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V. APPLICATIONS DE LA TÉLÉDÉTECTION A L'AMENAGEMENT DES BASSINS VERSANTS

par

Albert Rango 1/

1. INTRODUCTION

La télédétection depuis l'espace a vu le jour en 1960 avec le lancement du premier satellite météorologique TIROS 1. Plusieurs générations de satellites météorologiques ont été lancés depuis et présentent un intérêt certain pour la recherche hydrologique. Les premiers vols spatiaux habités ont eu lieu vers le milieu des années soixante, et des expériences photographiques spéciales ont fourni une masse de renseignements utiles aux divers chercheurs intéressés par les sciences de la terre. Les images en couleur ou noir et blanc des champs de neige et des eaux de surface ont attiré l'attention de quelques hydrologues et de spécialistes de l'aménagement des bassins versants et les premières études exploratoires ont démarré. Vu les résultats positifs obtenus par ces pionniers de la recherche, un satellite appelé LANDSAT-1 (précédemment dé-nommé ERTS-1) destiné à l'étude des ressources de la terre fut lancé le 23 Juillet 1972, suivi par LANDSAT-2 le 22 janvier 1975. Les données fournies par ces deux satellites expérimentaux, par la série de satellites de recherche Nimbus et par les satellites NOAA pour l'étude de l'environnement font actuellement l'objet d'une vaste série d'examens de la part de nombreux chercheurs travaillant sur les ressources hydriques. Les résultats des études les plus récentes faites avec des données LANDSAT sont très bien décrits par Freden et Mercanti (11) et Freden, Mercanti et Becker (12).

2. SYSTEMES DE TÉLÉDÉTECTION ACTUELLEMENT DISPONIBLES

Dans le domaine des sciences de la terre, la télédétection n'est pas une nouveauté et existait déjà avant 1960 quand on employait la photographie aérienne. On s'est servi d'avions volant à basse et moyenne altitude pour étudier l'enneigement, la cartographie des sols, le tracé des voies de communication, pour les prospections pétrolières et minières, ainsi que pour planifier l'utilisation des terres. Bien que toutes ces activités soient antérieures à 1960, il semble que le lancement de LANDSAT ait suscité chez les hydrologues un surcroit d'intérêt et les ait amenés à s'intéresser de plus près aux applications de la télédétection (10). Les hydrologues disposent maintenant de divers types d'instruments et plate-formes de télédétection (certains conçus spécialement pour l'étude des problèmes hydrologiques), mais à l'heure actuelle les détecteurs comportant le potentiel d'application le plus large sont le scanner multispectral (MSS) monté sur LANDSAT et la caméra multispectrale de base portée par des avions volant à haute altitude, comme les U-2. LANDSAT, qui fournit des informations régionales hydrologiques itératives depuis une altitude de 910 km, et 1'U-2 qui couvre avec un fort pouvoir de résolution une superficie limitée depuis une altitude d'environ 20 km tendent à se compléter pour une large gamme de dimensions de bassins et d'opérations d'aménagement des bassins versants.

1/Albert Rango est spécialiste de la Recherche en hydrologie au Goddard Space Flight Center National Aeronautics and Space Administration (NASA), Greenbelt, Maryland, U.S.A., 20771. Cette communication a été proposée pour le Colloque sur l'enneigement des bassins versants de l'American Society of Civil Engineers, 11-13 août 1975, Logan, Utah.

Il est généralement possible d'ajuster les vols de télédétection utilisant des avions volant à basse et moyenne altitude en fonction des besoins de l'utilisateur qui peut pour cela louer les services de diverses entreprises privées et organismes gouvernementaux. La NASA organise souvent, dans le cadre de son projet ERAP (Barth Resources Aircraft Project) des vols à haute altitude pour appuyer diverses missions effectuées par satellites et autres projets de recherche en rapport avec les sciences de la terre. Les supports de télédétection à haute altitude combinent les avantages des détecteurs des satellites et ceux des avions volant à basse-altitude en ce qu'ils permettent d'obtenir des données de forte résolution sur des bassins versants de dimension moyenne. L'équipement du projet ERAP a évolué depuis 1971 afin de répondre à un large éventail de besoins et conditions de recherche et devrait de ce fait pouvoir s'appliquer à la plupart des cas qui peuvent se présenter en matière d'aménagement des bassins versants. L'équipement photographique de base actuellement utilisé sur la plupart des vols se compose de 4 caméras de 70 mm, d'un appareil multispectral et d'une caméra Wild RC-10 à focale de 152 mm. Les 4 caméras de 70 mm coordonnées, avec des distances focales de 45 mm, sont couplées de manière à fournir des images simultanées couvrant de larges portions du spectre photographique, semblables aux images fournies par LANDSAT. Chaque série d'images coordonnées en 70 mm couvre une superficie d'environ 21 km de côté (échelle approximative 1:445 000), avec une résolution au sol moyenne de 12 m. Le Wild RC-10 est une caméra cartographique calibrée de haute qualité, utilisant un film de 240 mm de largeur, Chaque vue produite par le Wild RC-10 couvre une superficie qui représente un carré d'érosion de 30 km de côté (échelle approximative 1:130 000) avec une résolution au sol moyenne de 7 m. Les images en infra-rouge couleur (0,51-0,90mm) sont généralement prises avec la caméra RC-10. Pour les vols à objectifs spéciaux, on dispose d'un certain nombre d'autres caméras à distance focale supérieure, de formes diverses, et de détecteurs électro-optiques.

