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Partie I Sorgho


Introduction
Tendances de la production
Utilisation
Stocks
Commerce international
Prix sur le marché international
Commerce intérieur et politiques nationales
Innovations, considérations environnementales et orientation de la recherche
Perspectives à moyen terme7
Résumé et conclusion

Introduction

Le sorgho est l'une des principales denrées alimentaires dans les régions les plus pauvres du monde et où la sécurité alimentaire est la plus menacée. La culture est génétiquement adaptée aux agroécologies chaudes et sèches, où il serait difficile de cultiver d'autres céréales. Dans ces régions, souvent frappées par la sécheresse, le sorgho est généralement cultivé à la fois pour son grain, utilisé en alimentation humaine, et sa paille utilisée comme fourrage. Dans les pays en développement, la paille peut représenter jusqu'à 50 pour-cent de la valeur totale de la culture, surtout en année de sécheresse.

Environ 90 pour-cent des superficies cultivées en sorgho dans le monde et 70 pour-cent de la production mondiale se trouvent dans les pays en développement. (Figs. 1 et 2). L'Asie et l'Afrique produisent chacune de 25 à 30 pour-cent de la production mondiale (Tableau 1). Le sorgho est surtout cultivé par des ménages paysans pratiquant une agriculture à petite échelle. En Afrique, la production se caractérise par une culture extensive, à faible apport d'intrants et peu productive. La production est généralement plus intensive en Asie; les engrais et les semences améliorées y sont beaucoup plus utilisés. Sur ces deux continents, le sorgho est d'abord utilisé en alimentation humaine. Par contre, dans les pays développés, la presque totalité de la production est destinée à l'alimentation animale.

Cette catégorisation - pays en développement producteurs de sorgho pour l'alimentation humaine et pays développés producteurs pour l'alimentation animale - est généralement vraie. Cependant, il y a quelques exceptions. Ainsi, des pays en développement de l'Amérique latine et des Caraïbes (ex. Mexique et Argentine) sont d'importants pays producteurs de sorgho fourrager (Fig. 1). Par conséquent, on évaluera dans ce rapport la production, l'utilisation et le commerce du sorgho sur une base régionale et selon les niveaux d'intensité des systèmes de production. Ces systèmes se partagent en deux groupes principaux:

· Les pays du Groupe 1 (surtout en Asie et en Afrique) cultivent le sorgho pour l'alimentation humaine. L'agriculture pratiqués est traditionnelle, les rendements moyens sont bas, moins de 1 t/ha, et très variables d'une année à l'autre;

· Les pays du Groupe II (pays développés ainsi que quelques pays en développement) produisent le sorgho sur une base commerciale, surtout pour l'alimentation animale. Les pratiques agricoles sont modernes et les rendements moyens atteignent 3-5 t/ha.

Les statistiques sur la production, l'utilisation et le commerce du sorgho sont bonnes, surtout dans les pays où la culture est commerciale. Elles sont moins complètes dans les pays où le sorgho est une culture de subsistance.

Figure 1. Principaux pays producteurs de sorgho.

Figure 2. Importance relative du sorgho dans le monde.

Tableau 1. - Superficies cultivées en sorgho, rendement et production par région1.

1 Chaque entrée est la moyenne des trois années couvertes par la période indiquée, ex. 1979-81.

 

Superficie (million d'hectares)

Rendement (t/ha)

Production (million de tonnes)

