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Point de vue


Le GATT et le commerce du riz: quels changements?
Le GCRAI compte un nouveau donateur: Le PNUE
Affrontement culturel: Les Karimojong et les Iteso, frères ennemis
Une haie vive, c'est tellement mieux
La lutte intégrée contre les ravageurs? C'est en Chine
La FAO en action

Le GATT et le commerce du riz: quels changements?

Par Chan Ling Yap

Au cours des sept années du cycle de l'Uruguay qui a permis la signature de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT), d'âpres batailles ont été livrées en matière d'agriculture. Nombreux sont ceux qui attendent de l'ère nouvelle l'ouverture des marchés protégés et la réduction des primes à l'exportation.

Mais la question demeure de savoir si l'accord que la nouvelle Organisation mondiale du commerce (OMC) est chargée d'administrer offre réellement une solution aux problèmes des échanges de produits alimentaires de première nécessité.

L'exemple du riz montre bien que malgré la rhétorique qui entoure cet accord, les principales nations exportatrices de produits alimentaires de base continuent à utiliser des mécanismes commerciaux destinés à favoriser les exportations et freiner les importations.

Ainsi, pour célébrer cette ère nouvelle, fin 1994 et début 1995, les deux plus grands exportateurs mondiaux (la Thaïlande et les Etats-Unis) ont augmenté leurs primes à l'exportation de riz. Les Etats-Unis ont relancé leur programme d'accroissement des exportations en septembre 1994, les primes à l'exportation passant de 12 à 87,50 dollars la tonne. La Thaïlande a suivi en novembre et ses primes à l'exportation de riz atteignent 10 dollars la tonne. Les exportations de riz de ces deux pays ont fortement augmenté durant cette période.

Portes ouvertes

La hausse des primes à l'exportation pourrait bien n'être qu'un chant du cygne, avant que l'on ne se mette en marche vers la réduction du soutien à l'agriculture et la correction des distorsions des échanges commerciaux. Après tout, la mise en oeuvre de l'accord du cycle de l'Uruguay vient tout juste de débuter. La question la plus importante est celle de ses implications à long terme pour l'économie du riz dans le monde.

Le nouvel accord commercial a réussi à ouvrir en partie les portes du marché du riz au Japon et en République de Corée. Le riz est un aliment et un symbole fondamental pour ces deux pays. Leurs gouvernements n'ont certes pas pris d'un coeur léger la décision d'autoriser son importation.

Aux termes de l'accord, 4 % des besoins en riz du Japon seront couverts par les importations en 1995, pour passer à 8 % en l'an 2000. La République de Corée commencera par importer 1 % de ses besoins pour atteindre 4 % en 2004. Ces pourcentages ont été calculés sur la quantité de riz consommée de 1986 à 1988, alors que ces deux pays tendent aujourd'hui à diminuer leur consommation de riz pour se tourner vers d'autres aliments: cinq kilos de moins par personne et par an au Japon et dix kilos de moins en République de Corée, depuis 1986-1988.

Avec la réduction de la consommation de riz et la croissance des importations au cours des cinq prochaines années, on assistera probablement à de fortes pressions tendant à réduire la production nationale, subventionnée par les contribuables des deux pays. Ce ne sera pas facile, vu l'importance économique et politique du riz et l'insécurité ressentie par toute nation contrainte de renoncer à son autosuffisance alimentaire.

Au moment où le Japon a accepté de s'engager dans le cycle de l'Uruguay, ses dirigeants ont approuvé un programme de réforme agraire destiné à permettre aux riziculteurs de résister à la concurrence étrangère. Ce programme prévoit une amélioration accélérée des infrastructures et des terrains agricoles, et des prêts sans intérêts aux cultivateurs débutants. En outre, le gouvernement est autorisé à prélever une lourde taxe (292 yens au kilo) sur les ventes de riz importé, ce qui entraîne une forte hausse du prix à la consommation des importations de riz bon marché.

Libéralisation d'un côté, protectionnisme de l'autre: cette année la Thaïlande autorisera ses commerçants à importer jusqu'à 237863 tonnes de riz, mais leur imposera une taxe à l'importation de 30 % qui découragera, au bout du compte, les achats de riz à l'étranger.

Dans la pratique, le GATT n'a pas eu beaucoup d'effet sur les programmes rizicoles nationaux

L'un des objectifs principaux du cycle de l'Uruguay était de transformer en tarifs douaniers les barrières commerciales. telles que les interdictions d'importer, les quotas d'importation et le monopole commercial des gouvernements. Les pays intéressés ont accepté mais se sont arrangés. La plupart ont 1 adopté pour le riz des tarifs d'importation si élevés qu'ils découragent les importateurs. Le GATT a provoqué des changements essentiels dans le commerce international, en ce sens qu'il a ouvert quelques marchés du riz traditionnels; mais son impact global, en particulier sur la production, restera probablement modeste.

