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1.  INTRODUCTION

1.1   Définitions et aperçu historique

La FAO (1990) définit l'aquaculture de la façon suivante:

“L'aquaculture consiste à élever des organismes aquatiques-poissons, mollusques, crustacés et plantes aquatiques. Elle implique une forme d'intervention dans le processus d'augmentation de la production, telle que la mise en charge régulière, l'alimentation, la protection contre les prédateurs, etc. Elle implique également la propriété par une personne physique ou morale du stock en élevage. Du point de vue des statistiques, les organismes aquatiques récoltés par un individu ou une personne morale qui en a été propriétaire tout au long de leur période d'élevage sont donc des produits de l'aquaculture. Par contre, les organismes aquatiques exploitables par tous en tant que ressource commune, avec ou sans licences appropriées, sont à considérer comme des produits de la pêche.”

Aux fins du présent document, les zones géographiques couvertes par le terme “côtier” incluent la zone littorale influencée par la mer, la colonne d'eau et le lit de la mer qui s'étend jusqu'au bord du plateau continental (Sorensen and McCreary, 1990). Ainsi, le terme “aquaculture côtière” couvre toutes les activités aquacoles marines ou en eau saumâtre, qu'elles soient basées à terre ou en mer.

La production aquacole s'accroît dans le monde entier, et il est prévu que les activités aquacoles se multiplieront dans le futur proche et cela par leur meilleure maîtrise et par leur diversification. Actuellement, la production aquacole représente approximativement 15,3 pour cent de la production de la pêche mondiale (voir FAO, 1992) contre 14 pour cent en 1989 (New, 1991; voir également FAO, 1991a). En 1990, la production aquacole côtière atteignait approximativement 7,5 millions de tonnes dont la valeur était estimée à 13 230 millions de dollars E. -U. (voir FAO, 1992). Le développement de l'aquaculture a pour force motrice, d'une part, la demande croissante en produits aquacoles qui engendre profits et revenus et, d'autre part, le besoin urgent d'approvisionnements alimentaires réguliers.

L'aquaculture interagit avec l'environnement. Elle en utilise les ressources et y cause des changements. Beaucoup d'interactions ont des résultats bénéfiques. L'expansion de l'aquaculture a eu des avantages socio-économiques substantiels, notamment l'accrois- sement des revenus, de l'emploi, des recettes en devises ainsi qu'une amélioration de l'alimentation (Pullin, 1989). II faut reconnaître que, jusqu 'à présent, l'aquaculture en général n'a eu que peu d'effets négatifs sur l'écosystème. Néanmoins, certains cas de dégradation de l'environnement dans les régions côtières se sont manifestés à cause, par exemple, de l'élevage intensif en cages en Europe ou du type d'élevage de crevettes pratiqué en Asie du Sud-Est ou en Amérique latine.

Dans de nombreux pays tempérés et tropicaux, l'aquaculture peut encore être améliorée. L'effort devrait porter sur l'amélioration de la gestion et des méthodes utilisées par de nombreuses fermes aquacoles afin d'assurer leur durabilité et leur compatibilité avec l'environnement. Malheureusement, la planification et la coordination du développement de l'aquaculture, fondées sur une information de base appropriée contenant suffisamment de données techniques et socio-économiques, restent l'exception plutôt que la règle dans la plupart des pays.

Bien qu'il existe un potentiel de développement dans de nombreuses zones, l'aquaculture risque d'être de plus en plus exposée à des contraintes d'environnement, de ressources et de marchés. Elle a besoin de terrain et d'eau et entre donc parfois en conflit avec d'autres utilisateurs des mêmes ressources. De plus, toutes les implications du développement aquacole sur l'environnement, y compris les effets négatifs de l'élevage et les conséquences de l'accroissement de la pollution aquatique sur la faisabilité et la perennité du développement de l'aquaculture, suscitent des préoccupations croissantes.

Durant ces vingt dernières années, l'attention s'est de plus en plus portée sur les risques potentiels du développement aquacole pour l'environnement. Dans certains cas, des problèmes ont été causés par la conversion des zones humides, les décharges d'éléments nutritifs et de déchets organiques, l'introduction d'espèces exotiques, l'utilisation de produits chimiques ainsi que la détérioration de la qualité de l'eau et la raréfaction des sites adaptés à l'aquaculture. Ces problèmes ont été maintes fois abordés par des experts internationaux, par exemple, à la Commission indo-pacifique des pêches (CIPP), à la Commission européenne consultative pour les pêches dans les eaux intérieures (CECPI), au Conseil international pour l'exploration de la mer (CIEM), à la Société asiatique des pêches, au Centre international d'aménagement des ressources bioaquatiques (ICLARM), à la Société mondiale d'aquaculture (WAS), à la Société européenne d'aquaculture (EAS), et au Groupe mixte OMI/FAO/Unesco/OMM/OMS/AIEA/NU/PNUE 1 d'experts chargés d'étudier les aspects scientifiques de la pollution des mers (GESAMP).