1979-81

1989-91

1992-94

1979-81

1989-91

1992-94

1979-81

1989-91

1992-94

Pays en développement

38,60

38,30

40,00

1,14

1,04

1,11

43,90

40,00

44,20

Afrique

13,40

18,30

21,80

0,89

0,75

0,78

11,90

13,78

17,10


Afrique du Nord

3,29

4,07

5,95

0,90

0,67

0,69

2,94

2,73

4,10



Soudan

3,05

3,90

5,77

0,74

0,53

0,58

2,27

2,09

3,32


Afrique occidentale

5,70

10,00

11,30

0,89

0,76

0,82

5,10

7,60

9,30



Burkina Faso

1,05

1,32

1,40

0,59

0,75

0,89

0,62

0,99

1,25



Mali

0,43

0,77

0,95

0,78

0,87

0,77

0,34

0,68

0,73



Niger

0,82

2,04

2,26

0,42

0,19

0,18

0,35

0,39

0,42



Nigeria

2,70

4,90

5,70

1,22

0,98

1,07

3,30

4,80

6,10


Afrique centrale

0,93

1,09

1,21

0,68

0,72

0,74

0,64

0,79

0,89


Afrique orientale

3,23

2.95

3,08

0,95

0,88

0,89

3,08

2,59

2,75



Ethiopie

1,05

0,81

0,91

1,35

1,09

1,27

1,42

0,88

1,16



Kenya

0,17

0,13

0,12

0,95

0,88

1,05

0,16

0,11

0,12



Mozambique

0,29

0,42

0,38

0,63

0,40

0,33

0,18

0,17

0,12



Somalie

0,48

0,45

0,40

0,35

0,54

0,36

0,17

0,24

0,14



Tanzanie

0,71

0,53

0,66

0,76

0,99

0,90

0,54

0,53

0,59



Ouganda

0,17

0,24

0,26

1,78

1,49

1,50

0,31

0,36

0,38



Zimbabwe

0,14

0,14

0,13

0,61

0,58

0,52

0,09

0,08

0,07


Afrique australe

0,17

0,22

0,19

0,50

0,37

0,39

0,09

0,08

0,07

Asie

20,78

16,56

15,11

0,95

1,03

1,19

19,69

17,00

17,98


Proche-Orient

0,92

0,60

0,60

0,81

0,95

1,06

0,75

0,58

0,64



Arabie Saoudite

0,28

0,13

0,15

0,44

1,31

1,18

0,12

0,17

0,18



Yémen

0,63

0,47

0,45

0,98

0,85

1,02

0,62

0,40

0,46


Extrême-Orient

19,85

15,95

14,51

0,95

1,03

1,19

18,94

16,42

17,34



Chine

2,83

1,55

1,36

2,49

3,31

4,12

7,03

5,13

5,61



Inde

16,36

13,79

12,55

0,70

0,78

0,89

11,38

10,79

11,23



Pakistan

0,40

0,41

0,40

0,58

0,59

0,59

0,23

0,24

0,24



Thaïlande

0,22

0,19

0,17

1,07

1,28

1,35

0,24

0,24

0,23

Amérique centrale et Caraïbes

1,96

2,07

1,73

2,82

2,73

2,87

5,54

5,64

4,95


El Salvador

0,13

0,12

0,14

1,15

1,27

1,48

0,15

0,16

0,20


Guatemala

0,04

0,06

0,07

1,95

1,41

1,19

0,08

0,08

0,08


Haïti

0,16

0,13

0,11

0,76

0,74

0,78

0,12

0,10

0,09


Mexique

1,49

1,61

1,28

3,35

3,17

3,43

4,99

5,10

4,38


Nicaragua

0,05

0,05

0,05

1,55

1,61

1,80

0,08

0,08

0,09

Amérique du Sud

2,48

1,40

1,38

2,77

2,59

3,08

6,86

3,61

4,23


Argentine

1,87

0,65

0,70

3,02

2,95

3,72

5,64

1,92

2,60


Brésil

0,08

0,16

0,15

2,13

1,54

1,87

0,17

0,25

0,28


Colombie

0,22

0,26

0,22

2,22

2,87

3,08

0,49

0,74

0,69


Uruguay

0,06

0,03

0,04

2,01

2,48

2,97

0,11

0,08

0,11


Venezuela

0,23

0,25

0,21

1,61

2,13

2,10

0,37

0,53

0,44

Pays développés

6,48

5,05

4,99

3,33

3,38

3,94

21,58

17,08

19,66


Australie

0,55

0,46

0,50

1,98

2,16

1,96

1,08

1,00

0,98


Communauté européenne

0,13

0.11

0,12

4,58

4,90

5,61

0,59

0,56

0,70


Afrique du Sud

0,38

0,22

0,18

1,43

1,58

2,05

0,54

0,34

0,37


Etats-Unis

5,27

4,06

4,05

3,63

3,69

4,32

19,16

14,97

17,50


CEI2

0,09

0.15

0,10

1,14

0,76

0,73

0,10

0,11

0,07

Monde

45,10

43,30

45,00

1,45

1,32

1,42

65,50

57,10

63,90

2 Communauté des Etats indépendants. Jusqu'en 1991, superficie dans l'ex-URSS.

Source: FAO

Répartition géographique

En Afrique occidentale et centrale, l'aire de culture du sorgho s'étend du désert du Sahara, au Nord, jusqu'aux forêts équatoriales, au Sud (Fig. 2). En Afrique orientale et australe, il est produit dans les régions sèches, où les précipitations sont trop faibles pour permettre la culture du maïs.

Le Nigeria et le Soudan sont les deux principaux pays producteurs de sorgho en Afrique (Tableau 1). Le sorgho s'étend donc sur une grande partie du continent africain et il est, dans plusieurs régions, une denrée alimentaire essentielle. En Asie, la production est beaucoup plus concentrée. Deux pays, la Chine et l'Inde, produisent ensemble 94 pour-cent de la production régionale.

En Amérique centrale et dans les Caraïbes, la culture du sorgho est concentrée au Mexique (90 pour-cent de la production régionale). En Amérique du Sud, elle est particulièrement importante en Argentine (60 pour-cent de la production régionale) et présente dans des régions sèches du Brésil, du Nord de la Colombie et du Venezuela.

Les pays développés produisent près du tiers de la production mondiale de sorgho. En Amérique du Nord, le sorgho est cultivé dans les plaines du centre et du Sud des Etats-Unis (surtout dans les états du Kansas, du Texas et du Nebraska), où la pluviométrie est faible et variable. Les Etats-Unis sont le premier pays producteur de sorgho au monde (plus de 25 pour-cent de la production mondiale). En Europe, le sorgho est cultivé localement en France, en Italie et en Espagne. En Océanie, l'Australie est le seul pays producteur important.

Tendances de la production

Tendances: production mondiale

Entre 1979 et 1994, la production mondiale de sorgho a diminué de 0,7 pour-cent par an (Tableau 2 et Fig. 3), alors qu'elle augmentait pour le blé (1,8 pour-cent), le riz (2,3 pour-cent) et le maïs (1,7 pour-cent). Durant cette période, la production a augmenté en Afrique (2,9 pour-cent), mais elle a diminué dans la plupart des autres régions du monde, surtout en Amérique du Nord et en Amérique du Sud (Tableau 2).

Dans la majorité des pays du Groupe 1 (pays en développement), l'augmentation de la production a été inférieure à la croissance démographique (Tableau 2). La production par habitant a diminué dans les années 1980, mais il y a eu une récupération partielle au début des années 1990.

Figure 3. Evolution de la production du sorgho dans le monde, 1979-94.

Tableau 2. Taux de croissance du sorgho, 1979-94.


Superficie
(%/an)

Rendement
(%/an)

Production
(%/an)

Production par habitant (%/an)

