Bien qu'elles soient mentionnées collectivement comme poissons de l'Extrême-Orient, ou poissons herbivores, ou Carpes chinoises principales ou simplement poissons chinois, elles sont assez différentes au point de vue biologique, tout en ayant cependant quelques caractéristiques similaires.
Leur nourriture et leurs habitudes alimentaires sont notamment très différentes, et celles-ci sont de la plus grande importance pour les pisciculteurs.
est, comme son nom l'indique, un mangeur de plantes aquatiques. Mais elle consomme également l'herbe verte naturelle des prairies, fraîchement coupée. Quand elle atteint une taille suffisante, elle mange la grossière végétation aquatique émergeante telle que roseaux, joncs et autres plantes semblables.
Elle a évidemment des préférences pour certains types de végétation aquatique qu'elle sélectionne en premier lieu. Par exemple la Jacinthe d'eau (Eichornia crassipes) n'est consommée que quand il n'y a aucune autre nourriture disponible et que la Carpe herbivore est réellement affamée. C'est un poisson ayant son habitat en bordure des étangs.
La Carpe herbivore n'est jamais élevée seule en monoculture et il n'est pas du tout indiqué de le faire. Selon un vieux proverbe chinois, une assez grosse Carpe herbivore bien nourrie, alimente 3 autres poissons. Et ceci est vrai, parce qu'une grosse Carpe herbivore consomme chaque jour une grande quantité de matières végétales; elle peut en consommer 30–40%, quelquefois même jusqu'à 100% de son propre poids. Naturellement, la plupart des plantes ingérées quittent le corps du poisson sous forme de matières fécales. Ces matières végétales sous cette forme partiellement digérée, constituent une excellente fumure organique pour l'étang dans lequel les algues, le zooplancton et principalement la faune animale de fond peuvent se développer. Bien entendu, les effets de fumure des Carpes herbivores n'apparaissent pas quand il n'y a pas suffisamment de matières végétales (leur nourriture) dans l'étang.
La Carpe herbivore est plutôt un mangeur agressif. Quand la température de l'étang est assez élevée (au-dessus de 25–26° C.) elle mange abondamment. Sous 18° C son appétit baisse, sa digestion se ralentit, et elle arrête de se nourrir dans les eaux de 15–13° C. Quand elle est élevée en polyculture avec la Carpe commune régulièrement alimentée, elle prend aussi bien la nourriture de cette dernière, notamment les graines qui provoquent quelquefois une inflammation de l'intestin pouvant lui être fatale, si celle-ci se répète souvent.
Cette habitude alimentaire spéciale n'apparaît pas au tout jeune âge de la Carpe herbivore. Sa première nourriture contient des Rotifères et des larves de Crustacés (nauplii); ensuite elle consomme du zooplancton, principalement des Cladocères et des Copépodes. Quand elle est âgée d'un mois et demi (4–5 cm de long) elle commence à mordiller les algues filamenteuses ainsi que les jeunes feuilles tendres des plantes aquatiques sub-mergées. Dès qu'une telle nourriture est disponible, elle change rapidement ses habitudes alimentaires. A 100 gr., une Carpe herbivore consomme une grande quantité de plantes aquatiques tendres, ou d'herbes vertes fraîches finement coupées en petites pièces. Au fur et à mesure de sa croissance, elle prend davantage d'herbes et de plantes aquatiques grossières.
La Carpe herbivore, comme tous les Cyprinidés a la cavité buccale dépourvue de dents; par conséquent elle ne peut couper les feuilles ni les jeunes pousses (jets - bourgeons) des plantes. Par contre elle a les dents pharyngiennes bien développées avec lesquelles elle mâche les éléments végétaux. Il est clair que la Carpe herbivore ne peut enlever les plantes enracinées (riz par exemple); elle prend d'abord un rameau dans la bouche et essaie d'en arracher une feuille; quand elle y parvient, le morceau de feuille est pris et poussé sous les dents pharyngiennes, et le mâchonnement commence. Seul un poisson suffisamment gros peut manger de fortes (dures) plantes aquatiques et des herbes grossières. Ce fait doit être présent à la mémoire quand la Carpe herbivore est nourrie avec des herbes; les grosses Carpes herbivores sont même capables d'éliminer les plantes aquatiques émergeantes, en les abattant dans l'eau, à la suite d'efforts continus.
