8.- LAGUNA DE BAY

La Laguna de Bay est le plus grand lac d'eau fraîche des Philippines; elle a une superficie de 90.000 hectares. Il s'agit en réalité d'un vaste étang car les profondeurs maxima trouvées en saison pluvieuse et en saison sèche sont respectivement de l'ordre de 3,76m et 1,59 m.

De Septembre 1977 à Septembre 1978, la Station de Recherches Piscicoles d'Eaux Douces de Binangonan, Rizal (SEAFDEC) a entrepris des études destinées à connaître les paramètres physico-chimiques et les caractéristiques biologiques de ce plan d'eau, composition et densité du peuplement piscicole dépendant on le sait de l'environnement.

Lors des études, le lac a été divisé en 12 zones. Les prélèvements et observations physico-chimiques y ont été effectués toutes les deux semaines et ont donné les résultats suivants :

8.1 - Facteurs physico-chimiques

Si l'on se refère aux valeurs du pH, on a affaire à une eau neutre ou légèrement basique. Il n'y a pas de fluctuations significatives du pH.

Le maximum de salinité a été observé en saison sèche à l'embouchure de la rivière Pasig, unique déversoir du lac. Le niveau du lac baisse en effet à cette période et la mer et l'eau polluée débouchent dans le lac. C'est dans cette même embouchure qu'a été observée la plus basse concentration d'O₂ dissous, lequel phénomène est dû aux hautes températures et aux agents polluants. Pour le reste du lac, la concentration en O₂ dissous est suffisante surtout en période de fortes pluies.

Généralement, il n'y a pas de stratification thermale du lac, la différence de température entre la surface et le fond étant inférieure à 1°C.

Les bas taux de concentration d'azote total étaient uniquement observés en saison sèche au cours de laquelle les nitrates sont utilisés par le plancton alors abondant. A ce moment, le phosphore et le carbone augmentent.

Les analyses ont indiqué en général des teneurs très intéressantes en nitrates et en phosphates fertilisant l'eau et enrichissant le fond, favorisant croissance et survie.

8.2 - Facteurs biologiques

Les premiers résultats obtenus ont montré des taux de production remarquablement élevé pour un lac tropical eutrophique. Les récoltes effectuées ont également montré un phytoplancton varié suivant les saisons et suivant les stations. La faune benthique est essentiellement composée de mollusques.

L'étude de la Laguna de Bay se poursuit pour obtenir plus d'informations car les données actuelles ne sont que partielles.

En résumé, la Laguna de Bay est un vaste étang peu profond, aux eaux neutres ou légèrement basiques, riches en matières minérales et organiques. La lumière y pénètre facilement et le cycle de la production primaire est rapide. L'eau a, à tous les endroits visités, la couleur vert foncé caractéristique des milieux riches en algues planctoniques.

L'existence de 17.000 canards élevés au bord du lac ajoute encore à la fertilité du lac par la fraction d'aliments gaspillés par les animaux et les déjections organiques de ceux-ci.

En 1970, la production du lac Laguna de Bay était estimée à 35.000 Tonnes soit un rendement de 350 Kg/ha. Ce rendement a été porté à 5 Tonnes/ha en 1973, année à partir de laquelle est né le premier enclos sur une superficie de 4 Ha. Il existe actuellement 4.300 ha d'enclos où la production est de 17.200 Tonnes. Si le rendement par hectare du reste du lac qui a été exploité en 1970 par 13.000 pêcheurs se maintient à 350 Kg/ha, la production y est de (90.000–4.300) 350 = 29.995.000 Kg ou 29.995 Tonnes. La production totale du lac est alors actuellement de 47.195 Tonnes.

Le système enclos qui sera défini plus bas est une véritable innovation dans l'industrie piscicole philippine; la superficie des enclos varie de 1 ha à plusieurs hectares.

J'ai pu discuter avec un pisciculteur qui travaille pour le compte d'un propriétaire d'enclos établis sur la Laguna de Bay. Celui-ci possède deux enclos de 30 ha chacune, construits respectivement en 1976 et en 1978. L'enclos est constitué par une barrière de bambou entourée de filets à différentes mailles qui dépassent le niveau du plan d'eau pour éviter les fuites des poissons (Voir photo).

Le dispositif dure deux ans : à partir de la 3è. année, les bambous sont remplacés au fur et à mesure qu'ils pourrissent. La duréc d'utilisation de la partie immergée du filet est de 5–6 ans, celle de la partie aérienne est de 3 ans.

L'enclos est en général compartimenté et les dimensions des mailles des filets qui entourent l'enclos et les compartiments varient en fonction des destinations de ces derniers (alevinage, grossissement).

Le propriétaire a sa propre écloserie où il fait la reproduction artificielle des espèces exotiques telles carpes chinoises et carpe indienne. Il y fait également grossir les larves de Chanos qui sont capturées sur les côtes. Quand ces larves atteignent la taille de juvéniles, elles sont transportées en barque pour être transférées en enclos. (Voir photo).

En étang de grossissement, la mise en charge est de 40.000 alevins de Chanos à Il'hectare. Au cas où ce chiffre n'est pas atteint, il est complété par d'autres espèces de poissons comme la carpe argentée, la carpe à grosse tête, le rohu. Les étangs ne sont pas fertilisés et les poissons non nourris. L'élevage dure 7 à 9 mois au cours desquels les poissons élevés atteignent les poids suivants :

Des pêches partielles ont lieu à partir du 5ème mois.

Les taux de mortalité n'excèdent pas 10% quelques jours après les mises en charge. Lors de mon passage, j'ai pu remarquer que 2 ou 3 Chanos de 500 g flottaient sur l'eau, à l'intérieur de l'enclos. On me répondait que cas de mortalités arrivent lorsqu'il y a insuffisance d'oxygène due à la décomposition des matières organiques.

D'après le pisciculteur, une année de récolte suffit pour récupérer les coûts d'investissements.

Avec la multiplication des enclos, s'accroît parallèlement, semblet-il, le mécontentement des pêcheurs riverains du lac, ceci pour la raison essentielle suivante : la construction d'enclos nécessite un investissement non négligeable que seuls les gens riches peuvent réaliser. En général, ce sont ces derniers qui sont propriétaires d'enclos; ils habitent les villes et confient l'exploitation des enclos à des salariés qui sont pour la plupart les habitants des zones avoisinant le lac. Pour ces derniers, leur zone de pêche devient de plus en plus réduite d'autant plus qu'actuellement les demandes de construire des enclos affluent au hureau den Pêches et Aquatiques.

Il convient de mentionner que les propriétaires d'enclos doivent une redevance annuelle de 200 Pesos par hectare.

Autre problème : dépressions cycloniques qui causent aux enclos des dégâts importants.