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I. BESOINS ACTUELS ET FUTURS EN PERSONNEL HALIEUTIQUE QUALIFIE

1. Besoins par rapport au plan directeur de développement du secteur

1.1. Objectifs et stratégie du secteur

Le Plan directeur élaboré en 1992 constitue un programme cohérent de développement de la pêche et de l'aquaculture à moyen (5 ans) et long terme (10 ans)1. Ce plan trace les orientations de développement du secteur en fonction du potentiel encore sous-exploité et du dynamisme du secteur constaté au cours de la dernière décennie. Il propose également plusieurs programmes d'action devant être réalisés d'ici l'an 2000. Il est à rappeler que la production totale actuelle oscille autour de 104.000 tonnes alors que le potentiel en pêche et aquaculture est de l'ordre de 450.000 tonnes, dont 300.000 tonnes de produits commercialisables.

Ainsi la politique du secteur de la pêche et de l'aquaculture à Madagascar a pour objectif général d'optimiser les bénéfices économiques et sociaux retirés de l'exploitation de ces ressources halieutiques et aquacoles. Cet objectif général peut se subdiviser en quatre objectifs :

Le Plan directeur prévoit que la production passe de 104.000 tonnes en 1990 à 144.000 tonnes en 1996 et jusqu'à 185.000 – 190.000 tonnes à l'horizon 2000. La disponibilité en poissons destinés à la consommation locale devra s'accroître de 48.000 tonnes en dix ans, soit un taux de croissance moyen de 5,9% par an (taux supérieur à celui de la croissance démographique: 3%). Ainsi la disponibilité en poissons par habitant pourra passer de 7,4 kg en 1990 à 8 kg en 1996 et à 8,5 kg en 2001. Quant à l'exportation des produits halieutiques, le plan prévoit des recettes en devises de près de 130 milliards de FMG (prix constant 19902) en 1996, soit une augmentation de plus de 100% par rapport à 1990. La quantité des produits exportés pourra encore tripler d'ici dix ans, l'accroissement du nombre d'emplois dans le secteur des pêches devrait se situer à environ 14.500 d'ici 1996, soit une augmentation de 21%.

1 Plan directeur - pêche et aquaculture à Madagascar, DRH/MAG/85/014, Antananarivo, juillet 1992.

2 En 1990, le cours était de 1.495 FMG pour 1 US $

La réalisation des objectifs définis reposera essentiellement sur la pêche maritime traditionnelle, compte-tenu du fait que la production de la pêche continentale s'approche déjà de la prose maximale équilibrée et que certains plans d'eau principaux sont déjà surexploités. Pour augmenter la consommation locale en poissons, le plan prévoit également à moyen terme une meilleure utilisation des poissons d'accompagnement de la pêche crevettière et des poissons de rebut de la pêche thonière.

A long terme, l'accroissement de la production se fera également grâce à la participation plus importante de la pêche artisanale et industrielle dans le ravitaillement du marché local, mais aussi par le développement de la pisciculture. En ce qui concerne l'exportation, l'augmentation de la production proviendra essentiellement du développement de l'aquaculture des crevettes et de la pêche au thon.

1.2. Création d'emplois

Le nombre d'emplois directs pouvant être créés dans le domaine de la pêche et de l'aquaculture dépend des possibilités de développement du secteur. Ainsi, selon le Plan directeur, la majorité des nouveaux emplois proviendra du sous-secteur de la pêche traditionnelle maritime (laquelle fournit presque la totalité des poissons destinés à la consommation locale), soit environ 12.000 emplois directs supplémentaires d'ici 1996.

En ce qui concerne la pêche artisanale, dont le développement sera relativement lent, le nombre d'emplois qui sera créé jusqu'en 1996 est estimé à quelques 150 pêcheurs. A long terme, cette pêcherie pourrait constituer une source d'emplois plus importante. Pour la pêche industrielle, on prévoit d'ici 1996 environ 350 nouveaux postes à bord des bateaux, particulièrement dans la pêche thonière et crevettière.

L'aquaculture, et essentiellement l'élevage de crevettes, pourrait créer pendant les cinq prochaines années 700 à 800 emplois. Pour la production artisanale d'alevins (pisciculture), les nouveaux emplois seront plutôt limités car, dans la majorité des cas, celle-ci ne constitue encore qu'une activité complémentaire pour les agriculteurs.
On attend aussi une augmentation significative du nombre d'emplois indirects découlant du développement de la pêche et de l'aquaculture (environ 1.300 postes). Ainsi, l'augmentation de la production de la pêche traditionnelle maritime générera de nouveaux emplois au niveau de la collecte, du transport et de la commercialisation des produits. De même, le développement de la pêche industrielle et de l'aquaculture aura un effet d'entraînement important sur la multiplication des industries connexes, aussi bien en amont (chantier naval, usine d'aliments, fabrique de matériel de pêche, structures d'avitaillement, etc.) qu'en aval (structures de gestion des infrastructures portuaires de débarquement, de transbordement, de stockage, de conserverie, de réparation navale, etc.).

Afin de soutenir le développement du secteur, au cours des cinq prochaines années, il est nécessaire d'estimer et d'identifier les besoins et les demandes en cadres et agents de maîtrise, aussi bien dans le secteur privé que dans l'administration.

2. Besoins par rapport aux prévisions des opérateurs

2.1. Caractéristiques des entreprises du secteur des pêches

Depuis quelques années le secteur des pêches et de l'aquaculture attire un grand nombre d'entrepreneurs en raison de l'existence de ressources abondantes encore sous-exploitées et en raison de la rentabilité importante de certains produits, notamment ceux destinés à l'exportation.

Actuellement, l'administration chargée de la pêche et de l'aquaculture ne dispose pas d'une liste complète des entreprises intervenant dans le secteur, en particulier de celles orientées vers le marché local (pêche, traitement, commercialisation). En revanche, elle dispose d'une liste relativement exhaustive des entreprises et opérateurs individuels travaillant pour l'exportation. Ceci s'explique par le fait que ces dernières doivent obtenir une autorisation de l'administration pour l'exportation de leurs produits.

On peut distinguer 3 types d'entreprises opérant actuellement dans le domaine des pêches (selon leur chiffre d'affaires et le nombre des personnes employées) :

Pour les besoins de l'étude, on a choisi de cibler l'enquête sur la totalité des grandes et moyennes entreprises ainsi que sur un groupe représentatif d'entreprises de type familial. Ainsi, l'échantillon de l'enquête est constitué de 36 sociétés. Sur les 36 entreprises étudiées, les dix plus grandes emploient 5.105 personnes soit 88% de la totalité des employés des 36 entreprises, dont 355 cadres ou agents de maîtrise (80% du total), alors que le reste (26 entreprises) n'emploie que 547 personnes permanentes, dont 87 cadres et agents de maîtrise. Ces 10 entreprises réalisent également 96% du chiffre d'affaires total des 36 entreprises (soit 91 milliards de FMG, en 1991).

1 Le cours moyen en 1992 était de 1.870 FMG pour 1 US $

2.2. Politique d'emploi des entrepreneurs et leur opinion sur les personnes employées

A la question de savoir comment se fait le recrutement des cadres et des spécialistes et quel est le profil des candidats recherchés, les réponses des responsables des 36 entreprises enquêtées sont révélatrices. En effet, tous les responsables interrogés font référence à l'expérience professionnelle et ne considèrent pas le diplôme comme un facteur déterminant dans le recrutement des personnes. Cela explique le fait que ces entreprises recrutent très peu de spécialistes formés dans les écoles de pêches, mis à part les officiers navigants et les mécaniciens sortants de l'Ecole Nationale d'Enseignements Maritime (ENEM). Actuellement, quatre sociétés emploient 8 sortants de l'Unité de Formation Supérieure Halieutique (UFSH) et 3 sociétés emploient 6 sortants de l'Ecole d'Application des Sciences et Techniques Agricoles (EASTA).

La majorité des sociétés analyse les candidatures en fonction des besoins immédiats de l'entreprise et préfére former directement sur le tas leur personnel. Ceci est particuliérement vrai pour les grandes et moyennes entreprises. Celles-ci recrutent par ailleurs leurs cadres sur recommandation ou par l'intermédiaire de bureaux d'étude.

Les petites entreprises ont trés peu recours aux spécialistes. Ces entreprises de type familial sont gérées par une ou deux personnes qui sont les seuls cadres de l'entreprise. Ces gérants organisent eux-mêmes la production, la collecte et la comptabilité de l'entreprise. Les emplois offerts par ces entreprises nécessitent rarement un niveau de qualification très élevé ou plus exactement les responsables de ces entreprises ne voient pas la nécessité d'investir dans un personnel trés qualifié, sauf si ce dernier accepte un salaire nettement inférieur à celui correspondant à ses qualifications. Ainsi, ces sociétés forment elles aussi leur personnel sur le tas et recrutent en fonction de leurs besoins immédiats et ponctuels. Elles manifestent souvent une certaine méfiance à l'égard des sortants des écoles halieutiques. Leur stratégie consiste plutôt à faire appel à des personnes non diplômées mais ayant déjà une bonne expérience au sein d'autres sociétés.