Une belle théorie

En théorie, la suppression des restrictions et des distorsions dans les échanges permettra aux différents pays de s'adapter librement aux disponibilités et à la demande du marché mondial et de répondre aux variations des prix. Le commerce ainsi libéralisé encouragera les pays à produire des biens de première nécessité quand ils y trouveront un avantage en termes de coût et d'efficience.

En pratique, il semble que l'on continuera à utiliser des: mécanismes commerciaux tels que le maintien de tarifs élevés sur les importations. Pour de nombreux pays, il est moins important de supprimer les distorsions du commerce international du riz que d'assurer leur autonomie alimentaire. Ils doivent donc dissuader les cultivateurs de quitter leurs rizières pour des activités plus lucratives. Pendant la dernière décennie, en Chine, environ trois millions d'hectares de paddy ont été convertis à d'autres usages. Les économies asiatiques en croissance rapide (Inde, Indonésie, Thaïlande, Malaisie) connaissent la même évolution, car les revenus des emplois dans l'industrie sont plus intéressants que ceux de la riziculture.

Pour certains de ces pays, une réduction des taxes à l'importation provoquerait une croissance brutale des importations de riz bon marché qui ferait chuter les prix agricoles. La diminution du soutien à la production aboutirait à une augmentation des charges pour les cultivateurs. Ces deux mesures pousseraient ainsi la main-d'oeuvre agricole à de nouvelles migrations et entraîneraient un certain affaiblissement de l'agriculture.

La riziculture est un investissement à long terme. Il est illusoire de croire que les agriculteurs et les pays s'adapteront facilement aux libres effets combinés des forces du marché. D'ailleurs, les fluctuations des cours mondiaux du riz sont plutôt le résultat de variations liées aux conditions climatiques.

Les agriculteurs qui ont abandonné la culture du riz n'y reviennent pas facilement. Dans nombre de pays, l'abandon des rizières a signifié la perte d'une culture qui est à la fois source de nourriture, d'emplois, de revenus et facteur de cohésion familiale.

En Chine où quelque 120 millions de tonnes de riz sont consommées chaque année, le volume de riz disponible sur le marché international n'atteint que 15 à 16 millions de tonnes.

Pour ce pays qui peut difficilement se permettre d'acheter à l'étranger une forte proportion de ses besoins en riz, l'autonomie alimentaire reste un idéal alléchant, même si les coûts de production doivent rester élevés.

Chan Ling Yap est spécialiste des produits rizicoles auprès de la FAO

Le GCRAI compte un nouveau donateur: Le PNUE

Travaux sur l'ADN dans un laboratoire du GCRAI. Ils permettront peut-être de produire un vaccin contre les maladies transmises par les tiques

Le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) est devenu le quatrième co-parrain du plus grand consortium international de recherche agricole existant, fait révélateur d'une orientation plus centrée sur l'environnement et sur la durabilité du développement rural.

Le Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (GCRAI), avec ses 16 centres de recherche disséminés dans le monde, étudie les moyens d'améliorer la production végétale et animale par la sélection de plantes et d'animaux hautement performants et par l'introduction de nouvelles méthodes agricoles dans des conditions climatiques difficiles et sur des sols problématiques.

Le GCRAI a toutefois été fortement critiqué pour son approche technique trop limitée, ignorant les petits exploitants, et sa politique de développement des cultures à fort apport d'engrais et de pesticides. Un autre reproche: ne pas dévoiler les résultats des recherches aux fermiers et aux vulgarisateurs concernés.

C'est à Luzerne (Suisse), en février dernier, que le PNUE est devenu co-parrain au niveau ministériel du réseau du Groupe consultatif, aux côtés de la Banque mondiale (qui préside le GCRAI), de la FAO et du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Au total, 45 donateurs publics et privés financent le réseau, la plupart des fonds provenant des budgets d'aide publique.

"L'orientation, la conduite et les dispositions financières nouvelles" approuvées à Luzerne prévoient une plus forte participation des pays en développement à la direction du groupe. Les pays en développement membres du GCRAI, au nombre de huit avant la réunion, seront désormais douze, avec l'entrée de la Côte d'Ivoire, de l'Egypte, de l'Iran et du Kenya. On estime qu'il s'agit là d'un pas en avant vers une répartition Nord-Sud plus équitable entre les membres du réseau. Seules trois institutions du GCRAI sont situées dans le Sud.

Cette étape devrait se traduire par le resserrement des liens entre institutions du GCRAI et programmes agricoles nationaux. Dans l'ensemble, les changements indiquent que le groupe a été sensible aux critiques d'ONG telles que la Rural Advancement Foundation International (RAFI) ou la Genetic Resource Action International (GRAIN).

Les délégués présents à la réunion ont suggéré aux chercheurs du GCRAI de "traiter avec plus de vigueur la question de la rareté de l'eau et de la gestion des sols et des nutriments". M. Ismail Serageldin, président du GCRAI et vice-directeur de la Banque mondiale, a déclaré que "la réunion a fourni un cadre qui permettra d'intensifier la collaboration internationale en matière de recherche agricole pour la promotion de l'agriculture durable et de la sécurité alimentaire".