Pays en développement

0,1

-0,5

-0,4

-2,4

Afrique

3,9

-1,0

2,9

0,0


Afrique du Nord

3,9

-1,1

2,8

0,2



Soudan

4,2

-0,9

3,3

0,8


Afrique occidentale

5,7

-1,2

4,5

1,5



Burkina Faso

2,5

3,2

5,8

2,9



Mali

6,3

-0,1

6,2

4,4



Niger

8,2

-5,9

1,8

-2,2



Nigeria

6,7

-2,1

4,4

1,4


Afrique centrale

2,1

0,9

3,1

0,0


Afrique orientale

-0,2

-0,6

-0,8

-3,6



Ethiopie

-1,0

-0,7

-1,7

-4,4



Kenya

-1,5

2,4

0,8

-2,7



Mozambique

2,0

-4,9

-3,0

-4,6



Somalie

-1,3

0,6

-0,7

-3,2



Tanzanie

0,5

-0,2

0,3

-2,8



Ouganda

2,8

-1,0

1,8

-1,5



Zimbabwe

-1,3

1,3

0,0

-3,2


Afrique australe

3,0

-2,2

0,7

-2,2

Asie

-2,6

1,5

-1,1

-3,0


Proche-Orient

-2,8

3,2

0,3

-2,6



Arabie Saoudite

-0,9

7,7

6,7

2,3



Yémen

-2,8

1,6

-1,3

-4,7


Extrême-Orient

-2,5

1,4

-1,1

-2,9



Chine

-5,8

3,6

-2,5

-3,8



Inde

-2,1

1,7

-0,5

-2,5



Pakistan

0,1

0,1

0,3

-3,1



Thaïlande

-2,4

1,5

-0,9

-2,3

Amérique centrale et Caraïbes

-0,4

-0,1

-0,6

-2,7


El Salvador

0,5

1,7

2,3

0,8


Guatemala

4,1

-4,0

0,0

-2,8


Haïti

-2,6

0,0

-2,6

-4,4


Mexique

-0,4

-0,2

-0,6

-2,8


Nicaragua

0,2

0,0

0,3

-2,5

Amérique du Sud

-5,9

0,6

-5,4

-7,2


Argentine

-9,6

1,4

-8,3

-9,6


Brésil

4,1

-0,9

3,1

1,2


Colombie

0,1

2,8

2,9

1,0


Uruguay

-4,5

3,9

-0,9

-1,4


Venezuela

0,0

2,0

2,1

-0,3

Pays développés

-2,6

1,2

-1,5

-2,5


Australie

-1,9

-0,1

-2,0

-3,4


Communauté européenne

0,0

1,6

1,5

0,0


Afrique du Sud

-4,1

1,8

-2,4

-4,8


Etats-Unis

-2,7

1,3

-1,5

-2,4


CEI1

0,5

-3,5

-3,0

-4,6

Monde

-0,2

-0,5

-0,7

-2,5

1 Communauté des Etats indépendants. Jusqu'en 1991, superficie dans l'ex-URSS.

Source: FAO

On observe deux tendances distinctes dans les pays du Groupe I. En Asie, la production a diminué au cours de la dernière décennie (Fig. 3), suite principalement à une forte baisse des superficies cultivées et de la production en Chine. En Inde, la production a augmenté de près de 5 pour-cent par an au cours de la décennie 1970, mais elle est demeurée stable pendant la dernière décennie. Dans ce pays, le sorgho a été remplacé par des cultures plus rentables, telles que les légumineuses et les oléagineux. La baisse des superficies cultivées a été compensée par une augmentation de la productivité, suite à l'utilisation de variétés améliorées et d'engrais. Les rendements sont passés d'environ 650 kg/ha au début des années 1970 à près de 900 kg/ha en 1992-94. En Afrique, la production a augmenté, surtout pendant la première moitié de la décennie 1980. Sur ce continent, la pression démographique a entraîné une expansion de l'aire de culture du sorgho et son débordement sur des terres particulièrement sèches. En fait, les rendements ont chuté pendant cette période.

Dans le Groupe II (pays développés, Argentine et Mexique), la production a chuté de près de 40 pour-cent au cours de la seconde moitié de la décennie 1980. Cela s'explique essentiellement par des politiques agricoles qui ont entraîné une réduction des superficies cultivées en sorgho. Aux Etats-Unis, la production a chuté de près de moitié au cours des dix dernières années. Pendant 1985-88, les superficies cultivées en sorgho dans ce pays sont passées de 6,8 à 3,7 millions d'hectares. Deux événements majeurs se sont produits:

(i) la législation agricole, adoptée en 1985, a réduit le prix de soutien du sorgho, comparativement au coton et au maïs (les principales cultures en concurrence avec le sorgho), introduit l'interchangeabilité dans les régions où le sorgho et maïs sont produits, diminué les bénéfices de l'assurance-récolte pour le sorgho et permis aux producteurs de sorgho de mettre en jachère de grandes superficies. Ces changements ont amené les fermiers à remplacer le sorgho par d'autres cultures.

(ii) La mise au point de variétés de maïs relativement plus tolérantes à la sécheresse et la diffusion de la technologie du "no-tillage" (non travail du sol) ont permis d'étendre l'aire de culture du maïs plus à l'Ouest, sur les terres traditionnelles du sorgho. Enfin, les universités et les sociétés semencières privées ont réduit leurs recherches sur le sorgho.

En Argentine, suite à une très forte diminution des importations de sorgho par l'ex-URSS, la production de sorgho a chuté, passant de 8 millions de tonnes en 1983 à 3 millions de tonnes en 19881.

1 L'ex-URSS était un gros importateur de maïs et de sorgho des Etats-Unis. Suite à l'embargo sur le grain imposé par les Etats-Unis au début des années 1980, l'URSS a commencé à importer de l'Argentine un volume important de sorgho. Ces achats ont chuté dramatiquement lorsque l'embargo a été levé et que les prix ont favorisé l'achat de maïs (des Etats-Unis).

Tendances: superficies et rendements

Le sorgho est cultivé sur 45 millions d'hectares dans le monde (moyenne 1992-94, Tableau 1). Les superficies ont augmenté en Afrique, où elles sont passées de 13 millions à près de 22 millions d'hectares entre 1979-81 et 1992-94 (Fig. 4). Cependant, elles ont diminué ailleurs dans le monde. Entre 1979 et 1994, les superficies mondiales de sorgho ont reculé de 0,2 pour-cent par an (Tableau 2). La diminution la plus forte a été enregistrée en Amérique du Sud, surtout en Argentine.

Comme pour les autres cultures, les rendements du sorgho ont augmenté suite au développement et à la diffusion de nouvelles technologies - variétés améliorées, utilisation de plus d'intrants et, dans une certaine mesure, meilleure utilisation des ressources du milieu et lutte contre les maladies et les insectes. L'Afrique fait exception car, sur ce continent, les rendements ont chuté de 14 pour-cent dans les années 1980, avant de récupérer au début des années 1990 (Fig. 5). En Inde, les rendements varient beaucoup d'une région à l'autre, selon la pluviométrie, les types de sol et les saisons. Les rendements en saison des pluies sont de 2-2,5 t/ha dans les régions où les sols sont profonds et la pluviométrie fiable, mais inférieurs à 500 kg/ha en contre-saison dans plusieurs régions où la pluviométrie est faible.

La productivité varie considérablement d'une région du monde à l'autre: rendements de 0,8 t/ha en Afrique (moyenne de 1992-94), 1,2 t/ha en Asie, plus de 4 t/ha en Amérique du Nord et 5 t/ha en Europe (Tableau 1). Ces différences s'expliquent essentiellement par le niveau de commercialisation et le niveau technologique qui lui correspond. Le Mexique illustre bien l'impact de la commercialisation à grande échelle sur la productivité. Dans ce pays, les superficies cultivées en sorgho sont passées de 0,1 million à 1,5 million d'hectares entre les années 1960 et le début des années 1980, et le rendement moyen du sorgho dépasse 3 t/ha, soit un tiers de plus que la moyenne nationale du maïs.

Dans plusieurs pays du Groupe II, l'utilisation des hybrides, la fertilisation et l'irrigation ont permis d'augmenter les rendements, même lorsqu'ils étaient déjà élevés. Par contre, dans les pays du Groupe I, le sorgho est surtout cultivé sur de petites parcelles fragmentées et peu fertiles, parfois en association avec d'autres cultures. Des contraintes financières limitent l'utilisation des intrants commerciaux. Cependant, quelques pays du Groupe I (ex. Soudan et Zimbabwe) produisent une partie de leur sorgho sur de grandes fermes à des fins commerciales en utilisant suffisamment d'intrants et parfois une irrigation d'appoint. Au Zimbabwe, les producteurs commerciaux récoltent 2-3 t/ha, par rapport à 400-600 kg/ha dans les petites exploitations traditionnelles.

Un facteur important de l'augmentation des rendements est l'adoption des hybrides. Les hybrides sont davantage utilisés dans les régions où le sorgho est produit sur une base commerciale et dans les pays où l'industrie semencière privée est bien développée. Aussi, l'utilisation des hybrides se concentre dans les pays du Groupe II. Dans la plupart des pays du Groupe 1 - à l'exception de la Chine, de l'Inde, de la Thaïlande, du Soudan et du Zimbabwe - l'utilisation des hybrides est négligeable. La plupart des hybrides (dans le Groupe II) sont des sorghos fourragers. Cependant, des hybrides de sorgho destinés à l'alimentation humaine ont été mis au point dans quelques pays du Groupe I, surtout en Inde où ils occupent environ 55 pour-cent des superficies cultivées en sorgho.

