1. Comment le temps et le climat sont-ils définis?
2. Dans quelle mesure le climat de la terre a-t-il varie au cours de l'histoire géologique?
3. Quels changements sont intervenus dans le climat de la terre depuis le début de l'histoire de l'humanité?
4. Quels facteurs peuvent provoquer des changements dans le climat de la terre?
Le temps est la condition atmosphérique dominante dans une zone à un moment déterminé, se traduisant par la chaleur ou le froid, un ciel clair ou nuageux, la sécheresse ou l'humidité, le vent ou le calme.
Le climat, selon la définition de l'Organisation météorologique mondiale (OMM) est la "synthèse des conditions météorologiques dans une région donnée, caractérisée par les statistiques à long terme des variables de l'état de l'atmosphère". Les changements saisonniers comme le passage de l'hiver au printemps, à l'été et à l'automne dans les zones tempérées et de l'humidité à la sécheresse dans les régions tropicales font aussi partie du climat.
Le climat joue un rôle essentiel dans la répartition des végétaux et des animaux et dans la formation des sols, par le jeu de l'altération des matériaux géologiques et de la décomposition ou de la conservation de la matière organique.
Si le climat de notre planète a été suffisamment stable pour entretenir la vie pendant des millions d'années, le climat est dynamique et sujet aux changements. Les donnés fournies par les fossiles et d'autres indicateurs comme le diamètre des cernes des arbres, les taux de croissance des organismes marins et les types de végétation révélés par les pollens fossiles,
prouvent clairement que le climat de la Terre a été caractérisé par des périodes de temps chaud et de temps froid dès son origine (Fig. 1.1). Par exemple, il y a plus de 230 millions d'années, vers la fin du Paléozoïque, les glaciers recouvraient la plus grande partie des tropiques actuels. Cependant, durant une bonne partie du Mésozoïque, alors que les dinosaures et d'autres reptiles dominaient la Terre (il y a 180 millions à 65 millions d'années), les températures étaient beaucoup plus élevées qu'elles ne le sont aujourd'hui.
Au cours du dernier million d'années, le climat de la Terre a été caractérisé par de longues périodes de temps froid durant lesquelles les glaciers continentaux couvraient de vastes surfaces. Chacune de ces périodes durait de 80 000 à 100 000 ans et elles étaient entrecoupées par des périodes plus brèves de temps plus chaud, de 10000 à 15000 ans chacune. Au dernier maximum glaciaire, il y a environ 18000 ans, le niveau des océans était inférieur de 130 m à celui d'aujourd'hui. A cette époque, les Bahamas étaient une énorme masse de terres émergées et la région sahélienne de l'Afrique était un désert. Les glaciers continentaux commencèrent à se retirer il y a à peu près 10 000 ans. Il y a environ 6 000 ans, alors que les glaciers étaient encore en phase de retrait, la Terre est entrée dans une période durant laquelle les températures moyennes étaient à peu près égales à celles d'aujourd'hui mais avec des étés légèrement plus chauds et des hivers plus froids. Les précipitations augmentèrent dans le Sahel africain et le niveau du Lac Tchad monta jusqu'à plus de 40 m au-dessus de celui d'aujourd'hui. En Afrique, les civilisations étaient considérablement plus avancées qu'en Europe. Les plaques de glace continuant à se retirer vers le nord, le Sahel devint à nouveau une région à faible pluviosité, ses zones septentrionales étant envahies par le désert du Sahara.
De nombreux scientifiques estiment que la période de températures relativement douces dont nous bénéficions aujourd'hui finira par conduire à une autre ère glaciaire (Easterling, 1990; Harrington, 1987).
Figure 1.1 - Tableau général des variations de températures et de précipitations au cours de l'histoire géologique. Les courbes indiquent les écarts aux moyennes globales actuelles. En noir, périodes plus froides que la période actuelle. Les tirets indiquent des données fragmentaires (Source: Goodess et al, 1992).
D'après les données historiques, au cours des 1100 dernières années, la terre a connu des variations climatiques, du moins à l'échelon régional, suffisamment stables et d'assez longue durée pour être considérées comme des changements climatiques (Easterling, 1990).
