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ANNEXE 3. Note technique FAO/PNUE sur les critères et indicateurs de gestion durable des forets pour les pays de l'Afrique sèche1

1 Organisée en collaboration avec l'lUFRO.

Note du Secrétariat FAO/PNUE

Siège du PNUE
Nairobi, Kenya 21-24 Novembre 1995.

PARTIE I

APERÇU DES INITIATIVES INTERNATIONALES DE FORMULATION DE CRITERES ET D'INDICATEURS DE GESTION DURABLE DES FORETS AU NIVEAU NATIONAL

CONTEXTE

1. Dans le domaine de la gestion des forêts, la formulation des critères et indicateurs est un des résultats les plus importants de la Conférence des Nations Unies pour l'environnement et le développement (CNUED, Rio de Janeiro - 1992). Le rôle déterminant des forêts dans le développement durable a été officiellement reconnu à la Conférence de la CNUED dans la "Déclaration de principes, non juridiquement contraignante mais faisant autorité, pour un consensus mondial sur la gestion, la conservation et l'exploitation écologiquement viables de tous les types de forêts". Plus connue sous le nom de "Principes forestiers", cette Déclaration s'applique à tous les types de forêts et concilie les fonctions productives des forets à leurs rôles environnemental, social et de protection. Le cadre opérationnel des activités de suivi de la CNUED est défini dans le rapport Action 21. Le Chapitre 11 de ce rapport. Lutte contre le déboisement (Section 11.22[b]), indique que les gouvernements ont décidé, en coopération avec les groupes de défense d'intérêts spécifiques et les organisations internationales de "formuler des critères de valeur scientifique éprouvée, ainsi que des directives concernant la gestion, la conservation et le développement durable de tous les types de forêts".

2. L'appel pour la formulation des critères et indicateurs pour la gestion durable des forêts a été relancé lors de plusieurs initiatives à la suite de la CNUED. La Déclaration de Bandung issue de la Conférence mondiale sur les forêts organisée par le Gouvernement d'Indonésie (février 1993), la Résolution de New Delhi, adoptée lors du Séminaire international "Pour une gestion forestière durable: préparation de la session 1995 de la Commission du développement durable" (juillet 1994), et le Séminaire "Science, forêts et durabilité - concertation sur l'action à mener", organisé par le Gouvernement d'Indonésie et le Centre pour la recherche forestière internationale (CIFOR) en décembre 1994, ont contribué à mettre en évidence les besoins de coopération internationale et de partenariat à l'échelle mondiale pour l'entretien et le développement des ressources forestières mondiales. Le Groupe de travail intergouvernemental sur les forêts, parrainé conjointement par les Gouvernements de la Malaisie et du Canada, a mis à profit les compétences techniques d'experts du monde entier et offert un lieu de dialogue privilégié pour examiner les grands problèmes forestiers afin de tenter de résoudre les différents avant la troisième session de la Commission du développement durable (CDD) en Avril 1995, et pour passer en revue et analyser les activités de suivi de la CNUED dans le domaine des forêts. La formulation de critères et d'indicateurs pour la gestion durable des forêts (qui comprend l'élaboration d'une définition acceptable par tous de la "gestion durable" des forêts), fait partie des priorités et tâches les plus importantes du Groupe de travail intergouvernemental sur les forets. Ce groupe a été récemment établi et a tenu sa première session du 11 au 15 septembre 1995 a New York.

LE ROLE DES CRITERES ET DES INDICATEURS DANS LA GESTION DURABLE DES FORÊTS

3. La gestion durable des forêts est généralement considérée comme l'une des principales contributions du secteur forestier au développement durable. Il importe donc de parvenir à un consensus international sans ambiguïté et à une définition commune claire de la gestion durable des forêts et de la façon de la mettre en pratique à grande échelle.

4. Les critères et indicateurs sont des instruments que l'on peut utiliser à la fois pour conceptualiser cette notion et pour progresser dans le sens d'une gestion durable des forêts. Ces critères définissent les éléments ou principes de base de la gestion forestière qui permettront d'évaluer la viabilité écologique des forêts. Chaque critère peut se caractériser par un ou plusieurs indicateurs qualitatifs, quantitatifs ou descriptifs. Grâce à la mesure et au suivi de ces indicateurs, il est possible de déterminer et d'évaluer les effets des mesures d'aménagement forestier, ou de l'absence d'intervention humaine, et par conséquent d'ajuster les mesures prises pour mieux répondre aux objectifs fixés. Les critères et les indicateurs peuvent être identifiés au niveau de l'unité de gestion forestière, au niveau national ou régional.