Les ONG s'occupant de développement rural sont peu convaincues: dans une déclaration conjointe publiée à la suite de la rencontre, vingt ONG internationales s'inquiètent de l'absence de "propositions solides pour une rénovation authentique du GCRAI. La réunion s'est contentée de répéter de vagues généralités, sans faire cas de questions politiques non résolues, comme les droits de propriété intellectuelle ou les profits tirés des recherches du GCRAI bénéficiant aux pays donateurs". Un comité a été mis sur pied pour améliorer les relations entre le réseau du GCRAI et les organisations non gouvernementales.

Dans une "Déclaration et Programme d'action", les participants à la réunion de Luzerne se sont engagés à "renouveler leur soutien et à le renforcer dans la mesure du possible". Dans l'avenir immédiat, les fonds risquent fort de se maintenir au niveau annuel actuel de 270 millions de dollars, dont 40 millions de la Banque mondiale.

En outre, plusieurs membres du GCRAI ont indiqué leur volonté de mieux financer la recherche agricole axée sur la réduction de la pauvreté. Même si les fonds restent surtout destinés à couvrir les frais généraux, les bailleurs de fonds devraient "cibler" davantage leur aide sur des projets spécifiques, une approche qu'ils jugent préférables car ils savent ainsi exactement ce qu'ils financent.

John Madeley est un journaliste de nationalité britannique; il est spécialisé en développement agricole.

Affrontement culturel: Les Karimojong et les Iteso, frères ennemis

Chaleur torride et sèche. Le vent chargé de poussière frappe une vieille femme à la peau ridée et blanchie. Les rafales de poussière lui font plisser les yeux.

"Mes enfants! De l'eau, de l'eau! Qu'est-ce que peut faire une vieille femme comme moi?", gémit-elle en tombant à genoux, dans un geste à la fois de salut et de supplication. Et elle s'écrie, d'une voix prophétique: "Sans eau, nous allons tous mourir!".

Dans la région de Teso (nord-est de l'Ouganda) située à 400 km de la capitale, Kampala, les Iteso se battent pour cultiver des terres frappées par des sécheresses de plus en plus longues. Et comme si la misère ne suffisait pas, la lutte intense pour les maigres réserves d'eau et les rares pâturages se fait chaque jour plus âpre.

A peu de distance vivent leurs cousins, les Karimojong, des pasteurs nomades. Bien qu'ils parlent des dialectes apparentés, les deux peuples ont des conceptions du monde différentes, qui reflètent leurs modes de vie: agriculture sédentaire, élevage nomade.

Les différences ont engendré l'hostilité dans les années 80 à la suite du vol par les Karimojong de plusieurs animaux appartenant aux Iteso. En 1993-94, la sécheresse et la famine qui frappèrent la région, tuant 6 000 personnes, n'arrangèrent rien. Les pasteurs désertèrent Karamoja, la région la plus touchée, pour aller puiser l'eau ailleurs, dans la région de Teso et dans les districts voisins de Kitgum, Lira, Mbale et Kapchorwa.

Aux yeux des Karimojong, les Iteso se trouvent sur leurs parcours et leur disputent certaines ressources en eau qui, traditionnellement, leur appartiennent. Pour les Iteso, les Karimojong sont des criminels en armes, des ignorants qui travaillent nus, parmi leurs bêtes.

Les armes d'Amin

Les Karimojong se sont armés en 1979, lors de l'invasion tanzanienne qui a causé la chute du dictateur Idi Amin. Les soldats d'Amin ayant abandonné une garnison dans leur région, les pasteurs ont fait main basse sur les armes. Entre 1987 et 1989, le cheptel des Iteso a été pratiquement anéanti par les incursions des Karimojong et par la lutte armée intense entre les forces du Président Yoweri Museveni et celles de ses opposants Iteso.

De nombreux Iteso ont rejeté la responsabilité de la famine sur les Karimojong qui ont volé leurs boeufs, ce qui a fait chuter la production agricole et interdit le stockage de réserves. Avant le vol des boeufs, une exploitation classique de Teso comportait trois greniers pour engranger mil, sorgho, arachide et patate douce séchée. A présent, peu nombreux sont ceux qui possèdent encore un grenier.

Non pas que la vie des Karimojong ait été facile. L'eau et l'herbe sont vitales pour un peuple qui conduit des milliers de têtes de bétail et des centaines de chèvres et de moutons. En février dernier, certains d'entre eux ont déclaré que pas une seule goutte d'eau n'était tombée sur leurs terres depuis juillet 1993. Un jeune Karimojong avait alors fait un parallèle terrifiant: "Nos terres sont en train de se transformer en désert, comme le Sahara".

Les Karimojong s'étaient déplacés dans les marécages du Teso, riches en eau et en pâturages "résistants à la sécheresse". Les Iteso auraient pu trouver certains avantages dans la proximité des pasteurs, notamment pour la possibilité d'acheter du lait et des animaux. Mais les Iteso étaient plus nerveux qu'accueillants, exaspérés de voir les grands troupeaux des Karimojong piétiner leurs terres, mettant ainsi en danger la fertilité des sols exposés à l'érosion.