Figure 4. Evolution des superficies cultivées en sorgho dans le monde, 1979-94.

Figure 5. Evolution des rendements du sorgho dans le monde, 1979-94 (moyenne mobile, 3 ans).

En Afrique, où le sorgho est une culture-clé de la sécurité alimentaire, la chute des rendements est préoccupante. La croissance démographique a entraîné une expansion de l'aire de culture du sorgho et son débordement sur des terres particulièrement sèches et marginales. Dans certains pays, des politiques commerciales ont favorisé le remplacement du sorgho par le maïs sur des champs relativement productifs. Cela est en partie imputable à des politiques qui ont favorisé le commerce et la transformation du maïs, mais non du sorgho. Ailleurs, la période de jachère a diminué excessivement, laissant à la terre encore moins de temps pour reconstituer ses réserves en éléments nutritifs. La fertilisation étant généralement très faible, on assiste à une dégradation de la fertilité des champs. Cependant, la chute des rendements, bien qu'évidente, est moins prononcée que ne le laissent paraître les chiffres (1,0 pour-cent par an entre 1979 et 1994, Tableau 2). En effet, les données de 1979-81 renvoient à des terres relativement bonnes et celles de 1992-94 à un agrégat de terres "bonnes" et de terres plus marginales.

Contraintes de la production

La plupart du temps, la majorité des petits exploitants, surtout dans les régions semi-arides de l'Afrique, n'arrivent pas à produire suffisamment de sorgho pour satisfaire les besoins alimentaires de leur famille. Ils perçoivent la culture du sorgho (et la production agricole en général) comme une entreprise n'assurant, qu'en partie, leur subsistance et qui procure des revenus moindres que d'autres investissements, comme l'élevage ou l'éducation. Aussi, ils ne sont pas portés à investir dans les engrais ou les semences améliorées. La hausse des coûts de la main-d'oeuvre a aussi affecté la plupart des opérations agricoles, notamment la préparation du sol, le sarclage, l'effarouchement des oiseaux et le conditionnement du grain. Dans toute l'Asie et dans les zones urbaines en Afrique, un autre facteur important est le changement des préférences alimentaires des consommateurs. Lorsque leurs revenus augmentent, ces derniers ont tendance à délaisser les céréales traditionnelles au profit du blé, du riz et, dans certains cas, du maïs.

Dans certaines régions, les oiseaux ravagent les cultures, surtout à la phase de remplissage des graines. Pour minimiser les dégâts, on cultive dans certains pays des variétés de sorgho ayant un testa violacé qui contient des polyphénols (substances tanniques, amères et astringentes) qui déplaisent aux oiseaux. Cependant, la plupart des variétés cultivées en Afrique et en Asie ne contiennent pas de tannin et sont sensibles aux dégâts causés par les oiseaux. Une autre contrainte importante est le Striga, une plante parasite qui se fixe sur les racines du sorgho d'où elle puise son eau et ses éléments nutritifs, réduisant ainsi la croissance et les rendements, causant même la mort de la plante dans les cas graves. Quelques variétés résistantes au Striga ont été mises au point, mais leurs rendements sont généralement moindres que ceux des cultivars traditionnels ou améliorés (mais sensibles au Striga).

Les moisissures des graines causent des pertes importantes, surtout dans les régions où les cultivars améliorés ont été adoptés2. Elles réduisent le rendement en grain et la qualité du grain. D'autres maladies importantes sont l'anthracnose, la pourriture charbonneuse, le mildiou, l'ergot ainsi que l'helminth-osporiose. Les insectes sont une contrainte dans plusieurs régions. Les foreurs des tiges sont endémiques dans toutes les régions. En Afrique occidentale, les punaises des panicules et la cécidomyie sont des ravageurs redoutables. En Afrique et en Asie, la mouche des pousses cause des pertes importantes dans les cultures semées tardivement ou pratiquées en contre-saison.

2 La plupart des variétés améliorées arrivent à maturité plus tôt que les variétés locales, souvent avant la fin de la saison des pluies. Cela augmente leur sensibilité aux moisissures des graines et limite grandement leur adoption.

Un autre problème est la variabilité de la pluviométrie, qui entraîne des fluctuations importantes de la production. Les prix chutent abruptement lorsque les récoltes du sorgho sont bonnes, ce qui n'incite guère les commerçants à entrer sur ce marché, surtout que les infrastructures de stockage sont généralement inadéquates. Cela augmente le risque financier des producteurs de sorgho et explique leur réticence à investir dans la production commerciale de cette céréale.

Dans plusieurs pays du Groupe I, des politiques inadéquates limitent l'expansion de la production du sorgho. En Afrique, les mesures en faveur du sorgho sont relativement plus modestes que celles adoptées en faveur du maïs qui a envahi des terres autrefois cultivées en sorgho. En Asie, surtout en Inde, les subventions versées pour l'irrigation et les engrais ont favorisé le riz, le blé et les cultures de rente au détriment des céréales secondaires, et les politiques d'achat de riz et de blé se sont traduites par une augmentation des superficies consacrées à ces espèces. Dans un grand nombre de pays en développement, les politiques de soutien des prix du sorgho, parfois établies depuis longtemps, ont été réduites ou abandonnées, suite à la déréglementation des marchés.

Utilisation

A l'échelle mondiale, l'utilisation du sorgho a diminué légèrement, passant de 65,4 millions de tonnes en 1979-81 à 63.5 millions de tonnes en 1992-94 (Tableau 3). Au début des années 1980, on estime que 39 pour-cent de la production mondiale a été utilisée pour l'alimentation humaine et 54 pour-cent pour l'alimentation animale. La proportion du sorgho destinée à l'alimentation humaine s'est accrue graduellement, car l'utilisation du sorgho en alimentation humaine a augmenté en Afrique et, ailleurs dans le monde, on a remplacé le sorgho par d'autres grains (surtout du maïs) dans l'alimentation du bétail. En 1992-94, 42 pour-cent de la production mondiale de sorgho était utilisé pour l'alimentation humaine et 48 pour-cent pour l'alimentation animale.

Alimentation humaine

A l'échelle mondiale, on a consommé annuellement environ 27 millions de tonnes de sorgho en 1992-94 (Tableau 3), cela presque exclusivement en Afrique et en Asie (Fig. 6). C'est une denrée essentielle dans plusieurs pays en développement, surtout dans les régions sèches des zones tropicales semi-arides. La consommation de sorgho par habitant est plus stable et beaucoup plus élevée dans les régions rurales que dans les centres urbains. En outre, la consommation tend à être plus élevée dans les régions où la pauvreté et l'insécurité alimentaire sont les plus grandes.