Etant donné la couverture réduite et moyenne assurée par les avions, les données obtenues sont un peu trop limitées pour de nombreux domaines d'étude potentiels. L'avantage des véhicules spatiaux est qu'ils permettent une surveillance régionale constante, répétitive, de systèmes hydrologiques dynamiques sur tout secteur présentant un intérêt, parfois avec des résolutions raisonnablement fortes. Les satellites LANDSAT 1 et 2 sont des véhicules identiques dotés de caractéristiques orbitales qui amènent chacun des satellites sur tout point donné de la surface terrestre une fois tous les 18 jours. Chaque satellite accomplit 14 orbites par jour, récoltant à chaque orbite des données intéressant une tranche de la surface terrestre de 185 km de largeur. Le franchissement de l'équateur vers le sud se produit approximativement chaque jour à la même heure, vers 09.42 heure locale solaire. Cette configuration orbitale assure au jour le jour un chevauchement latéral de la récolte des données de 14 pour cent à l'équateur; l'orbite étant quasi polaire, le chevauchement arrive à dépasser 80 pour cent sous les hautes latitudes, permettant ainsi des couvertures quotidiennes pour des périodes allant jusqu'à 6 jours dans les régions polaires. Au moment où sont écrites ces lignes LANDSAT 1 et LANDSAT 2 sont tous deux en service, et les configurations orbitales sont telles que les deux satellites assurent une couverture réelle de tout point de la surface terrestre une fois tous les 9 jours.

LA charge utile de LANDSAT comprend les éléments ci-après:

 

1) Un scanner multispectral (MSS). Le MSS effectue un balayage horizontal sur le trajet de l'orbite, dans 4 bandes du spectre: le vert (0,5-0,6m m), le rouge (0,6-0,7m m), et 2 bandes dans le proche infra-rouge (0,7-0,8 m m) et (0,8-1,1 m m). Au cours du traitement au sol, on obtient des vues en 70 mm couvrant un carré de 185 kilomètres de côté. Le pouvoir de résolution du MSS concernant les objets présents à la surface de la terre varie selon les caractéristiques géométriques de l'objet et de son contraste avec le milieu environnant; généralement, le MSS possède un pouvoir de résolution spatiale proche de 80 mètres.

2) Return beam vidicon (RBV). Les caméras RBV visionnent successivement des surfaces de 185 sur 185 kilomètres, dans trois bandes spectrales différentes: le vert (0,475-0,575 m m) m), le rouge (0,580-0,680 u m) et le proche infra-rouge (0,698-0,830 m m). Ce dispositif est actuellement en réserve sur chacun de ces deux satellites.

3) Le dispositif de collecte des données (DCS). Le DCS ne relève pas de la télédétection mais constitue plutôt un système de communication. Il collecte les informations provenant de quelque 150 plateformes au sol équipées d'instruments mais éloignées et non desservies; il relaie ces informations aux stations au sol de la NASA qui les transmet aux usagers.

Les expériences Skylab de 1973-74 ont apporté des données spatiales supplémentaires de haute qualité pour l'étude des ressources hydriques. Le progremme mondial de Skylab sur les ressources de la terre (EREP), placé à une altitude nominale de 435 kilomètres, utilisait la photographie dans la gamme visible et le proche infrarouge, la spectrographie infrarouge, un détecteur à balayage électromécanique, et des détecteurs pour les études utilisant les hyperfréquences. La première mission Skylab habitée (SL-2) s'est déroulée du 25 mai 1973 au 22 juin 1973 et n'a comporté que onze émissions de données sur les ressources de la terre. La seconde mission (SL-3) a eu lieu du 28 Juillet 1973 au 25 septembre 1973 et a fait passer à 44 les émissions concernant les ressources de la terre; la troisième mission (SL-4),du 16 novembre 1973 au 8 février 1974, a effectué 55 émissions sur les ressources terrestres.

Plus de 35 000 vues ont été ainsi obtenues, sans compter une masse de données sur bandes magnétiques.

Les capteurs-détecteurs EREP les plus intéressants sont la caméra photographique multispectrale à six bandes (S-190A) et la caméra terrestre (earth terrain camera S-190B). Les images obtenues dans les bandes spectrales du dispositif S-190A englobaient la gamme visible et le proche infrarouge du spectre, avec des résolutions allant de 30 à 79 mètres et couvrant des superficies de 163 kilomètres de côté. Le S-190B a donné des images couleur, blanc et noir, ou infrarouge couleur à forte résolution, couvrant des superficies de 190 kilomètres de côté. Les résolutions allaient de 17 à 30 mètres selon le film utilisé. Etant donné la durée relativement courte de la collecte des données, Skylab n'a pas été en mesure d'assurer le couverture répétée et régulière que peut fournir LANDSAT, mais a donné la photographie des ressources terrestres à la plus forte résolution obtenue à ce jour depuis l'espace.

Le 15 octobre 1972, la National Oceanic and Atmospheric Administration lançait le satellite NOAA-2 qui inaugurait une série de satellites écologiques à résolution moyenne. Depuis, NOAA-3 et NOAA-4 ont également été mis sur orbite. NOAA-2 a une orbite quasi circulaire héliosynchrone, à une altitude théorique de 1 500 kilomètres. Il franchit l'équateur vers le sud à 08.51 heure locale solaire et fournit deux vues par jour de lAmérique du nord, l'une vers 10 heures et l'autre vers 22 heures (heure locale). Les caractéristiques orbitales de NOAA-3 et NOAA-4 sont très semblables à celles de NOAA-2.

La charge utile des satellites écologiques NOAA comprend un certain nombre de détecteurs, mais l'un des plus intéressants est le radiomètre à très forte résolution (VHRR). Le VHRR est un radiomètre à balayage à deux canaux, sensible à l'énergie émise dans le spectre visible (0,6-0,7 m m) et dans l'infrarouge (10,5-12,5 u m). L'angle de champ instantané est théoriquement de 0,6 mrad pour chacun des canaux. La résolution au sol est approximativement de 0,9 kilomètre au point subcéleste. Bien que le VHRR soit conçu à priori pour une lecture directe, un enregistreur à bande magnétique fournit jusqu'à 8 1/2 minutes de données enregistrées par orbite.

Le tableau 1 récapitule les caractéristiques des dispositifs de télédétection et des données actuellement à la disposition des hydrologues pour l'aménagement des bassins versants. La section ci-après décrit comment certaines de ces sources de données ont été appliquées aux problèmes hydrologiques.

Table 1. Caractéristiques des systèmes de télédétection disponibles et utilisables pour l'aménagement des ressources en eau.