5. Ainsi au niveau national, en évaluant ou mesurant systématiquement et périodiquement les indicateurs, il est possible de suivre les modifications et tendances et, à terme, les progrès réalisés pour maintenir les diverses fonctions des forêts énoncées dans le Programme "Action 21" de la CNUED et dans les "Principes forestiers". Dans le cadre d'une définition de la gestion durable des forets, acceptable au niveau international, des évaluations effectuées au niveau de l'unité d'aménagement forestier peuvent aussi être utiles dans certains cas pour éclaircir certaines questions concernant l'environnement et les échanges, notamment la certification des produits forestiers.

6. A la lumière des initiatives en cours, il devrait être possible de convenir, au niveau mondial, d'un ensemble de base de critères applicables au plan national et d'un petit nombre de critères communs correspondants qui offriraient aux pays concernés un cadre international pour l'évaluation de viabilité de la gestion. On pourrait également envisager de mettre au point des indicateurs complémentaires susceptibles d'être ajustés aux politiques d'environnement et de développement et aux conditions de chaque pays2. Par conséquent, les ensembles d'indicateurs appropriés correspondant à un critère donné pourront varier selon les pays et les régions/éco-régions.

2 Conformément au second principe de la Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement.

7. Même si une zone forestière donnée ne satisfait pas à tous les critères nationaux et internationaux de durabilité, l'ensemble des critères pourront être globalement respectés au plan national. Citons à ce propos les cas de la conservation de la diversité au niveau des écosystèmes et des espèces et au sein d'une même espèce, et de la fixation du carbone, dans lesquels des zones forestières limitées ne peuvent à elles seules répondre aux objectifs nationaux et internationaux mais peuvent seulement y contribuer dans le cadre d'un plan général d'aménagement du territoire national.

APERÇU DES INITIATIVES INTERNATIONALES ACTUELLES

8. Avant la CNUED, des directives pour la gestion durable des forêts tropicales ont été élaborées en 1990 sous les auspices de l'Organisation internationale des bois tropicaux (OIBT), suivie par des critères pour évaluer leur mise en oeuvre publiée au début 1992. En 1993, ces directives ont été complétées par les directives pour l'établissement et la gestion durable des plantations tropicales et les directives sur la conservation de la biodiversité dans les forêts tropicales productives. L'OIBT a développé actuellement des directives pour la protection contre le feu des forêts tropicales, des directives pour les industries forestières durables et des directives pour la gestion durable des forêts de mangroves.

9. Depuis la CNUED, il y a eu plusieurs initiatives internationales et nationales, conduites au niveau gouvernemental ou non-gouvernemental (ONG), en vue de formuler des critères et des indicateurs pour analyser la durabilité de la gestion forestière. Dans ce domaine, les activités intergouvernementales ont été principalement menées dans le cadre de trois grandes initiatives internationales. A la suite des deux Conférences ministérielles sur la protection des forêts en Europe, tenues en 1990 et 1993, le "Processus d'Helsinki" est essentiellement axé sur les forêts européennes (tempérées, boréales et méditerranéennes). Les pays européens ont adopté six critères et vingt-sept indicateurs quantitatifs et un certain nombre d'indicateurs descriptifs. Un rapport de synthèse sur la mise en oeuvre des engagements d'Helsinki a été remis à la troisième session de la CDD (avril 1995). La deuxième initiative, dite le "Processus de Montréal", est issue du Colloque de la CSCE3 sur le développement durable de la forêt boréale et de la forêt tempérée (Montréal, septembre 1993). Elle porte sur la formulation des critères et indicateurs pour la gestion durable des forêts tempérées et boréales hors d'Europe. Les dix pays participants ont adopté en février 1995 sept critères et soixante-sept indicateurs. La troisième initiative est relative aux critères et indicateurs de durabilité des forêts d'Amazonie, adoptée par les pays intéressés en février 1995 à Tarapoto (Pérou), sous les auspices du Traité de coopération de l'Amazonie. Les travaux menés dans le cadre de cette initiative ont débouché sur l'élaboration de douze critères et soixante-dix-sept indicateurs de l'aménagement durable des forêts d'Amazonie. Ils sont axés sur la gestion des forêts aux niveaux de l'unité d'aménagement forestier, national et international. Plus récemment, certaines dispositions visant à amorcer un processus analogue en Amérique centrale ont été prises sous les auspices de l'Alliance Centre-Américaine pour le développement durable. La FAO a participé et contribué activement à toutes ces initiatives consécutives à la CNUED.