Les pasteurs Karimojong ont récupéré les armes abandonnées par les soldats d'Amin Dada (Photo Laura Mulenga)

"Pourquoi gardent-ils autant de bétail si les pacages et l'eau disponibles ne suffisent pas à le nourrir?", s'était plaint un agriculteur. Et Okello Faustino, dirigeant d'une municipalité locale, d'ajouter: "Nous ne pouvons rien faire: ils sont armés".

Le chef des Karimojong, Nicholas Lomilo, avait justifié la taille du cheptel: "Le bétail, c'est de la nourriture. En cas de sécheresse, que mangerons-nous? Nous vendrons alors du bétail pour manger."

Les Karimojong n'acceptent pas l'argument selon lequel leur cheptel dépasse les capacités de leurs terres. "C'est un mensonge", dit un jeune pasteur aux yeux de lynx, ajoutant que l'étendue des pacages de Karamoja est telle qu'il faudrait plus de deux mois pour la parcourir dans toute sa largeur. "Le seul problème à Karamoja, c'est l'eau", dit-il, faisant écho à ses compagnons.

Les Karimojong n'ont pas semblé gênés par l'accueil réservé des Iteso. "J'aime cette terre, il y a de l'eau et le sol est fertile", avait confié l'un d'eux, d'autres ajoutant que même si les pluies reprenaient chez eux, ils ne quitteraient pas les terres des agriculteurs. Insinuation très discutable car ce n'était pas de bonne grâce que les agriculteurs les hébergeaient. En fait, les Iteso n'arrivaient pas à se débarrasser des pasteurs armés.

"On ne veut pas que les Karimojong restent parce qu'ils volent nos vaches. C'est comme si on te prenait ta femme et qu'on te la ramenait pour faire l'amour dans ta maison", avait déclaré Michael Erigu, président du conseil municipal, se faisant écho de la croyance populaire qui voulait que les vaches exhibées par les Karimojong soient celles qui leur avaient été dérobées.

A cela, quelques jeunes guerriers nomades répondirent qu'un agriculteur avait trompé, volé et assassiné l'un des leurs. Selon les agriculteurs, le pasteur n'était pas mort et se rétablissait à l'hôpital.

Un Karimojong d'un certain âge

Face à cette vague de récriminations, le Président Museveni envoya ses négociateurs pour apaiser les esprits exaltés des deux camps.

Bien que difficile, la situation n'était pas inextricable. "S'ils étaient désarmés, ils pourraient rester", avait déclaré un Iteso.

En février 1994, le Président Museveni donna aux pasteurs deux semaines pour déposer les armes. Ils n'en firent rien, mais les pluies arrivèrent et ils se retirèrent lentement vers la zone limitrophe entre les deux, régions. La récolte qui suivit fut bonne.

Les pasteurs sont partis, mais il est fort probable qu'ils reviendront avec la sécheresse. Poursuivant ses efforts de pacification du pays, le Président Museveni a promis le développement de la région des Karimojong, qui se sentent rejetés par tous, sauf par les missionnaires. "Il n'y a pas d'écoles, pas d'hôpitaux, pas de routes", a expliqué un nomade.

La promesse gouvernementale de faire reverdir la région, trop souvent restée sans suite, laisse les Karimojong sceptiques. "Nous prévoyons de construire 260 barrages, deux par commune", a promis Museveni dans une lettre de mars 1994, adressée aux chefs et aux anciens du nord de l'Ouganda.

Il s'agit d'un plan déjà annoncé avant l'arrivée au pouvoir du Mouvement de résistance national (NRM) de Museveni, en 1986. Pendant longtemps, il a fait partie du Programme en dix points du NRM pour le développement du pays. Le programme est resté en attente pendant que le pays s'essouflait sous le poids du remboursement de sa dette extérieure à des banquiers qui prêtaient jadis généreusement à Amin, Obote, Okello et d'autres, aujourd'hui accusés de crimes divers.

Museveni n'a pas tardé à reconnaître les obstacles. Les donateurs ont posé trop de conditions aux emprunts, acceptées, dit-il, "par nos fonctionnaires trop faibles. Les fonds ont été détournés du développement hydrique au bénéfice d'autres secteurs, comme la sensibilisation des communautés et la plantation d'arbres". Les fonctionnaires "faibles" sont ceux de l'Agence de développement de Karamoja (KDA), une création du NRM née en 1987 pour donner à la région un "traitement de choc".

Les fonctionnaires du KDA ont souvent été très critiqués pour leur façon d'opérer depuis leurs bureaux de Kampala, au lieu de braver le soleil, la poussière et les mouches aux côtés des pasteurs Karimojong.

Mais les fonctionnaires gouvernementaux rejettent ces accusations. "Les Karimojong sont difficiles et hostiles aux intervenants extérieurs", a expliqué l'un d'eux, ajoutant qu'ils ont trop de têtes de bétail, des milliers, et qu'à leur passage, les pacages voisins des barrages sont réduits en poussière. Les barrages ne pouvant tenir sans pâturages, l'entière initiative est donc vouée à l'échec.