Le sorgho est consommé sous des formes qui varient d'une région à l'autre. En général, il est consommé sous forme de grain entier ou de farine utilisés dans la préparation de plats traditionnels. On compte quatre groupes principaux d'aliments à base de sorgho:

· pain plat, généralement sans levain, fait avec une pâte fermentée ou non, consommé en Asie et dans certaines parties de l'Afrique;

· bouillie, fluide ou épaisse, fermentée ou non, surtout consommée en Afrique;

· produits bouillis semblables à ceux préparés à partir du gruau de maïs ou du riz;

· aliments frits à l'huile.

La consommation de sorgho par habitant - et son importance du point de vue de la sécurité alimentaire - est plus grande en Afrique. Par exemple, la consommation par habitant est de 90-100 kg/an au Burkina Faso et au Soudan, où le sorgho procure plus du tiers de l'apport calorique total. Cependant, entre 1979 et 1994, la consommation de sorgho par habitant a diminué légèrement (0,1 pour-cent par an) en Afrique (Tableau 4), surtout en Afrique orientale. Sur le continent africain, la production de sorgho a augmenté de 44 pour-cent pendant cette période, mais cette augmentation a été inférieure au taux de croissance démographique. Pendant la période 1979-94, la consommation de sorgho par habitant n'a diminué que légèrement, car la production a beaucoup augmenté. Si cette croissance pouvait être maintenue, là sécurité alimentaire et les niveaux de nutrition pourraient être améliorés sensiblement dans les régions rurales, où 90 pour-cent du sorgho est consommé.

En Asie, le sorgho est encore une culture essentielle à la sécurité alimentaire de certaines régions (ex. les régions rurales de l'état du Maharashtra en Inde, où la consommation par habitant est supérieure à 70 kg/an). Cependant, la production et l'utilisation du sorgho en alimentation humaine ont chuté dans les années 1980 et au début des années 1990, car les préférences alimentaires des consommateurs ont changé. Leurs revenus augmentant, ils ont opté pour le blé et le riz, dont on préfère le goût et qui sont plus faciles et plus rapides à apprêter. Cette tendance a été accentuée par l'urbanisation rapide et la disponibilité plus grande d'aliments à préparation rapide faits à base de blé et de riz.

Dans de nombreux pays, des politiques gouvernementales ont aussi contribué au déclin de l'utilisation du sorgho en alimentation humaine. Par exemple, des importations de blé et de riz à des prix relativement bas se sont traduites par une baisse de la compétitivité des céréales produites localement. Dans d'autres pays (Chine et Inde), les activités d'achat et de vente du sorgho par les agences publiques de distribution ont été interrompues et la consommation de sorgho a diminué dans les centres urbains. Dans plusieurs pays, des subventions à la consommation, des devises surévaluées ou des importations subventionnées ont gardé les prix du blé et du riz relativement bas, réduisant la compétitivité des céréales locales. Cependant, les programmes d'ajustement structurel et les dispositions prises lors des Négociations d'Uruguay ont contribué à réduire ces distorsions du marché.

Alimentation animale

Environ 48 pour-cent de la production mondiale de sorgho est destinée à l'alimentation animale (42 pour-cent pour l'alimentation humaine). Contrairement à l'utilisation en alimentation humaine relativement stable, l'utilisation du sorgho fourrager est sensible à deux facteurs: l'augmentation des revenus qui stimule la demande pour les produits de l'élevage et la compétitivité des prix du sorgho par rapport aux céréales concurrentes, surtout le maïs. En alimentation humaine, le sorgho est généralement perçu comme une céréale inférieure. Mais, l'élasticité des revenus pour les produits de l'élevage (et la demande dérivée pour les aliments du bétail) est généralement positive et élevée.

Tableau 3. - Types d'utilisation du sorgho par région.


Alimentation humaine
(million de tonnes)

Alimentation animale
(million de tonnes)

Autres utilisations
(million de tonnes)1

Utilisation totale
(million de tonnes)

Consommation par habitant
(kg/an)

Moyenne 1979-81

Pays en développement

25,0

14,7

4,4

44,2

7,7


Afrique

9,0

0,8

2,3

12,1

18,8


Asie

15,7

7,4

2,0

25,1

6,1


Amérique centrale et Caraïbes

0,4

7,0

0,2

7,6

3,6


Amérique du Sud

0,1

3,7

0,3

4,1

0,3

Pays développés

0,3

20,4

0,6

21,2

0,2


Amérique du Nord

0,1

10,5

0,2

10,8

0,5


Europe

0,0

2,8

0,0

2,8

0,0


Ex-URSS

0,0

2,5

0,0

2,5

0,0


Océanie

0,0

0,4

0,0

0,4

0,0

Monde

25,3

35,1

5,0

65,4

5,7

Moyenne 1989-91

Pays en développement

25,1

14,5

3,7

43,3

6,2


Afrique

11,5

0,9

1,8

14,2

18,2


Asie

13,3

6,1

1,6

21,0

4,6


Amérique centrale et Caraïbes

0,4

8,4

0,3

9,1

2,7


Amérique du Sud

0,0

2,7

0,2

2,9

0,1

Pays développés

0,4

16,8

0,5

17,7

0,3


Amérique du Nord

0,2

10,9

0,2

11,3

0,8


Europe

0,0

1,2

1,2

1,4

0,0


Ex-URSS

0,0

0,3

0,0

0,3

0,0


Océanie

0,0

0,8

0,0

0,8

0,0

Monde

25,5

31,3

4,2

61,1

4,8

Moyenne 1992-94

Pays en développement

26,4

14,8

5,5

46,7

6,2


Afrique

12,8

1,3

3,2

17,3

18,6


Asie

13,3

5,6

2,0

20,9

4,1


Amérique centrale et Caraïbes

0,4

7,5

0,3

8,3

2,9


Amérique du Sud

0,0

3,1

0,3

3,4

0,1

Pays développés

0,3

15,8

0,7

16,8

0,2


Amérique du Nord

0,1

11,1

0,3

11,5

0,5


Europe

0,0

1,1

0,2

1,3

0,0


CEI

0,0

0,1

0,0

0,1

0,0


Océanie

0,0

0,8

0,0

0,8

0,0

Monde

26,7

30,6

6,2

63,5

4,8

1 Semences, produits manufacturés et pertes.

Tableau 4. - Taux de croissance estimatifs des différents types d'utilisation du sorgho par région, 1979-94.