D'une maniére générale, les responsables des entreprises enquêtées semblent satisfaits de leur personnel (80,5% des entreprises) même s'ils regrettent parfois le manque de conscience professionnelle ou de pratique d'une partie de leurs employés ou bien encore le manque de responsabilité d'une partie des cadres. Deux autres types de réponses confirment cette satisfaction: le remplacement des personnes non performantes et une bonne sélection au recrutement.

La question posée sur les problémes majeurs auxquels ces entreprises sont confrontés avait pour but de mieux situer les problémes de ressources humaines par rapport aux autres problémes. Parmi les problémes évoqués par les responsables des entreprises, on trouve essentiellement :

Parmi les autres réponses concernant les aspects humains, les opérateurs ont signalé l'absence de bons gestionnaires et le manque de confiance envers une partie de leur personnel (par exemple à cause du vol des produits en mer ou à terre).

Les réponses concernant les facteurs limitant les activités de l'entreprise n'indiquent pas que le facteur humain constitue pour l'instant un obstacle majeur à leurs activités. Parmi les facteurs limitant les activités des sociétés, trois ont été les plus fréquemment cités par les responsables des entreprises enquêtées. Il s'agit premiérement de la situation politique actuelle du pays qui n'incite pas aux investissements et qui parfois même complique l'organisation du travail et le planning des sociétés. Le second facteur est la limitation des crédits bancaires. Cependant, pour les grosses sociétés qui disposent de capitaux étrangers, le probléme de crédits ne se pose pas vraiment. En revanche, la majorité des sociétés de moyenne et de petite taille sont dépendantes des disponibilités de crédits bancaires. Le troisième facteur concerne la production insuffisante par rapport à la demande, expliquée essentiellement par la surexploitation des stocks de crevettes et de langoustes dans certaines zones.

2.3. Perspectives de développement

La majorité des sociétés prévoit le développement de leurs activités, soit par l'augmentation de la production actuelle, soit par la diversification de leurs activités, soit encore par un meilleur traitement des produits à terre. L'augmentation de la production des espéces traditionnellement exploitées (langoustes, trépangs, poulpes, etc), se fera grâce à l'exploitation de nouvelles zones côtières, ainsi que par la capture des crevettes et langoustes de profondeur. Ces entreprises prévoient également la diversification de leurs activités, telles que l'élevage des crevettes en mer (presque toutes les sociétés de la pêche industrielle crevettiére), l'exploitation d'autres espèces (telles que thon, requin et certains poissons nobles) et une meilleure utilisation des poissons d'accompagnement.

Plusieurs entreprises ont indiqué leur intention de développer les investissements à terre dans le traitement et le transport des produits (construction de nouvelles usines de transformation ou modernisation des anciennes installations, construction de chambres froides et achats de moyens de transport, essentiellement des véhicules isothermes ou frigorifiques). Ces investissements à terre sont motivés par la nécessité d'améliorer la qualité des produits destinés à l'exportation, par l'augmentation de la valeur ajoutée des produits et enfin par la nécessité de répondre aux exigences des clients.

L'existence de ressources est considérée comme l'atout principal du développement. L'expérience et le savoir-faire technique constituent également des atouts primordiaux, essentiellement pour les grandes et moyennes sociétés ayant déjà une longue expérience et des structures d'équipements adéquats ainsi que des cadres maîtrisant le processus de production, de conservation et de commercialisation des produits. Un autre atout est aussi considéré comme important par les sociétés enquêtées : la connaissance du marché international et la disposition des contrats avec les clients étrangers sûrs et permanents.

Parmi les contraintes majeures qui pourraient entraver la réalisation des projets des sociétés enquêtées, le problème de qualification du personnel n'arrive qu'en dernière position. Les contraintes principales les plus souvent citées sont les mêmes que les facteurs actuels qui limitent les activités des sociétés, à savoir: la situation politique qui fait hésiter les investisseurs, le manque de crédits bancaires essentiellement pour les moyens et petits opérateurs et le mauvais état des routes. Certaines sociétés ont également soulevé le probléme de la concurrence déloyale, le manque de chaîne de froid, l'absence de politique de gestion rationnelle des ressources par l'Etat et le prix du poisson trop faible au niveau de la vente locale.

2.4. Besoins des entreprises en spécialistes

Les réponses des responsables des entreprises à la question concernant leurs besoins futurs en spécialistes (en fonction de leur prévision de développement) sont souvent très générales. précisant rarement le type et le nombre de spécialistes et de cadres dont ils auront besoin. Toutefois, on peut classer leur réponses en cinq groupes. Le groupe le plus important concerne les spécialistes en contrôle de qualité des produits à terre et en mer. Le deuxième groupe englobe les spécialistes en froid, technologistes en traitement et valorisation des produits. Pour ces deux groupes, le besoin de ce type de spécialistes est lié aux exigences des importateurs, essentiellement ceux de la CEE qui ont décidé de renforcer les normes de qualité des produits à partir de 1993. Une autre raison qui pousse les entreprises à un meilleur traitement des produits est l'augmentation de la valeur ajoutée des produits et un meilleur conditionnement pour répondre à l'attente d'une clientèle toujours exigeante.

Le troisième groupe est celui des mécaniciens et officiers navigants. Malgré quelques critiques sur la préparation pratique des cadres navigants et des mécaniciens des bateaux, les besoins des spécialistes restent toujours importants. Elle est liée à l'acquisition de nouveaux bateaux et au remplacement progressif des cadres expatriés, ou encore au départ à l'étranger des officiers malgaches attirés par des salaires plus importants.

Le quatriéme groupe des cadres recherchés, mais en nombre plus restreint, est composé de spécialistes en gestion, finance et administration. Ces cadres sont surtout recherchés par les entreprises de taille moyenne. Le plus important pour les entreprises c'est de trouver des gens dynamiques, bien organisés et capables de bien gérer ou d'administrer les fonctions que les entreprises leur confient. Lorsqu'elles parlent des écoles spécialisées auxquelles elles pourraient avoir recours, ces entreprises évoquent plutôt des écoles de gestion type Institut National Supérieur de la Comptabilité et de l'Administration des Entreprises et non des écoles halieutiques. Certaines entreprises prévoient, pour ce type de poste, de recruter plutôt des expatriés.

Le dernier groupe, non moins important, est constitué des spécialistes en élevage de crevettes. L'élevage de crevettes étant une activité nouvelle à Madagascar, les besoins en spécialistes resteront importants vu les possibilités de développement de cette activité.

Pour l'élevage de crevettes, il est possible de quantifier les besoins pour les cinq prochaines années. Nous savons aujourd'hui que les prévisions de réalisation des fermes aquacoles sont estimées à 2.000 ha environ d'ici 1996. Nous savons également, à la base du “Plan de développement de l'aquaculture de crevettes à Madagascar” élaboré en décembre 1990, ainsi que le planning de recrutement de “l'Aqualma”, que pour une ferme de 800 ha avec une usine de traitement, il faut 300 personnes environ, dont 50 cadres et agents de maîtrise. En conséquence, pour 2.000 ha, les besoins en cadres seront de l'ordre de 125 personnes d'aprés la structure suivante:

-directeurs techniques et administratifs (expatriés)8 personnes
-biologistes (ingénieurs)18 personnes
-techniciens d'élevages25 personnes
-contremaîtres d'élevages20 personnes
-responsables logistiques pour la ferme et l'usine de traitement (ingénieurs)8 personnes
-techniciens pour la maintenance7 personnes
-spécialistes en froid (techniciens)8 personnes
-spécialistes en traitement des crevettes en usine (techniciens)7 personnes
-spécialistes en contrôle de qualité (techniciens)10 personnes
-responsables administratifs en gestion, finances et commerce (cadres moyens et supérieurs)15 personnes

Comme on peut le constater, les entreprises qui vont se lancer dans la crevetticulture auront besoin essentiellement de techniciens pour différentes activités (élevage, maintenance, traitement, qualité, etc.). Les besoins en ingénieurs concernent surtout les biologistes d'élevage de crevettes et, à un moindre degré, les responsables logistiques et administratifs.