Véhicule spatial/ détecteur

Bandes spectrales

Superficie couverte (kilomètres carrés)

Résolution nominale (mètres)

Fréquence de couverture

U-2/Caméras multispectrales Vinten

0,475-0,575 0,580-0,680 0,690-0,760 0,510-0,900

425

12

variable
U-2/Caméra Wild

0,510-0,900

875

7

variable
Skylab/Earth Terrain Caméra

0,4-0,7

0,5-0,7 

0,5-0,88

11880

17 - 30

variable
Skylab/Caméra à photographie multispectrale
0,4-0,7
0,5-0,6
0,5-0,88
0,6-0,7
0,7-0,8
0,8-0,9

26570

30 - 79

variable
LANDSAT/ MSS
0,5-0,6
0,6-0,7
0,7-0,8
0,8-1,1

34225

80

une fois tous les 18 jours (un système de deux satellites permet de couvrir les Etats-Unis tous les neuf jours)
NOAA/VHRR
0,6-0,7
10,5-12,5

sous-continent

900

deux fois par jour

 

3. PROGRES RÉCENTS DES APPLICATIONS DE LA TELEDETECTION A L'AMÉNAGEMENT DES BASSINS VERSANTS

3.1 Cartographie de l'enneigement

L'élément le plus précis concernant le stock nival que l'on puisse obtenir à partir des astronefs ou aéronefs est la superficie du bassin versant recouverte par la neige. La détermination des superficies enneigées par satellites utilisant des images prises dans le spectre visible et dans le proche infrarouge a été dûment confirmée par des mesures obtenues d'aéronefs volant à basse et haute altitude et se trouve exposée dans des ouvrages parfaitement documentés (3). L'extraction de paramètres plus significatifs du stock nival, tels que l'équivalent en eau et la hauteur d'eau, en est encore au stade de la recherche bien que déjà les valeurs en équivalent en eau obtenues en mesurant le ralentissement par la neige de rayons gamma naturels émis par des aéronefs volant extrêmement bas s'avèrent très prometteuses (4, 16). Ces techniques ne sont cependant pas encore tout à fait opérationnelles et il est heureux que l'on ait observé une bonne relation entre les observations par satellites de la superficie neigeuse et l'écoulement consécutif à la fonte des neiges (22). Deux méthodes ont été employées pour étudier les relations entre la surface enneigée et l'écoulement. Tout d'abord, on a surveillé de 1967 à 1972 un grand bassin versant dépourvu de ramifications amont importantes (l'Indus en amont d'Attock, Pakistan), en utilisant des données à faible résolution obtenues par satellites météorologiques et des relevés des débits effectués dans le cadre de la Décennie hydrologique internationale. La superficie neigeuse moyenne vers le début avril a été mise en relation, dans une simple analyse de régression, avec l'écoulement se produisant du ler avril au 30 juin. La relation de régression indiquée sur la figure 1 était significative à 99 pour cent.

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Figure 1. Comparaison entre les estimations par satellites de la couverture neigeuse et les mesures de l'écoulement effectuées de 1967 à 1972 pour l'Indus, en amont d'Attock, Pakistan,

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Figure 2. Variations de la couverture neigeuse observées par LANDSAT dans le nord-ouest du Wyoming, 1972-73.

Un examen utlérieur de données LANDSAT, à plus court terme mais avec une résolution plus forte, concernant les Wind River Mountains (Wyoming) a mis en évidence l'existence de relations semblables sur des bassins versants n'excédant pas 200 kilomètres carrés de superficie. La figure 2 montre la variation annuelle de la couverture neigeuse dans les Wind River Mountains pendant la période d'enneigement 1972-73. La superficie neigeuse a été mesurée en détail sur sept petits bassins versants pendant deux ans. Trois bassins versants ont été considérés comme de haute altitude (>3050 mètres d'altitude moyenne) et les quatre autres de faible altitude <3050 mètres d'altitude moyenne). Dans les deux catégories, on a supposé semblables les bassins versants afin d'établir une base de données multiples comportant plus de deux points. La superficie neigeuse au 15 mai a été mesurée et mise en relation avec l'écoulement du 15 mai - 31 juillet pour chaque groupe de bassins versants pendant les deux années. Les relations de régression obtenues ont elles aussi été significatives à 99 pour cent. La figure 3 montre ces relations pour les bassins versants de faible altitude.

On pouvait estimer approximativement l'écoulement en utilisant les équations indiquées dans les figures 1 et 3, mais ces relations sont importantes du fait que les différences d'extension de la superficie enneigée telles qu'observées depuis l'espace sont en relation quantitative avec l'écoulement résultant de la fonte des neiges et, partant, en relation indirecte avec le volume d'eau présent sur un bassin versant. Les données obtenues par satellites concernant la superficie enneigée, jointes aux données réunies par les méthodes traditionnelles devraient constituer un paramètre indice supplémentaire des plus efficaces pour prédire les débits saisonniers et limiter les erreurs que rendent inévitables les techniques actuelles de prévision. Ces mêmes données concernant l'étendue de l'enneigement devraient avoir une certaine utilité pour les quelques modèles de bassins versants nécessitant des données sur la superficie neigeuse.

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Figure 3. Comparaison entre les estimations de la couverture neigeuse par LANDSAT et des mesures de l'écoulement (1973 et 1974) pour quatre bassins versants d'une altitude moyenne inférieure à 3 050 mètres dans les Wind River Mountains (Wyoming).

Etant donné l'intérêt que présente la cartographie de l'enneigement par satellites, la NASA patronne actuellement un projet de démonstration coopératiftraitant des applications opérationnelles des observations de la couverture neigeuse par satellites. Des organismes fédéraux comme le U.S. Geological Survey, le U.S. Bureau of Reclamation, la Bonneville Power Administration, le U.S. Soil Conservation Service, le U.S. Army Corps of Engineers et laNational Oceanic and Atmospheric Administration, ainsi que des organismes d'état tels que le California Department of Water Resources, la Colorado Division of Water Resources et le Projet Arizona Salt River s'efforcent actuellement de mettre à l'épreuve les données obtenues par satellites en les intégrant dans leurs techniques opérationnelles. Ce projet englobe quatre grandes zones d'étude et dix-sept bassins versants dans l'ouest. Les études en cours utilisant les modèles hydrologiques, l'analyse de régression, les vols d'aéronefs à basse altitude, le calcul des zones de fonte des neiges, ainsi que le système de collecte des données LANDSAT, à côté de la photo-interprétation fondamentale. Les résultats et les analyses de rentabilité résultant de ce projet seront présentés accompagnés de toute la documentation appropriée.

