COMITÉ DES PRODUITS

GROUPE INTERGOUVERNEMENTAL
SUR LA VIANDE

SOUS-GROUPE DES CUIRS ET PEAUX

Sixième session

Le Cap (République sud-africaine)
9 - 11 novembre 1998

PROJECTIONS JUSQU'EN 2005


Table of Contents


I. INTRODUCTION

1. L'industrie mondiale des cuirs et peaux, du cuir tanné et des produits en cuir a beaucoup évolué depuis 15 à 20 ans. Au cours de cette période, les tanneries et industries du cuir se sont délocalisées vers les pays en développement où les coûts de fabrication sont moins élevés. De nombreux pays en développement, conscients du potentiel économique de leurs cuirs et peaux bruts, ont fait de gros efforts pour développer ces industries.

2. Les cuirs et peaux sont avant tout des sous-produits de l'industrie de la viande. Par conséquent, leur production ne suit guère l'évolution de la demande de cuirs et peaux. Les déséquilibres entre l'offre et la demande de cuirs et peaux ont souvent entraîné d'importantes fluctuations des prix. Ce groupe de produits se caractérise aussi par son extrême hétérogénéité. On s'intéresse de plus en plus à des peaux exotiques provenant d'animaux sauvages, de reptiles, de poissons, etc. outre la source traditionnelle de cuirs et peaux que sont les animaux d'élevage. Les présentes projections ne couvrent toutefois que les cuirs et peaux dérivés des animaux d'élevage ci-après: bovins et veaux, moutons et agneaux, et chèvres et chevreaux. La demande de cuirs et peaux a été modélisée en fonction des revenus des consommateurs, de la population, et des tendances passées de la consommation. On a pris pour hypothèse que toutes les peaux produites seront utilisées par l'industrie des tannages et que la demande de cuirs n'a pas d'incidence directe sur la production de cuirs et peaux. L'offre de cuirs et peaux dérive de la production de viande projetée jusqu'en 2005 telle qu'elle résulte du Modèle alimentaire mondial.

II. OFFRE

3. La tendance de la production mondiale de cuirs et peaux de bovins a été en légère hausse ces dix dernières années, au taux moyen annuel de 0,7 pour cent par an. La production mondiale devrait augmenter de 0,8 pour cent par an pour atteindre un niveau record d'environ 5,8 millions de tonnes en 2005. L'analyse des changements intervenus dans la production laisse penser que la croissance relativement rapide dans les régions en développement sera partiellement compensée par une baisse de la production dans les pays développés.

4. La production de cuirs et peaux de bovins dans les régions développées baissera d'environ 0,4 pour cent par an d'ici 2005, pour s'établir un peu au-dessus de 2,7 millions de tonnes, ce qui correspond à une baisse du nombre de bovins abattus du fait de la réduction des troupeaux et de la poursuite de la tendance des consommateurs à préférer la viande de volaille à la viande rouge. Dans les pays développés, la production de la Communauté européenne devrait baisser plus vite que dans les années 90 du fait de la contraction de la demande de viande de boeuf. La production de cuirs de bovins en Amérique du Nord devrait aussi baisser d'ici 2005 en raison de la réduction des abattages aux Etats-Unis. Dans les pays de l'ex-URSS et dans certains pays d'Europe orientale, les changements structurels et, dans certains cas, la perte de marchés étrangers, ont entraîné une contraction de la demande de produits d'élevage dans la deuxième moitié des années 90. Il en résulte que le cheptel bovin devrait diminuer et que les abattages n'atteindront pas leurs niveaux des années 90. Par conséquent, la production de cuirs devrait baisser d'environ 1 pour cent par an. Par contre, en Océanie, les abattages de bovins devraient reprendre par rapport à la période de stagnation du début des années 90, essentiellement à cause d'une inversion de la tendance antérieure à la baisse de la production de viande bovine. Il en résulte que la production devrait augmenter d'environ 1,3 pour cent par an.

5. La production de cuirs et peaux de bovins dans les pays en développement devrait, selon les prévisions, augmenter de 2,1 pour cent par an pour atteindre plus de 3 millions de tonnes en 2005, du fait de l'accroissement de la demande de viande. La part de la production de cuirs des pays en développement dans le total mondial devrait atteindre près de 53 pour cent d'ici 2005. L'augmentation la plus forte devrait avoir lieu en Asie, encore que la crise financière dans cette région risque de ralentir la croissance dans certains pays. La consommation de viande de boeuf par habitant en Asie augmente rapidement dans de nombreux pays, en particulier en Chine et en République de Corée. De plus, en République de Corée, la viande de boeuf est celle qui remplace de préférence les produits de la mer qui se font de plus en plus rares. L'Asie continuera donc à être une source majeure de cuirs, sa part dans la production mondiale passant de 19 pour cent en 1994 à 26 pour cent en 2005.