Pour les activités autres que la crevetticulture, la quantification des besoins en spécialistes est difficile à réaliser, dans la mesure où la plupart des entreprises enquêtées n'ont pas été capables d'indiquer le nombre, même approximatif, de leurs besoins. Sans prendre trop de risques, on peut estimer ces besoins sur la base des fréquences des réponses exprimées pour chaque type de spécialiste recherché. 12 entreprises enquêtées estiment avoir besoin de spécialistes supplémentaires en contrôle de qualité des produits (niveau techniciens ou ingénieurs). On peut donc penser qu'il y aura au minimum un besoin de 12 personnes spécialisées en qualité de produit. Il est fort probable que cette demande sera plus élevée, étant donné que certaines sociétés prévoient le renforcement du contrôle de qualité à bord des bateaux. 9 entreprises souhaitent recruter des spécialistes en froid et 8 autres des technologues en traitement et valorisation des produits. 7 sociétés souhaitent recruter des mécaniciens de bateaux et 6 sociétés des officiers navigants. Il est clair que le recrutement de ces cadres sera plus élevé que le nombre de ces sociétés. En fonction du nombre de bateaux et du nombre d'officiers expatriés en poste actuellement qui seront progressivement remplacés, chaque société aura probablement besoin d'un ou de plusieurs nouveaux personnels navigants. Les besoins en officiers navigants et en mécaniciens sont estimés à 30–50 personnes d'ici 1996. Enfin, les besoins en cadres en gestion, finances et administration ne sont ressentis que par 5 sociétés enquêtées.

3. Besoins par rapport à l'administration

3.1. Objectifs et situation de l'emploi

Les principaux objectifs de l'administration chargée de la pêche et de l'aquaculture sont de concevoir, de proposer et de mettre en oeuvre la politique de développement du secteur de la pêche et de l'aquaculture dans le cadre des orientations fixées par le Gouvernement. La Direction centrale définit la politique globale en matière de pêche et d'aquaculture, la stratégie à adopter, les objectifs à atteindre et les actions à entreprendre pour les réaliser. Elle doit disposer à l'échelon régional de structures d'exécution et d'appui lui permettant d'exercer son autorité et d'exécuter efficacement ses programmes. Le rôle des services décentralisés était défini au moment de la création de la Direction comme essentiellement un rôle d'exécution (réalisation et suivi des projets, application de la législation, contrôle, surveillance, etc). Ces services devaient également permettre de transmettre des informations de terrain à la Direction centrale afin que celle-ci puisse contrôler les résultats de sa politique et éventuellement corriger certaines des actions entreprises. Ce rôle est réalisé par la collecte et la transmission des informations sur le milieu, les pêcheurs, les autres opérateurs et leurs problèmes, l'évolution de la production, la commercialisation, etc.

Pour atteindre ces objectifs, un organigramme a été proposé en 1985, qui prévoyait au niveau de la Direction centrale 3 services : pêche industrielle, pêche artisanale et aquaculture. A ces services, il faut ajouter une division d'appui, de suivi et de statistique et une division administrative et financière. 6 Services provinciaux et 18 Circonscriptions étaient prévus et sont actuellement tous opérationnels. En revanche, sur les 44 Sections planifiées lors de la création de la Direction de la Pêche et de l'Aquaculture (DPA), seules 8 sont actives et sur les 29 Brigades, seules 10 sont actives. En outre, les services décentralisés comportent également 10 stations piscicoles fonctionnelles.

Cet organigramme prévoyait d'employer 945 personnes (horizon 5 à 10 ans) dont 96 pour la Direction centrale et 849 pour les services décentralisés. Les besoins en ingénieurs ou en cadres supérieurs (classification VI à IX) étaient de 71 tandis que pour les techniciens ces besoins étaient de 351 (classification III à V). Il est intéressant de comparer ces chiffres prévisionnels avec le nombre de personnes effectivement employées par la Direction des Ressources Halieutiques (DRH). Au début de l'année 1992, le personnel total employé par la DRH est de 499 personnes (66 personnes à la Direction centrale), dont 200 permanents. Parmi ces derniers, on note 67 cadres supérieurs et 49 cadres techniques. Le nombre actuel d'ingénieurs halieutes est de 30 personnes dont 28 ont suivi leur formation d'ingéniorat à l'UFSH et deux à l'étranger. Les autres cadres supérieurs, dans la majorité des cas des ingénieurs des eaux et forêts ou d'élevage, proviennent de l'Université d'Antananarivo. Parmi les 67 cadres supérieurs, 22 travaillent à la Direction centrale. Pour les 49 cadres techniques, 45 travaillent sur le terrain.

L'analyse des chiffres présentés ici et dans les annexes 1 et 2 montre que :

Compte-tenu de la nouvelle politique économique du pays et de la limitation des dépenses au niveau de la fonction publique, il est difficile de compter sur des recrutements importants ou même sur le remplacement des cadres actuels dans la mesure où ceux-ci sont relativement jeunes et n'envisagent pas, en général, de quitter l'administration.

L'enquête menée en octobre/novembre 1992, pour la nécessité de la présente étude auprès des responsables de l'administration centrale et décentralisée, a démontré également qu'au niveau du recrutement, il a été rarement tenu compte des tâches à accomplir dans le choix des candidats. Ces recrutements échappent souvent aux responsables directs et se font au niveau du ministère, sans nécessairement prendre en considération la formation reçue par les personnes recrutées. Le nombre d'ingénieurs halieutes travaillant actuellement dans l'administration s'explique par le fait que 28 cadres déjà en poste ont suivi une formation complémentaire en ingéniorat halieutique à l'UFSH. Il convient de souligner que les personnes qui n'étaient pas fonctionnaires de l'administration et qui sont sorties des instituts créés spécialement pour former les cadres pour l'administration (EASTA, UFSH) n'ont presque jamais été recrutées au sein de cette administration.

3.2. Problèmes majeurs de l'administration et attributions effectives des cadres

Pour connaître l'influence du facteur humain sur le fonctionnement de l'administration de la pêche et de l'aquaculture, il était important d'interroger les responsables de cette administration, aussi bien au niveau central que décentralisé (12 personnes), sur les problèmes majeurs actuels de l'administration et leurs causes ainsi que les tâches effectives de ces cadres dans la réalisation de leur travail.

Les problèmes de l'administration les plus souvent mentionnés sont:

Un autre problème a été également mentionné : il s'agit du pouvoir des opérateurs, qui fait que les cadres de terrain n'ont qu'un faible poids et ne sont pas toujours écoutés par ces opérateurs.

Les résultats de l'enquête actuelle confirment les conclusions de celle effectuée il y a 3 ans auprès des 56 agents de l'administration1. Cette enquête avait démontré qu'en ce qui concerne l'équipement, seuls les Services provinciaux sont relativement bien équipés en moyens de communication (téléphone) et de locomotion (voiture, moto, vélo). Au niveau des Circonscriptions. la moitié seulement est dotée de téléphone et dispose de voitures. Les autres échelons décentralisés sont pratiquement privés de téléphone et de moyens de déplacement.

Les conditions de travail difficiles, et particulièrement l'équipement modeste en moyens de locomotion et matériel de vulgarisation, réduit en réalité les activités quotidiennes des différents services décentralisés. Selon les nécessités, ces derniers sont occupés pour la majorité, soit par les travaux de bureau (les chefs des Services provinciaux consacrent en moyenne 70–80% de leur temps en travaux de bureau, les chefs des Circonscriptions 50–60% et les autres moins de 30% de leur temps), soit par les activités dans le milieu d'affectation (contrôle des marchés, relevé des statistiques disponibles localement, délivrance des Certificats d'origine et de salubrité, contacts sur place). Toutes les autres activités demandant une sortie sur le terrain sont en conséquence limitées (vulgarisation et démonstration de nouvelles techniques et technologies de pêche, sensibilisation et encadrement des pêcheurs et des opérateurs, tournées de contrôle, identification des besoins des pêcheurs, police de pêche, organisation des groupes de pêcheurs, etc.) et ne constituent que 20% des occupations globales des cadres des Services provinciaux et 15% des Circonscriptions. Pour les Sections et Brigades, ces travaux sur le terrain, qui doivent être les activités principales à réaliser, n'engagent que 25% de leur temps.

Les problèmes évoqués par les cadres nécessitent une certaine analyse. Premièrement, la disponibilité de l'équipement détermine le travail des cadres de terrain. Sans équipement, ces derniers ne peuvent que rester dans leurs bureaux et s'enfermer dans des tâches administratives sans rapport avec leurs véritables attributions. Ceci étant, l'augmentation du nombre du personnel n'augmentera pas l'efficacité du travail de l'administration. Deuxièmement, le fonctionnement de l'administration pourrait être amélioré par une meilleure affectation des cadres existants (surtout plus de cadres proches des opérateurs et pêcheurs), par une simplification de l'organigramme, limitant un certain nombre des maillons intermédiaires afin de réduire le travail administratif et le chevauchement des activités. Cette analyse démontre également, que par rapport aux tâches assignées aux cadres des services décentralisés, le profil le plus adapté serait celui de technicien-praticien. Les cadres supérieurs, qui sont en majorité ingénieurs, devraient disposer de plus d'autonomie et participer plus largement à l'élaboration des conceptions de développement du secteur et à la prise des décisions.