En revanche, les Karimojong estiment que les décisions prises au sommet ne tiennent pas compte de leurs revendications. Ils veulent que les barrages soient construits de façon à abreuver aisément le cheptel et qu'ils soient situés près de la région de Teso, zone limitrophe fertile grâce à ses bassins versants.

Au-delà des arguments qu'ils exposent aux politiciens et aux bureaucrates, les nomades ont bien compris le problème. "Si le gouvernement nous donne de l'eau, alors tout est possible, déclare Lomilo. Le gouvernement ne peut pas faire pousser l'herbe; l'eau, oui".

Francis Onapito-Ekomoloit est rédacteur-adjoint du journal The Monitor à Kampala et a conduit des recherches sur les Karimojong pour le Panos Institute (Londres).

Une haie vive, c'est tellement mieux

Les haies vives (clôtures faites d'arbres ou d'arbustes en pleine végétation) peuvent être bénéfiques aux cultures comme aux animaux: elles délimitent et séparent les champs, empêchent la divagation des animaux, servent de brise-vent et/ou de support pour les vignes. Plus résistantes que d'autres types de clôtures, elles peuvent être établies à un moindre coût, avec des matériaux locaux. Finie la coupe pour faire des clôtures, les fermiers avisés plantent des arbres!

Une haie vive enrichit les sols: les feuilles qui tombent forment paillis sur la superficie de la terre, parfait pour l'humidité et contre les mauvaises herbes. Les petites branches taillées peuvent servir de compost, tandis que les racines profondes des arbres restituent à la superficie du sol azote et autres nutriments, qui seront utiles aux cultures à racines peu profondes. Si l'arbre est légumineux, comme certaines essences du genre Prosopis, il fixera davantage d'azote, ce qui augmentera le rendement des cultures et permettra de faire des économies sur les engrais minéraux azotés.

Le feuillage de certains arbres, que les ruminants aiment à arracher des arbres, peut aussi être mélangé au fourrage. On conseille toutefois la prudence pour ce qui concerne quelques essences, comme le Gliricidia sepium ou le Leucaena leucocephala, dont les feuilles peuvent être toxiques pour le bétail, à doses élevées.

Certaines essences utilisées comme haie vive ont des feuilles, des fleurs et des bourgeons comestibles - les fleurs, les gousses et les racines du moringa (Moringa oleifera) par exemple. Tout surplus de production peut être vendu. Les haies sont aussi une source intéressante de bois de feu.

Bien entendu, elles comportent également des inconvénients. Par exemple, les arbres peuvent devenir trop grands, rendant l'émondage laborieux. Ils peuvent ombrager les cultures ou leur disputer l'eau, les nutriments ou l'espace pour les racines. Il faut donc bien planifier les haies et les contrôler régulièrement.

Construction d'une haie vive

Une haie vive peut notamment être obtenue en plantant une rangée d'arbres qui seront ensuite reliés avec du fil de fer enveloppé pour qu'il n'incise pas l'écorce. On plantera des boutures fraîches (de 5 à 20 cm de diamètre) en lieu et place des pieux de barrière. Avant de fixer le fil de fer, on attendra de préférence que les boutures aient bien pris ou, mieux encore, qu'elles aient atteint le diamètre d'un pieu. En attendant, on peut fabriquer une clôture temporaire faite de matériaux végétaux locaux, comme le bambou, placée à l'extérieur de l'enceinte.

Plantation de bananiers au Sénégal; en arrière-plan, une haie vive

Les arbres qui n'ont pas pris seront remplacés. Pour qu'ils se développent bien, on remplira les trous des boutures avec du terreau et on arrosera les plantes en cas de précipitations irrégulières.

Plantés en file serrée, le papayer, le bananier, le leucaena (L. leucocephala), le moringa (Moringa oleifera) et le filao (Casuarina sp.) sont idéaux pour délimiter les terres et empêcher le passage du bétail.

Le Gliricidia sepium, un arbuste légumineux qui se développe à partir d'une graine ou d'une bouture, peut aussi servir de clôture, à base étroite et large cime. Ses jeunes feuilles, fleurs et bourgeons sont souvent cuits comme légumes.

Le yucca pied d'éléphant (Yucca elephantipes) vit longtemps et se reproduit facilement à partir de boutures, mais sa croissance est relativement lente. En Amérique centrale, les boutures sont plantées en file serrée et l'arbre, en poussant, forme un rideau dense très difficile à traverser en raison des épines. Les fleurs sont comestibles.

Le leucaena, petit arbre fixateur d'azote, peut empêcher la dispersion des moutons. Tout aussi populaire, le moringa se développe même en saison sèche et pousse rapidement durant la première année. Ses feuilles sont utilisées pour l'alimentation humaine ou animale, ses fleurs ont un goût semblable à celui du radis, ses gousses sont un légume délicieux et ses racines, traitées avec du vinaigre, peuvent remplacer le raifort. Enfin, ses graines pilées et séchées peuvent purifier l'eau.