Durant la période de l'histoire de l'Europe connue sous le nom de Moyen Age, un climat chaud, qui a duré à peu près de 900 à 1200 après J.-C. a dominé la plus grande partie de l'Europe; il fut appelé Optimum Médiéval. Cette période a permis à l'homme de s'installer dans des régions qui seraient aujourd'hui considérées comme trop rudes sur le plan climatique. Durant l'Optimum Médiéval, on cultivait l'avoine et l'orge en Islande et la vigne prospérait dans le sud de l'Angleterre. Les forêts canadiennes s'étendaient beaucoup plus loin vers le nord qu'elles ne le font aujourd'hui, les colonies agricoles prospéraient dans les hautes terres du nord de l'Ecosse et une colonie viking était établie au Groenland.
L'Optimum Médiéval se termina au XIIIe siècle et fut remplacé par 600 années de refroidissement prononcé. Le froid s'intensifiant, cette période est devenue connue sous le nom de Petit Age Glaciaire. La couverture de neige et de glace n'avait jamais été aussi étendue depuis le Pléistocène et ses immenses glaciers. Les colonies vikings qui existaient au Groenland entre 985 et 1500 après J.-C. disparurent. Les forêts d'Amérique du Nord se retirèrent vers le sud et, dans le nord de l'Europe, les canaux étaient souvent gelés pendant tout l'hiver, bloquant les transports par voie d'eau.
Encadré 1.1 Sécheresses historiques en Californie et en Patagonie. Tandis que l'Europe jouissait de l'Optimum Médiéval, d'autres régions du monde souffraient de toute évidence d'une sécheresse prolongée. Selon une étude achevée récemment, comprenant l'analyse d'anciennes souches d'arbres submergées, la région de la Californie actuelle, aux Etats-Unis, a connu deux sécheresses longues et sévères pendant la plus grande partie de l'Optimum Médiéval. Celles-ci ont été séparées par une période d'humidité inhabituelle de durée Inférieure à un siècle. La première de ces sécheresses a duré plus de deux siècles. La deuxième a persisté plus de 140 ans, El est démontré que la Patagonie, en Amérique du Sud, a également été touchée par ta sécheresse durant cette période. Les sécheresses en Californie ont peut-être été provoquées par un déplacement vers le nord des orages d'été. La Californie compte aujourd'hui 30 millions d'habitants. Par conséquent, une sécheresse de cette ampleur aurait de nos jours un effet catastrophique (Stine, 1994). |
Lorsque le Petit Age Glaciaire relâcha sa prise sur le climat de l'Europe au milieu du XIXe siècle, on avait commencé à enregistrer systématiquement divers paramètres climatiques comme les températures et les précipitations1. Ces données montrent qu'à la fin du XIXe siècle, une tendance au réchauffement commençait à se manifester dans les hémisphères nord et sud. Cette tendance atteignit son premier point culminant dans les années 30. Les années suivantes, les températures globales accusèrent une légère baisse avant de reprendre leur tendance à la hausse. La tendance au refroidissement était plus prononcée dans l'hémisphère nord.
1 Pour certaines régions de l'Europe, on dispose d'enregistrements des températures et des précipitations remontant jusqu'au XIIe siècle. Finck (1985) a présenté une récapitulation des étés très humides et des étés secs dans le nord de l'Allemagne.
Selon les données relatives au climat mondial durant les deux dernières décennies, les températures globales de l'air en surface ont augmenté, dépassant les maxima de 1930. Cette tendance au réchauffement concerne à la fois l'hémisphère sud et l'hémisphère nord (Couglan et Nyenzi, 1990); elle a entraîné un accroissement de la température globale moyenne en surface d'environ 0,45°C depuis le milieu du siècle dernier.
Les variations de température de la Terre et les changements associés dans le climat ont des causes complexes. Elles peuvent être classées dans les catégories suivantes:
Facteurs astronomiques - comme des changements dans l'activité solaire, des variations dans l'excentricité de l'orbite de la terre autour du soleil, des changements dans l'inclinaison de l'axe de la terre (obliquité) et la précession de l'axe de la terre et des collisions avec des astéroïdes ou des comètes.Facteurs géologiques - comme la dérive des continents, des changements dans la topographie des fonds océaniques, les éruptions volcaniques, la formation de montagnes, l'érosion et l'altération des roches.
Facteurs océaniques - comme l'effet du phénomène El Niño, des changements dans la circulation océanique, des variations du niveau de la mer, la formation de glace, les efflorescences phytoplanctoniques et la production de sulfure de diméthyle.
Facteurs intervenant à la surface de la Terre -notamment l'effet de la végétation sur l'albédo de la surface (la blancheur ou le degré de réflexion de la lumière incidente provenant d'un objet) et l'évapotranspiration, les effets des plans d'eau, y compris l'irrigation et la poussière.