3.2 Inventaires des eaux de surface

Les capteurs-détecteurs dans le proche infrarouge, à fort pouvoir de résolution, comme ceux qui équipent LANDSAT, peuvent être utilisés pour mesurer la superficie exacte des eaux de surface en raison du fort contraste dans le proche infrarouge entre l'eau et les terres adjacentes. Les études LANDSAT ont fourni de nombreux résultats indiquant que des nappes d'eau ayant à peine 0,01 km2 de superficie peuvent facilement être délimitées. Grâce à LANDSAT, il est donc possible de surveiller les eaux de surface, même sur de petits bassins versants inaccessibles. Le U.S. Army Corps of Engineers a employé des données LANDSAT pour localiser et recenser des nappes d'eau de plus de 0,02 km2, calculer leur superficie, identifier leur forme et localiser des emplacements de barrage sur les grandes rivières conformément aux dispositions juridiques prises au plan fédéral (17). Pour des nappes d'eau plus importantes, LANDSAT s'est également avéré utile. Le Goddard Space Flight Conter a récemment fourni au Comité national des Etats-Unis pour la Décennie hydrologique internationale un imprimé de sortie d'ordinateur signalant l'emplacement, l'étendue en surface, ainsi que les dimensions maximales nord-sud, est-ouest de 128 nappes d'eau de surface couvrant plus de 100 km2 d'après les mesures fournies par LANDSAT. Ces données serviront à l'établissement d'un inventaire mondial des eaux de surface. L'utilisation de LANDSAT présente un inconvénient, à savoir que, pour les lacs intérieurs à 10 km2, la réduction et le traitement des données devient une entreprise ardue quand il s'agit d'inventorier les eaux de surface sur de vastes étendues.

3.3 Evaluation des crues et cartographie des aires d'ennoyage

Les données LANDSAT représentent le type d'informations obtenues par satellites qui se prête le mieux à I'observation des crues étant donné la fidélité cartographique et le pouvoir de résolution relativement fort des capteursdétecteurs dans le proche infrarouge. Sur la cartographie des crues à l'aide des données LANDSAT, Hallberg, Hoyer et Rango (13), Deutsche et Ruggles (9), Rango et Salomonson (19), et Williamson (29) ont rédigé des communications.

Les superficies inondées sont détectées sur les bandes LANDSAT du proche infrarouge comme surfaces à coefficient de réflexion atténué du fait de l'eau stagnante, de l'humidité excessive du sol et de la demande hydrique de la végêtation. Ce qui est particulièrement important c'est que les observations LANDSAT effectuées jusqu'à deux semaines après la pointe de la crue portent encore la caractéristique de ce coefficient de réflexion atténué dans le proche infrarouge des zones précédemment inondées, ce qui fait qu'il n'est pas nécessaire d'effectuer les observations par satellites au moment des pointes de crues. D'autres études (6, 20) ont montré que les superficies susceptibles d'être inondées, connues en tant que zones exposées aux crues, ont tendance à présenter des signatures multispectrales qui diffèrent par moment des signatures des zones environnantes non exposées aux crues. Les zones exposées aux crues ont une végétation naturelle et des caractéristiques pédologiques spéciales mais aussi des traits culturaux différents, acquis au fil des temps en raison d'une plus grande fréquence des inondations, ce qui permet de les distinguer des zones non exposées aux crues. Les études précitées montrent également que les signatures des zones exposées aux crues identifiées par LANDSAT ont, à ce jour, une corrélation que l'on n'explique pas avec les frontières techniques et juridiques des crues établies sur cent ans. On s'occupe actuellement d'étudier les raisons de ces corrélations fortuites en utilisant des données digitales LANDSAT.

Les observations LANDSAT concernant les crues et les zones exposées aux crues sont certes riches de promesses, mais seulement à l'échelle régionale. L'essentiel de la photocartographie par satellites des inondations a été fait au 1:250 000. On a bien établi des cartes des zones d'inondations et des zones exposées aux crues d'après des données digitales LANDSAT à l'échelle 1:24 000 et 1:62 500, mais elles ne satisfont pas aux normes nationales de précision cartographique. Pour de nombreuses raisons d'ordre juridique, il est indispensable de produire des cartes à des échelles encore plus grandes. C'est pourquoi l'évaluation des crues sur les petits bassins versants doit généralement se faire en utilisant la photographie infrarouge couleur à forte résolution, comme celle que l'on peut obtenir avec les U-2. Ces images ont la résolution voulue pour cartographier les zones inondées. La détection des zones exposées aux crues aux échelles requises par la loi a également été faite à partir de données aériennes (14). Il semble que pour la plupart des applications relatives aux crues en matière d'aménagement des bassins versants, la photographie aérienne de forte résolution constitue l'outil de travail par excellence. On peut utiliser les données LANDSAT pour obtenir une excellente vue d'ensemble des crues à l'échelle régionale (et sur de grands bassins versants) ainsi que comme moyen de surveillance des aires d'ennoyage dans le temps. Mais tant que l'on ne disposera pas de données de satellites à plus forte résolution, ce sont les aéronefs qui fourniront les données les plus utiles.

