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Annexe 3
PROPOSITIONS POUR LE DEVELOPPEMENT DE LA PISCICULTURE AU RWANDA

1. RESUME

Pour établir un service de vulgarisation de la pisciculture couvrant tout le Rwanda il sera nécessaire de construire des petits groupes d'étangs simples dans chacune des préfectures du pays.

Pour les travaux de vulgarisation comme pour la production de poissons pour le marché, on devra utiliser au maximum les excellentes installations existantes déjà à Kigembe et à Butare. Ces projets pilotes et de démonstration seront placés sous la responsabilité directe du Ministère de l'agriculture et seront supervisés par le Chef des Divisions des eaux, sous la direction du Directeur des eaux et forêts.

En plus des dépenses actuelles du Gouvernement dans ce secteur, 2 700 000 FRw environ seront nécessaires pour établir ces services, avec des dépenses renouvelables annuelles d'approximativement 1 900 000 FRw. Environ la moitié de cette somme sera récupérée de la vente du poisson.

Le rendement escompté réside dans l'établissement de la pisciculture dans le système agricole traditionnel. Si l'on admet que chacun des neuf centres sera chargé de la construction de 100 étangs de paysans d'une superficie moyenne individuelle de 5 a environ, 45 t de poisson frais seront produites chaque année et consommées sur place. En outre, 40 t de poisson par an seront produites par les centres de pisciculture et vendues directement sur le marché. Un système de transport pour la diffusion des renseignements, des alevins, etc., doit être établi à un coût total net de 700 000 FRw environ par an en plus des dépenses actuelles pour ce secteur au Rwanda.

2. GENERALITES

L'échec fréquent des efforts visant à l'introduction de la pisciculture dans le cadre de l'agriculture traditionnelle des paysans, soit au Rwanda comme dans d'autres parties de l'Afrique, incite à la prudence. La raison de cet échec a souvent été que l'on a voulu introduire une technique agricole nouvelle et un type de nourriture inconnu dans le système agricole traditionnellement conservateur des paysans. Il faut se souvenir que le niveau technique des idées introduites ne doit pas dépasser la capacité de comprendre des paysans qui doivent être convaincus de la rentabilité de l'opération avant qu'ils décident d'accepter le risque de quelque chose de nouveau. Si les techniques nouvelles sont vantées avec trop d'enthousiasme par les moniteurs ou les animateurs, on court toujours le risque que les efforts des paysans soient interrompus à la fin du programme de vulgarisation. Les paysans doivent apprendre les techniques nécessaires puis être indépendants de tout soutien extérieur.

Le programme d'introduction de la pisciculture chez les paysans rwandais présenté ci-après a pour but d'établir la tradition d'une pisciculture se suffisant à elle-même au niveau des petites exploitations agricoles, et non d'introduire de grandes unités de production.

3. PROGRAMME DE VULGARISATION

Ce programme devrait être divisé en trois étapes:

Motivation des agriculteurs

La meilleure méthode est l'utilisation comme exemple des étangs de démonstration. Bien que la croissance des poissons aient peu de valeur du point de vue de la propagande (les poissons sont difficiles à voir), les paysans devraient remarquer que le poisson est nourri. Les deux moments d'impact maximum sont celui de la récolte et l'appréciation de la simplicité de la construction des étangs.

Le plus grand nombre de gens possible doivent être avisés et assister à la récolte et la moisson peut être vendue aux spectateurs. Il faudra manipuler avec soin des alevins destinés à être distribués comme semence.

Les étangs de démonstration doivent être bâtis en matériau bon marché de provenance locale (eviter l'utilisation de tuyaux, de béton, de briques, etc.) et d'une taille qui les rende faciles à construire par quelques agriculteurs employant les outils les plus primitifs.

Une des formes de démonstration les plus efficaces est un étang appartenant à un paysan dynamique qui sera activement aidé par les agents de vulgarisation au moment de cette première récolte, afin de faire bénéficier ses voisins de cet exemple.

Il est possible qu'il faille attendre plusieurs bonnes récoltes d'un étang de démonstration avant que les premières demandes soient reçues des fermiers intéressés.