Ces différentes consultations ont chaque fois mis l'accent sur l'urgence d'apporter des améliorations dans plusieurs domaines tels que: i) application de méthodes aquacoles appropriées, ii) planification et gestion du développement sectoriel, iii) intégration de l'aquaculture dans la gestion des infrastructures multisectorielles des zones côtières et des bassins fluviaux, iv) législation régissant l'aquaculture, et v) évaluation et suivi des changements écologiques et socio-économiques associés au développement de l'aquaculture.

1.2  But et portée du document

Ce document a pour but de promouvoir la gestion de l'environnement dans l'aquaculture côtière. II s'adresse à toutes les personnes intéressées par la planification, le développement et la gestion de l'aquaculture côtière acceptable du point de vue de l'environnement. II devrait aussi être utile aux spécialistes qui s'occupent de l'aménagement de l'environnement dans les zones côtières.

Des lignes directrices générales, basées sur l'examen rapide des publications disponibles, sont données pour la gestion de l'environnement de l'aquaculture côtière. Ces lignes directrices, énoncées au chapitre 2, renvoient directement le lecteur au chapitre pertinent de l'examen qui contient des informations plus spécifiques (chapitres 3–6). On espère que, par l'apport de renseignements utiles, ce document contribuera à améliorer la formulation et la mise en oeuvre d'approches et d'actions appropriées spécifiques à chaque pays qui tiennent compte donc des conditions écologiques et socio-économiques particulières influant sur le développement de l'aquaculture côtière.

Le chapitre 3 tente de dégager les incidences sur l'environnement du développement de l'aquaculture côtière vue dans le contexte plus large de l'utilisation des ressources côtières et des changements concomitants de l'environnement. De plus, les principaux facteurs et causes biophysiques et socio-économiques de la détérioration et de la mauvaise gestion de l'environnement, qui sont spécifiques de l'aquaculture côtière, sont abordés de façon à mettre en évidence les éventuelles contraintes au développement respectueux de l'environnement. Des méthodologies sont présentées concernant l'évaluation et le suivi des risques et des impacts de l'aquaculture côtière sur l'environnement (chapitre 5). Quelques options de gestion de l'environnement sont également décrites et pourront être appliquées au niveau de la politique générale et de l'élevage (chapitre 6).

1 OMI: Organisation maritime internationale; FAO: Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture; Unesco: Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture ; OMM: Organisation météréologique mondiale; OMS: Organisation mondiale de la santé; AIEA: Agence internationale pour l'énergie atomique; NU: Nations Unies; PNUE: Programme des Nations Unies pour l'environnement.

De nombreux efforts ont été faits pour dégager les circonstances et les besoins du développement et de l'environnement en aquaculture côtière dans les pays en développement. Malheureusement, il existe là un manque réel d'informations adéquates et de données relatives aux effets négatifs. De plus, les informations disponibles en provenance des pays des zones tempérées ne peuvent, dans la plupart des cas, être utilisées pour évaluer quantitativement ou pour prédire les effets négatifs sur l'environnement de l'aquaculture des pays tropicaux. Enfin, la plupart des idées formulées jusqu'à présent sur les effets négatifs potentiels de l'aquaculture sont encore de nature spéculative et ne sont pas confirmées par des preuves scientifiques (Pillay, 1992). Le manque de recherches spécifiques aux différents types d'aquaculture et leurs environnements différents rend extrêmement difficile tout jugement définitif.

Toutes les lignes directrices comportent des limites dues d'une part, à leur caractère général et de l'autre à leur large portée. Vu la grande variété des types d'aquaculture côtière et de leur environnement dans le monde, il serait sans doute nécessaire de préciser certaines conclusions de ce document afin de répondre aux demandes spécifiques des différents lecteurs. Nous encourageons donc ces derniers à formuler des commentaires et des suggestions afin d'améliorer ce document en indiquant les conditions spécifiques de développement et d'environnement qui ont facilité ou entravé les progrès de l'aquaculture côtière dans leur pays ou leur projet.

La gestion de l'environnement dans le développement de l'aquaculture côtière et sa promotion représentent un véritable défi. En effet, cette aquaculture présente de très grandes variations en ce qui concerne non seulement les personnes concernées, les ressources utilisées, les méthodes appliquées mais également les caractéristiques de l'environnement des sites exploités ou potentiels. Il est donc possible d'améliorer l'adaptation et l'intégration de l'aquaculture au développement des zones côtières. Nous pensons qu'une gestion appropriée de l'environnement peut être réalisée en renforçant l'efficacité du développement et de la gestion des activités aquacoles.


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