Facteurs atmosphériques - tels que le rôle des gaz à effet de serre, du dioxyde de soufre et des polluants atmosphériques, les effets de la couche nuageuse et les interactions entre l'air, la terre et la mer.
Les paragraphes suivants présentent quelques exemples de l'action de ces facteurs sur le climat mondial.
On estime que les variations de l'activité solaire, comme la fréquence et l'intensité des taches solaires ou le réchauffement progressif du soleil avec la diminution de sa réserve d'hydrogène, ont des effets importants sur le climat. La quasi-interruption de l'activité solaire pendant environ 70 à 80 ans au XVI le siècle, par exemple, coïncide avec le point culminant du Petit Age Glaciaire, période de récoltes catastrophiques en Europe qui furent suivies de décennies de difficultés et de conflits sociaux. La tendance au réchauffement qui suivit le Petit Age Glaciaire coïncida avec une reprise de l'activité solaire. La période récente de températures plus chaudes est associée à une activité solaire exceptionnellement forte qui a commencé à la fin des années 80 (Harrington, 1987; Windelius et Tucker, 1990). Cependant, l'accroissement mesuré de l'énergie solaire reçue par la Terre pendant les pics d'activité solaire ne semble pas être suffisant pour entraîner des changements importants dans le climat.
En de rares occasions, des astéroïdes de grandes dimensions sont entrés en collision avec la Terre. Une collision de ce genre peut avoir plusieurs effets catastrophiques, en particulier la formation d'une couche de fine poussière dans l'atmosphère qui réduit la quantité d'énergie solaire parvenant à la surface de la terre. Ceci peut provoquer une baisse des températures et des intensités lumineuses. De l'avis de certains scientifiques, la collision d'un astéroïde d'environ 10 km de diamètre avec la Terre, il y a environ 65 millions d'années, a eu pour conséquence le refroidissement très marqué qui a mis fin à la période des dinosaures. Près de la moitié des genres de végétaux et d'animaux vivant à cette époque ont disparu (Harrington, 1987).
La théorie de Milankovitch sur les glaciations est basée sur la variation à long terme du rayonnement solaire reçu aux latitudes polaires durant certaines périodes de l'année. Ces variations sont dues à des changements dans l'excentricité de l'orbite de la Terre autour du soleil, qui varie entre 0 et 0,06 avec une période moyenne de 93 000 ans; l'angle d'inclinaison de l'axe de la Terre, qui varie entre 22,1 et 24,5° avec une moyenne de 41 000 années et la précession de l'axe de la Terre, qui varie avec une période moyenne de 21 000 ans (Weertman, 1976).
Les éruptions volcaniques sont parfois si violentes que de grandes quantités de poussière et de gaz sont projetées à haute altitude dans l'atmosphère. Les particules qui atteignent la stratosphère peuvent persister pendant plusieurs années. Elles provoquent une baisse des températures en réfléchissant le rayonnement solaire. Le Petit Age Glaciaire a été caractérisé par une activité volcanique fréquente par rapport à notre siècle. L'éruption en 1815 du volcan indonésien Tambora, la plus grande éruption enregistrée dans l'histoire, a été suivie d'une période de temps frais dans certaines régions de l'Europe, de l'Amérique du Nord et peut-être d'autres régions du monde, appelée "L'Année sans été". Elle eut pour conséquence une mauvaise récolte de maïs dans certaines zones des Etats-Unis et des mauvaises récoltes généralisées en Europe de l'Ouest (Stommel et Stommel, 1983). A Gand, en Belgique, par exemple, l'été de 1816 fut le plus froid jamais enregistré entre 1753 et 1960 (Gommes, 1980), Les émissions volcaniques dues à l'éruption du El Chichón au Mexique en 1982 et du Pinatubo aux Philippines en 1991 ont également causé un léger refroidissement.
L'océan joue un rôle essentiel dans le système climatique global. Plus de la moitié du rayonnement solaire atteignant la surface de la Terre est d'abord absorbée par l'océan, où elle est stockée et redistribuée par les courants océaniques avant d'être libérée dans l'atmosphère. Les courants océaniques sont commandés par les transferts de quantité de mouvement, de chaleur et d'eau entre l'océan et l'atmosphère (Cubasch et Cess, 1990).
