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Annexe 9 - APERCU SUR L’HYDROLOGIE DU PLATEAU CONTINENTAL OUEST-AFRICAIN DE LA MAURITANIE A LA GUINEE

par

J.P. REBERT
Physicien océanographe, ORSTOM, CRODT, Dakar, Sénégal

1. SYSTEMES GENERAUX

Les variations saisonnières de la circulation et des masses d’eaux sont très importantes dans toute la zone comprise entre le cap Blanc et le cap Roxo. Elles sont en relation directe avec les forces qui engendrent les principaux courants, c’est-à-dire les migrations des systèmes de haute et basse pressions de l’Atlantique Centre-Est à savoir: l’anticyclone des Açores et celui de Sainte-Hélène ainsi que la dépression saharienne.

Le déplacement de ces centres fait remonter l’ensemble du système des courants vers le nord en été boréal et le fait descendre vers le sud en hiver ou par saison sèche en même temps que leur intensité respective se modifie.

La circulation est constituée sur le plateau continental par la résultante de deux systèmes aux caractéristiques très différentes:

- Un courant sud en saison froide, improprement appelé courant des Canaries, car ce dernier bifurque à l’ouest au niveau du cap Blanc pour former le courant nord-équatorial. Il s’agit en fait d’une dérive littorale dont les fluctuations de vitesse sont très bien reliées aux variations de vent et dont la largeur n’excède guère celle du plateau continental au-delà duquel on trouve fréquemment un ensemble de vortex et de contre-courants. L’épaisseur du courant superficiel est faible (20 à 50 m). Sous ce courant côtier se trouve un contre-courant dirige vers le nord au niveau du talus continental entre le Cap-Vert et le cap Blanc.

- Un courant nord en saison chaude qui est une branche du contre-courant équatorial apportant des eaux chaudes et salées sur le plateau continental. Le contre-courant équatorial atteint son maximum d’intensité et d’extension vers le nord en été, s’écoule en général vers le sud-est en atteignant la cote ouest-africaine pour former le courant de Guinée. En été deux branches se forment, la séparation ayant lieu vers le cap Roxo. La branche nord peut atteindre la latitude du cap Blanc; cependant ce courant est très variable et subit de larges oscillations.

- Dans les zones côtières, en particulier, sur le banc d’Arguin et au sud du Cap-Vert peuvent se développer de petits contre-courants côtiers dûs à des processus thermohalins: circulation convective sur le banc d’Arguin due à la forte évaporation augmentant la densité de l’eau, contre-courants côtiers nord dus à l’échauffement des eaux au sud du Cap-Vert en période d’upwelling faible, courants de pente nord dûs à l’accumulation des eaux d’origine fluviatile en saison des pluies principalement au sud du cap Roxo. Au sud des Bissagos les courants côtiers sont faibles et irréguliers, masqués par d’importants courants de marée.

2. FRONTS

Les deux systèmes de courants transportent des eaux à températures très différentes (17 à 20° et 24 à 28°). Ils sont à leur point de rencontre séparés par des zones frontales à fort gradient thermique. Ces fronts se situent au niveau du cap Blanc en saison chaude et au niveau du cap Roxo en saison froide. Leur allure est assez différente dans ces deux positions (Fig. 1 et 2). Entre ces deux positions extrêmes, une migration très rapide se produit aux changements de saison; mai-juin et octobre. Cependant, sur le plateau continental il est difficile de suivre le passage du front entre ces deux positions car il se développe un ensemble de phénomènes d’upwellings côtiers qui tend à créer un gradient général de température de la cote vers le large et de petits fronts secondaires séparant des zones d’upwelling fort de zones de convergence. Des fluctuations brèves et importantes se produisent au moment du changement de saison, en particulier lors de l’installation de la saison froide.

3. SAISON FROIDE, UPWELLING COTIER

La saison froide dure de novembre à mai au niveau du Sénégal. Sa durée diminue progressivement du nord au sud. Au sud du cap Roxo elle est très courte, mais une petite saison froide apparaît en été, trahissant des influences de l’hémisphère sud qui vont croissant lorsqu’on s’enfonce dans le golfe de Guinée. A partir de la Guinée la saison froide australe est plus importante que la précédente (Fig. 3).

Un upwelling côtier se développe le long de la cote dans la zone ou soufflent les alizés c’est-à-dire jusque vers le cap Roxo. Le profil de la cote, la largeur du plateau continental, la direction et l’intensité des vents conditionnnement les fluctuations spatiales et temporelles de cet upwelling (Fig. 1).