3 CSCE = Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe.

10. Les initiatives mentionnées ci-dessus ont été complétées par un certain nombre d'activités nationales connexes exécutées par des organismes gouvernementaux et par des organisations non-gouvernementales nationales et internationales. Parmi ces dernières, citons le Fonds mondial pour la nature (WWF) et le "Forest Stewardship Council" (FSC), qui travaillent à la mise au point de critères et indicateurs au niveau de l'unité d'aménagement forestier. L'expérimentation internationale de ces critères et indicateurs au niveau de l'unité d'aménagement forestier est en cours dans le cadre du projet "Expérimentation des critères et indicateurs de l'aménagement durable des forets" coordonné par le CIFOR; ce projet comprend des activités de terrain, notamment en Côte d'Ivoire.

L'APPUI ET LE RÔLE DE LA FAO ET DU PNUE DANS LA FORMULATION DES CRITERES ET DES INDICATEURS ET LEUR RÔLE DE CATALYSEUR DU DIALOGUE ENTRE LES INITIATIVES PRESENTES

11. A la demande de la communauté internationale et de ses organes statutaires, la FAO a convoqué, en collaboration avec l'OIBT, une Consultation d'experts de trois jours sur l'harmonisation des critères et indicateurs de l'aménagement durable des forêts, en février 1995. Cette Consultation a réuni des experts des pays et organisations participant aux initiatives internationales susmentionnées, et des spécialistes des régions géographiques et écologiques qui, à ce jour, n'ont pas été couvertes par les activités internationales de suivi de la CNUED dans ce domaine. L'objectif de cette réunion était d'examiner la couverture thématique et géographique des initiatives en cours visant à la mise au point de critères et indicateurs de l'aménagement durable des forets au niveau national, de chercher les moyens d'associer les pays et régions non couverts, et de chercher à concilier, et éventuellement à harmoniser, les initiatives en cours.

12. A sa douzième session, le Comité des forêts (COFO, Rome, 13-16 mars 1995), en examinant le rapport de la réunion d'experts FAO/OIBT sur l'harmonisation des critères et indicateurs de gestion durable des forêts a "demandé à la FAO, en collaboration avec d'autres organisations internationales concernées, de promouvoir les échanges d'informations, de résultats de recherches, de données et d'expériences entre toutes les initiatives [en cours et à venir], et de faire participer les pays qui ne font pas encore partie des initiatives internationales en cours". Les forets tropicales sèches ont fait l'objet d'une mention spéciale dans le rapport de la réunion et dans les échanges de vues du COFO.

13. La Déclaration de Rome sur les forêts, préparée par les Ministres chargés des forets réunis à Rome en mars 1995, a également souligné la nécessité "de continuer à élaborer et appliquer des critères et indicateurs pour l'aménagement durable de tous les types de forêts, et de tester et développer le concept de gestion durable des forêts grâce à l'application de ces critères et indicateurs, compte tenu des spécificités régionales et sous-régionales, ainsi que de promouvoir la comparabilité des initiatives internationales à cet égard".

14. La FAO, en tant qu'organisation chef de file, en étroite collaboration avec l'OIBT, le PNUE, le PNUD, l'UICN et d'autres partenaires concernés, est prête à concourir aux travaux du Groupe intergouvernemental afin de faciliter le développement des critères et des indicateurs au niveau national. Elle entend également de stimuler la participation des régions et pays qui ne sont pas encore associés à ces activités et de promouvoir un dialogue entre les initiatives existantes.

15. Compte tenu des recommandations ci-dessus, le PNUE et la FAO ont organisé une réunion d'experts sur les critères et indicateurs de l'aménagement durable des forêts dans les zones sèches d'Afrique. Les conclusions et recommandations de cette réunion seront soumises pour examen aux délégués de la dixième Session de la Commission des forêts et de la faune sauvage pour l'Afrique, en Afrique du Sud, du 27 novembre au 1 décembre 1995. Une réunion d'experts analogue est prévue par la FAO juste avant la douzième Session de la Commission des forêts pour le Proche-Orient (octobre 1996) pour examiner la mise au point de critères et d'indicateurs de l'aménagement durable des forêts et terrains boisés des pays de la région. La FAO a récemment été sollicitée par les pays de l'Amérique Centrale de les assister pour amorcer un processus analogue en Amérique centrale sous les auspices de l'Alliance Centre-Américaine pour le développement durable.