Un courant océanique connu pour son influence importante sur le climat global est l'EI Niño (L'Enfant-Dieu en espagnol). Il s'agit d'un courant océanique chaud qui apparaît généralement le long de la côte ouest de l'Amérique du Sud vers Noël et dure plusieurs mois. Un phénomène El Niño est déclenché par l'oscillation australe (ENSO) provenant du gradient entre un système de basse pression qui couvre certaines régions de l'Indonésie et de la Malaisie, et un système de haute pression sur le Pacifique Sud. Quand la différence de pression entre ces deux systèmes diminue, les alizés soufflant vers l'ouest sont affaiblis, causant un réchauffement de la surface de l'océan au large de la côte péruvienne. Ceci entraîne un déplacement du système de basse pression vers l'est, une diminution des précipitations en Malaisie et en Indonésie et une augmentation
des précipitations sur la côte ouest de l'Amérique centrale et de l'Amérique du Sud. Un phénomène ENSO particulièrement grave en 1982-83 a provoqué une forte sécheresse sur l'île de Bornéo, causant les incendies de forêts les plus étendus jamais vus dans l'histoire. Près de 3,5 millions d'ha de forêts ombrophiles primaires et secondaires au Kalimantan Est, en Indonésie, ont été détruits par ces incendies (Goldammer et Seibert, 1990). Ce même phénomène ENSO a provoqué de violentes tempêtes et des inondations importantes le long de la côte ouest de l'Amérique du Sud. Les événements ENSO ont une influence sur la météorologie de la planète entière. C'est le principal facteur de l'environnement à l'échelon mondial qui a des répercussions sur l'activité saisonnière des ouragans dans l'Atlantique. Il n'y a pas d'ouragans durant les saisons où les températures de l'eau dans le Pacifique équatorial oriental et central sont élevées. Leur activité est renforcée durant les saisons où les températures de l'eau sont basses (Grey, 1993). Il est également démontré que les phénomènes ENSO sont liés à une pluviosité inférieure à la moyenne en Afrique australe (Cane et al, 1994).
Les océans sont également le théâtre de phénomènes chimiques et biologiques importants pour le contrôle du CO2 II s'établit un transfert de CO2 de l'atmosphère à l'océan dû aux différences dans la pression partielle de CO2 dans l'océan et dans les couches les plus basses de l'atmosphère. Les océans contiennent également du phytoplancton qui transforme le CO2. dissous en un carbone particulaire qui pénètre dans l'eau profonde (Cubasch et Cess, 1990).
La température moyenne de la Terre est actuellement de 15°C. Ceci est dû en grande partie aux effets des gaz radiatifs ou "à effet de serre" présents dans l'atmosphère. Sans ces gaz, la température moyenne de la Terre serait de -18°C, ce qui équivaut à la température de la surface de la lune et la vie, telle que nous la connaissons, ne serait pas possible. La plus grande partie du rayonnement de courte longueur d'onde que la Terre
reçoit du soleil traverse ces gaz et réchauffe la surface de la Terre. La surface, à son tour, renvoie dans l'atmosphère le rayonnement thermique de grande longueur d'onde. Celui-ci est absorbé par les gaz à effet de serre et réchauffe l'atmosphère. L'atmosphère émet un rayonnement de grande longueur d'onde vers l'espace et vers le bas pour réchauffer encore la surface de la Terre (pour plus de détails, voir question 5).
Encadré 1.2 Le soulèvement du Plateau tibétain a-t-il refroidi le monde? Le plateau tibétain, situé entre l'Himalaya au sud et les monts Kunlun au nord, aurait été formé par ta dérive continentate qui s'est terminée par la collision de l'Inde avec l'Asie. Le Plateau couvre environ 2,2 millions de kilomètres carrés et représente 0,4 % de la superficie terrestre totale. L'altitude moyenne est de 5 kilomètres au-dessus du niveau de la mer. On a suggéré que le soulèvement du plateau a créé des modes de circulation de l'air qui prélèvent l'air chargé de vapeur d'eau au-dessus de l'Océan indien en été et apportent des pluies de mousson au sous-continent indien. Le dioxyde de carbone présent dans l'atmosphère est dissous dans les pluies torrentielies, formant une solution faible d'acide carbonique qui érode le socle du plateau et se déverse dans l'océan sous forme de bicarbonates. Ce processus aurait ainsi prélevé de grandes quantités de dioxyde de carbone dans l'atmosphère terrestre, avec pour conséquence un effet de refroidissement global (Patterson, 1993). |