On peut noter ainsi:

- En Mauritanie l'upwelling est intense au nord du cap Blanc ou il est quasi-permanent et sous le cap Timiris. Il est maximum en mai-juin. Les eaux sont froides et très peu stratifiées. Au niveau de 16° N (Saint-Louis) existe une autre zone favorable. Le plateau continental étant très étroit l'upwelling est extrêmement côtier. Il est maximum de février à avril.

- Au nord du Cap-Vert une zone de convergence existe au niveau de Kayar où la direction de la cote favorise l’accumulation d’eau. Sous le Cap-Vert l'upwelling est fort de février à mai. Les remontées d’eau ont lieu à partir des niveaux 70 à 100 m, soit moins profondément qu’au niveau du cap Blanc. Les eaux sont un peu plus stratifiées qu’au cap Blanc si bien que les températures de surface sont aussi faibles (<18°). Le plateau continental étant plus large l'upwelling maximum se produit vers le milieu du plateau avec deux cellules de circulation.

- Au niveau du cap Roxo l'upwelling maximum se produit en janvier-février. Les alizés faiblissent et tournent ensuite à l’ouest très rapidement.

Les fluctuations interannuelles de la durée et de l’intensité de la saison froide sont importantes au niveau du Sénégal et en rapport avec les fluctuations du régime des vents. l'écart-type de la longueur de la saison est de 15 jours environ et l'écart-type interannuel des températures de surface est supérieur à 1° C. Les eaux d’upwelling entraînées en surface sont principalement les eaux centrales sud-atlantiques.

4. SAISON CHAUDE

Les eaux chaudes de surface apparaissent au moment du retrait des alizés au niveau du Sénégal. On se trouve alors dans la zone intertropicale de convergence avec un régime de vents variables d’ouest virant progressivement aux vents de mousson du sud-ouest vers le sud. Les eaux de surface sont les eaux chaudes, salées et pauvres du contre-courant équatorial. Il existe alors une couche de surface isotherme dont l’épaisseur augmente légèrement vers la cote par suite du processus d’accumulation. Sous cette couche la stratification est forte et une thermocline bien marquée existe dans toute la zone. Le gradient de température dans la thermocline est maximum en fin de saison chaude (septembre) mais l’épaisseur de la couche de surface est maximum en début de saison chaude (juillet) ou elle peut dépasser 50 m.

La couche de surface se dessale progressivement au cours de la saison des pluies passant de 39 pour mille à 35 pour mille, les salinités restant fortes dans le nord en raison du gradient pluviométrique élevé nord-sud de la zone tropicale. Sur le plateau continental des dessalures de surface beaucoup plus fortes sont notées surtout au sud du Cap-Vert en raison de l’importance des apports fluviatiles existant au niveau de la Guinée et de la Guinée-Bissau ou les salinités peuvent descendre largement en deçà de 30 pour mille. Dans la zone côtière existe alors un fort gradient est-ouest de salinité de surface (Fig. 2).

Les principales fluctuations hydrologiques en saison chaude sont, outre la longueur de la saison:

- les fluctuations interannuelles de l’épaisseur de la couche de surface. Au mois d’août cette épaisseur au niveau du Sénégal peut varier entre 20 et 60 mètres;

- les fluctuations de pluviométrie qui influent directement les fluctuations de salinité de la couche de surface dans les zones côtières. Celles-ci ont été particulièrement importantes ces dernières années.

Les deux phénomènes ont d’ailleurs été mis en rapport. Au niveau du Sénégal les années sèches la thermocline est plus profonde et les températures de surface légèrement moins élevées.

Les eaux peu salées peuvent atteindre exceptionnellement la latitude du cap Timiris semble-t-il mais elles refluent très rapidement dans la zone nord des l’apparition des alizés. Devant la Guinée et la Guinée-Bissau par contre, en raison de l’apport constant des fleuves et de la faible circulation de surface elles peuvent persister jusqu’à la fin de la saison sèche.

Fig. 1 - Courants de surface, zones d’upwelling () et fronts en saison froide (février - avril)

Fig. 2 - Courants de surface, zones d’upwelling () et salinité de surface en saison chaude (août - septembre)

Fig. 3 - Variations saisonnières de la température de surface à M’bour, Conakry et aux Bissagos


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