CRITERES ET INDICATEURS DE GESTION DURABLE DES FORETS EN AFRIQUE SECHE

16. Parmi les activités menées à ce jour pour mettre au point des critères et indicateurs nationaux de l'aménagement durable des forêts, ce sont essentiellement les travaux liés aux directives de l'OIBT, aux critères et indicateurs types de l'aménagement durable des forêts pour les zones tropicales humides qui intéresseront les pays d'Afrique4. De plus, certains pays d'Afrique pourraient en principe bénéficier directement des travaux réalisés dans le cadre des processus d'Helsinki et de Montréal et des initiatives sous-régionales lancées en Amérique centrale et du Sud décrites ci-dessus.

4 Les pays d'Afrique membres de l'OIBT sont: Cameroun, Congo, Côte d'Ivoire, Guinée équatoriale, Gabon, Ghana, Libéria, Togo, Tanzanie, Zaïre.

17. Comme on l'a vu plus haut, diverses instances internationales ont souligné à plusieurs reprises la nécessité d'harmoniser les démarches concernant les critères et indicateurs, et d'y associer les pays et les régions écologiques qui ne participent pas encore aux initiatives internationales dans ce domaine. Les pays des zones arides et semi-arides ont été cités à ce propos. Bien que ces pays aient souvent des ressources forestières limitées, les forêts et autres terrains boisés jouent un rôle important pour répondre aux besoins alimentaires de base des populations locales; les forêts et les terrains boisés contribuent aussi à maintenir de multiples fonctions écologiques dans ces zones.

18. En fonction de l'utilité de ces critères et indicateurs pour la gestion de tous les types de forêts et de zones boisées d'Afrique, les discussions lors de cette réunion d'experts peuvent s'appuyer sur une note de secrétariat FAO/PNUE et sur les trois notes de contexte, préparés par un expert de chacune des régions suivantes: la région du Comité permanent inter-Etats de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS)5, la région de l'Office intergouvernemental pour la lutte contre la sécheresse et pour le développement (IGADD)6 et la région de la Communauté pour le développement de l'Afrique australe (SADC)7.

5 Les pays membres du CILSS: Burkina Faso, Cape Vert, Guinée Bissau, Gambie, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal et Tchad.

6 Les pays membres de l'IGADD: Djibouti, Ethiopie, Kenya, Somalie, Soudan et Uganda

7 Les pays membres de la SADC: Angola, Botswana, Lesotho, Malawi, Mozambique, Namibie, Afrique du sud, Swaziland, Tanzanie, Zambie et Zimbabwe.

19. Les débats, lors de cette réunion d'experts, examineront les activités et les initiatives internationales en cours. Ils étudieront les possibilités de modification des critères et des indicateurs déjà identifiés pour l'aménagement durable des forêts et leur adaptation aux conditions environnementales aux besoins socio-économiques et aux capacités institutionnelles des pays des zones sèches en Afrique. Ces travaux aideront à identifier également une stratégie et un calendrier pour promouvoir des actions aux niveaux régional, éco-régional et national pour tester les critères communs ainsi que des groupes d'indicateurs applicables au niveau régional. Cette stratégie doit être conforme aux besoins et aux aspirations économiques, sociales et écologiques des pays africains de la zone aride.

PARTIE II

ASPECTS SUBSTANTIELS RELATIFS A LA NECESSITE. LA PERTINENCE ET L'APPLICABILITE DES CRITERES ET DES INDICATEURS DE GESTION DURABLE DES FORETS POUR LES PAYS AFRICAINS DES ZONES SECHES

Note du Secrétariat FAO/PNUE

1. Le but principal de cette note du secrétariat est de faciliter le débat de la réunion d'experts et ne veut en aucun cas favoriser telle ou telle région, tel ou tel critère, tel ou tel indicateur. Cette note se limite à la gestion des forêts et autres terres boisées des pays des zones sèches en Afrique1, qui ne font partie d'aucune initiative de formulation de critères et d'indicateurs de gestion durable (comme celle de l'OIBT pour les forêts tropicales humides). Les zones sèches d'Afrique concernent principalement (mais pas exclusivement) les pays membres des organisations sous régionales IGADD, CILSS et SADC (voir annexe 2).