1 Z. Kasprzyk, Rabelahatra - Service de terrain, leurs activités et problèmes actuels, Rapport de terrain no7 du projet MAG/85/014, juin 1989.

3.3. Activités principales à réaliser par l'administration

Les activités principales à réaliser par l'administration, selon les personnes enquêtées, ne diffèrent pas de celles fixées par les autorités. Ces activités sont les suivantes en fonction de leur importance :

Les deux premiers points ont été surtout cités par les responsables de terrain alors que les deux autres l'ont été par les responsables de la Direction centrale.

Si l'on se réfère à l'enquête réalisée en 1989, on constate que les activités jugées comme prioritaires par les agents des services décentralisés sont à peu près les mêmes. Parmi les activités jugées indispensables à réaliser par les Services provinciaux et les Circonscriptions, deux tâches figurent en première place :

Cette enquête avait également démontré que les quatre échelons des services décentralisés (Services provinciaux, Circonscriptions, Sections et Brigades) voient leurs activités à effectuer à l'avenir de façon analogue (vulgarisation, encadrement, sensibilisation, contrôle des marchés et recueil des statistiques). Devant cette situation, le problème de chevauchement d'attributions se pose.

La Direction des Ressources Halieutiques doit simplifier et mieux adapter sa structure pour réaliser ses activités principales. Cette simplification concerne les structures des services de terrain à quatre niveaux qu'il faut ramener tout de suite à trois niveaux (Service provincial, Circonscription, Section), puis à deux niveaux dans les régions où cela est justifié (Services provinciaux et Sections). Il est jugé peu rationnel de disposer d'un Service provincial et d'une Circonscription dans la même ville, ce qui est actuellement le cas. La nouvelle structure permettra non seulement d'accélérer le flux des informations et des décisions entre les cellules d'exécution et l'organe de décision mais surtout d'atteindre directement les opérateurs. Outre la simplification de l'organisation, il faudrait redéfinir et bien différencier les attributions de chacun des services de terrain, décentraliser les moyens techniques et financiers et prévoir les moyens de fonctionnement avant l'installation d'un service décentralisé.

Quant au renforcement, il conviendrait également d'adapter et de mettre en place un système statistique bien approprié. Ce qui doit se traduire par la création d'un service statistique au niveau de la Direction centrale et par l'affectation d'agents chargés de la collecte des données au niveau du terrain.

3.4. Besoins futurs en cadres pour l'administration

Il ressort de l'analyse sur le fonctionnement de la DRH, sur les problèmes majeurs et sur les activités à réaliser par cette administration, que les besoins futurs en cadres concernent essentiellement les techniciens. Ces techniciens doivent être capables de travailler directement avec les petits opérateurs et pêcheurs qui se trouvent souvent dans des sites éloignés des grandes villes. Les attributions de ces techniciens concernent la vulgarisation des nouvelles techniques et technologies, la sensibilisation et l'encadrement des pêcheurs et aquaculteurs et le recueil des statistiques.

Au niveau des cadres supérieurs, l'administration a fait beaucoup d'effort pour leur formation afin que la Direction centrale et chaque cellule de coordination et de conception (Services provinciaux et Circonscriptions) soit dotée d'au moins un cadre supérieur. Il est surprenant que l'administration n'ait pas fait le même effort pour rendre opérationneles les services d'exécution (Section et Brigade). On se trouve aujourd'hui dans la situation paradoxale où il manque des gens pour mettre en pratique les conceptions élaborées par les cadres supérieurs. D'ailleurs, pendant l'enquête, les besoins supplémentaires en cadres supérieurs ont été rarement mentionnés. Il était à chaque fois question de la nécessité pour ces responsables de disposer de techniciens bien formés.

Il s'avère donc que les besoins futurs de l'administration à court et moyen terme concernent presque uniquement les cadres techniques. La question qui se pose est de savoir le nombre approximatif de ces besoins en techniciens ainsi que les possibilités de leur recrutement vu la restriction du budget du Ministère.

Par rapport au nombre des cellules d'exécution (Section/Brigade) pour lesquelles les besoins sont estimés à 70, on peut prévoir 1 technicien par cellule. A ces besoins, il faudrait ajouter au minimum 2 techniciens par Service provincial et Circonscription, ce qui donne 48 techniciens pour ces deux échelons. Même si l'organigramme devait être modifié (par exemple plus de Services provinciaux ou de Circonscriptions), les besoins globaux en techniciens seront toujours de 110–120 personnes au minimum. Or, actuellement la DRH n'emploie que 49 techniciens. Il manque donc, théoriquement, environ 60–70 techniciens.

Est-ce-que l'administration aura les possibilités de les recruter ? En considérant la situation économique précaire du pays et la nouvelle politique qui prévoit plutôt la réduction du budget, il est fort probable que la création de nouveaux postes soit limitée.

Etant donné que les possibilités réelles de recrutement des nouveaux cadres sont très limitées et que l'administration doit être opérationnelle sur le terrain, les personnes enquêtées ont indiqué la possibilité de mieux utiliser les cadres déjà en poste. En effet, beaucoup de cadres sont concentrés dans la Direction centrale et dans les grandes villes, souvent sans attributions précises.

Par ailleurs, comme il a été cité précédemment la multiplication des échelons provoque le chevauchement des attributions et la lenteur dans l'exécution des activités et dans la circulation des informations. Quel que soit le nombre des cadres et leurs attributions, il est aussi évident que l'efficacité et le caractère de leur travail seront toujours conditionnés par la disponibilité des moyens tant techniques que financiers.

L'une des solutions à court terme pour mieux utiliser ces cadres serait de les affecter sur le terrain (en dehors des grandes villes) avec des attributions précises. Ceci est possible, si l'on applique la proposition d'un nouvel organigramme avec une structure plus simple et moins d'échelons intermédiaires. Il est également plus rationnel de supprimer les 6 Circonscriptions localisées dans les mêmes chefs-lieux que les Services provinciaux. Ainsi, on pourrait disposer des postes libérés pour les utiliser dans les cellules plus proches des opérateurs. Pour que les cadres des services décentralisés effectuent plus de sorties sur le terrain et soient plus efficaces dans leur travail de vulgarisation, ils doivent disposer de moyens de locomotion et de démonstration. Cependant, la restriction budgétaire ne permet pas de penser qu'à court et moyen terme, ces moyens seront disponibles, sauf si une aide internationale devait intervenir.

II. ANALYSE DU POTENTIEL ET DU FONCTIONNEMENT DE LA FORMATION HALIEUTIQUE

1. Situation actuelle de la formation technique et professionnelle à Madagascar

1.1. Problématique générale de la formation technique et professionnelle

Historiquement, le système éducatif malgache a été dominé par la formation générale, théorique et académique. La formation professionnelle n'y occupait qu'une place marginale, souvent comme une résponse pédagogique à l'échec scolaire. Seuls les élèves ayant des difficultés à suivre le cycle académique furent obligés de s'orienter vers la formation professionnelle et technique. Cette situation se retrouve au niveau des entreprises ou des organismes privés de formation où la formation professionnelle, alors dénommée formation permanente ou continue, n'était qu'un sous-produit de la stratégie économique. Seules, quelques grandes entreprises (JIRAMA-eau et électricité, RNCFM-transport ferroviaire, SECREN-chantier naval, STAR-brasserie, etc.) considéraient la formation professionnelle comme un élément important de leur stratégie et politique générale.

Selon un rapport d'évaluation de la Banque Mondiale (juin 1991)1 pour les entreprises industrielles et tertiaires établies de longue date, on constate un manque croissant d'agents techniques, de techniciens supérieurs, d'agent de maîtrise et de certains spécialistes. Par ailleurs, même si les études effectuées manquent de rigueur, fautes d'informations fiables, on constate qu'une forte proportion des demandeurs d'emplois diplômés de l'enseignement technique et professionnelle n'ont pas les connaissances qu'ils sont sensées avoir acquises. C'est-à-dire que la formation technique et professionnelle est confrontée à des problèmes critiques : le système ne forme pas, en quantité et en qualité, des ouvriers qualifiés, des techniciens et des cadres dont auraient besoin les secteurs moderne et informel.

Le Gouvernement, conscient de cette situation, met actuellement en place un projet (le projet de renforcement de la formation technique et professionnelle : PREFTEC) avec l'aide de la Banque Mondiale, de la Coopération Française et du PNUD. Ce projet a pour objectifs d'adapter l'enseignement technique et la formation professionnelle aux besoins des employeurs et du marché de l'emploi, d'allouer un rôle plus important au secteur privé de la formation (écoles gérées par les ONG ou les entreprises commerciales), de promouvoir des politiques de partage des coûts entre les partenaires et d'améliorer la qualité et l'efficacité du système.