Alimentation humaine (%/an)

Alimentation animale (%/an)

Autres utilisations1 (%/an)

Utilisation totale (%/an)

Consommation par habitant (%/an)

Pays en développement

0,3

-0,3

0,7

0,1

-1,6


Afrique

2,8

3,7

1,6

2,7

-0,1


Asie

-1,6

-1,5

-1,0

-1,5

-3,4


Amérique centrale et Caraïbes

0,6

0,5

3,0

0,6

-1,6


Amérique du Sud

-4,1

-2,3

0,1

-2,1

-6,0

Pays développés

3,8

-2,2

1,6

-2,0

2,7


Amérique du Nord

0,9

-0,2

1,6

-0,2

-0,1


Europe

-51,7

-4,4

15,4

-3,0

0,0


CEI2

0,0

-23,6

2,2

-22,5

0,0


Océanie

-5,5

4,7

51,0

-5,0

-7,4

Monde

0,3

-1,3

0,8

-0,5

-1,5

1 Semences, produits manufacturés et pertes. Source: FAO
2 Communauté des Etats indépendants. Jusqu'en 1991, superficie dans l'ex-URSS.

Figure 6a. Utilisation du sorgho en alimentation humaine et animale dans le monde, 1979-94. - Afrique

Figure 6b. Utilisation du sorgho en alimentation humaine et animale dans le monde, 1979-94. - Asie

Figure 6c. Utilisation du sorgho en alimentation humaine et animale dans le monde, 1979-94. - Amérique latine et Caraïbes

Figure 6d. Utilisation du sorgho en alimentation humaine et animale dans le monde, 1979-94. - Pays développés

La demande pour les aliments du bétail est concentrée dans les pays développés et les pays à revenus moyens d'Amérique latine et d'Asie, où la demande pour la viande est forte et l'industrie animale intensive. Plus de 85 pour-cent de l'utilisation mondiale du sorgho fourrager se situe dans les pays du Groupe II (Fig. 6), notamment aux Etats-Unis, au Mexique et au Japon qui comptent ensemble pour près de 70 pour-cent de cette forme d'utilisation (Tableau 5).

L'utilisation mondiale de sorgho fourrager est passée de 16 millions de tonnes au début des années 1960 à environ 35 millions de tonnes au milieu des années 1980, soit une croissance annuelle moyenne de 4 pour-cent. Cette demande a été le pivot de l'augmentation de la production mondiale et du commerce international du sorgho pendant cette période. Un facteur important a été l'augmentation de l'utilisation du sorgho fourrager aux Etats-Unis dans les années 1960 et le début des années 1970; l'industrie de l'élevage s'est alors déplacée de l'aire de production du maïs au Nord, vers les plaines du Sud où la plus grande partie du sorgho américain est produit. Un autre facteur a été la forte demande pour les produits de l'élevage en Amérique latine, surtout au Mexique. De plus, les gouvernements de certains pays d'Amérique latine (ex. Venezuela) ont restreint leurs importations de maïs.

Par la suite, les tendances ont été influencées par deux événements: la réaction de l'ex-URSS à l'embargo sur les ventes de grain imposé par les Etats-Unis au début des années 1980 et des politiques américaines qui ont favorisé le maïs au détriment du sorgho. La production de maïs a augmenté. Le maïs devint moins cher que le sorgho et le commerce et l'utilisation du sorgho fourrager ont diminué. L'utilisation du sorgho en alimentation animale a augmenté graduellement en Afrique, mais elle est demeurée relativement stable dans les pays asiatiques à faibles revenus. Environ 5-10 pour-cent du sorgho produit en Inde - un pourcentage beaucoup plus élevé en Chine - est utilisé pour l'alimentation du bétail et de la volaille. Cependant, ces deux régions sont des utilisateurs relativement secondaires des aliments du bétail. Les tendances viennent surtout des pays du Groupe II, notamment des Etats-Unis.

Sorgho vs maïs. La concurrence entre le sorgho et le maïs est un facteur-clé de l'utilisation du sorgho en alimentation animale. Les caractéristiques fourragères du sorgho ressemblent à celles des autres céréales qu'il concurrence. Son énergie métabolisable est presque égale à celle du maïs, sa teneur en protéines brutes est supérieure (mais de qualité moindre) et il est relativement riche en niacine, une vitamine essentielle. Cependant, les investissements importants faits dans la recherche sur le maïs ont permis d'augmenter le rendement et de réduire le cycle de croissance de cette céréale. Cela a amélioré la compétitivité des prix du maïs dans plusieurs pays.

Dans la plupart des pays, les industries des aliments du bétail recherchent généralement les formules alimentaires les plus économiques. Lé sorgho/maïs est alors mélangé à des ingrédients qui ne sont pas des grains. La quantité de sorgho utilisée dépend avant tout des prix du sorgho et du maïs et de la valeur nutritive de chacune de ces espèces. Un autre facteur important est la préférence des consommateurs pour la couleur de la viande. Le maïs contient des niveaux plus élevés de carotène que le sorgho. La viande des animaux nourris avec du maïs tend à être plus jaunâtre que la viande des animaux nourris avec du sorgho. Au Japon, par exemple, les consommateurs préfèrent généralement une viande blanchâtre. Le sorgho est donc un ingrédient particulièrement apprécié dans certaines rations (volailles, porcs et quelques races bovines). En Inde, le sorgho n'est guère apprécié des éleveurs, car les consommateurs indiens préfèrent généralement que la viande des volailles et les jaunes d'oeuf soient d'un jaune plus foncé.

D'autre part, il y a lieu de souligner que le commerce des résidus de récolte de sorgho est actif en Asie. En Afrique, ces résidus ne sont généralement utilisés qu'à la ferme. Mais, en Asie, il y a une demande croissante pour la paille de sorgho; cela en milieu rural, afin de compenser pour les pénuries d'aliments du bétail, et en milieu urbain, pour nourrir des animaux laitiers.

Tableau 5. - Utilisation du sorgho en alimentation animale dans quelques pays sélectionnés.

 

Moyenne 1979-81

Moyenne 1984-86

Moyenne 1989-91

Moyenne 1992-94

(million de tonnes)

(million de tonnes)

(million de tonnes)

(million de tonnes)

Etats-Unis

10,5

14,7

10,9

11,1

Mexique

6,7

6,6

8,1

7,1

Japon

4,1

4,2

3,5

2,6

Chine

2,4

2,1

1,5

1,9

Argentine

2,1

2,5

0,9

1,5

Communauté européenne

1,8

0,5

0,8

0,9

Australie

0,4

0,3

0,8

0,8

Colombie

0,5

0,5

0,7

0,7

Venezuela

0,7

1,3

0,6

0,4

CEI1

2,5

0,9

0,3

0,1

Autres

3,4

3,1

3,2

3,2

Monde

35,1

36,7

31,3

30,6

1 Communauté des Etats indépendants. Jusqu'en 1991, superficie dans l'ex-URSS.

Source: FAO

Autres utilisations

Un autre aspect important du sorgho grain, surtout en Afrique, est son utilisation dans la production de boissons alcooliques. Le grain est utilisé pour le malt ou comme complément dans la production de deux types de bière: bière blonde et bière brune (bière traditionnelle africaine faible en alcool qui contient de fines particules en suspension). Les statistiques sur les quantités de sorgho utilisées dans la préparation de ces bières ne sont pas disponibles pour tous les pays, mais il semblerait qu'on s'en serve surtout pour la production de la bière brune. Traditionnellement, le sorgho est un ingrédient important des bières artisanales. La demande croissante a permis l'établissement d'une industrie dans quelques pays. Elle produit de la bière brune et une bière en poudre pour la vente au détail. Des quantités beaucoup plus faibles de sorgho sont utilisées pour produire de la bière blonde, surtout au Nigeria et au Rwanda. A la fin des années 1980 et au début des années 1990, un embargo temporaire imposé par le Nigeria sur les importations d'orge a favorisé le développement d'un marché pour les boissons à base de malt de sorgho. Dans ce pays, de petites quantités de grain sont aussi utilisées pour la production d'édulcorants.