Aide pendant la construction des étangs

La construction des étangs et des canaux d'eau ne devrait pas exiger plus de compétence que celle que les fermiers rwandais possèdent déjà. Des conseils doivent lui être donnés de manière à l'aider à suivre la bonne pratique de la pisciculture; notamment pour la vidange complète de l'étang, le contrôle d'entrée de l'eau, la solidité et la pente des digues et l'utilisation la plus efficace du terrain.

Le soutien pendant la phase initiale de production

Lorsque les étangs sont aménagés et préparés d'une façon satisfaisante, les vulgarisateurs devront pouvoir fournir des alevins en quantités suffisantes. Au moment des premières récoltes qui sont l'occasion d'une nouvelle action de propagande, la qualité et la quantité de poissons devront être observées et le propriétaire complimenté ou critiqué en conséquence; il recevra des explications appropriées. Après les premières récoltes il ne devrait plus être nécessaire d'aider le fermier à moins que des alevins soient demandés à la suite d'un accident (mort des poissons, inondation, digues détruites, etc.).

4. ETABLISSEMENT DES CENTRES DE DEMONSTRATION DE LA PISCICULTURE

Chacune des préfectures devrait être dotée d'un centre de pisciculture soit neuf et bien situé, soit aménagé dans les installations existantes (notamment celles de Kigembe à Butare ou de Muko à Ruhengeri). Les nouvelles constructions devraient être aussi près du chef-lieu de la préfecture que possible, ceci pour des raisons administratives et pour l'avantage dela présence des marchés urbains. Chacun de ces centres servira à la diffusion de conseils, d'alevins sur un rayon de 20 à 30 km.

5. EXIGENCES MINIMALES D'UN CENTRE PISCICOLE DE PREFECTURE

Les étangs

Chaque centre devra posséder 10 étangs d'environ 5 a et cinq étangs d'environ 2 a (le nombre et la dimension exacte des étangs ne sont pas très importants). Les étangs les plus grands serviront aux démonstrations des méthodes d'élevage des poissons de consommation et à l'élevage des alevins pour la distribution et le repeuplement. Les petits étangs sont destinés au stockage des alevins prêts à être distribués.

La construction

La construction des étangs se fera avec les méthodes que devront utiliser les paysans. La profondeur variera d'un minimum de 0,5 m à un maximum de 1,5 m au “percedigue”. Les perce-digues seront simples et bordés avec des bâtons pour éviter les dégâts causés par l'écoulement de l'eau. Le canal d'entrée sera formé par un simple bouchon d'argile. Pour le détail des méthodes de construction, voir le manuel en Kinyarwandan intitulé: “Ibyuzi Bororeramo Amafi” publié par le Centre nutritionnel de Ruhengeri.

Alimentation

Lorsque c'est possible, des cultures pouvant alimenter les poissons devront être aménagées près des étangs. Un petit entrepôt devra être construit pour conserver des déchets de paille, etc.

Logements

Des logements devront être construits au moyen de matériaux locaux près des étangs pour le gardien et l'assistant agronome responsable.

Transport

Au minimum chaque agronome responsable d'un centre recevra une bicyclette. Un véhicule motorisé sera mis à disposition pour les transports par la préfecture ou le Ministère de l'agriculture.

6. RECOMMANDATIONS POUR LE CENTRE PISCICOLE DE BUTARE

Pour le développement de la pisciculture, la région de Butare est un cas spécial; elle possède déjà 15 ha d'étangs de production dans un excellent état. Butare est la deuxième ville du Rwanda et les étangs de paysans sont déjà nombreux dans la région.

L'ensemble des étangs du Groupe scolaire de Butare et le CAP de Kigembe doivent être considérés ensemble, et faire l'objet d'un programme commun de production de poisson pour le marché et pour le stockage. Leurs étangs sont dans un état relativement satisfaisant et n'ont pas besoin de dépenses importantes. A part les moyens de transport, aucune dépense n'est nécessaire en plus de celles déjà supportées par le Gouvernement.

L'assistant agricole (A 1) chargé du CAP de Kigembe devra être aussi responsable du programme des étangs du groupe scolaire. Un assistant (A 2) devra avoir la responsabilité du programme journalier de ces étangs.