Habituellement, on nourrit la Carpe herbivore à l'aide des herbes croissant sur les digues des étangs. Il faut environ 0.10 Ha de surface plantée d'herbes pour nourrir le stock de Carpes herbivores d'un étang de 1 Ha. La Carpe herbivore augmente la production des autres poissons en débarrassant les étangs de leurs algues necives (ou nuisibles) et en fertilisant l'eau des bassins (fumure par les matières fécales); ceci en plus de sa propre production elle-même considérable. Par conséquent c'est un poisson de pisciculture des plus utiles, de différentes façons.
d'autre part, est un poisson-filtreur dont les aros branchiaux sont munis d'un appareil filtreur spécial d'une telle finesse qu'il peut tamiser les algues planctoniques et les débris organiques extrêmement petits, de 0.02 mm. La Carpe argentée se nourrit d'algues planctoniques qui abondent dans un bon étang bien fertilisé. La Carpe argentée est parmi la faune piscicole un spécialiste en aliment, mangeant principalement le phytoplancton; il ne consomme pas d'aliments plus gros et ne se nourrit jamais sur le fond des étangs. C'est un réel poisson filtreur exploitant les eaux pélagiques (son habitat). Il ne peut faire l'objet d'aucune pêche sportive du fait qu'il ne mord à aucun appât.
En pisciculture moderne, la Carpe argentée se révèle un poisson des plus utiles et essentiellement nécessaire, puisqu'elle utilise les ressources alimentaires des étangs (naturelles et renouvelables) qui ne sont mangées par aucun autre poisson et qui se développent en masses importantes dans les étangs bien fertilisés. En gardant sous contrôle toute surpopulation d'algues planctoniques, elle accroît la productivité biologique des étangs, assurant par cette activité une meilleure croissance de production des autres espèces de poisson élevées en même temps. La production de Carpe commune est réellement plus élevée en utilisant les mêmes moyens, avec la Carpe argentée que sans elle; en plus de la production de Carpe commune, s'ajoute la propre production plutôt élevée de la Carpe argentée. Ainsi, le pisciculteur a deux avantages en élevant simultanément Carpe argentée et Carpe commune; il accroît indirectement la production de la Carpe commune et obtient en plus, la production de chair de la Carpe argentée. La carpe argentée également, n'est pas élevée en monoculture. De même que la larve de Carpe herbivore, la larve de Carpe argentée commençant juste à se nourrir, consomme des Rotifères ainsi que des petits Crustacés. L'alevin commence à manger des algues quand il est âgé d'un mois, où il atteint alors 4–5 cm de longueur.
Avec l'âge, ce poisson ne change plus ses habitudes alimentaires.
est très proche de la Carpe argentée. Elle est également un poisson filtreur (tamiseur) mais son appareil filtreur n'est pas aussi fin que celui de la Carpe argentée. C'est également un poisson se nourrissant en pleine eau, prélevant sa nourriture dans la masse des eaux libres (son habitat) des étangs. Son alimentation habituelle comprend des animaux planctoniques (zooplancton) ainsi que des algues de plus grosse taille (phytoplancton). Il a été constaté que dans les bassins contenant un nombre suffisant de Carpe à grosse tête, il ne se développe jamais de “fleurs d'eaux” d'algues bleu-vert; en contrôlant le développement des algues bleu-vert, la Carpe à grosse tête se révèle un poisson d'accompagnement extrêmement utile en élevage piscicole, bien que jusqu'à un certain point elle entre en compétition avec la Carpe commune, en ce qui concerne le zooplancton. La nourriture de la larve de Carpe à grosse tête est identique à celle des larves de Carpe herbivore et de Carpe argentée.
Les alevins de Carpe argentée et de Carpe à grosse tête sont d'apparences très similaires ; mais la nageoire pectorale de la Carpe argentée est plus courte, n'atteignant pas la base de la nageoire abdominale, tandis que chez la Carpe à grosse tête, la nageoire pectorale est plus longue, dépassant la base de la nageoire abdominale.