Un peu de sorgho grain est aussi utilisé par des brasseries mexicaines et américaines. En Chine, environ le tiers de la production du sorgho grain servirait à fabriquer des boissons alcooliques, surtout une liqueur forte traditionnelle.

Stocks

Les stocks mondiaux de sorgho sont beaucoup moindres que ceux des autres céréales. Ils sont présentement estimés (fin de campagne 1994) à 8 millions de tonnes (soit seulement 3 pour-cent des stocks mondiaux de céréales) par rapport à 20-25 millions de tonnes au milieu des années 1980. Les stocks ont chuté, mais ils sont maintenant mieux répartis. Jusqu'au milieu des années 1980, plus de la moitié des stocks de sorgho se trouvaient aux Etats-Unis. Au cours des dernières années, les stocks américains représentaient moins de 20 pour-cent du total mondial. La Chine, l'Inde et le Mexique auraient présentement de plus gros stocks que les Etats-Unis.

Une partie importante des stocks mondiaux de sorgho est conservée de façon informelle dans les greniers des paysans des pays du Groupe I. Les statistiques officielles sont déficientes à l'égard de ces stock. Dans les régions où la production céréalière varie considérablement d'une année à l'autre, surtout en Afrique, ces stocks représentent parfois la consommation de plusieurs années. Cependant, il arrive plus souvent que les stocks des paysans soient beaucoup moindres. La plupart des ménages paysans peuvent à peine produire suffisamment de grain pour la consommation familiale jusqu'à la prochaine récolte et pour les semences de la campagne suivante. Après une mauvaise récolte, ils sont obligés d'acheter leur grain et/ou leurs semences, ou encore ils dépendent de l'aide humanitaire. Malgré l'importance de ces stocks, on ne dispose pas de données précises sur leur volume ni leur répartition.

Commerce international

Le commerce international du sorgho est très influencé par la demande pour les produits de l'élevage et conséquemment celle des aliments du bétail et les prix des céréales fourragères dans les pays du Groupe II. Seulement 6 pour-cent du sorgho transigé sur le marché international est destiné à l'alimentation humaine (environ 500 000 tonnes par an). Il s'agit surtout d'importations de pays africains. Le commerce international du sorgho fourrager est très sensible au différentiel de prix sorgho/maïs et les volumes peuvent fluctuer considérablement. Le marché mondial du sorgho ne représente actuellement qu'un peu plus de 3 pour-cent du commerce mondial des céréales. Le sorgho est surtout utilisé dans le pays où il est produit. Néanmoins, le volume des exportations de sorgho est passé de 3 millions de tonnes au début des années 1960 à plus de 12 millions de tonnes (environ 20 pour-cent de la production mondiale) au début des années 1980 (Tableaux 6 et 7). Cette croissance date surtout des années 1960 et de la première moitié des années 1970, alors que le commerce mondial du sorgho a triplé en l'espace d'environ 15 ans. Une autre expansion est survenue au début des années 1980, lorsque l'ex-URSS, suite à l'embargo sur le grain imposé par les Etats-Unis, a commencé à acheter des quantités importantes de sorgho sur le marché international. Par rapport aux années 1950 et 1960, ces achats ont réduit le différentiel des prix d'exportation sorgho/maïs.

Le marché mondial a atteint un sommet de plus de 13 millions de tonnes en 1985, puis chuté à environ 10 millions de tonnes au début des années 1990. Il a diminué encore pour atteindre environ 8 millions de tonnes en 1994. Ce déclin est imputable à divers facteurs, entre autres:

· une forte baisse de la production aux Etats-Unis;

· un plus faible écart entre les prix d'exportation du maïs et du sorgho (Fig. 7) qui a réduit la compétitivité du sorgho comme aliment du bétail;

· la levée des restrictions ou interdictions touchant les importations de maïs dans de nombreux pays, dont la Colombie, le Mexique et le Venezuela.

Tableau 6. - Importations de sorgho à l'échelle mondiale1.

1 Chaque entrée est la moyenne des trois années couvertes par la période indiquée, ex. 1979-81.

 

1979-81

1984-86

1989-91

1992-94

('000 tonnes)

('000 tonnes)

('000 tonnes)

('000 tonnes)

