuvre du présent programme.

Dans le village de Boboyo, au sein du territoire de Gemena dans la province du Sud-Ubangi, la FAO a soutenu les communautés locales grâce à la fourniture de 3 tonnes de semences (2 tonnes d’amarante, 300 kg de tomate et 500 kg de piment) à 52 organisations paysannes et 2 000 ménages. Ces intrants ont permis d’emblaver environ 54 ha de terres agricoles. De plus, les participants au projet ont été formés sur des pratiques clés, telles que l’installation et la gestion de pépinières, la gestion d’espaces maraîchers et l’association des cultures en agroforesterie. La FAO a également fourni des semences de cultures maraîchères (amarante, aubergine, gombo, piment et tomate) et vivrières (arachide, maïs, soja et riz) pour soutenir ces activités.  

Le projet de la FAO s’appuie sur la participation active des organisations paysannes de la région. « Chaque membre de la communauté identifie les plantules d’arbres utiles, les recueille et les apporte aux techniciens du Ministère de l’environnement et de la conservation de la nature qui encadrent la mise en œuvre du reboisement », explique M. Xavier Bangabutu, chargé de projet pour la FAO. Cet engagement direct des populations locales permet de valoriser leurs connaissances approfondies de la forêt et de son écosystème. « Nous connaissons très bien les différentes essences d’arbres de notre forêt, leurs usages et leurs périodes de fructification. Cette expertise locale est essentielle pour le succès du reboisement.», souligne M. Lucien Bembi, membre d’une organisation paysanne bénéficiaire.

Un des objectifs de la FAO consiste à la mise en place de pépinières d’arbres qui seront ensuite plantées directement dans les champs des organisations paysannes. Parmi les espèces ciblées, on trouve des arbres à chenilles, médicinaux, fruitiers et autres essences forestières fertilisantes. « Nous espérons que, grâce à la restauration de la forêt, nos petits-enfants auront la chance de retrouver notre enfance quand jadis, les différentes espèces abondaient dans nos forêts », se réjouit Mme Annie Nubea, membre d’une organisation paysanne et épouse du chef du village.

M. Léon Mopindo, né dans le village de Boboyo, se souvient du temps où la forêt était encore abondante, avec beaucoup de gibier, de produits ligneux et de fruits sauvages : « On s’amusait à observer les chimpanzés jouer sur les grands arbres juste derrière nos cases. Mais peu à peu, la forêt a laissé place à des champs de cultures vivrières, faisant disparaître la faune et la flore. Aussi, depuis quelques années, nous avions remarqué des phénomènes jamais vus pendant notre enfance. La pluie n’était plus au rendez-vous, il faisait de plus en plus chaud, et il n’y avait plus l’ombre des arbres pour se reposer ».

En outre, les activités de la FAO ont permis la mise en place de pépinières communautaires afin de produire et transplanter ces plants dans les zones agricoles. Les formations dispensées ont permis d’introduire des techniques de gestion durable des ressources naturelles et de conservation des forêts à partir d’essences forestières choisies par les bénéficiaires eux-mêmes. Ces techniques consistent notamment à restaurer la fertilité du sol à travers la mise en place de parcelles de maraîchage, de cultures d’arachide et de maïs en couloirs, avec des espèces légumineuses fertilisantes (soja, moringa, leucaena) et des essences utiles. Sur le site du village de Boboyo, une parcelle de reboisement avec des essences forestières de 10 ha, mise à disposition par les autorités locales, est en cours d’installation. Elle est visible et accessible et permettra ainsi d’inciter les populations à la culture de reboisement.

« C’est une approche gagnante pour nous tous : la forêt est restaurée et nos rendements agricoles s’améliorent grâce à l’agroforesterie. Fort de ce succès, le projet devrait être dupliqué dans d’autres régions de la République démocratique du Congo afin de contribuer à la reforestation, tout en renforçant la sécurité alimentaire locale et en valorisant les savoirs traditionnels des communautés locales. », conclut M. Bernard Tukutuku, membre d’une organisation paysanne bénéficiaire.