1 Les pays d'Afrique du Nord ne sont pas inclus dans cette revue, du fait que une réunion d'experts sera organisée en Octobre 1996, spécifiquement pour les pays de l'Afrique du Nord et du Proche Orient.

ETAT DES LIEUX ET OBJECTIFS DE LA GESTION FORESTIERE DANS LA REGION

Contexte physique et étendue des zones sèches en Afrique

2. Les zones sèches sont caractérisées par une seule saison des pluies, et par une saison sèche de huit à neuf mois très marquée. L'évapotranspiration excède la pluviométrie pendant la plus grande partie de l'année.

3. Les zones sèches sont définies par l'index d'aridité, comme appliqué par le PNUE dans son "Atlas du monde de la désertification" (PNUE, 1992, Nairobi, 72 pp.). L'index d'aridité est le quotient de P/EPT, avec P, la précipitation annuelle moyenne et EPT, l'évapotranspiration potentielle annuelle moyenne. La précipitation est mesurée et la EPT est calculée suivant la méthode de Thornthwaite (Thornthwaite 1948). Les zones "sèches" ont un index d'aridité inférieur à 0.65. Thomas et Middleton (1994)2 ont défini quatre zones différentes d'aridité: sub-humide sèche, semi-aride, aride et hyper-aride. Les zones hyper-arides ne sont pas comprises dans cette étude car il s'agit de déserts où les forêts et terres boisées sont rares (oasis) et leur gestion très particulière. Les superficies des zones sèches en Afrique et dans le monde sont présentées dans le tableau 1.

2 Thomas, D.S.G., Middleton, N.J. (1994). Desertification: exploding the myth. John Wiley and Sons, Chichester. 194 pp.

4. En Afrique, les zones sèches (en excluant les zones hyper-arides et déserts qui couvrent à eux seuls 978.2 millions d'hectares) ont une surface de 1286 millions d'hectares et représentent 43% de la surface totale du continent (2964 millions d'hectares). Les zones sèches de l'Afrique représentent 25% des zones sèches du monde entier (PNUE 1995).

Tableau 1: - Les superficies des zones sèches en Afrique et dans le monde (en millions d'hectares)3.

3 Source: "Development of Desertification Indicators for Field Level Implementation", UNSO/UNDP et NRI, avril 1995 (page 4, Tableaux 1 et 2).

Zones

Index d'aridité

Surface Mondiale

Surface en Afrique (ha) (%)

1. Sèche sub-humide

0.50 - < 0.65

1294.7

268.7

21

2. Semi-aride

0.20 - < 0.50

2305.3

513.8

22

3. Aride

0.05 - < 0.20

1569.1

503.5

32

Total


5169.1

1286.0

25

Types de végétation des zones sèches

5. La végétation naturelle des zones sèches est constituée essentiellement de forêts claires, mangroves, forêts de galerie, savanes (savanes boisées, savanes arborées, savanes arbustives, savanes herbeuses), broussailles et de steppes (FAO/PNUE: Les ressources forestières en Afrique, 1981).

6. Pour les pays situés en zones sèches africaines, les ressources forestières prises en compte par cette étude vont des mangroves des côtes occidentale et orientale d'Afrique (Sénégal, Kenya) et autres forêts côtières (Tanzanie, Mozambique), aux forêts ombrophiles (par exemple dans l'ouest du Kenya), en passant par la savane et les forêts claires (les formations de "miombo" au Kenya et Malawi, les formations à Combretaceae au Mali, Niger, Tchad, Soudan), les forêts sempervirentes de montagne (importantes dans le centre du Kenya, dans l'ouest et l'est de l'Ouganda et en Ethiopie). Vers le nord et vers le sud du continent africain, une pluviométrie de plus en plus faible et une saison sèche de plus en plus prolongée donnent origine à des forêts de plus en plus caducifoliées et ouvertes, dont les arbres sont de dimensions plus réduites. Encore plus au nord et plus au sud, ces formations tournent progressivement aux prairies, aux broussailles et finalement au désert.