6. En Afrique également, la consommation de viande de boeuf augmente vite et, compte tenu de la collecte plus efficace de cuirs et des programmes visant à améliorer les techniques de dépouille et de conservation, on s'attend à une croissance d'environ 2 pour cent par an de la production de cuirs qui devrait atteindre 364 000 tonnes d'ici 2005. La hausse de la production de cuirs et peaux de bovins devrait se poursuivre en Amérique latine et dans les Caraïbes, encore qu'à un rythme beaucoup moins soutenu car les consommateurs vont sans doute diversifier leur schéma de consommation et se tourner vers d'autres viandes.

7. La production mondiale de peaux de moutons et de chèvres devrait augmenter de 1,9 pour cent par an pour atteindre plus de 700 000 tonnes d'ici 2005.

8. Les pays en développement continueront à élever plus des deux tiers des troupeaux de moutons et de chèvres dans le monde, et leur part de la production mondiale de ces peaux devrait se développer pour atteindre près de 69 pour cent d'ici 2005. Cela s'explique par une productivité accrue, des programmes permanents d'amélioration des normes d'élevage et d'utilisation des produits d'élevage, en particulier dans les pays où ces articles servent à la production de cuirs légers et d'accessoires en cuir. La région Extrême-Orient devrait continuer à être le principal fournisseur de peaux brutes de moutons et de chèvres.

9. On prévoit que l'abattage de moutons et de chèvres dans les pays développés va diminuer, en raison de la réduction des troupeaux. Par conséquent, l'offre totale de peaux de moutons et de chèvres devrait aussi baisser marginalement. Le taux de déclin en Océanie, principale zone d'exportation des pays développés, devrait se ralentir, même si l'élevage du mouton reste affecté par les perspectives peu dynamiques du secteur de la laine. Par contre, dans les pays de l'ex-URSS, la production de peaux de moutons et de chèvres devrait reprendre, grâce à la demande accrue de viande de mouton.

III. DEMANDE

A. DEMANDE D'ARTICLES EN CUIR

10. Les estimations de la consommation de cuirs et de produits en cuir utilisées dans la présente analyse sont tirées des données sur la production et le commerce international1. Ces données sont exprimées en équivalent cuirs et peaux bruts.

11. La demande mondiale de cuirs et produits en cuir (en équivalent brut) devrait continuer à se développer d'ici 2005 du fait de l'augmentation des revenus et, dans une moindre mesure, de l'accès plus large aux produits industriels, y compris le cuir et les chaussures en cuir, tel que convenu dans le cadre du Cycle d'Uruguay. La demande devrait croître à un taux supérieur à celui des années 90 et dépasser celui de la production, ce qui laisse penser que les prix continueront à se raffermir. Toutefois, le taux de croissance projeté de la demande varie selon les régions, ce qui correspond à l'évolution des styles de vie et à l'incidence variable de facteurs tels que l'augmentation des revenus et de la population et la préférence des consommateurs pour des produits en cuir véritable. Au niveau mondial, les chaussures resteront sans doute, et de loin, la principale utilisation finale des cuirs et peaux et, par conséquent, les perspectives de la demande de chaussures en cuir continueront à déterminer, dans une large mesure, la demande totale de cuirs et peaux, malgré une augmentation de la part des cuirs consacrée à d'autres utilisations finales telles que les vêtements et l'ameublement.

12. Dans les pays en développement, la demande de cuirs et d'articles en cuir devrait augmenter même si, au moins à court terme, cette hausse risque d'être freinée par les effets de la crise financière en Asie. Evaluée à 1,1 pour cent, la croissance de la demande serait supérieure à celle des pays développés où elle atteindrait 0,6 pour cent par an. Néanmoins, les régions développées représenteront encore 54 pour cent de la consommation mondiale de cuirs projetée en 2005. Les consommateurs les plus aisés continueront à exiger des produits de haute qualité. Par conséquent, la demande de cuirs et de produits en cuir devrait augmenter dans les pays développés, en particulier en Amérique du Nord et dans les pays d'Europe qui ont des tanneries et des industries du cuir établies de longue date.

B. DEMANDE DE CUIRS ET PEAUX BRUTS

13. Les tanneries et industries de produits en cuir des pays en développement ont beaucoup évolué depuis une vingtaine d'années. La quantité de cuirs et peaux bruts exportés par ces pays a baissé, et des quantités accrues de cuirs finis sont transformées sur place en articles en cuir, chaussures et autres produits en cuir pour le marché intérieur et l'exportation. La capacité des tanneries et des industries du cuir des pays en développement devrait continuer à croître d'ici 2005 en Asie, surtout en Chine, en Inde et au Pakistan, et en Amérique latine. Toutefois, il semble assez improbable que les pays exportateurs d'Asie atteignent les taux de croissance rapide des années 90: en effet, les conséquences négatives de la crise financière asiatique devraient ralentir la croissance de la capacité de transformation et de fabrication dans un certain nombre de pays consommateurs d'Asie pendant plusieurs années.

14. L'augmentation des coûts de production, due en partie à une législation et à une réglementation de protection de l'environnement plus restrictives, devrait encore réduire les activités de traitement des cuirs dans les pays développés. Toutefois, en Europe orientale, où les coûts de production sont plus faibles qu'en Europe occidentale, le secteur des tanneries et des industries du cuir, en particulier les fabriques de chaussures, devrait se développer.