Bien que la Carpe noire (ou Carpe à mollusques) et la Carpe de vase ne soient pas encore introduites à Madagascar, il semble utile de mentionner ici leur nourriture et leurs habitudes alimentaires.
se nourrit principalement de mollusques, escargots et limaces vivant sur le fond des étangs ou sur les plantes aquatiques. Du fait que certains mollusques sont les vecteurs (hôtes intermédiaires) d'une maladie très dangereuse pour l'homme, la Bilharziose, la Carpe noire peut constituer un excellent moyen de contrôle de l'expansion de cette maladie, voire même de son éradication. D'autre part, les mollusques se développent abondamment sur le fond des étangs, restant inexploités si la Carpe noire n'y est pas stockée.
est un poisson de croissance modérée qui se nourrit principalement des débris ou déchets accumulés sur le fond des étangs ; il consomme également les animaux de fond, tels que vers, insectes, larves, etc… Sous ce rapport, il entre en compétition directe avec Carpe commune ; cependant, il rend d'excellents services pour l'étang, ainsi qu'au pisciculteur, en tant que nécrophage consommant les matières fécales des autres poissons.
Il est bien connu que la croissance de chaque espèce de poisson dépend des caractères génétiques propres au poisson en question, ne pouvant se réaliser entre autres, que si une nourriture suffisante, qualitativement et quantitativement est continuellement disponible. Génétiquement, les Carpes chincises principales sont des poissons à croissance rapide, pouvant atteindre facilement un poids de 5 à 10 Kg. Sous cet aspect, la Carpe de vase est une exception ; c'est un poisson à croissance modérée atteignant seulement 2–3 Kg.
Parmi les 3 espèces, la Carpe herbivore a la croissance la plus lente. Mais dans les eaux tropicales et subtropicales où la nourriture est illimitée, elle peut atteindre 2 à 2.5 Kg en un an quand la densité de stockage est de l'ordre de 100–200 poissons à l'Ha. Normalement elle parvient au poids de 0.5–0.8 Kg dans la première année, quand le taux de stockage est de 400–500 poissons/Ha. Les poissons plus âgés atteignent facilement 10–20 Kg.
La Carpe argentée grandit également très bien. Quand la densité de stockage est de 1.000–1.500 poissons/Ha, et que l'étang est bien fertilisé, la Carpe argentée atteint un poids de près de 1 Kg en 8 mois de temps. Des Carpes argentées âgées de 3–4 ans peuvent atteindre facilement le poids de 4 à 7 Kg dans les eaux tropicales riches. Même en Europe où la période de production (croissance) est seulement de 100–120 jours dans l'année, ces Carpes âgées de 7 ans atteignent un poids de 14–15 Kg.
Parmi les 3 espèces, la Carpe à grosse tête (Carpe marbrée) a la croissance la plus rapide. Dans sa première année elle peut atteindre un poids de 1,5–2 Kg, tandis que les spécimens âgés de 3–4 ans peuvent peser de 7 à 10 Kg.
Mais il est à souligner que l'aptitude à cette rapidité de croissance des Carpes chinoises principales ne peut se réaliser que quand celles-ci disposent continuellement d'assez de nourriture adéquate et qu'elles vivent dans des eaux de prodondeur suffisante, d'au moins 1 à 1.50 m. Les Carpes chinoises principales sont des poissons d'eau chaude : leurs excellentes aptitudes de croissance rapide trouvent leurs capacités de développement optimum parmi les conditions d'environnement qui prévalent en régions tropicales et subtropicales.
En Europe, la Carpe herbivore ainsi que la Carpe argentée femelles atteignent leur maturité sexuelle en 5–6 ans ; les mâles sont mûrs un an plus tôt. La Carpe à grosse tête (marbrée) est parmi les 3 espèces, le poisson d'eau chaude au plus haut degré; elle arrive à maturité à l'âge de 7–8 ans. Mais dans les régions tropicales et subtropicales, la maturité sexuelle se développe plus rapidement; des spécimens âgés de 2–3 ans peuvent être déjà sexuellement mûrs ; la Carpe argentée notamment. La maturité sexuelle dépend également de la qualité de la nourriture, ce qui est bien compréhensible. Du fait que la maturité sexuelle est en relation étroite avec la température de l'eau, il est évident que dans les régions ayant des eaux plus chaudes (comme à Kianjasoa) les Carpes atteignent plus tôt ce stade de maturité que dans les zones à eaux plus fraîches (comme à Andasibe - dans le cas de Madagascar).