1 Source: Rapport d'évaluation de la formation technique et professionnelle à Madagascar-(Projet PREFTEC) Banque Mondiale, juin 1991.

1.2. Enseignement technique et professionnel agricole et halieutique

La formation agricole publique est assurée par cinq ministères : Agriculture, Eaux et forêts et Environnement, Ressources Halieutiques, Instruction Publique, Universités. D'autres ministères y participent marginalement (Population, Emploi et Formation, Forces Armées …). Différents établissements dispensent également cette formation :

2. Description des instituts de formation halieutique existants

2.1. Historique et justification

La formation en matière de pêche et aquaculture à Madagascar existe à différents niveaux. Elle a suivi le développement du secteur (augmentation de la production pour le marché intérieur et pour l'exportation) et avait pour but de fournir au secteur les spécialistes nécessaires à son développement. D'une manière générale, la formation de ces spécialistes, à l'exception des officiers pont et machine (sortants de l'Ecole Nationale d'Enseignement Maritime de Mahajanga) et des ingénieurs agronomes (sortants de l'Ecole Supérieure des Sciences Agronomiques de l'Université d'Antananarivo) a débuté au cours des années 1980.

Au lendemain de l'indépendance (au début des années 1960), il était urgent de mettre en place des systèmes de formation devant fournir à l'administration et au secteur de production, les cadres et divers spécialistes pour remplacer progressivement les cadres expatriés. Cependant les sortants de l'ENEM et de l'ESSA de cette époque n'étaient pas vraiment formés pour la pêche et l'aquaculture. Les premiers enseignements à l'ENEM, qui furent créés en 1961, furent destinés aux élèves officiers au cabotage et aux apprentis marins. Puis au fil des ans, les formations se sont diversifiées pour mieux s'adapter aux réalités du pays.

Au niveau de l'enseignement supérieur, l'ESSA (auparavant nommée ENSA), créée en 1963, avait pour mission de former des ingénieurs malgaches (en agronomie, en élevage, en forêt avec des notions sommaires en pêche et aquaculture), destinés principalement à servir au sein de l'administration.

Parmi les obstacles pouvant freiner le développement des activités halieutiques, différents experts ont identifié l'insuffisance numérique ou les besoins en cadres de haut niveau et en techniciens.

Ainsi, pour répondre aux besoins de la jeune administration des pêches, (créée en 1985), deux écoles orientées vers la formation des cadres et techniciens pour cette administration ont été mises en place en 1986. Il s'agit de la filière pêche de l'Ecole d'Application des Sciences et Techniques Agricoles de Mahajanga pour les adjoints techniques et de l'Unité de Formation Supérieure Halieutique de l'Université de Toliara pour les ingénieurs halieutes.

Par ailleurs, la formation des spécialistes pour les instituts de formation et de recherche a démarré en 1981 avec la filière Océanologie de l'Université de Toliara. Depuis plusieurs années. différents organismes, notamment des organisations non gouvernementales, ont assuré la formation ponctuelle des pêcheurs traditionnels et artisanaux. Mais c'est seulement en 1987 que des programmes de formation plus structurés furent mis en place : il s'agit des projets-pêche pour la promotion de la pêche artisanale à Toamasina en 1987, et l'année suivante à Nosy-Be pour la pêche traditionnelle.

2.2. Programmes et leur évolution

D'une manière générale, la nature des modules enseignés devrait dépendre du profil défini par les utilisateurs. Or, jusqu'à présent, les programmes ont été dominés par la formation théorique (moins coûteuse, ne nécessitant pas des infrastructures techniques et des formateurs praticiens), préparés le plus souvent par les formateurs eux-mêmes, sans tenir compte des besoins réels des utilisateurs.

2.2.1. L'Ecole Nationale d'Enseignement Maritime

Installée à Mahajanga, elle forme les spécialistes de navigation et de machine, et délivre les brevets suivants :

  1. Le brevet de capacitaire à la pêche institué pour favoriser le développement des petits métiers, permet de commander les petites embarcations de pêche. L'enseignement étalé sur 18 semaines (à raison de 28h/semaine), porte sur les techniques de pêche, les méthodes de conservation et de transformation artisanales du poisson. Une importance particulière est donnée à la connaissance, à la conduite et à l'entretien courant des moteurs hors-bord et diesel. Il est ouvert aux inscrits maritimes âgés de 21 ans au moins et totalisant 24 mois de navigation effective à la pêche.

  2. Le brevet de lieutenant de pêche donne accès au commandement des navires de pêche d'une jauge brute inférieure à 25 tonneaux, armés pour la pêche côtière. Il permet aussi de remplir les fonctions de second capitaine et de lieutenant sur tous les navires armés pour la pêche au large. L'admission au cycle de formation se fait sur concours au niveau de la 4ème année d'étude secondaire (classe de 3ème) par les candidats âgés de 17 ans au moins et 25 ans au plus. La formation se déroulant sur 3 semestres scolaires (à raison de 32h/semaine), porte essentiellement sur la navigation, la sécurité, les techniques de pêche artisanale et industrielle, la conservation et la transformation des produits de la mer. Des périodes de formation pratique sont effectuées à bord du navire école “Andry” et les élèves embarquent au cours des vacances scolaires sur des navires de pêche appartenant aux armateurs.

  3. Le brevet de patron de pêche autorise le commandement de tous les navires armés pour la pêche au large. La formation donnée en deux périodes de 4 mois (octobre à janvier de l'année suivante : 32h/semaine), permet aux candidats de participer à la campagne crevetière. Les cours apportent aux titulaires du brevet de lieutenant de pêche totalisant 30 mois de navigation effective à la pêche après l'obtention du brevet, les compléments nécessaires en navigation, sécurité, manoeuvre, stabilité, technique de pêche, réglementation, gestion.

  4. Le brevet d'officier mécanicien (3ème et 2ème classe) permet d'occuper le poste de chef mécanicien. La formation des officiers de 3ème classe, se déroulant sur 3 semestres scolaires à raison de 28h/semaine, porte essentiellement sur la conduite, l'entretien et les réparations des moteurs diesel, des machines électriques et frigorifiques, avec un, complément en dessin industriel, en construction navale et stabilité des navires. Ce brevet est principalement destiné aux mécaniciens des bateaux de pêche dont la puissance totale est inférieure à 368 KW. Cette formation est ouverte aux candidates admis sur concours au niveau de la 4ème année d'étude des lycées techniques âgés de 17 à 25 ans, sauf pour les inscrits maritimes justifiant 12 mois de navigation effective. En ce qui concerne les mécaniciens de 2ème classe, la scolarité dure 3 ans. Ce brevet permet d'occuper la fonction de chef mécanicien sur les unités dont la puissance totale est inférieure à 1.472 KW.

2.2.2 L'Ecole d'Application des Sciences et Techniques Agricoles de Mahajanga

Elle forme en 3 ans des adjoints techniques halieutes. L'admission est réalisée en commun avec les autres filières, par voie de concours du niveau de 4ème année d'études secondaires (classe de 3ème). Mais en réalité les admis possèdent souvent le baccalauréat. L'enseignement dispensé à Amborovy (1ère et 2ème années) comprend une cinquantaine de modules dont environ les ⅔ correspondent chacun à une tâche professionnelle et technique précise. La formation au cours de ces deux premières années (respectivement 1.510 h et 1.470 h) est surtout théorique à cause de l'insuffisance des moyens matériels. Elle porte sur la connaissance du milieu, la navigation, la technologie de la pêche et de la transformation, l'entretien des moteurs, la gestion et l'organisation d'entreprise de pêche, l'aquaculture, complétée par des modules de culture générale. Des stages préprofessionnels dans les entreprises de pêche, dans les stations piscicoles et dans les organismes de recherches sont prévus. La 3ème année d'étude se déroule à Antananarivo et porte sur les autres filières agricoles (polyvalence) dans le but d'ouvrir le champs d'action des sortants.

2.2.3. L'Ecole Supérieure des Sciences Agronomiques de l'Université d'Antananarivo

Elle ne forme pas à proprement parler de spécialistes en matière de pêche et aquaculture. Mais elle dispense pour certains élèves-ingénieurs des modules relatifs à l'halieutique, notamment au niveau de 3 départements : agronomie-phytotechnie, élevage et eaux et forêts. Le volume horaire consacré à la formation halieutique est relativement faible eu égard à la totalité des heures d'enseignement (entre 10 h et 100 h selon les départements). L'enseignement porte sur la pisciculture, les pêches maritimes, les pêches continentales, l'hydrobiologie, l'aquaculture, le contrôle de qualité.