Caractéristiques socio-économiques fondamentales des zones sèches en Afrique.

7. Les productions agricoles et pastorales restent le principal moteur du développement économique dans la région. Le gros de la population rurale dépend des activités agricoles pour sa survie. Une grande partie de la production agricole provient des terres forestières, et des activités agricoles importantes comme le pastoralisme et la culture itinérante se font en forêt. Les forêts sont donc indispensables pour garantir la sécurité alimentaire des populations.

8. Les produits forestiers autres que le bois (tels que fruits, noix, feuilles alimentaires, pharmacopée, miel, gomme, gibier, fourrage, tannins et teintures,...) sont particulièrement importants pour satisfaire des besoins essentiels des populations. Souvent ces produits sont l'unique source de protéines et vitamines dans une alimentation humaine principalement basée sur les céréales. Les forêts et autres terres boisées dans les pays des zones sèches contribuent largement aux besoins énergétiques par la production de bois de feu (le bois représente environ 85 % de l'énergie domestique).

9. Les forêts et autres terres boisées servent à de multiples usages pour la population ainsi que pour la conservation de l'environnement. Par exemple elles servent à la protection des terres agricoles, des cours d'eau et autres milieux fragiles. Enfin elles contribuent à la satisfaction de besoins religieux, culturels et spirituels, et d'agrément des populations rurales et urbaines dans la région.

10. En raison d'une croissance démographique élevée dans les pays de la région (3 à 4 % par an environ, une des plus élevées du monde), ces différents usages des forêts sont de plus en plus difficilement satisfaits. La forêt se dégrade davantage en raison d'une augmentation accélérée des besoins (en énergie, en terres de culture,...), mais aussi en raison d'une croissance économique faible, souvent négative et d'un niveau de développement technologique encore bas. Les savanes et forêts claires sont les plus touchées.

11. Bien que la forêt joue un rôle central dans le développement, la politique forestière n'est pas suffisamment harmonisée avec les autres politiques d'aménagement du territoire. Au cours des trois dernières décennies, la région a vécu des crises économiques et des conflits civils de plus en plus importants. Assez fréquemment, le fait d'écarter les populations locales de la gestion des forêts a provoqué des contrecoups négatifs sur l'état de la forêt. Néanmoins les surfaces des plantations ont augmenté bien qu'un récent ralentissement soit constaté. Les surfaces de forêts privées sont encore limitées, mais les plantations forestières par les agriculteurs sont en augmentation, particulièrement dans les zones plus humides.

Situation et objectifs de la gestion forestière

12. De nombreux efforts sont réalisés par les pays de la région pour mettre en place des politiques forestières appropriées, l'établissement de plans d'action forestiers nationaux, de lois, de méthodes et de techniques d'aménagement des forêts. Des projets ont été mis en oeuvre pour améliorer les techniques d'aménagement et de conservation des formations végétales, de boisement et reboisement et/ou pour asseoir des règles de saine gestion des forêts naturelles.

13. Les forets sous aménagement effectif occupent un faible pourcentage du domaine forestier. Les contraintes financières, techniques, juridiques, économiques, politiques sont la cause de cette situation. Il convient néanmoins d'indiquer que l'option de gestion participative responsabilisant les communautés de base permettra d'augmenter de façon substantielle dans les années à venir, les superficies aménagées. Ces aménagements devront être à buts multiples (bois de feu, fourrage, produits divers, pâturage...) car ainsi ils se rapprocheront plus des utilisations traditionnelles de ces forêts. Ces aménagements seront complétés par la promotion d'activités agroforestières.

14. Dans la plus part des pays de la région, les politiques et objectifs de gestion forestière correspondent bien aux principes de la CNUED. Ces objectifs visent en particulier à:

- contribuer à la sécurité alimentaire en accroissant les rôles multiples de la forêt;

- promouvoir une utilisation durable des ressources naturelles, et la conservation des écosystèmes importants;

- rendre l'utilisation des terres plus équitable;

- promouvoir des organisations communautaires à la base d'une gestion intégrée (agriculture, élevage, forêts,...) et participative des ressources naturelles pour garantir la sécurité alimentaire, la sécurité énergétique, le développement économique, social et culturel.

