FAO en Tunisie

La FAO a initié la caravane de l’eau en Tunisie

03/08/2022

Tunis, juillet 2022.  La représentation de la FAO en Tunisie a mise en place sous le slogan « Chaque goutte compte » et dans le cadre du projet régional pour la « mise en œuvre de l’agenda 2030 pour l’amélioration de l’efficience et de la productivité de l’eau et de sa durabilité dans les pays du Proche Orient et de l’Afrique du Nord », fiancé par la caravane de l’eau, une activité de sensibilisation organisée pour initier un public large (étudiants, écoliers, agriculteurs, décideurs…) aux concepts de la durabilité de l’eau et le calcul de  l’empreinte en eau indirecte et directe.

La caravane a été lancée en marge de la célébration de la journée mondiale de l’eau, le 22 Mars dernier, et sillonnent depuis, les gouvernorats de la Tunisie à travers des journées de sensibilisation, rassemblant agriculteurs, écoliers et étudiants, et en proposant des actions simples et adaptées à chaque public dans le but de préserver cette ressource rare et précieuse.

Avez-vous penser à mesurer votre empreinte en eau ?

10 760 litres ! C’est la moyenne[1] de l’empreinte en eau par personne et par jour pour un habitant des pays du Proche Orient et de l’Afrique du Nord. Un chiffre qui contraste avec le stress hydrique que vit cette région où les ressources en eau douce sont parmi les plus faibles au monde.

Mais si la capacité humaine d’une personne est de boire entre 2 et 3 litres par jour comment peut-on atteindre ces chiffres ? La réponse est simple. L’eau est partout: dans la nourriture que nous consommons, les vêtements que nous portons, les moyens de transport que nous prenons ou encore tous types d’appareils électroniques que nous utilisons au quotidien à commencer par les smartphones qui ne nous quittent pas.

Sensibiliser pour la sauvegarde de cette ressource essentielle à la vie quotidienne, à l’agriculture et à la sécurité alimentaire d’une population en continuelle expansion est le challenge que s’est donné « La Caravane de l’Eau » et ce en touchant plusieurs catégories à travers des activités adaptées.

Le changement commence par les enfants !

A Jendouba, Tozeur, Kebili ou encore Kairouan, la caravane de l’eau a initié sur plusieurs arrêts « la classe de l’eau en plein champs ». A la suite de plusieurs activités ludiques, la cinquantaine d’élèves des écoles primaires avoisinantes rassemblés sous les palmiers, les oliviers et entre les épis de blé et d’orge, ont été guidés pour calculer leurs propres empreintes en eau directe et indirecte et intégrer les corrélations entre gaspillage alimentaire et gaspillage de l’eau.

L’empreinte en eau d’un produit donné étant égale au volume total d’eau douce utilisé directement ou indirectement pour produire le produit donné (alimentaire ou industriel), dans toutes les phases de sa fabrication et de sa transformation[2].

« Si 50 litres d’eau sont nécessaires à la production de la tomate que mes parents proposent dans la salade qui accompagne nos repas et que je mets systématiquement de côté pour être ensuite jetée à la poubelle cela veut dire qu’à moi seule je peux gaspiller jusqu’au 200 litres d’eau par semaine uniquement en gaspillant ma salade » Témoigne, débitée par ces chiffres, Rawan 11 ans écolière de la région de Jemna du gouvernorat de Kebili.

Comme Rawan, tous les écoliers de la classe de l’eau auront retenu au moins un chiffre qui les aura marqué: Jihad Alah, 10 ans originaire de région El Kodia à Jendouba n’oubliera certainement pas que le smartphone qu’il convoite tant nécessite 12 750 litres d’eau pour être produit. Iselm, quant à elle, du haut de ses 9 ans retient que presque 1 500 litres d’eau sont nécessaires pour planter, arroser, récolter, transformer et transporter son mets préféré le CHOCOLAT.

Suivant une méthodologie rodée (toolkit disponible sur ce lien), chaque classe de l’eau dans les différents arrêts est clôturée par une compétition de dessin et de coloriage. A travers cette activité baptisée « Dessine ton eau » la parole, comme les pinceaux, sont donnés aux enfants pour proposer avec une approche participative des solutions de valorisation et préservation de la ressource à leur échelle personnelle, leurs écoles, foyers et entourages.

La productivité de l’eau au cœur d’une agriculture intelligente face au climat

En Tunisie, comme c’est le cas pour toute la région NENA, l'agriculture est le premier consommateur d’eau. Elle utilise environ 85 pour cent de l'eau douce totale disponible[3]. C’est donc en étroite collaboration avec les instituts nationaux spécialisés pour les cultures vitales en Tunisie, que la caravane de l’eau s’est adressée aux agriculteurs. L’objectif premier étant, la promotion de bonnes pratiques agricoles pour booster la productivité de l’eau pour les différentes spéculations.