3.4 Analyse de l'utilisation des terres du point de vue hydrologique

Il est important de connaitre l'utilisation des terres dans les bassins versants parce qu'on peut se servir d'un relevé des caractéristiques du couvert superficiel pour affiner les estimations en quantité, qualité et périodicité du rendement hydrique d'un phénomène météorique donné ou d'un traitement de bassin versant. Divers modèles de bassins versants nécessitent des données à jour concernant l'utilisation des terres pour les besoins du calibrage donc pour une meilleure simulation des débits. Ces données sur l'utilisation des terres peuvent être fournies par la télédétection à des niveaux divers. Il est généralement admis que l'on peut produire des cartes valables de l'utilisation des terres à partir des données LANDSAT au 1:62 500 et au 1:24 000 (2, 18). L'extraction de données de ce genre à partir d'informations LANDSAT se fait actuellement au Goddard Space Flight Center en utilisant des classifications multispectrales numériques concernant le bassin versant de la rivière Patuxent. Les données provenant de cette étude ont été utilisées pour calibrer un modèle hydrologique paramétrique d'un sous-bassin versant déterminé de 80 km2 de superficie. Les résultats de cette étude font apparaître un certain nombre de faiblesses en ce qui concerne les moyens d'extraction des données. En premier lieu, on ne peut utiliser les données LANDSAT correspondant à une date unique pour classer l'utilisation des terres du bassin versant tout entier. Il faut utiliser des données temporelles pour établir une classification de l'utilisation des terres pour l'ensemble de la superficie. En second lieu, si l'on utilise des données niveau I fournies par satellites (terre forestière par exemple) et quelques données niveau II seulement (forêts décidues par exemple), on obtient des classes d'utilisation des terres en raison des limitations du pouvoir de résolution. Si l'on désire des renseignements plus détaillés sur l'utilisation des terres, il faut utiliser les données fournies par des U-2 volant à haute altitude. Les résultats montrent que cette source de données peut satisfaire à tous les besoins d'informations d'un organisme de planification. Toutefois l'extraction des données est beaucoup plus difficile et beaucoup plus coÙteuse dans le cas des aéronefs; en effet, celles-ci ne sont pas aussi aisées à acquérir et ne se prêtent pas aussi facilement à l'extraction automatique que les données des satellites. Les photographies infrarouge couleur du bassin versant de la rivière Patoxent prises d'un avion U-2 ont cependant été traduites en données numériques et utilisées dans des programmes de classification automatique de la même manière que les données LANDSAT. Les résultats sont semblables à ceux de LANDSAT, mais en plus détaillé.

3.5 Caractéristiques physiographiques

Les observations physiographiques - par exemple la superficie et la forme d'un bassin, l'organisation du réseau hydrographique, la densité et le système de drainage, les caractéristiques individuelles des chenaux peuvent permettre à l'enquêteur d'estimer le débit annuel moyen et les débits annuels moyens des crues d'un bassin versant, ainsi que la rapidité avec laquelle un bassin versant réagit à un phénomène météorique déterminé. En général, il n'est pas possible de tirer de cartes topographiques des informations hydrologiques dynamiques du genre de celles que fournit la couverture à répétition de LANDSAT. En outre, dans certaines zones, les images LANDSAT apportent à elles seules davantage d'informations géomorphologiques que tout ce que l'on trouve sur des cartes d'échelle comparable (28). Dans une étude couvrant toute une gamme de régions physiographiques des Etats-Unis, Rango, Poster et Salomonson (21) ont constaté que la superficie des bassins versants, leur forme, ainsi que les mesures de la sinuosité des chenaux obtenus par LANDSAT sont généralement comparables aux mesures physiographiques similaires dérivées de cartes topographiques, quelle que soit la zone étudiée. Les réseaux de drainage sont bien dessinés dans les régions à relief accidenté et les détails correspondent à une échelle de 1:100 000. Les agrandissements LANDSAT peuvent se comparer aux données figurant sur des cartes topographiques au 1:62 500 (voir figure 4). Les cours d'eau de petite importance sont difficiles à repérer dans les régions à végétation dense et relief local peu accentué, ou dans des régions où le réseau hydrographique est peu développé. Dans ce type de région, les densités de drainage dérivées de LANDSAT ont tendance à être inférieures à celles que l'on tire de cartes topographiques à échelle équivalente. L'analyse temporelle LANDSAT améliore légèrement le détail physiographique dans ces régions mais l'on n'obtient une nette amélioration de la distinction des caractéristiques que quand on utîlise la photographie U-2 de haute altitude. En combinant ces deux systèmes de télédétection, on arrive à extraire tous les paramètres physiographiques nécessaires à l'analyse d'un bassin versant, sauf les dimensions précises des cours d'eau.

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CALQUE DE LA SUPERPOSITION LANDSAT AGRANDI AU 1/100 000, 2 JANV. 1973 CALQUE DE SUPERPOSITION, CARTE TOPOGRAPHIQUEDU USGS AU 1/62 500

Figure 4. Réseau de drainage de la rivière Kickapoo (en amont de la Farge) y Extrait des images LANDSAT et de cartes du U.S. Geological Survey Maps.

3.6 Modèles de bassins versants

Une grande partie des renseignements que l'on peut extraire au moyen des techniques de télédétection décrites plus haut peut être utilisée pour calibrer ou exploiter des modèles numériques de bassins versants, spécialement dans les régions où les données sont rares. Les données appropriées englobent: les classifications de l'utilisation des terres, les paramètres concernant le réseau hydrographique, quelques autres éléments physiographiques et la superficie enneigée. La question qui se pose est la suivante: la télédétection permet-elle d'extraire les données nécessaires à l'échelle appropriée ou avec la précision voulue ? L'un des paramètres requis pour la plupart des modèles concerne la surface imperméable du bassin versant. Ce paramètre se compose d'un certain nombre d'utilisations spécifiques des terres, y compris le périmètre urbain, les rues, les parcs de stationnement, les toits et les chantiers de construction. L'extraction d'un pourcentage intégré du paramètre correspondant à la surface imperméable serait exceptionnellement utile et Ragan (travaux non publiés, 1975) a étudié cette question sur le bassin versant de la rivière Anacostia, dans le Maryland. Il a comparé les classifications automatiques LANDSAT de la surface imperméable avec les résultats d'une étude antérieure basée sur des mesures manuelles effectuées sur des photographies aériennes à grande échelle prises à basse altitude. Il a fallu environ 94 homme/jours pour mener à bien l'analyse de lutilisation des terres en se servant des photographies aériennes. Il a fallu moins de 3 homme/jours pour accomplir le même travail avec les données LANDSAT. D'après l'analyse des données LANDSAT, on a estimé que l'imperméabilité du bassin était de 19 pour cent: l'étude sur photographies aériennes avait indiqué 24 pour cent. La concordance entre la méthode photographique traditionnelle et la technique LANDSAT a été excellente pour des sous-bassins versants dont la superficie atteint tout juste 1,48 km2. Ragan (travaux non publiés, 1975) estime que la correspondance entre les deux méthodes est plus que suffisante pour répondre aux besoins de données d'entrée de n'importe quel modèle hydrologique pour ce qui est de la surface imperméable.