IV. ÉCHANGES COMMERCIAUX

15. Le schéma des échanges de cuirs et peaux de bovins, de cuir tanné et de produits en cuir (en équivalent brut) a beaucoup évolué au cours des 20 dernières années. Au début des années 80, les pays en développement dans leur ensemble étaient importateurs nets de produits des pays développés. Dans les années 90, ils sont devenus exportateurs nets, et leurs exportations nettes devraient continuer à se développer encore dans la décennie à venir. En particulier, les exportations d'Amérique latine et d'Afrique devraient augmenter d'ici 2005. L'Asie dans son ensemble est un importateur net, un certain nombre de pays de la région important aussi des matières brutes également pour les transformer et les réexporter.Toutefois, comme la production intérieure dans cette région devrait, selon les projections, continuer à se développer plus vite que la consommation, les besoins d'importations nettes devraient diminuer d'ici 2005.

16. Parmi les régions développées, l'Amérique du Nord restera un grand exportateur net, et ses exportations ne devraient augmenterque très légèrement. Les besoins d'importation des pays d'Europe devraient continuer à augmenter, car la consommation continue à croître et la production diminue.

17. Les pays en développement sont, en tant que groupe, exportateurs nets de peaux de moutons et de chèvres. Leurs exportations nettes devraient augmenter de 1 pour cent par an d'ici 2005 car la croissance de la transformation des peaux est plus rapide dans les pays en développement que dans les pays développés.

18. Dans les régions en développement, l'Afrique sera le seul exportateur net important en 2005. Par contre, l'Amérique latine et l'Asie deviendront de plus en plus importateurs nets car la consommation dans cette région devrait se développer plus vite que la production. Dans les régions développées, l'Europe devrait rester le plus gros importateur de peaux de moutons et de chèvres et de produits dérivés, tandis que l'Océanie restera l'exportateur dominant. Toutefois, dans les deux cas, les volumes continueront à fléchir.

V. PRINCIPAUX PROBLÈMES ET
QUESTIONS DE DÉVELOPPEMENT

19. Les cuirs et peaux et leurs produits dérivés sont une source majeure de gains à l'exportation pour les pays en développement, passant de 2 milliards de dollars E.-U. en 1980 à environ 16 milliards de dollars E.-U. en 1995. La valeur totale du commerce des cuirs et peaux, cuir tanné et produits en cuir dépasse celle de la viande et représente près de 40 milliards de dollars E.-U. Pour certains pays, les exportations de cuirs et peaux sont particulièrement importantes. En Ethiopie, par exemple, ce groupe de produits est la deuxième source de gains à l'exportation. Au cours des 20 dernières années, comme les cuirs et peaux des pays en développement font de plus en plus l'objet de transformations avant leur exportation, la part des pays en développement dans la valeur mondiale des exportations est passée de 20 à plus de 40 pour cent.

20. Néanmoins, il est encore possible pour de nombreux pays en développement, en particulier en Afrique, d'accroître les bénéfices tirés de ces produits. Malgré les efforts déjà déployés pour améliorer la qualité des cuirs et peaux et réduire le gaspillage, des pertes considérables sont encore imputables à la non-utilisation de cette matière première précieuse, ainsi qu'aux dégâts provoqués aux cuirs et peaux du fait de la gestion médiocre des troupeaux, des maladies, et des traitements inadéquats pendant et après abattage. Des efforts visant à introduire le classement et la fixation appropriés des prix des matières premières sont nécessaires pour encourager un taux plus élevé de collecte et un plus grand souci de la qualité dans les pays d'Afrique et autres pays en développement.

21. Les échanges commerciaux de cuirs et peaux et produits dérivés n'atteignent pas tout leur potentiel dans certains pays du fait d'obstacles au commerce, y compris des tarifs douaniers à l'importation, taxes à l'exportation, contingents et interdictions visant les exportations. Les Accords du Cycle d'Uruguay ont réduit les tarifs douaniers sur les cuirs et pour les fabricants de cuirs dans de nombreux pays consommateurs. Cela devrait se traduire par un élargissement des débouchés de ces produits et stimuler la transformation, la fabrication et les échanges. Cependant, les taxes à l'importation de produits en cuir dans de nombreux pays restent élevées si on les compare à celles frappant d'autres biens, et des négociations visant à réduire encore ces taxes auront sans doute lieu dans le prochain cycle de négociations commerciales.


1) Les données sur la consommation de cuirs et de produits en cuir ne sont pas facilement disponibles, et celles concernant la consommation apparente ont été estimées à partir de la production ajustée compte tenu des exportations et des importations. Toutefois, les chiffres mondiaux du commerce des produits en cuir autres que les chaussures ne sont pas disponibles. Par conséquent, les estimations de la consommation reposent sur les échanges de cuirs et peaux bruts, de cuirs et de chaussures en cuir, mais pas sur les autres produits en cuir. Ces estimations seraient faussées pour les pays qui exportent ou importent des quantités importantes de produits en cuir autres que les chaussures. Compte tenu de ces difficultés, les estimations de la consommation ont été ajustées pour refléter l'hypothèse selon laquelle, au niveau mondial, la consommation est égale à la production.