il paraît évident que l'évolution des conditions de milieu exposée dans ce document pose de sérieuses inquiétudes pour l'avenir des pêches des Pangalanes et leur réhabilitation.
Aussi, une étude par un spécialiste et aménagiste de l'environnement halieutique devrait être menée en vue de préciser les types d'aménagements qu'il conviendrait d'entreprendre, sur le plan physique (réouverture d'exutoires - contrôle des échanges d'eaux - choix et type de travaux que de telles opérations impliquent, etc…) et biologiques (associations d'espèces et exploitation). Une première mission d'orientation générale (2 à 3 mois) pourrait prendre place en 1979 (budget non disponible à cette fin en 1978).
Dans l'immédiat, certaines mesures d'ordre pratique devraient être prises par les autorités locales concernées pour dégager notamment le canal de TAMATAVE et garder par la suite le contrôle sur Eichornia crassipes.
- Tout d'abord, un Arrêté devrait interdire la mise en place de tout nouveau barrage. Ensuite, les autorités locales concernées devraient parvenir à convaincre les pêcheurs de ne plus utiliser le barrage intégral tel que pratiqué actuellement (filet mobile bloquant l'espace laissé libre au milieu du barrage, pour permettre la navigation) et d'arrêter totalement la pêche du Mulet pendant la première et la dernière descẽnte de ce poisson à la mer, o'est-à-dire uniquement aux lunes de Mai et de Septembre, de manière à donner une chance à un certain nombre de reproducteurs de rejoindre la mer pour s'y reproduire et assurer ainsi le recrutement de nouveaux stocks. Les dimensions des mailles du filet utilisé en barrage intégral (filet mobile) ne devraient pas être inférieures à 5 cm de côté.
L'administration des Eaux et Forêts devrait pouvoir obtenir par un bon encadrement technique, la coopération des Chefs de barrage ainsi que des Fokonolona pour l'application de simples mesures de police à prendre dans le sens indiqué ci-dessus au niveau des Fokontany, et dont les effets ne peuvent être mesurés qu'à long terme (d'où nécessité d'un contrôle statistique permanent). Il faut en effet quatre ans à un jeune alevin de Mulet venu de la mer pour atteindre en lagune le stade adulte impliquant alors son retour à la mer pour s'y reproduire.
La première expérience sur l'introduction de cette technique a été couronnée de succès; toutefois ces résultats doivent être confirmés au cours de 1978/79 par des essais répétés portant notamment sur la dimension type qu'il conviendrait de donner à ces pêcheries à caractère collectif, ainsi que le rythme de leur exploitation en vue d'en obtenir le rendement optimum; dès que leur gestion sera mise au point, la Brigade des Pêches des Pangalanes assistée du Projet pourra entreprendre un programme de vulgarisation de cette méthode auprès des collectivités des pêcheurs, opération entrant dans le cadre de l'aménagement des pêches. Cette vulgarisation implique au préelable la reconnaissance par sondage des endroits convenant à l'implantation de ce type de pêcherie. Si Gobius persiste à investir les acadjas, il conviendra de l'éliminer ou tout au moins de le réduire par capture au moyen d'engins nouveaux (point 4.2.1.3 ci-après), ou par des pêches électriques systématiques.
Toujours dans l'optique de l'aménagement des pêches et d'une exploitation plus rationnelle des stocks, le Projet secondé du personnel technique de contrepartie procédera à l'introduction de nouveaux engins qui seront, dans la mesure du possible, en monofilament de nylon invisible, en raison de la forte transparence des eaux ; il s'agira notamment de :
verveux classiques en vue d'accentuer l'effort de pêche sur les voraces.
trabaques ou verveux d'un type particulier, avec ailes et barrière, à fixer sur des perches ; cet engin serait susceptible d'améliorer encore l'effort de capture des voraces, mais son introduction visorait surtout la pêche de l'Hétérotis.
filets-sennes pour l'exploitation des zones d'eaux libres littorales ou profondes mais situées hors des zones frayères de certaines espèces dont Tilapia nilotica et Tilapia mossambica notamment.
Il s'agit en fait d'engins de capture laissant le poisson en vie, et donnant par conséquent un produit de première qualité.
Enfin, en complément de ces moyens de production, des viviers flottants en grillages de plastique permettant le stockage, la stabulation et le maintien en vie du poisson, jusqu'au moment de sa commercialisation.