Outre cette étude, on a effectué une analyse de sensibilité qui a identifié les paramètres d'entrée du modèle de bassin versant du Kentucky qui se prêtent aux systèmes actuels de télédétection (1). Les paramètres d'entrée que l'on peut obtenir par télédétection avec une précision acceptable sont les suivants: superficie du bassin versant, fraction correspondant à la zone imperméable, fraction du bassin correspondant aux eaux de surface, taux maximal d'interception de la végétation, longueur moyenne de l'écoulement en surface, coefficient de rugosité de l'écoulement en surface et fraction du bassin versant couverte par la forêt. D'autres paramètres ont été identifiés comme potentiellement extractibles à mesure que l'on améliorera l'interprétation des images et les techniques d'analyse et que l'on mettra au point de nouvelles méthodes de télédétection. Des essais utilisant les données cartographiques existantes et des renseignements à jour obtenus par la télédétection sont en cours pour déterminer si les modèles basés sur les données de la télédétection fournissent de meilleures simulations des écoulements que ceux qui exploitent des données traditionnelles. Le Goddard Space Flight Center est en train d'évaluer de nombreux modèles, bassins versants et types de données de télédétection afin de dégager des conclusions précises concernant les possibilités d'application de la télédétection à l'établissement des modèles de bassins versants.

3.7 Système de collecte des données

La collecte d'informations hydrologiques sûres comme le niveau des rivières, l'équivalent eau de la neige, la qualité de l'eau et le niveau des eaux souterraines, n'est pour le moment pas accessible à la télédétection opérationnelle. Néanmoins, des observations précises et rapides de ces paramètres sont nécessaires et les satellites constituent un moyen sûr de recueillir et relayer ces informations. Le système de collecte des données LANDSAT (DCS) en a fait la preuve en plusieurs cas (7). Quelque 150 plateformes de collecte des données (DCP) fonctionnent sur le territoire des Etats Unis. Sur l'emplacement de ces DCP, on effecute des mesures hydrologiques traditionnelles qui sont relayées par satellite jusqu'à l'utilisateur en temps quasi réel. En Arizona par exemple, lors des fontes de neige exceptionnellement importantes qui se sont produites au printemps de 1973, les données provenant des DCP-LANDSAT fournissaient, en moins d'une heure, les renseignements indispensables sur le ruissellement résultant de la fonte des neiges. Cette information hydrologique a permis d'aménager beaucoup mieux l'écoulement des eaux des bassins versants des rivières Salt et Vende, et d'atténuer les inconvénients des crues dans la région de Phoenix. Il a été démontré en règle générale dans tous les cas vérifiés, que la fiabilité des DCS est comparable à celle des systèmes au sol de relais télémétriques sur. hyperfréquences, sinon meilleure. Le satellite écologique opérationnel géostationnaire (GOES) constitue un autre système de collecte des données qui permet d'interroger en permanence, 24 heures sur 24, des capteurs-détecteurs disséminés sur des zones étendues. D'autres essais ont été faits dans le cadre des recherches récentes en vue d'intégrer les données DCS et les images obtenues par satellites pour établir de façon plus complète les caractéristiques du cycle hydrologique des bassins.

4. LA TÉLÉDÉTECTION. UN POTENTIEL A DÉVELOPPER

4.1 Détermination de la teneur en eau du sol

Bien que l'humidité du sol soit l'un des paramètres les plus importants pour résoudre les équations du bilan hydrique des bassins versants, les techniques de télédétection utilisables pour évaluer la teneur en eau du soi n'en sont encore qu'au stade de la mise au point et doivent encore être dûment essayées. Les observations multispectrales LANDSAT semblent devoir permettre des estimations relatives de l'humidité du sol basées sur la réponse différenciée des sols humides et des sols secs, différence particulièrement prononcée vers le proche infrarouge des bandes LANDSAT. De plus, la cartographie multispectrale des sols sur données LANDSAT a donné des résultats satisfaisants dans certaines régions, généralement celles où la végétation est rare. Dans ces zones à végétation clairsemée, les variations du coefficient de réflexion paraissent en rapport avec l'humidité du sol au voisinage de la surface. Étant donné que l'on ne peut faire que des déductions d'ordre qualitatif sur l'humidité du sol superficiel dans les zones de sol dénudé, il n'est pas possible d'utiliser LANDSAT pour calculer réellement le bilan hydrique.

L'utilisation des données obtenues dans l'infrarouge thermique pour déceler les variations de l'humidité du sol a été étudiée sur la base d'expériences réalisées en Arizona (15). Ces expériences ont montré que plus le pourcentage d'humidité du sol est élevé par rapport au poids, moins la température de la surface varie dans la journée. Si de futurs travaux confirment ces variations initiales, les données de l'infrarouge thermique fournies par le VHRR équipant les satellites NOAA (et autres capteursdétecteurs) devraient pouvoir servir à déceler des variations quantitatives de l'humidité du sol susceptibles d'être utilisées pour planifier l'irrigation. Toutefois, l'influence de la végétation constitue en grande partie une inconnue et doit être évaluée au moyen de recherches supplémentaires.

