Le régime forestier au Mali est peu efficace parce que ne reposant sur aucune base scientifique. En effet, les taux sont fixés sans tenir compte du coût réel de production. Les taxes de bois sont nettement en deçà du coût réel de production ce qui pose la problématique de la régénération de nos forêts. Les recettes générées sont trop dérisoires pour faire face aux besoins de réinvestissement qui sont par contre énormes. Le régime fiscal forestier est également peu efficient dans la mesure où les coûts de recouvrement sont quelque peu élevés par rapport aux montants perçus. Le recouvrement des recettes induit des dépenses trop onéreuses (salaires des agents forestiers chargés du recouvrement, fonctionnement, etc.) ce qui n’autorise guère une quelconque efficience. L’exploitation frauduleuse du bois constitue aussi un handicap majeur pour l’efficacité du régime fiscal. Au-delà des taux dérisoires des taxes, on assiste à une évasion fiscale qui réduit les possibilités de réinvestissement dans les forêts.
Les règles sont claires en ce sens que les taxes sont déterminées par type de zone et selon la nature du produit. Le système paraît cependant peu équitable aux autres éléments de la filière notamment les commerçants transporteurs et les revendeurs de bois. Les consommateurs payent aussi un lourd tribu au système car le bois leur est vendu à un prix prohibitif. Le gouvernement pourrait difficilement augmenter les recettes qu’il perçoit auprès du secteur forestier puisque toute augmentation des taxes du bois engendre ipso facto une augmentation du prix de la consommation ce qui de façon inévitable débouche sur des troubles sociaux. C’est d’ailleurs le phénomène qui a été observé au Mali en juin 1999 avec la grève des exploitants de bois à cause de l’augmentation des taxes intervenue le 17 décembre 1998 par Décret No 98-402/P-RM.
Cette grève des exploitants de bois a occasionné des troubles sociaux graves au niveau de Bamako à cause de la pénurie du bois et du charbon de bois qu’elle a engendré. Il en a résulté une difficulté d’application immédiate du dit décret. Il a fallu observer un moratoire de trois mois pour permettre son application effective sur le terrain l’adaptation des taux de taxes au coût réel de production de bois est une nécessite incontournable si l’on veut mener une politique de gestion durable des ressources forestières. Cette politique de vérité des prix devra être soutenue par les deux mesures d’accompagnement suivantes ;
L’état doit veiller à harmoniser les taxes d’exploitation du bois avec les prix aux consommateurs de manière à réduire les disparités ;
La promotion des énergies de Substitution en vue de réduire la demande de bois. Cette mesure permettra non seulement de réduire l’exploitation intense du bois mais elle a aussi et surtout l’avantage de réguler les taxes et les prix aux consommateurs.
Le régime fiscal forestier au Mali est par nature peu efficace à cause de la faiblesse des taxes perçues qui sont dérisoires pour réaliser des investissements en forêts. Le régime fiscal forestier est aussi inadapté au souci de l’aménagement durable des forêts car le Décret No 98-402/P-RM ne prévoit que 30% de la taxe d’exploitation en zone orientée et 45% de la taxe d’exploitation en zone contrôlée comme recette devant alimenter le fonds d ‘aménagement des forêts. Les recettes d’exploitations sont à 80% réalisées dans la zone incontrôlée ce qui joue négativement sur le niveau du fonds d’aménagement. Au titre des années 1999 et 2000, il n’a été recouvré au titre du fonds d’aménagement que la somme de 14.814.875 FCFA ce qui manifestement est insignifiant pour des besoins d’investissement. Il existe un partage des revenus avec d’autres groupes d’intérêt dans le secteur notamment les chambres d’agriculture et les communes. Globalement l’effet net des taxes et subventions dans le secteur forestier n’est pas équitable dans la mesure où les prélèvements opérés sur la ressource ne sont pas compensés en terme de réinvestissement.