Les haies composées d'essences mentionnées ci-dessus sont courantes, mais maintes espèces locales, tout aussi utiles, peuvent être mieux adaptées aux conditions locales.

Pour en savoir davantage:

L'ABC de l'AUM, Gérés n° 133, pages 38-43.
Living fences help to protect gardens, Letter no. 67, Summer 1992, publié par Food Gardens Foundation, P.O. Box 41250, Graighall, Johannesburg 2024, Afrique du Sud.
Living fences: Somali farmers adopt an agroforestry technology, Agroforestry Today, vol. 3, no. 1, Janvier-mars 1991, publié par ICRAF, P.O. Box 30677, Nairobi, Kenya.
Living Fencing, The Permaculture Activist, no. 23, publié par Permaculture Activist, P.O. Box 3630, Kailua-Kona Hl 96745, Etats-Unis.
Living fences, Agroforestry Today, Volume 2, no. 1, Janvier-mars 1990, publié par ICRAF, P.O.Box 30677, Nairobi, Kenya.
Live trees for fence poste, IRETA's South Pacific Agriculture News, Vol. 3, No. 7, Juillet 1985, publié par Institute for Research, Extension & Training in Agriculture, USP/SOA, Private Bag, Apia, W. Samoa.

(Adaptation de la note technique The living fence: its role on the small farm, publiée par ECHO (Educational Concerns for Hunger Organization). Pour en savoir plus ou pour commander les graines des arbres cités (gliricidia, moringa et leucaena), contacter ECHO, 17430 Durrance Rd., North Fort Myers, FL33917, Etats-Unis.)

La lutte intégrée contre les ravageurs? C'est en Chine

L'Asie se lance dans la nouvelle Révolution verte durable. Ainsi, en Chine seulement, plus d'un million de fermiers seront bientôt formés officiellement pour combattre les ravageurs tout en respectant l'environnement: une approche-clé de la stratégie agricole des années 90.

Les insecticides et engrais chimiques onéreux utilisés copieusement par la Révolution verte des années 60 ont permis une forte hausse des rendements agricoles, mais la productivité s'est avérée non durable. Aujourd'hui, la Lutte intégrée contre les ravageurs (LI) gagne du terrain. Démarche raisonnée de lutte contre parasites et maladies, la LI s'appuie notamment sur les ennemis naturels des ravageurs des cultures et sur un meilleur emploi des produits chimiques.

Il est plus simple d'inonder les champs d'insecticides mais, à terme, la LI coûte moins cher à l'Homme et à l'environnement. De plus, gouvernements, agronomes et fermiers ont dû accepter que la productivité dépendant des insecticides soit de moins en moins viable, car les ravageurs astucieux subissent une mutation génétique et, insensibles aux substances chimiques, reviennent dévaster les cultures.

De fait, les gouvernements de plusieurs pays (Inde, Bangladesh, Indonésie, Philippines et Vietnam) ont récemment choisi la LI comme stratégie officielle de lutte contre les ennemis du riz et ont réduit ou supprimé les subventions aux engrais, à la suite probablement de l'adoption des programmes d'ajustement structurel.

Former 500 000 personnes

Xiong Meiqiu est l'une des 500 000 Asiatiques ayant reçu une formation en LI au cours de la dernière décennie, dans le cadre d'un programme organisé par la FAO et par les gouvernements nationaux de la région. Comme maintes femmes de la province orientale de Jiangxi, en Chine, Xiong cultive seule une petite rizière, alors que son mari travaille à l'extérieur. Avant elle utilisait, comme ses voisins, insecticides et engrais, sans se soucier de l'état des sols, ce qui lui a fait perdre temps et argent, tout en endommageant ses cultures.

Depuis la formation reçue en 1989, c'est une fervente adepte de la LI. Elle a appris à distinguer les insectes nuisibles des insectes utiles, à choisir le moment et la manière d'appliquer des insecticides, à apprécier l'emploi de produits moins toxiques, ainsi qu'à mieux utiliser l'eau et les engrais. "Je participerais: encore à des cours de ce genre, même si je devais payer pour cela", a-t-elle déclaré.

Le riz est l'aliment de base de 750 millions de Chinois. La Chine en a produit 188 millions de tonnes en 1993, plus que tout autre pays. Cependant, les maladies et ravageurs du riz détruisent parfois jusqu'à 15 % des récoltes, menaçant la stabilité de la productivité et les revenus des fermiers chinois. L'utilisation irraisonnée d'insecticides a permis aux ravageurs de développer leur résistance aux insecticides et a porté atteinte à l'environnement et à la santé humaine et animale. Une nouvelle approche était absolument nécessaire.

Au début des années 80, des expériences sur les maladies et les ravageurs du riz ont été menées dans neuf provinces du sud de la Chine. Différents modules pédagogiques de LI furent préparés à partir des pratiques culturales locales, en insistant sur la prévention multi-niveaux. Entre 1983 et 1987, la Commission gouvernementale pour les sciences a affecté 500 000 yuan (58 823 dollars) à des campagnes d'information sur ces nouvelles techniques. Intéressée par l'expérience, la FAO a envoyé une mission d'enquête sur place en 1988.