PERTINENCE DES INITIATIVES INTERNATIONALES ACTUELLES POUR LES PAYS DE L'AFRIQUE SECHE

15. Les différents critères et indicateurs formulés dans le cadre des initiatives internationales (OIBT, Helsinki, Montréal, WWF) ont été examinés dans les trois notes techniques du point de vue de leur validité par rapport au contexte des pays dans les zones sèches et aux besoins et aspirations des populations de la zone concernée. Toutes ces initiatives ont été considérées comme pertinentes et un certain nombre de critères et indicateurs complémentaires ou supplémentaires ont été proposés dans ces notes afin de faciliter l'élaboration et le suivi des programmes de développement forestier et de protection environnementale.

16. Une synthèse des résultats et des recommandations des trois notes techniques est ci-jointe présentée comme une liste de sept critères retenus avec leurs indicateurs correspondants recommandés en vue de faciliter la discussion durant la Consultation d'Experts.

Pertinence de ces critères et indicateurs pour les pays africains des zones sèches.

17. Avant de traiter de la validité des critères et indicateurs, il conviendrait de situer les notions de "forêt" et "aménagement forestier" dans le contexte général des pays des zones sèches d'Afrique.

La notion de forêt

18. Plusieurs définitions existent sur la forêt. Celle qui se rapprocherait le mieux des forêts et autres terres boisées des zones sèches africaines est celle de la FAO. Pour nos travaux, le terme "forêt" correspond aux écosystèmes ayant au moins 10% de couvert arboré et/ou de bambous (projection verticale de la surface du houppier au sol), et "autres surfaces boisées" se réfèrent aux terres portant des arbres, arbustes ou arbrisseaux disséminés, naturels ou plantés, et qui peuvent être sous cultures (parcs agroforestiers) ou non.

Le concept de gestion durable des forêts

19. Les définitions de la FAO, de l'OIBT, d'Helsinki et de Montréal comportent des éléments communs pertinents pour toutes les éco-régions du monde. Elles prennent en compte: les rôles multiples des forêts aux plans écologique, économique et social; les besoins du présent et ceux du futur; le maintien du potentiel productif des forêts (produits et services). Il convient cependant de relever que les critères et indicateurs de l'OIBT ont été conçus à partir du concept de gestion durable des forêts dites permanentes, mettant ainsi l'accent sur les forêts délimitées et dévolues à la production de bois d'oeuvre généralement de haute qualité.

20. Comme déjà dit auparavant, une grande partie des besoins des populations (bois de feu, de service, autres produits et services divers), sont satisfaits à travers les activités agricoles et pastorales en forêt (forêts classées à statut permanent, forêts "vacantes"..). Dans certains cas, la production d'aliments et la cueillette de produits considérés comme secondaires (fourrage, fruits, gomme...) peuvent être plus importants économiquement et socialement que le bois. Ainsi, la contribution des forêts à la sécurité alimentaire devait être inclue dans le concept d'une gestion durable des forêts.

21. En intégrant les considérations mentionnées ci-dessus, le concept d'aménagement durable des forêts, qui tient compte de la réalité des pays africains des zones sèches est défini comme suit: l'aménagement durable des forêts est la mise en valeur des forêts et autres surfaces boisées garantissant le maintien et l'amélioration de leur productivité, de leur santé et vitalité, de leur diversité biologique en vue de satisfaire les besoins présents et futurs des populations au plan économique, environnemental, social et culturel (Goumandakoye, 1995).

Examen de la validité des critères

22. L'analyse de l'ensemble des critères d'aménagement durable des forêts issus de ces différents processus et initiatives présentés dans la 1ère partie de cette note, permet de dégager sept critères applicables aux conditions des zones sèches africaines. Ces critères retenus sont présentés dans le tableau 2.

23. Le tableau 2 montre clairement un accord général sur la pertinence de sept groupes principaux de critères aux conditions des pays des zones sèches en Afrique. Différents points de vue ont été exprimés sur l'intérêt, pour les zones sèches, du groupe de critères sur la contribution aux cycles planétaires du carbone. Ce groupe a été soit éliminé en tant que priorité ou critère pertinent (CILSS), soit retenu comme un indicateur (IGADD), soit encore retenu comme critère "Stockage du carbone" (SADC). Le groupe de critères sur le cadre juridique et institutionnel a été identifié par tous comme pertinent bien que pas expressément identifié comme un critère à part entière dans la note technique couvrant les pays de la SADC. L'attention a été portée par l'ensemble des notes techniques couvrant les trois régions sur la nécessité d'intégrer la gestion des ressources forestières dans l'aménagement du territoire, et sur un groupe de critères supplémentaire, notamment la contribution à la lutte contre la désertification et les effets de la sécheresse.