2.2.4 La Filière Océanologie de l'Université de Toliara

Elle est ouverte aux titulaires de la licence en sciences naturelles constitue une spécialisation en deux étapes pour former des enseignants-chercheurs :

2.2.5 L'Unitéde Formation Supérieure Halieutique1 de l'Université de Toliara

Elle a pour mission de former des ingénieurs de haut niveau dotés d'une formation à la fois générale et spécialisée en halieutique. Cette institution, mise en place dans le cadre d'une convention RDM/PNUD/FAO, a bénéficié de ce fait depuis sa création en 1986 d'un apport financier extérieur. Les élèves-ingénieurs sont recrutés par voie de concours parmi les titulaires du diplôme d'ingéniorat des sciences agronomiques et de maîtrises en océanologie et sciences biologiques appliquées (Bac + 4 ans) en activitéou non. La formation, s'étalant sur 15 mois plein, se compose de deux parties :

Le programme comprend des modules traitant de la connaissance des milieux aquatiques et des ressources, de l'exploitation et de la valorisation des ressources, du traitement mathématique des données, de l'économie et de la gestion des systèmes halieutiques, de la production, de la législation, de l'analyse des projets, etc.

1 Devenu depuis décembre 1992 Institut Halieutique et des Sciences Marines

2.2.6 Centres de formation des pêcheurs

2.3. Moyens de mise en oeuvre

A l'exception de l'EASTA de Mahajanga, tous les instituts de formation disposent d'un minimum de moyens matériels, financiers et humains pour leur fonctionnement. En effet, l'EASTA se caractérise par une absence chronique de matériels didactiques, de documentation et de personnel d'encadrement (1 seul enseignant permanent pour la filière pêche).

L'ENEM possède une logistique et un équipement relativement complet (locaux équipés, ateliers, embarcations, etc.). L'insuffisance de formateurs nationaux constitue son point faible (5 expatriés et 4 nationaux).

L'Université de Toliara (UFSH/Filière Océanologie) possède un ensemble d'équipements et de formateurs/encadreurs (4 expatriés + 10 nationaux) suffisant pour ce type de formation académique.

Quant à l'ESSA, l'enseignement en matière de pêche et aquaculture constitue un complément dans la formation des ingénieurs de sciences agronomiques. En conséquence, cette école ne dispose pas d'un équipement nécessaire pour la formation halieutique ou aquacole. Elle est privée également de formateurs permanents spécialisés dans ces domaines.

Pour les centres de formation de pêcheurs, la continuité des activités au-delà des projets n'est pas souvent assurée et devrait normalement être poursuivie par l'administration ou les ONG locales. Si les équipements sont complets, l'insuffisance du personnel d'encadrement national et le coût de fonctionnement peuvent constituer des obstacles à la pérennisation de la formation.

Si l'on considère l'encadrement au niveau des instituts de formation (ENEM, EASTA. Universités d'Antananarivo et Toliara), on compte actuellement 25 formateurs permanents composés de 10 expatriés et 15 nationaux auxquels s'ajoutent une vingtaine de vacataires/consultants et conférenciers. Il s'avère donc indispensable de programmer ou de poursuivre des plans de formation de formateurs en vue d'affermir les bases de la pérennité des instituts de formation halieutique.

2.4. Nombre de spécialistes formés et leur utilisation

En général, pour chaque type de formation, le nombre des places offertes par concours devrait être calculé en fonction des possibilités d'embauche et de la capacité d'accueil des instituts. Actuellement, le nombre d'élèves par promotion varie entre 5 et 25. Ce mode de recrutement devrait limiter le chômage des diplômés, d'autant plus que certains élèves sont des agents ayant déjà un emploi (ENEM, UFSH). Cependant, les sortants de l'Ecole d'Application des Sciences et Techniques Agricoles rencontrent de réels problèmes d'embauche à cause de leur formation jugée trop théorique, conséquence entre autre de l'insuffisance qualitative et quantitative des équipements et des formateurs permanents. De surcroît l'environnement socio-économique pas aussi favorable, faible capacité d'embauche des petites entreprises, gel des postes budgétaires au niveau de l'administration, non disponibilité de capitaux pour l'auto-emploi. De même, les opérateurs ne sont pas suffisamment informés de l'existence de l'école. Sur les 38 adjoints techniques sortants de l'EASTA (1ère et 2ème promotions), moins d'une dizaine ont trouvé un emploi dans le privé (SOMAPECHE, SOGEDIPROMA, KALETA) ou dans l'administration (un seul contractuel).

L'utilisation des sortants des autres instituts se résume de la façon suivante:

Ecole Nationale d'Enseignement Maritime. Les entreprises de pêche (de type industriel ou artisanal) constituent les principaux pourvoyeurs d'emplois des sortants de l'ENEM, dans la mesure où le nombre d'élèves recrutés est fonction de la demande des utilisateurs. Cependant, selon les propositions de traitement salarial, certains sortants trouvent des offres plus intéressantes auprès des sociétés des lêles voisines (par ex: Comores et Maurice). Ainsi pour les cinq dernières années, les brevets délivrés se répartissent comme suit :

Filière Océanologie de l'Université de Toliara. Les 24 diplômés formés depuis la création de cette filière se répartissent comme suit : 7 recrutés par le Centre National de Recherches Océanographiques (CNRO), 5 assistants à l'Université de Toliara, 3 assistants à l'Université de Mahajanga, 2 embauchés pàr des sociétés de pêche, 1 recruté au Service Provincial des Ressources Halieutiques (SPRH) à Mahajanga, 1 en formation doctorale en France, 3 vacataires à l'Université de Toliara et 2 perdus de vue. Théoriquement, la Filière Océanologie n'est qu'une première étape du cycle post-universitaire qui permet de former les enseignants-chercheurs (niveau doctorat). Cependant, la structure académique actuelle ne permet pas aux titulaires du diplôme de préparer leur doctorat sans avoir trouvé au préalable un poste de travail. Conformément aux objectifs, la grande majorité des diplômés se retrouve dans les universités (Mahajanga et Toliara) ou dans le centre de recherche (Nosy-Be). Néanmoins, le gel du recrutement dans la fonction publique commence à se faire sentir; car si les besoins existent dans cette branche, les derniers sortants ne sont que de simples vacataires dans l'attente de propositions (fonction publique, sociétés de pêches, projets, etc).

Unité de Formation Supérieure Halieutique. Sur les 50 ingénieurs halieutes formés, on en trouve: 28 dans l'administration des pêches, 8 dans les sociétés de pêche, 6 dans d'autres structures (projets, organisations non-gouvernementales et autres sociétés), 4 dans les instituts de formation/recherche, 2 en formation doctorale à l'extérieur, 1 opérateurs privé et 1 enseignant au lycée. Parmi ces 50 ingénieurs halieutes formés, 28 sont des cadres de l'administration recyclés. Le gel des postes budgétaires a limité les nouvelles embauches dans l'administration, ce qui a conduit les sortants non fonctionnaires à chercher du travail, soit dans les sociétés de pêche (8), soit dans d'autres sociétés ou organismes (6), soit dans les instituts de formation et de recherches (4 postes + 2 en formation doctorale). Un seul ingénieur s'est installé à son propre compte en devenant opérateur économique après un court séjour au sein d'une société privée.

Ecole Supérieure des Sciences Agronomiques de l'Université d'Antananarivo. Les mémoires de fin d'études ayant trait à la pêche et réalisés par les étudiants pour l'obtention du diplôme d'ingéniorat (depuis la création de l'école) se chiffrent à 26 et se répartissent comme suit: 12 dans le Département élevage, 11 dans le Département eaux et forêts et 3 dans le Département industries agro-alimentaires. La totalité des travaux effectués par les étudiants du Département élevage concernent la pêche maritime et, pour ceux des eaux et forêts, la pisciculture. Parmi, les 26 ingénieurs de l'ESSA, 9 sont passés par l'UFSH, 4 se retrouvent actuellement dans l'administration des pêches, 2 au CNRO et 1 dans chacun des services ou sociétés suivants : Direction de l'Elevage, Direction des Eaux et Forêts, PNB, Bankin'ny Tantsaha Mpamokatra (BTM), Fanalamanga, Filière physique-chimie de l'Université de Toliara. Les employeurs des 5 restants n'ont pu être identifiés.

Apostolat de la mer. Les actions de formation ont touché les pêcheurs de Toamasina, SainteMarie, Antalaha, Soanierana-Ivongo et Fénérive-Est et ont permis de former 4 promotions de stagiaires, soit une quarantaine de pêcheurs. A l'issue de la formation, ils auraient dû acquérir une embarcation motorisée pour créer des unités de pêche. Mais le système envisagé, bien coordonné au niveau de la conception (formation-construction-accession à la propriété), recontre d'énormes problèmes au niveau de la mise en oeuvre concrète. En effet, ces pêcheurs formés ne disposent pas d'économies suffisantes et n'ont pas accès aux crédits bancaires pour les investissements nécessaires. Aussi, reprennent-ils leur activité précédente, c'est-à-dire la pêche piroguière.