Le régime fiscal forestier doit être révisé de manière à prendre en compte l’aménagement durable des forêts. Cette révision devra tenir compte des trois aspects suivants :
• les taux de taxes doivent être rehaussés pour générer des recettes conséquentes susceptibles de financer les travaux de régénération des forêts ;
• la répartition des recettes perçues devra réserver la part la plus importante pour l’aménagement des forêts ; et
• l’instauration des fonds d’aménagement, même sur les zones incontrôlées.
Le niveau global des dépenses publiques spécifiquement ciblées sur l’aménagement durable des forêts est trop faible voire insignifiant au regard des besoins d’investissement en forêts et en raison de la nécessité et de l’urgence de maintenir l’équilibre écologique dans les formations forestières.
Les dépenses publiques sur l’aménagement durable des forêts concernent surtout la formation du personnel d’encadrement et les populations, les travaux sommaires d’entretien des forêts (ouvertures de pare feu), l’élaboration des plans d’aménagement et de gestion. L’aspect le plus important mais le moins financé reste le reboisement en forêt pour accélérer le processus de reconstitution des ressources forestières.
Les problèmes critiques qui gênent le financement des institutions financières publiques sont de deux ordres :
• la faiblesse des moyens de l’état qui ne favorise pas une affectation conséquente de fonds à l’aménagement durable des forêts ; et
• l’attitude de bailleurs de fonds qui décident à l’avance de l’utilisation de leurs fonds à des postes de dépenses qui ne correspondent pas le plus suivant aux priorités nationales en matière d’investissement en forêt.
Il importe donc de prendre les mesurer suivantes :
• inverser la tendance actuelle du budget d’état afin qu’il accorde la priorité aux dépenses liées à l’aménagement durable des forêts ; et
• amener les bailleurs de fonds à tenir compte des priorités nationales en matière d’investissement durable des forêts dès la conception des projets forestiers.
Les dons et subventions gérés par les sociétés, les particuliers et les ONG ont eu un impact plutôt timide à cause des approches diverses et souvent contradictoires utilisées par ces intervenants dans l’exécution des actions. Les interventions de ces ONG sur le terrain se font surtout dans un cadre non concerté ce qui occasionne dans bien des cas un gaspillage de ressources financières.
Pour optimiser l’impact des dons et subventions, il est nécessaire de mettre en place un cadre de concertation entre les intervenants et les institutions forestières politiques en vue d’une meilleure coordination des actions sur le terrain.
Il serait intéressant d’entrevoir la possibilité d’utiliser les taxes issues des déf richements dans l’aménagement durable des forêts. De même, les subventions accordées à l’agriculture peuvent être utilisées en partie pour l’aménagement durable des forêts à travers le développement de l’agroforesterie.
Le gouvernement du Mali est résolument engagé dans le soutien au secteur forestier à travers l’édition de textes législatifs et réglementaires en matière de protection et de gestion durable des ressources forestières.
Il s’investit également tous les jours dans la recherche de financement extérieur en faveur de la gestion durable des ressources forestières. L’existence d’un certain nombre de projets forestiers au Mali illustre éloquemment tout l’intérêt que le gouvernement porte à l’aménagement durable des forêts. Cet intérêt du reste a été réaffirmé puisque la protection de l’environnement figure en bonne place dans la constitution du Mali. Des efforts financiers non négligeables sont également déployés par le budget d’état en faveur de l’aménagement durable des forêts mais ils restent cependant très insuffisants au regard des besoins d’investissements en forêt. Des recrutements de personnel forestier sont également opérés chaque année pour palier l’insuffisance des moyens humains. D’importants efforts restent encore à fournir par l’état surtout dans le sens de la révision des taxes d’exploitation des ressources forestières qui devra adapter les taux au coût réel de production de bois. Le gouvernement a élaboré et mis en œuvre la Stratégie Energie Domestique avec l’appui de la Banque Mondiale. Cette stratégie vise la valorisation du bois énergie à travers des mesures d’exploitations rationnelle. Il est opportun que l’état s’engage dans un processus de révision du régime fiscal forestier en vue d’accroître la contribution des ressources intérieures au financement de l’aménagement durable des forêts.