Les hyperfréquences passives et actives sont très intéressantes pour la surveillance de l'humidité du sol car, grâce à leurs possibilités de pénétration, les rayonnements micro-ondes fournissent certains renseignements sur la constitution de la couche subsuperficielle. La constante diélectrique de l'eau aux hyperfréquences étant assez importante (jusqu'à 80), alors que celle du sol sec est spécifiquement inférieure à 5, la teneur en eau d'un sol peut modifier considérablement les propriétés diélectriques de celui-ci (24). Des expériences récentes effectuées avec des radiomètres à micro-ondes aéroportés survolant un terrain dépourvu de végétation indique que la température de brillance aux hyperfréquences est une fonction de la longueur d'onde du radiomètre et de la distribution de l'humidité dans le sol. Il semble que plus la longueur d'onde des hyperfréquences est importante, plus la pénétrabilité du sol est grande et plus l'on obtient d'informations sur l'humidité du sol en fonction de la profondeur. Même les hyperfréquences de plus petite longueur d'onde fournissent un grand nombre de données très utiles sur l'humidité du sol au voisinage de la surface. En général, plus le pourcentage d'humidité du sol en fonction du poids est élevé, plus la température de brillance aux hyperfréquences diminue. Les propriétés du sol influent beaucoup plus sur le retour des hyperfréquences de petite longueur dl onde (1,5 centimètres) que de grande longueur d'onde (21 centimètres). On continue d'étudier les effets de la végétation et de la rugosité de la surface sur l'émission des micro-ondes par le sol (24).

En décembre 1972, la NASA a lancé le satellite Nimbus 5, porteur du radiomètre à hyperfréquences et balayage électrique (ESMR). Cet instrument a hyperfréquences passives et pouvoir de résolution grossier (l - 1,55 centimètres) offre un moyen de surveiller les caractéristiques de l'humidité en surface et au voisinage de la surface sur des zones extrêmement étendues. Dans une étude initiale utilisant les premières données ESMR sur la vallée du Mississippi, on avait comparé les fluctuations des températures de brillance aux hyperfréquences avec un certain nombre de paramètres hydrologiques connus. Les meilleures corrélations concernaient les précipitations, ce qui montre que l'ESMR assure véritablement une surveillance des variations de l'humidité du sol dans une couche située juste au-dessous de la surface (25). De telles observations peuvent éventuellement fournir un indice de la sensibilité aux inondations d'une région déterminée ou de son aptitude à l'irrigation. Mais les études de bassins versants n'en bénéficieront pas tant que l'on n'aura pas sensiblement amélioré le pouvoir de résolution des détecteurs. Les expériences sur les hyperfréquences actives sont elles aussi encourageantes, mais la recherche dans ce domaine n'en est qu'à ses débuts et l'on ne dispose pas encore de résultats précis.

4.2 Futurs dispositifs spatiaux

Un certain nombre de satellites sont actuellement en service et de nouveaux véhicules spatiaux seront lancés dans les dix années à venir. En variant les fréquences de couverture et les puissances de résolution spatiale, on pourra, grâce aux divers systèmes, observer différents types de phénomènes concernant les ressources hydriques. La figure 5, adaptée d'après Salomonson (23), présente divers phénomènes à observer, périodes d'observation, graduations de distance, et potentiel des dispositifs installés sur des astronefs non habités, existants ou à l'étude. A titre d'exemple, LANDSAT observe généralement divers phénomènes concernant les ressources hudriques tous les 18 jours au plus et identifie des objets ayant au moins une dimension de 80 m ou plus. Les autres satellites actuellement en service, les séries Nimbus et NOAA, effectuent des observations toutes les 12 heures avec de bonnes résolutions de l'ordre de 0,9 km. On note sur la figure 5 que nombre d'applications dont il est question dans la présente communication se trouvent dans les zones couvertes par LANDSAT, Nimbus et NOAA. Les détecteurs EREP de Skylab, quand ils étaient en service, avaient la possibilité d'effectuer des observations intermédiaires, à des moments divers, avec des résolutions descendant jusqu'à 17 m (Earth Terrain Caméra). Les satellites LANDSAT auront un suivi éventuel qui commencera avec le lancement de la série de satellites d'observation terrestre (EOS) envisagé pour la fin de la décennie. Les satellites EOS auront à peu près la même fréquence d'échantillonnage et les mêmes types de détecteurs que LANDSAT, mais la capacité de résolution spatiale sera portée à 10 m sur de petites zones d'étude. Au-delà du programme SOS, on prévoit pour le début des années 80 une série de satellites d'observation terrestre synchrones (SEOS) qui seront en mesure d'effectuer des observations toutes les quelques minutes si on le désire, avec des résolutions d'environ 100 m. Il sera possible d'effectuer des observations à partir d'une altitude synchrone en plaçant un très grand télescope en avant des télédétecteurs actuellement disponibles. Ces observations rapides rendront possible une meilleure définition par télédétection des phénomènes hydrologiques dynamiques.

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Figure 5. Diagramme spatio-temporel montrant le potentiel d'observation des systèmes équipant les astronefs existants et à l'étude.

Les applications et les satellites mentionnés à la figure 5 tiennent compte uniquement des détecteurs actuellement disponibles et non d'instruments nouveaux ou plus perfectionnés à l'étude. Il est certain que d'autres portions du spectre électromagnétique seront exploitées dans les années à venir. Le programme EREP Skylab, avec ses détecteurs très diversifiés, a constitué un excellent début dans le sens de l'évaluation des avantages que peuvent offrir des observations pratiquées dans diverses régions du spectre d'usage peu courant. Le programme ERAP a également apporté une masse d'informations aboutissant à la mise au point et à l'utilisation en vol de nouveaux instruments. Les applications des hyperfréquences seront probablement àla pointe de l'effort de recherche dans les années 80.

Les futurs systèmes de télédétection se composeront très probablement des satellites mentionnés ci-dessus, équipés de divers détecteurs couplés avec des dispositifs de collecte des données obtenues par satellites, afin de présenter rapidement des données hydrologiques traditionnelles. Ce dispositif sera complété par des missions d'acquisition de données au moyen d'aéronefs volant à haute, moyenne et basse altitude et par des prospections ausol limitées. Pour tirer parti de cette masse de données concernant les ressources hydriques, il faut mettre au point des systèmes perfectionnés, rapides et souples de traitement automatique des données pour disséminer l'information hydrologique appropriée aux organismes opérationnels.