Cette même année, la Chine fut invitée à s'associer à un projet FAO appelé "Programmes inter-pays pour le développement et l'application de la LI dans la production rizicole du Sud et du Sud-Est asiatique". Le projet FAO démarra en 1980, avec l'appui financier des gouvernements australien et hollandais et de l'Arab Golf Fund. Dès l'adhésion de la Chine, l'Australie offrit 250 000 dollars pour aider les riziculteurs chinois dans leurs efforts de protection des cultures.

Dans te Comté de Fengcheng (Province de Jiangxi), un agro-technicien explique aux paysans comment localiser les insectes

La Station chinoise pour la protection des plantes (GSPP) décida de financer des programmes de formation à l'intention des fermiers sur l'application de la LI à la production de riz. Les premiers cours ont eu lieu dans cinq provinces: Hunan, Hubei, Jiangxi, Anhui et Sichuan. En 1990, la formation s'élargit à 14 autres cantons de ces provinces, aux provinces de Jiangsu, Zhenjiang et Guangdong, ainsi qu'à la municipalité de Shanghai. Entre 1989 et 1990, près de 160 000 fermiers de plus de 2 000 villages chinois reçurent une formation en LI.

Une fois familiarisés avec cette méthode, les fermiers réduisent fortement l'emploi d'insecticides, conscients des effets nuisibles de leurs composantes très toxiques. Ils apprennent aussi à distinguer les ennemis des amis des cultures. Par exemple, en 1990, les rizières des fermiers ayant reçu une formation dans la province de Hunan comptaient de deux à quatre fois plus d'araignées - utiles, car elles se nourrissent d'insectes nuisibles -que les autres rizières de la province.

Les riziculteurs ayant suivi les cours obtiennent également une rentabilité économique supérieure à celle des autres: leur production de riz augmente de 7 % et ils économisent environ un tiers sur les pesticides. Selon les estimations, les 50 000 paysans ayant participé au programme ont perçu un revenu supplémentaire de neuf millions de yuan (1,1 million de dollars), l'investissement de 250 000 dollars de la FAO pour le projet ayant ainsi donné lieu à un bénéfice de 400 %.

Encouragé par ces résultats, le Ministère de l'agriculture a créé un comité directeur national pour la prévention des maladies et des insectes nuisibles, en vue de protéger les rizières du pays et d'améliorer les revenus agricoles. Le comité conduit des essais sur la LI, effectue des démonstrations et des évaluations.

Sauver des millions de vie

Pour la troisième phase du projet FAO (1993-1997), la Chine a obtenu du gouvernement australien une aide supplémentaire de 510 000 dollars, dont une partie a été utilisée en 1993 pour un cours national de formation de formateurs, dans le canton de Ningxia (province de Hunan). Les quarante instructeurs seront affectés soit à l'une des stations pour la protection des plantes des 10 provinces associées au projet, soit à l'un des 30 cantons du projet. On pense former 1700 instructeurs qui s'occuperont à leur tour de la formation de plus d'un million de fermiers en matière de LI au cours des prochaines années. Croissance des rendements et économies sur les pesticides devraient rapporter 280 000 millions de yuan (33 millions de dollars).

Il est clair que le programme de LI est très important pour les riziculteurs chinois, mais il pourrait sombrer par manque de fonds. "L'aide internationale et la participation gouvernementale au projet sont insuffisantes. La pénurie de fonds a entravé nos efforts pour promouvoir la formation en LI", a indiqué Liang Diyun, fonctionnaire à la Station pour la protection des plantes.

Dans sa petite rizière de la province de Jiangxi, Xiong Meiqiu témoigne du succès du projet. Les chiffres sont là: la LI s'est déjà révélée efficace sur une grande échelle. Et l'ensemble des riziculteurs du pays qui travaillent pour nourrir 1, 2 milliard d'habitants méritent certainement toute l'aide possible.

Zhao Qinghua, journaliste, écrit pour China Features.

(Article rédigé en collaboration avec l'équipe de Cérès)