Environ 20 ouvriers seront nécessaires pour l'entretien des étangs, la pêche, le gardiennage, etc., et devront être attribués à l'un ou à l'autre des deux complexes d'étangs selon les exigences des travaux. Il y a actuellement environ 15 ouvriers travaillant à plein temps à Kigembe.

7. SCHEMA DE L'ORGANISATION D'UN SERVICE DE PISCICULTURE (cf. fig 1)

Responsabilité

Pour assurer un programme cohérent il est essentiel que les centres préfectoraux, Butare et Kigembe soient directement sous le contrôle du Ministère de l'agricultre. Les responsabilités devront être clairement définies; les Centres préfectoraux, Butare et Kigembe dépendront directement du Chef de la Diviaion des eaux qui, à son tour, rendra compte au Directeur des eaux et forêts (du Ministère). Les centres préfectoraux pourront demander directement des conseils et des alevins à Kigembe et à Butare. Les agriculteurs utiliseront les services de ces centres et de Kigembe et Butare pour recevoir des conseils, des alevins, etc.

Personnel prévu (les chiffres entre parenthèses indiquent le personnel disponible en 1973)

Pour le contrôle de la construction, l'entretien de l'étang, et plus tard les travaux d'extension, dix (3) assistants agronomes de classe A1 ou A2.seront nécessaires. Ils travailleront en collaboration avec les animateurs et moniteurs de la préfecture. Un (1) assistant agronome de classe A1 doit avoir la direction générale des étangs de Kigembe et Butare.

Assistance technique prévue

L'aide d'un expert peut-être aidé d'un ou deux experts-associés sera nécessaire pendant la phase initiale de la planification et de la construction des étangs. Au commencement cet expert contrôlera de près le programme de production. Le Rwanda possède suffisamment de personnes compétentes pour que, lorsque cette phase sera terminée (c'està-dire 18 mois), le programme soit poursuivi sous la direction de personnel national.

Dépenses prévues

Une analyse détaillée des dépenses suit aux sections 9 à 13.

8. REPRODUCTION CONTROLEE DES CARPES

Le CAP de Kigembe est bien équipé pour les travaux de pisciculture. Lorsque la production sera bien établie, il faudra envisager les possibilités d'amélioration de la production par les définitions de méthodes de reproduction contrôlée des carpes dans les conditions locales.

Quelque succès a été obtenu durant la première phase de ce projet dans la reproduction contrôlée de carpes (“Carpe miroir”) introduites d'Ouganda. Il y a eu parfois des pontes naturelles dans les étangs de Kigembe et quelques centaines de carpes sont déjà en stock.

La carpe est un poisson très robuste, facile à transporter; il montre un très bon accroissement (p. ex. 150 g de poisson introduit dans 1 ha bien nourri a cru de 200 g par mois pendant une période de sept mois). Cette espèce peut apporter une contribution significative à la récolte des étangs de subsistance, si un approvisionnement continu en alevins peut être assuré. La difficulté de la reproduction dans les conditions locales au Rwanda est un avantage, leur taille sera plus large et ils croîtront plus vite s'ils ne peuvent pas pondre. Les données déjà disponibles à Kigembe devraient permettre d'établir des techniques de reproduction contrôlée pour cette espèce.

9. DEPENSES POUR UN CENTRE DE PISCICULTURE REGIONAL

Dépenses d'équipement
 FRw  
Construction des étangs
10 étangs de 5 a (à 200 hommes/jour/étang) = 200 hommes/jours*
70 000
  5 étangs de 2 a (à 100 hommes/jour/étang) = 500 hommes/jours*
17 500
Canaux, digues, etc. (selon le terrain) estimés 200 hommes/jours*
7 000
2 maisons à FRw 40 000 chacune
80 000
1 bicyclette
5 000
Total179 500
Note: Sans les frais d'arpentage, de piquetage, etc.
 