Tableau 2: - Aperçu de la pertinence des critères pour les régions de l'Afrique sèche.

Critère

Pertinence par sous-région

CILSS

IGADD

SADC

Ressources forestières

oui

oui

oui

Diversité biologique

oui

oui

oui

Santé et vitalité

oui + "intégrité"

oui

oui

Contribution aux cycles planétaires du carbone

NON

NON indicateur

oui

Fonctions de production

oui

oui

oui

Fonctions de protection

oui

oui

oui

Bénéfices et avantages socio-économiques

oui

oui

oui

Cadres juridique et institutionnel

oui

oui

NON

Critère supplémentaire proposé

Lutte contre la Désertification

NON

OUI4

4 Douze critères supplémentaires ont été proposés dans la Note Technique. Ces critères peuvent être répartis parmi les sept critères du tableau.

Analyse des indicateurs

24. L'analyse qui suit tient compte de tous les indicateurs formulés par les différents processus et initiatives. Les indicateurs retenus sont ceux qui sont considérés comme pertinents (ils doivent se rapporter aux objectifs de la gestion durable des forêts au Sahel), valables (ils doivent mesurer ou caractériser effectivement ce qu'ils sont censés mesurer ou évaluer), clairs (aisés, faciles à comprendre), fiables (vérifiables et objectifs), applicables (pratiques à mesurer, sans grandes contraintes techniques ou scientifiques, sans coûts administratifs, financiers ou en temps excessifs par rapport aux capacités ou priorités des pays). Ces indicateurs peuvent être quantitatifs, qualitatifs ou descriptifs.

25. Une des caractéristiques des pays africains des zones sèches est leur faible capacité institutionnelle, qui constitue un handicap pour évaluer avec fiabilité les indicateurs qui nécessitent un niveau technologique et de recherche fondamentale assez élevé. Ceci affectera la capacité de ces pays de rassembler le nombre et le type de données requises par les indicateurs. Néanmoins, il est important de souligner que les valeurs absolues de certaines indicateurs sont moins importantes que leur tendances évolutives.

PROPOSITION DE STRATEGIES ET DE CALENDRIER POUR L'ESSAI ET L'ADAPTATION DES CRITERES ET DES INDICATEURS EN ZONES SECHES D'AFRIQUE

26. Les stratégies présentées dans les trois Notes techniques représentent une opportunité de discussion au niveau national et régional sur les critères et les indicateurs de gestion durable des ressources forestières. Egalement, des consultations intergouvernementales sont proposées avec la participation de la communauté internationale et des ONG liées à la gestion des ressources forestières.

27. Cependant, la vulgarisation de critères et indicateurs et successivement leur utilisation effective et continue ne peuvent se faire qu'à travers un processus qui doit comprendre:

- essais et adaptation des critères et indicateurs au contexte des pays des zones sèches d'Afrique;

- appropriation de l'initiative par les pays;

- utilisation maîtrisée et courante des critères et indicateurs.

28. Des actions concrètes et concertées sont à mener dans la région. Elles sont présentées en détail dans les trois notes. Cependant quelques points particuliers méritent notre attention.

29. La nécessité de placer l'engagement du pays de gérer de façon durable ses ressources forestières au plus haut niveau politique. Cet engagement à un si haut niveau vient de ce que l'adoption de ces critères est un problème politique, qui affectera le bien-être social et économique de la plupart des habitants de la région. Cela facilitera aussi la présentation du consensus régional sur la gestion durable des forêts dans les réunions internationales sur ce sujet.

30. Le rôle des gouvernements devra, peut-être, être revu, des politiques de libéralisation étant peut-être nécessaires, notamment en encourageant les ONG et le secteur privé à prendre en charge certains des rôles de gestion et de suivi.

31. Un appui aux gouvernements des pays sera nécessaire pour contribuer au développement d'initiatives (sous) régionales de formulation de critères et d'indicateurs pour la gestion durable des forêts.

32. Une harmonisation entre les pays des zones sèches et avec les autres processus est nécessaire, de même que le développement de réseaux pour étudier différents aspects de la formulation des critères et indicateurs et spécialement l'identification des activités conjointes.


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