La FAO en action

Rome

Juillet-août 95

No 82

UNE PREMIÈRE: LES ONG CONSEILLENT LA FAO EN MATIÈRE DE SYLVICULTURE

II s'agit pour la FAO d'une "occasion sans précédent d'établir des contacts entre tous les groupes d'intérêt qui s'efforcent d'influencer les orientations futures de la foresterie", a déclaré le Directeur Général de la FAO, M. Jacques Diouf, lors de la 12ème session du Comité des forêts de la FAO (COFO), réunie à Rome, en mars dernier. Désireuse d'élargir le débat, la FAO a donc invité diverses ONG à participer à une réunion précédant la session du COFO, conjointement avec des représentants des industries. Les résultats des débats ont par la suite été soumis à l'examen des membres permanents du COFO et de la réunion des ministres qui a suivi.
La FAO est chargée de faciliter le suivi de la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement (CNUED), communément nommée Sommet de Rio. Le Directeur Général a indiqué:
"Au cours des prochaines décennies, des pans entiers de forêts, surtout en Afrique et en Amérique latine, seront détruits pour fournir du bois, construire des routes ou libérer des terres pour les cultures et l'élevage. Dans ce processus, une part importante de la diversité biologique et de la capacité des forêts à jouer un rôle écologique et à produire une vaste gamme de produits forestiers sera perdue, et de nombreuses populations autochtones devront peut-être quitter leur cadre de vie traditionnel. Par ailleurs, la croissance rapide de la population et l'aggravation de la pauvreté sont des forces dont il faut tenir compte et il n'existe pas de solutions immédiates."

... ET EN MATIÈRE DE PÊCHE

De même, une réunion avec les ONG s'occupant des ressources halieutiques s'est tenue à la FAO avant la 21ème session du Comité des pêches (COFI). Le litige du printemps entre le Canada et l'Espagne sur les ressources halieutiques des eaux internationales a mis en relief l'urgence de mesures internationales en matière de régulation de la pêche.
Selon la publication de la FAO La situation mondiale des pêches et de l'aquaculture, la communauté internationale doit affronter la question de la surexploitation des ressources et de la surcapacité (des flotilles) pour éviter une chute de la consommation mondiale de poisson d'ici 2010. En 1993, la production mondiale de poisson et coquillages (pêches de "capture" et aquaculture) a atteint le chiffre record de 101, 42 millions de tonnes, contre 100, 11 millions en 1992. Un tiers de ces prises est transformé en farine de poisson qui nourrit à son tour les poissons en élevage aquatique et le bétail. Les pertes, ou captures dites "accessoires" rejetées à la mer, sont de 27 millions de tonnes par an. Selon le Département des pêches de la FAO, plus des deux tiers des stocks mondiaux de poisson sont "pleinement exploités, surexploités, épuisés ou en voie de reconstitution".

ARABIE SAOUDITE: ÉCONOMIES D'EAU, CULTURES D'AGRUMES

Ce n'est pas un mirage: des arbres regorgeant de fruits - oranges, mandarines, pamplemousses, citrons et limettes - couvrent une superficie de 2020 ha dans la région de Najran (sud-ouest de l'Arabie Saoudite); ces plantations emploient en permanence 1500 bédouins. La région a bénéficié d'un projet FAO (UTFN/SAU/006) visant à établir un Centre national pour la recherche et le développement horticole (NCHRD). Initié en 1981, ce projet devrait s'achever mi-96.
Au début des années 80, les cultures - blé, légumes, fourrage, dattes, vignes et quelques agrumes - y étaient surtout irriguées par déversement. Mais sols sableux et pratiques culturales inadéquates engendraient une énorme dispersion d'eau. On préférait les cultures de plein champ, à gains rapides, aux cultures d'agrumes qui nécessitent un investissement à long terme. Divers programmes de vulgarisation et de formation, et l'introduction de la micro-irrigation, ont triomphé du manque d'intérêt et de connaissances. Des semences ont été offertes aux fermiers qui abandonnaient l'irrigation de surface pour l'irrigation localisée. Résultat: plus de 80 % des agrumes de Najran sont irrigués au goutte-à-goutte. La production d'agrumes est aujourd'hui de 14 000 tonnes; prévisions: 75 000 tonnes pour l'an 2000, 123 000 tonnes pour 2005.

La Révolution verte en question

Les remarquables progrès accomplis par la recherche et les transferts technologiques qui ont permis un accroissement exceptionnel des rendements agricoles au cours des années 60 et 70 semblent parvenus à la fin d'un cycle: le témoin de la Révolution verte passe aux mains de la nouvelle génération, confrontée aux graves menaces pesant aujourd'hui sur la sécurité alimentaire mondiale. Mais tout le monde n'est pas d'accord. Certains sont pleins de respect, d'autres voudraient au contraire se débarasser au plus vite de la vieille garde. Ils la remettent en question et s'irritent de la satisfaction nostalgique qui entoure les prouesses techniques de leurs prédécesseurs. Alors que les responsables du Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (GCRAI), comme Mike Collinson, comparent l'approche de la Révolution verte à la science elle-même, alors que la Sasakawa Foundation suggère d'en conserver les premières méthodes, d'autres protestent. Vandana Shiva traite ouvertement la Révolution verte d'erreur scientifique, Miguel Altieri se fait l'avocat d'une approche nouvelle, agro-écologique, à la recherche agricole. Des spécialistes de la sylviculture, comme J.B. Ball, S. Braatz et C. Chandrasekharan, de la FAO, insistent sur le rôle crucial des forêts dans les programmes de sécurité alimentaire. En bref, la question est posée. En naîtra-t-il une nouvelle révolution, une contre-révolution ou une combinaison des deux, cela reste à voir. Les lecteurs de Cérès sont invités à se joindre au débat.


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