Dépenses annuelles renouvelables
Assistant agronome classe A2 (1)
36 000
Ouvriers (2)*
24 500
Gardien (1)*
12 250
Matériaux consommables (houes, brouettes, etc.)
10 000
Amortissement des dépenses d'équipement (cf. ci-dessus) sur dix ans
17 950
Total100 700
Si chaque préfecture ** est équipée d'un centre (sauf Butare) le coût pour les neuf Centres est de:1 615 500
Les dépenses annuelles pour les neuf Centres sont de:906 300
(1 $ E.-U. = 84,0 FRw)

* Salaire annuel calculé sur la base de 35 FRw/jour pour une année de 350 jours.

** Ici on a supposé que les étangs à Muko (Ruhengeri) coûteront la même somme totale qu'un centre de construction nouvelle.

10. LES DEPENSES POUR L'ENSEMBLE DES ETANGS: GROUPE SCOLAIRE DE BUTARE, CAP DE KIGEMBE

Dépenses d'équipement
 FRw  
Véhicule (camion “pick-up” à ¾ ou 1 t)
550 000
Total550 000
Dépenses annuelles 
Assistant agronome classe 1 (1)
72 000
Assistant agronome classe 2 (1)
36 000
Ouvriers/gardiens (20)*
245 000
Frais d'utilisation d'un véhicule (25 000 km à FRw 20/km)**
500 000
Matériaux pour l'entretien des étangs
50 000
Total903 000

* Salaire annuel calculé sur la base de 35 FRw/jour pour une année de 350 jours.

11. LES DEPENSES POUR LE SERVICE DE GESTION DU MINISTERE DE L'AGRICULTURE

Dépenses d'équipement 
 FRw  
Véhicule (camion “pick-up” à ¾ ou 1 t)
550 000
Total550 000
Dépenses annuelles 
Agronome (Chef de Division des eaux)
200 000
Per diem pour le déplacement de l'agronome à 630 FRw pour 200 jours
126 000
Frais d'utilisation d'un véhicule (25 000 km à 20 FRw/km)**
500 000
Coût total annuel826 000

** Cette somme n'inclut pas l'amortissement du véhicule.

12. En plus des dépenses actuelles du Gouvernement dans le domaine de la pisciculture, les dépenses suivantes seront nécessaire pour l'établissement d'un service couvrant tout le pays.

Dépenses d'équipement 
 FRw  
La construction de nouveaux étangs
1 615 500
Véhicules (2)
1 100 000
Total2 715 500
Dépenses annuelles 
Salaires des assistants agronomes supplémentaires A2 (7)
252 000
Salaires des ouvriers/gardiens supplémentaires (35)
392 000
Matériaux pour l'entretien des étangs
90 000
Frais de transport
1 000 000
Frais de déplacement du Service de gestion du Ministère
126 000
Total1 860 000

13. ESTIMATION DU REVENU DES ETANGS DU CAP DE KIGEMBE, DU GS DE BUTARE ET DES CENTRES REGIONAUX PROPOSES

Superficie des étangs de production disponibles
 Kigembe CAP10 ha 
 Butare GS5 ha 
 Centres régionaux proposés5 ha 
Zone totale disponible20 ha 
Supposant une production nette moyenne de 2 t de poisson/ha/an, production totale prévue*40 t/an
Le poisson frais est vendu aux marchés à environ 40 FRw/kg** 
Revenu total de la vente du poisson:FRw 1 600 000/an
Coût estimé de l'alimentation (cultivée comme déchets):FRw           2 000/t
Quantité d'aliments requise (en supposant un coefficient alimentaire de 10:1)***400/t/an
Coût annuel total des aliments:FRw    800 000/an
Rendement
Revenu net
FRw      1 600 000
Frais d'alimentation
FRw         800 000
Revenu net/an
FRw         800 000

* Estimation de la production de poisson de consommation (c'est-à-dire 15 à 20 cm taille totale) prévue pour un étang bien nourri sur un cycle de récolte de six mois. Cette récolte est double ou triple si les alevins sont pris en considération. Au Rwanda un marché peut être trouvé pour toutes les tailles de poisson.

** Ce prix de vente est minimal; dans quelques régions du pays les prix sont 100 pour cent plus élevés.

*** Ce taux de conversion est minimal.


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