L'effort déjà entrepris, tendant à créer un meilleur équilibre des stocks doit être poursuivi ; les actions immédiates envisageables porteront respectivement sur :
des pêches sélectives pour la capture des voraces
des mesures de limitation de certains types d'exploitation, notamment des barrages à Mulets.
la création de zones- refuges (type acadja)
la création ou l'aménagement de zones frayères pour Carpes. Etudier la même possibilité pour Tilapia. Indépendamment des acadjas, il conviendrait de mettre en place des frayères artificielles facilement réalisables avec les matériaux locaux (fibres de piassava, branches de Casuarina, parcs d'Eichornia crassipes, etc.…), de préférence dans des diverticules contrôlables et protégés. Il conviendra vraisemblablement de renforcer la protection de ces frayères, en y pratiquant régulièrement (une fois par semaine) la pêche électrique pour éliminer Gobius giuris.
la poursuite et l'intensification des réempoissonnements dont notamment :
Les conditions de réussite de ces apports exogènes sont pratiquement assurées si les précautions élémentaires suivantes sont appliquées :
les déversements d'alevins seront massifs et répétés : il faut introduire plusieurs milliers d'individus à la fois.
les déversements s'effectueront dans des diverticules préalablement isolés, fermés par une barrière en filet ou en clayonnage, interdisant l'accès massif aux voraces ; ces diverticules répondront par ailleurs aux exigences de milieu propres à chaque espèce introduite. Pour certaines d'entre elles, comme par exemple le Mulet, l'élevage en enclos pourrait être envisagé.
les alevins seront libérés de leurs zones pilotes d'introduction, dès qu'ils atteignent une taille suffisante leur permettant d'échapper aux voraces.
N.B..: Les alevins de Carpe et Tilapia devraient provenir des Stations des Recherches Piscicoles qui détiennent des souches pures, alors que les Stations des Eaux et Forêts sont mobilisées pour la production d'alevins de Carpe servant au programme de développement rizipiscicole.
Cette étude a souligné suffisamment la complexité des problèmes que pose l'aménagement écologique et piscicole des Pangalanes pour comprendre l'importance de l'encadrement technique requis, et dont la valeur et la compétence joueront un rôle déterminant dans le succès ou l'écheo des opérations préconisées ci-dessus. Il est non moins évident que la Brigade des Pêches à son stade actuel, n'a pas de personnel de niveau scientifique et technique suffisant pour assumer pleinement la responsabilité de ces opérations. Pour autant qu' elle soit déchargée de ses fonctions forestières cumulées jusqu'alors avec ses fonctions piscicoles, cette Brigade peut mener à bien certains travaux pratiques d'exécution, tels que l'installation de pêcheries pilotes, les réempoissonnements, les pêches de contrôle, la vulgarisation et surtout le recueil des statistiques, mais elle n'est pas à même d'aborder les problèmes d'aménagement écologique et piscicole découlant d'études préalables de milieu, ni d'en contrôler l'évolution. Aussi, dans une perspective d'avenir plus large, au niveau de la Province de TAMATAVE et en fonction de la décentralisation administrative en cours, il semble tout indiqué de prévoir au cours du Projet, la formation d'un Ingénieur halieutique à affecter dans cette Province pour la gestion de ses deux plans d'eaux principaux : le Lac Alaotra et les Pangalanes qui totalisent à eux seuls 38.000 Ha, soit 41% de l'ensemble des plans d'eaux de plus de 1.000 Ha de tout le pays (93.620 Ha).
L'importance du recueil des données statistiques sur l'ensemble des activités halieutiques des Pangalanes n'est plus à démontrer (Réf. Document technique No1 du Projet).
Ces données de base verront leur valeur encore accrue, carelles constitueront le meilleur paramètre permettant notamment de contrôler l'évolution des stocks, de déterminer les mesures s'avérant utiles à prendre en fonction de cette évolution, de mesurer l'impact des aménagements entrepris, sur le milieu et la faune piscicole, fournir les indications nécessaires sur l'orientation à donner aux aménagements futurs, etc…
En conséquence, il y aura lieu de renforcer en temps opportun le personnel de la Brigade des Pêches par les agents d'exécution nécessaires à l'encadrement technique des opérations de contrôle (statistiques), ainsi que pour mener à bien ses fonctions de vulgarisation auprès des pêcheurs.