Centre de formation des pêcheurs - GTZ. 92 pêcheurs ont été formés. Parmi ces pêcheurs : 7 % ont constitué des groupes de 2 pêcheurs, 7% des groupes de 3 et 8% des groupes de 4. La constitution de ces groupes est une des conditions pour une meilleure utilisation des nouvelles techniques. Dans la mesure où l'exploitation des filets requiert un travail de groupe, il a été constaté que ce sont les groupes composés de 4 pêcheurs formés qui sont les plus stables et les plus performants. La majorité des pêcheurs travaillent encore dans des groupes où les autres pêcheurs n'ont pas reçu la formation (78 % des cas). Dans ces derniers cas, l'effectif étant trop réduit, des problèmes d'organisation se posent.

3. Efficacité et utilité des systèmes actuels de formation

3.1. Point de vue des opérateurs

36 responsables des différentes entreprises de pêches ont été interviewés. Avant d'analyser leurs opinions sur les sortants des écoles de formation halieutique, sur la connaissance des programmes de ces écoles ainsi que sur l'efficacité et l'utilité de la formation halieutique, il était intéressant de connaître la formation reçue par ces opérateurs. Il ressort que seulement 11 responsables ont été formés dans le domaine des pêche (officiers navigants, mécaniciens, océanographes), 11 autres ont obtenu la formation en gestion, finance et comptabilité, 7 responsables n'ont qu'un niveau de formation générale inférieure ou égale au baccalauréat et les autres ont des formations diverses.

L'opinion des opérateurs sur l'efficacité et l'utilité des systèmes actuels de la formation halieutique est liée à la connaissance qu'ils ont de ces éstablissements et à l'utilisation des sortants par ces derniers. Il ressort de l'enquête qu'à peine la moitié des responsables des entreprises connaît l'existence de l'UFSH et de l'ENEM, malgré l'envoi annuel de documents par certaines écoles. Les autres éstablissements tels que EASTA et universités sont presque inconnus d'eux. Mêmes s'ils connaissent l'existence des écoles de formation en pêche, rares sont ceux qui ont consulté les programmes de formation de ces instituts. 24 des 36 responsables d'entreprises ont indiqué ne pas connaître les programmes d'au moins un centre de formation. Ceux qui connaissent l'existence de ces instituts ont souvent indiqué que cette connaissance se limitait aux objectifs généraux de ces instituts (par exemple pour UFSH - formation des ingénieurs, pour ENEM - formation des officiers navigants ou mécaniciens.

Pour savoir si les gens formés dans différents instituts de formation sont efficaces et performants pour les entreprises de pêches, on a demandé directement aux responsables des entreprises leurs opinions sur ces sortants. Sur 36 interviewés, 25 d'entres eux n'ont aucune opinion (69% d'opinion exprimée), 10 (27%) ont une opinion plutôt positive et parmi eux presque tous les responsables des sociétés industrielles. Le pourcentage élevé de sans opinion s'explique par le fait que les entreprises recrutent très peu de sortants des instituts spècialisés en pêches. Il faudrait également noter que certaines entreprises qui ont émis une opinion sur les sortants n'ont pas nécessairement recruté des gens formés par ces instituts. La formation dans les écoles halieutiques est perçue non comme un apprentissage professional mais comme des enseignements quelconques portant sur des connaissances théoriques générales.

L'opinion des opérateurs sur l'efficacité et l'utilité du système actuel de formation était très importante dans la mesure où toutes les modifications ou adaptations du système actuel doivent tenir compte de l'attente de ces opérateurs. Or, 66% d'opérateurs n'ont aucune opinion sur la question. Pour eux, l'expérience est un facteur déterminant de performance dans l'entreprise. Ceci est reflété par les opinions sur le manque d'expérience, de pratique ou de stage en entreprise pour les sortants. Parmi les opinions les plus fréquemment avancés par les responsables des entreprises enquêtèes, on peut signaler que:

Pour ce qui est du système de formation le mieux adapté selon les personnes interviewées, il ressort que les grandes sociétés ont une opinion assez claire sur la question, tandis que les petites sociétés n'ont aucune idée là dessus. Parmi les propositions les plus souvent suggérées, on note la nécessité pour les entreprises de la formation spécialisée à la carte, de courte durée ou de recyclage (2 semaines à 3 mois au maximum), car les entreprises ne peuvent pas libérer leur personnel pour une longue durée (ceci concerne la formation du personnel de l'entreprise). Certains gérants de petites sociétés sentent la nécessité d'un recyclage dans la gestion de l'entreprise. Pour le recrutement des agents extérieurs, les entreprises préfèrent recruter des personnes ayant de l'expérience, ou des personnes ayant reçu une bonne formation technique et pratique. Pour les ouvriers, c'est à l'entreprise de les former sur le tas.

Par ailleurs, les entreprises regrettent de ne pas être consultées lors de l'élaboration des programmes de formation et suggèrent qu'à l'avenir le programme de formation soit plus adapté aux besoins des entreprises et qu'il y ait plus de pratique pendant la formation. Certains opérateurs pensent même qu'il est préférable que les futurs étudiants ou élèves travaillent pendant quelques temps dans les entreprises, avant d'entrer dans les écoles spécialisées telles que UFSH, ENEM ou EASTA.

3.2. Points de vue des cadres de l'administration

Parmi les 12 cadres enquêtés, 4 sont de la Direction centrale et 8 sont attachés aux différents échelons du service de terrain. L'âge moyen de ces cadres est de 38 ans. Ils travaillent pour l'administration depuis plus de 9 ans en moyenne et occupent leurs postes actuels depuis plus de 3 ans.

A fin de mieux apprécier les opinions des cadres de l'administration sur l'utilité et l'efficacité des systèmes actuels de formation, il convient de regrouper ces opinions en deux grands groupes: opinion générale et opinion par établissement.

Les cadres enquêtés constatent généralement que pour l'administration, les besoins en cadres moyens sont plus élevés que les besoins en cadres supérieurs et que les écoles forment souvent des personnes sans tenir compte de l'offre réelle du marché de l'emploi.

Les écoles ont une tendance à copier les programmes des écoles étrangères au lieu de tenir compte de la réalité malgache et de l'offre locale. La formation est actuellement trop axée sur la théorie, alors que l'efficacité de toute formation se mesure sur la capacité à appréhender les problèmes et à les résoudre sur le terrain en fonction des besoins des opérateurs et de l'administration.

L'opinion des cadres de l'administration sur l'utilité et l'efficacité des différents éstablissements formant des spécialistes pour la pêche se résume de la façon suivante.

Pour l'EASTA, les cadres trouvent que la formation de cette école est mai faite, orientée ni vers l'administration ni vers les entreprises. Son programme contient trop de modules théoriques et la partie pratique est presqu'inexistante à cause du manque d'équipement et du budget nécessaire. Les mêmes cadres pensent que l'EASTA, avec plus de moyens et un programme refait. pourrait être très utile compte-tenu du besoin ressenti en techniciens.

En ce qui concerne l'UFSH, son programme est jugé trop théorique avec un certain déséquilibre entre les modules. Cette formation est plutôt orientée vers l'administration. Les personnes interrogées estiment que l'UFSH devrait maintenant tenir compte des besoins en formations de courte durée, ciblées en fonction des besoins réels de l'administration ou des opérateurs.

Pour l'ENEM, les sortants sont très recherchés par les opérateurs, malgré le peu de pratique dans la formation et un certain retard dans le programme vis à vis de l'évolution technologique et de l'exploitation des bateaux.

La dernière année de formation à l'ESSA doit familiariser les étudiants aux activités de l'administration et à la gestion d'entreprise en renforçant les contacts avec les opérateurs et l'administration. Les sortants de cette école doivent également compléter leur formation sur la pêche, soit à l'extérieur, soit à l'UFSH, mais cette formation devra être de courte durée.

Pour la formation des pêcheurs traditionnels et artisanaux, les opinions sont partagées sur la conception de cette formation. Certains pensent qu'il est mieux de former les pêcheurs directement dans leurs villages (plus de pêcheurs formés, non coupés de leurs milieux, possibilité d'application immédiate des techniques acquises), alors que d'autres trouvent que les centres de formation permanents sont plus favorables dans la mesure où ces centres sont mieux équipés et que les pêcheurs sont plus disponibles (plus concentrés, moins de contraintes familiales).

Les mêmes personnes interviewées ont également exprimé leur opinion sur le système de formation le mieux adapté à l'avenir, aussi bien pour l'administration que pour les sociétés et pour les pêcheurs. La formation pour l'administration devrait s'orienter essentiellement sur des aspects techniques et socio-économiques avec plus de pratique. Cette formation permettra à l'administration de disposer de plus de cadres techniques, capables d'être de vrais partenaires pour les opérateurs, de les conseiller et même de démontrer certaines nouvelles techniques aux petits et moyens opérateurs. Pour les aspects de l'administration, la formation des cadres déjà en poste doit se faire sous forme de recyclage de courte durée sur des thèmes bien ciblés. Les autres candidats intéressés par un travail dans l'administration, doivent d'abord acquérir une expérience dans le domaine des pêches avant de suivre une formation spécifique dans les écoles halieutiques.