A chaque arrêt, un « walk and Talk » thématique a été organisé en faveur de centaine d’agriculteurs. Cela a été une occasion d’échanger autour de la préservation de la ressource entre les techniciens de l’institut national des grandes cultures (INGC) et les céréaliculteurs d’abord à Jendouba en Mai dernier. Ensuite, au mois de juin, la caravane s’est dirigée vers le sud du pays sous les palmiers dattiers en association avec le Centre Régional de Recherches en Agriculture Oasienne (CRRAO). Finalement, les échanges avec les oléiculteurs du centre du pays à Kairouan ont été organisés en partenariat avec l’Institut de l’Olivier (IO).

Les présentations orales, les démonstrations pratiques sur le terrain comme les discussions ont porté sur plusieurs aspects spécifiques à chaque spéculation notamment la connaissance des données météorologiques et des besoins en eau des plantes pour un usage rationnel de l’eau, la gestion durable des sols pour une meilleure productivité de l’eau ou encore l’initiation aux outils d’aide à la décision et nouvelles technologies qui permettent à l’agriculteur une gestion personnalisée de l’irrigation de ses parcelles.

En s’adressant aux céréaliculteurs de Jendouba, M. Anis Bousselmi, Expert en irrigation et agriculture de précision à l’INGC propose à travers l’application mobile de gestion de l’irrigation « Irey », développée par l’institut depuis 2015 et mise à jour depuis, une solution sur mesure garantissant à la fois une productivité améliorée et une préservation des ressources en eau. « Elle permet aux agriculteurs de s’inscrire à une plateforme en ligne même via les réseaux sociaux et recevoir, de ce fait, des notifications et des recommandations personnalisées concernant les périodes d’irrigation et les quantités nécessaires réduisant ainsi les coûts liés à l’irrigation » explique-t-il.

M. Kamel Gargouri, responsable à l’Institut de l’Olivier, a quant à lui introduit la session de débat avec la centaine d’oléiculteurs présents membres des écoles champs paysans de la région de Kairouan en mettant l’accent sur l’importance de la sensibilisation continue pour la valorisation des ressources en eau. « Cet échange avec les agriculteurs sur terrain est plus que nécessaire. Il permet la dissémination du paquet technique nécessaire à la bonne gestion des oliviers et le transfert/démocratisation des acquis de recherche optimisant ainsi la productivité en étant surs que CHAQUE GOUTTE D’EAU PARTE A SA PLACE » souligne-t-il.  

Pour Mme. Latifa Dhaouadi, experte en gestion de l’irrigation au Centre Régional de Recherches en Agriculture Oasienne, préserver les ressources c’est aussi savoir innover et adopter ses innovations. « Les deux sessions d’échange organisées dans le cadre de la caravane de l’eau à Kebili comme à Tozeur sont une occasion de plus de présenter aux agriculteurs des techniques d’irrigation intelligentes, innovantes et surtout adaptées au milieu oasien comme les barboteurs: Cette technique correctement adoptée améliore non seulement la productivité mais également la qualité des dattes. » explique-t-elle. « Ces initiatives sont également au cœur de la stratégie de l’Etat qui met à la disposition des agriculteurs des mécanismes de financement incitatifs pour la préservation de l’eau qui peuvent avoisiner les 60 pour cent. » ajoute-t-elle.

La FAO en appui aux start-uppeurs champions de l’innovation pour l’agriculture

Sensibiliser ? Oui. Agir ? Encore mieux ! Consciente de l’importance d’agir, la caravane a assuré son premier arrêt au Technoparc de la Mannouba, le 29 Mars, en collaboration avec « Smart Tunisian Technoparks » à la rencontre de jeunes start-uppeurs dont les projets proposent des solutions innovantes, ambitieuses et qui contribuent surtout à la valorisation et la préservation des ressources.

Sous le slogan « Les nouvelles technologies au service de l’agriculture: l’eau une opportunité d’innovation », la session d’échange a intégré les présentations notamment de la startup Dam-Guardian qui ambitionne de produire un robot responsable de la surveillance, du contrôle et de l’entretien des barrages et capable de prévenir leur dégradation sur le long terme.

Youfeed, le jeune projet d’entreprenariat social, d’un groupe d’étudiants d’Enactus IHEC Carthage propose, quant à lui, un fourrage concentré de produits 100 pour cent locaux basé sur un processus de valorisation des déchets de dattes et qui représente une alternative aux produits importés onéreux et polluants.

La caravane de l’eau trace son chemin

Après plusieurs arrêts dans les différentes régions de la Tunisie, la caravane de l’eau poursuit son chemin et ambitionne de toucher encore plus de monde toujours sous la campagne « CHAQUE GOUTTE COMPTE » implémentée sous l’ombrelle de l’initiative régionale de la FAO sur la rareté de l’eau et financée par l’Agence suédoise de coopération internationale pour le développement (Sida).

Car dans un pays qui vit un stress hydrique important, à l’image de toute la région, où les ressources en eau ont diminué des deux tiers au cours des 40 dernières années et devraient encore baisser de plus de 50 pour cent d'ici 2050: L’eau est plus que jamais la VIE, la NOURRITURE, VOTRE responsabilité et la NOTRE !



[1] The world Counts, 2022

[2] Water Footprint Network, Water Resource Manage 2007