4.3 Mieux connaître les possibilités de la télédétection appliquée à l'aménagement des bassins versants

En supposant qu'un spécialiste de l'aménagement des bassins versants estime qu'une technique de télédétection donnée serait à même de lui fournir une réponse désirée, il sera incapable de profiter de la télédétection s'il ne sait pas comment utiliser les donné-es ni même où les obtenir. Nous suggérons ici quelques solutions qui devraient permettre à l'utilisateur potentiel de se familiariser avec les techniques de la télédétection. Tout d' abord, il existe plusieurs manuels ou ouvrages scientifiques de compilation traitant spécifiquement des ressources hydriques, qui peuvent fournir une bonne base pour certaines applications de la télédétection aux ressources hydriques. L'American Water Resources Association a publié les comptesrendus d'un colloque sur la télédétection et l'aménagement des ressources hydriques, qui présentent une vaste gamme d'application des données obtenues tant par voie aérienne que par satellites à la surveillance des eaux du point devue quantitatif et du point de vue qualitatif (27). Sur la base des résultats positifs obtenus en matière de cartographie des superficies enneigées, on a rédigé un excellent manuel intitulé "Handbook of Techniques for Satellite Snow Mapping'' (3). Ce manuel de la neige met l'accent sur l'emploi des satellites NOAA et LANDSAT, mais fournit aussi une description complète d'autres sources éventuelles de données sur l'enneigement obtenues par satellites. Le U.S. Army Corps of Engineers a publié un certain nombre de documents assez utiles décrivant les applications de la télédétection aux ressources hydriques. Le Cold Region Research and Engineering Laboratory de Hanover (New Hampshire) a présenté les méthodes à utiliser pour localiser des réservoirs dont l'étendue superficielle est supérieure à 0,02 km2 (17). Le Hydrologic Engineering Center de Davis (Californie) a publié un rapport sur les applications de la télédétection au génie hydrologique (5). Le manuel du troisième Corps d'Ingénieurs sur la pratique de la télédétection et des résultats potentiels a été établi par la Waterways Experiment Station de Vicksburg (Mississippi) (30).

Pour pouvoir utiliser les données LANDSAT (ERTS) de la manière la plus efficace, il serait peut-être utile de se procurer le Manuel de l'utilisateur des données ERTS (8). On peut se le procurer pour un prix modique auprès du General Electric ERTS Liaison Office à Beltsville (Maryland).

Une fois acquise une connaissance de base des possibilités de la télédétection, la meilleure manière de se familiariser vraiment avec les moyens qu'offre la télédétection pour résoudre un problème particulier de bassin versant consiste à se procurer un certain nombre de données concernant la zone considérée. On peut alors analyser attentivement ces données 'et les comparer avec les connaissances acquises antérieurement et avec les données disponibles traditionnellement, afin de se familiariser avec les utilisations potentielles. Pour commander des données de télédétection, il faut s'adresser en premier lieu au Earth Resources Observations Systems (EROS) Data Center du U.S. Geological Survey, à Sioux Falls (Sud-Dakota). EROS peut fournir, au prix coûtant, des données LANDSAT, EREP Skylab et ERAP haute altitude. La zone à couvrir, le couvert nuageux acceptable et le type d'images sont les seules indications à fournir pour la commande. S'il s'agit de données LANDSAT, on peut également se procurer auprès de EROS, pour un prix symbolique, des catalogues complets des images existantes. La NASA a également publié un catalogue des données Skylab des ressources de la terre, ce qui facilite les commandes de données EREP (26). On peut également commander des données LANDSAT auprès du Earth Resources Data Center de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) à Suitland (Maryland), et auprès du U.S. Department of Agriculture, Agricultural Stabilization and Conservation Service, Western Aerial Photo Laboratory, à Salt Lake City (Utah). On peut se procurer les données NOAA-VHRR en s'adressant au National Environmental Satellite Service, Visible Products Support Branch, Suitland (Maryland). Pour ce qui concerne les données Nimbus et les moyens de se les procurer, on peut se renseigner auprès du National Space Science Data Center de la NASA, Greenbelt (Maryland).

Le EROS Data center ne diffuse pas seulement des images de télédétection mais offre aussi à l'usager une assistance en matière d'interprétation des données moyennant des consultations avec des spécialistes, Le matériel spécialisé de télédétection est à la disposition des usagers à EROS, ainsi que plusieurs cycles d'étude et cours de formation en télédétection.

Diverses universités proposent des cours en matière de télédétection, avec leurs spécialistes, Pour le cas où la solution par la télédétection au problème particulier d'un usager n'a pas encore été établie ou démontrée et si elle n'entre pas dans le cadre des activités de routine de systèmes tels que CROS, le Goddard Space Flight Conter de la NASA, à Greenbelt (Maryland) est en train de créer un Laboratoire de transfert de l'information (INTRALAB). INTRALAB servira à transférer directement les techniques de télédétection les plus récentes aux problèmes d'application d'un usager spécifique. on espère que les résultats des études réalisées par INTRALAB ne profiteront pas seulment à l'usager mais apporteront également à la NASA des éléments importants pour la préparation des futurs systèmes de détection et de traitement des données.

CONCLUSIONS

Les systèmes (opérationnels et expérimentaux) de télédétection par aéronef et par satellite sont à même aujourd'hui d'apporter une contribution considérable à l'aménagement des bassins versants, notamment dans les domaines ci-après: cartographie des neiges, inventaires des eaux de surface, aménagement des crues, surveillance de l'utilisation des terres du point de vue hydrologique et établissement des modèles de bassins versants. Le progrès technologique en matière de télédétection des données hydrologiques s'accélérant sans cesse, il faut que les spécialistes de l'aménagement des bassins versants prennent davantage conscience des possibilités de la télédétection et acquièrent une formation technique appropriée si l'on veut que ces nouveaux outils de travail soient exploités le mieux possible.

6. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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