3.3. Points de vue des élèves/étudiants sortants

Rappelons que l'interview a été réalisé avec 61 élèves/étudiants sortants dont 15 de l'EASTA, 32 de l'UFSH, 10 de l'Université de Toliara (Filière océanologie), 2 de l'ENEM et de 2 de l'ESSA. Environ 70% des personnes interviewées ont moins de 40 ans, 26% seulement sont originaires des côtes alors que 18% proviennent de familles de pêcheurs.

En considérant la proportion des enquêtés par école par rapport au total de l'échantillon, ainsi que la spécificité des opinions et des établissements concernés, les résultats qui suivent ont été traités et présentés distinctement pour chaque institut ou école.

Pour l'EASTA, la moyenne d'âge est moins élevée que l'ensemble de l'échantillon (29 ans). Ils' proviennent en majorité (60%) des régions côtières. De même, 27% ont une tradition familiale de pêche. Ils ont tous au moins le niveau secondaire de classe terminale, dont 27% ont déjà fait des études universitaires ; 33% d'entre eux avaient déjà un emploi avant la formation.

L'assurance d'un débouché, la spécialisation, l'intérêt pour le secteur, la tradition familiale, la possibilité de prise en charge par l'école (hébergement et nourriture) constituent les principales motivations qui ont justifié le choix pour l'EASTA.

Parmi les 15 enquêtés, 8 travaillent dans le secteur des pêches dont 2 comme stagiaires. En général, ils sont satisfaits de leur travail, mais déçus du salaire. Pour la majorité de ces personnes, l'adéquation entre la formation et les tâches effectuées actuellement n'est que partielle. Presque tous éprouvent un besoin de formation complémentaire en technologie du froid, en crevetticulture, en aquaculture, en biologie marine et océanographie.

Répondant aux questions sur l'utilité et l'efficacité de la formation, les personnes enquêtées ont jugé le programme orienté vers les besoins de l'administration et non vers ceux des entreprises. Ce programme est considéré en général comme trop théorique, avec peu de pratique et de stage. Les éléments du programme (modules), s'ils étaient effectivement réalisés, seraient jugés équilibrés entre eux et la durée de la formation considérée comme satisfaisante. Ils constatent que la 3éme année, au lieu d'une spécialisation, n'est qu'une simple ouverture polyvalente sur les autres secteurs (agriculture, élevage, eaux et forêts).

L'ensemble des interviewés jugent les enseignants compétents, mais en nombre insuffisant, en particulier les praticiens et les spécialistes.

En ce qui concerne l'UFSH, sur les 32 sortants enquêtés (dont 7 femmes), la majorité a entre 30 et 40 ans. 9% seulement ont déclaré être originaires des côtes et les motivations principales ayant justifié leur choix pour cet institut sont la spécialisation, le perfectionnement et l'assurance d'un débouché dans un secteur en développement.

La majorité des personnes enquêtées travaillent dans l'administration. D'après eux, il n'existe que des liens partiels entre les tâches à effectuer et la formation acquise. Des besoins de formation complémentaire en gestion, administration, en techniques de pêche, en vulgarisation ont été exprimés (en particulier le besoin de stage). Dans l'ensemble, la formation semble être satisfaisante, mais il est nécessaire de la compléter par la pratique, car elle est jugée trop théorique. La conception du programme est orientée vers les besoins de l'administration. Elle est mal organisée et devrait être améliorée. Le planning est souvent perturbé à cause des problèmes d'organisation des activités de formation pratique et de la disponibilité dans le temps des encadreurs. Dans l'ensemble, ils jugent les modules déséquilibrés entre eux et la durée est considérée insuffisante.

Pour 12 sur 32 des enquêtés, les enseignants sont jugés compétents, tandis que 7 sur 32 considèrent qu'ils manquent de pédagogie; le reste des sortants a refusé de se prononcer. Pour améliorer la formation, il est nécessaire d'augmenter la pratique et les stages et de revoir le choix des enseignants. Mais il semble nécessaire d'uniformiser le niveau des candidats à l'entrée, de maintenir le concours et de les choisir en fonction de leurs motivations.

Sur la question du système future de la formation à court et moyen terme, les enquêtés pensent qu'il faudrait former davantage de cadres moyens dans des écoles ou centres spécialisés en halieutique par une formation de courte durée. Le problème de la formation des formateurs a été aussi soulevé.

Pour la Filière océanologie de l'Université de Toliara, l'interview a porté sur 10 sortants (30– 40 ans), dont presque tous sont originaires des régions centrales. La motivation principale justifiant le choix de cette école pour ces 10 sortants est l'assurance d'un débouché à la sortie.

Parmi ces 10 sortants, 3 travaillent actuellement dans le secteur des pêches, 4 sont dans l'enseignement et la recherche et 3 autres sans emploi. Pour la majorité d'entre eux, les liens entre les tâches effectuées actuellement et la formation acquise sont positifs ou partiels. Toutefois, ils sentent la nécessité d'une formation complémentaire, notamment dans la gestion et dans l'économie des pêches.

Ils considèrent que le programme est conçu pour une formation générale, qui ne répond pas directement aux besoins de l'administration ni à ceux du secteur privé ou de la recherche. Toutefois sa durée est jugée acceptable par presque tous. Les modules équilibrés et la nécessité de voyages d'études sont aussi mentionnés. Ils indiquent aussi l'insuffisance d'encadreurs. Pour améliorer la formation, la spécialisation immédiate dès la lère année a été exprimée.

Pour ce qui est l'ENEM et de l'ESSA, 4 personnes seulement ont pu être enquêtre enquêtées. En effet, rappelons que les sortants de l'ENEM ont été difficile à joindre (étant souvent en mer) et pour l'ESSA, la majorité était en vacances pendant l'enquête.

Les opinions exprimées par ces quelques sortants de l'Université d'Antananarivo semblent reprendre celles exprimées par les sortants des autres établissements, à savoir : programme plutôt orienté vers l'administration et la recherche avec un manque de pratique. En ce qui concerne l'ENEM, le programme leur paraît conçu pour les armateurs et les sociétés d'armement avec une durée jugée suffisante. Néanmoins, un besoin de recyclage est ressenti eu égard à l'évolution des techniques et de la technologie de pêche.

En résumé, du point de vue des élèves et étudiants sortants des établissements de formation considérés ici, il ressort que:

Cependant, différents besoins de formation complémentaires semblent exister, surtout dans le domaine de la gestion en général, des statistiques et informatique, de la gestion des projets, de la biologie marine, de la technologie des pêches, du contrôle de qualité.

3.4. Point de vue des formateurs-encadreurs

Les formateurs/encadreurs interrogés (au nombre de 12), pour un âge moyen de 39 ans, sont dans le métier depuis 9 ans en moyenne (2 à 20 ans).

Ils entretiennent tous plus ou moins des relations avec l'administration chargée de la pêche (centrale ou décentralisée) et des entreprises de pêche (participation des opérateurs et des responsables d'administration dans les conseils d'administration, d'orientation, identification de postes de travail, des thèmes de stages, etc.).

D'une manière générale, la durée de formation dans différents établissements est jugée conforme aux objectifs et les programmes sont conçus pour répondre aux besoins des différentes branches du secteur : administration, privé, formation, recherche. Cependant, des problémes de concrétisation peuvent empêcher l'efficacité des sortants.

Pour répondre aux besoins du secteur, les formateurs enquêtés pensent que les établissements de formation devraient :

La sélection à l'entrée de toutes les formations (qui doit être maintenue) est souvent effectuée en fonction des possibilités d'embauche, alors que les besoins théoriques seraient importants, ces possibilités se heurtent à la limitation des postes budgétaires, au manque de crédits pour l'autoemploi et à la limitation et à l'ignorance des chefs d'entreprise de leur besoins réels en spécialistes.

Les formateurs interviewés, conscients des limites de recrutement tant au niveau de l'administration que des entreprises, préconisent d'une part de mettre en place une formation professionnelle à la carte de courte durée (en fonction des modules) et d'autre part, d'assurer un suivi technique aux sortants tout en collaborant à la création de conditions facilitant l'auto-emploi.

Pour que le système de la formation halieutique soit plus efficace, les formateurs estiment qu'un financement extérieur est nécessaire pour aider au fonctionnement de la formation halieutique (infrastructures, équipements, formation de formateurs, documentation, etc.). La pérennité nécessite parallèlement le financement de l'Etat et des entreprises (sous forme de partenariat ou de taxes professionnelles). Par ailleurs, ces formateurs pensent que le jumelage avec des institutions étrangères équivalentes sont à encourager.


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