Pays en développement

3801,6

4351,8

4901,8

4754,3

Afrique

152,4

482,5

305,2

423,7


Afrique du Nord

0,1

148,3

202,3

196,6



Soudan

0,02

140,1

92,3

191,8



Autres

0,1

8,2

110,0

4,9


Afrique occidentale

115,8

198,6

87,1

51,6



Burkina Faso

15,2

13,7

15,8

6,4



Mali

16,7

2,0

13,2

9,2



Niger

18,6

49,7

17,6

19,4



Sénégal

23,3

60,0

20,2

9,0



Autres

42,0

73,2

20,3

7,6


Afrique centrale

2,9

17,0

3,9

6,1


Afrique orientale

12,0

57,6

11,8

147,9



Ethiopie

4,1

29,0

6,8

62,0



Kenya

0,1

0,0

1,0

16,8



Somalie

3,7

12,5

3,8

19,0



Zimbabwe

0,0

3,2

0,0

17,1



Autres

4,2

12,9

0,2

33,0



Afrique australe

21,6

61,0

0,1

21,5



Botswana

13,9

60,0

0,1

21,5



Autres

7,6

1,0

0,0

0,0

Asie

847,7

1158,2

654,0

238,9


Chine

591,0

657,2

82,4

104,0


République de Corée

72,5

302,9

238,2

82,5


Turquie

0,0

0,0

55,4

0,0


Autres

184,3

198,1

278,0

49,4

Amérique latine

2793,6

2703,9

3330,2

4084,5


Caraïbes

4,0

0,0

65,4

3,6

Amérique centrale

2111,1

1930,5

2914,0

3990,4


Mexique

2106,9

1922,7

2912,1

3982,2


Autres

4,3

7,8

1,9

8,2

Amérique du Sud

678,4

773,5

350,8

90,4


Chili

13,7

6,4

2,2

33,3


Colombie

64,7

68,0

0,7

21,5


Equateur

0,0

10,3

28,0

10,4


Venezuela

588,6

684,5

315,8

4,5


Autres

11,4

4,3

4,1

20,8


Océanie

7,9

7,1

12,4

7,3

Pays développés

7892,8

6942,3

5234,5

3796,7


Israël

452,8

500,1

302,3

146,3


Japon

4291,3

4749,0

3843,9

2980,3


Afrique du Sud

2,0

9,4

0,4

,85,4


Communauté européenne3

1014,2

520,8

617,6

552,9


CEI4

1820,2

1160,3

387,7

2,4


Autres

312,2

2,6

82,6

29,4

Monde

11694,4

11294,0

9536,3

8551,1

2 Zéro lorsque les importations sont inférieures à 50 tonnes.
3 Incluant le commerce entre les pays membres.
4 Communauté des Etats indépendants. Jusqu'en 1991, superficie dans l'ex-URSS.
Source: FAO

Tableau 7. - Exportations de sorgho à l'échelle mondiale1.

1 Chaque entrée est la moyenne des trois années couvertes par la période indiquée, ex. 1979-81.

 

1979-81

1984-86

1989-91

1992-94

('000 tonnes)

('000 tonnes)

('000 tonnes)

('000 tonnes)

Principaux pays exportateurs

11328,9

10856,7

8764,3

7993,5


Argentine

3461,3

3144,7

926,5

842,1


Australie

519,8

1200,0

261,2

188,8


Chine

3,7

439,9

515,8

357,9


Etats-Unis

7344,0

6072,1

7060,8

6604,7

Autres

1011,4

591,6

478,4

739,4


Afrique

477,9

67,8

164,1

339,2



Afrique du Sud

208,5

33,7

11,0

1,4



Soudan

246,2

18,5

136,0

278,7



Autres

23,2

15,6

17,1

59,1


Asie

222,2

312,3

57,1

81,9



Thaïlande

189,4

267,8

55,4

9,2



Autres

32,8

44,5

1,8

72,7


Amérique latine et Caraïbes

54,1

45,5

17,2

38,5


Europe

266,3

165,9

239,9

279,7


Communauté européenne2

251,2

159,5

230,0

272,3


Hongrie

7,1

6,4

9,6

7,4

Pays en développement

4001,6

3976,4

1669,6

1658,1

Pays développés

8338,7

7471,8

7573,1

7074,9

Monde

12340,2

11448,3

9242,7

8732,9

2 Incluant le commerce entre les pays membres.
Source: FAO

Figure 7. Prix moyens annuels (juillet-juin) d'exportation du sorgho et du maïs (franc-bord US Golfe). (Sorgho = US Milo n° 2, jaune; maïs = US n° 2, jaune.)

Les importations de sorgho sont concentrées dans quelques pays. Le Japon et le Mexique réalisent environ 80 pour-cent des importations (Tableau 6). La Communauté européenne est un gros importateur qui s'est engagée à importer annuellement au moins 300 000 tonnes de sorgho, suite à l'entrée de l'Espagne en son sein3. Les importations totales de sorgho ont chuté dans les années 1980 et au début des années 1990. Une tendance importante est la forte chute des importations par les pays développés et l'augmentation des importations par les pays en développement où l'industrie animale s'est développée. Aussi, les importations de sorgho par les pays en développement ont augmenté considérablement, passant de 3-4 pour-cent au début des années 1960 à environ 55 pour-cent actuellement.

3 Cette disposition a par la suite été intégrée aux Négociations d'Uruguay.

Les principaux pays exportateurs sont l'Argentine, l'Australie, la Chine et les Etats-Unis qui fournissent ensemble plus de 90 pour-cent du volume total des exportations (Tableau 7). Les Etats-Unis fournissent les trois quarts de toutes les exportations. La production et les exportations de sorgho de l'Argentine ont beaucoup augmenté entre le début des années 1960 et le début des années 1980. Pendant cette période, les superficies récoltées sont passées de 0,8 million à 1,9 million d'hectares. Cependant, les exportations ont chuté suite à la baisse de la demande pendant la seconde moitié de la décennie 1980. L'Australie a commencé à exporter au début des années 1970, lorsque le pays a partiellement remplacé ses cultures de blé par le sorgho. La Chine était devenue un exportateur important au milieu des années 1980, mais sa part du marché mondial a diminué récemment suite à une forte augmentation de la demande intérieure pour le sorgho fourrager.

La part des autres pays exportateurs est faible. La Thaïlande est devenue un exportateur, à la fois modeste et régulier, au milieu des années 1960, mais la croissance de la demande intérieure pour le sorgho fourrager a entraîné une diminution de ses exportations depuis la fin des années 1980. Le Soudan est un fournisseur traditionnel. Son potentiel est grand, mais ses disponibilités varient considérablement d'une année à l'autre à cause de sécheresses périodiques. Au Sahel, les bonnes récoltes des dernières années et l'inélasticité relative de la demande intérieure ont permis d'accumuler des surplus exportables dans de nombreux pays, dont le Burkina Faso, le Mali et le Niger. Cependant, la forte concurrence sur les marchés internationaux et le coût élevé de la collecte et du transport du grain font qu'il est difficile d'exporter à partir de ces pays.

Les pays en développement, à l'exception des pays exportateurs déjà établis comme l'Argentine et la Chine, rencontrent de nombreux problèmes. Le volume du sorgho disponible pour l'exportation est généralement limité, il fluctue et la qualité du grain est variable. De plus, les faibles rendements, le coût élevé des intrants et du transport intérieur, dans certains cas des devises surévaluées, rendent leurs exportations non concurrentielles sur un marché international aussi compétitif.

Le volume de sorgho transigé entre pays en développement est faible. Il s'agit souvent d'un commerce transfrontalier et/ou de transactions triangulaires d'aide alimentaire. Cependant, les statistiques officielles sous-estiment le volume du commerce dans certaines régions. En Afrique de l'Ouest, le commerce régional du sorgho serait beaucoup plus important que ne le laissent paraître les statistiques officielles. Une partie importante du commerce qui se fait entre les pays sahéliens, ou encore entre les pays sahéliens et leurs voisins de la côte, n'est pas recensé. Il en va de même d'une grande partie du commerce qui se fait entre le Soudan et ses voisins. Ce commerce important et informel s'explique principalement par des différences de politiques entre partenaires commerciaux (ex. prix de soutien, taux de change, restrictions gouvernementales sur le commerce).

Prix sur le marché international

Le prix du sorgho sur le marché international est déterminé dans une large mesure par la situation de l'offre et de la demande aux Etats-Unis. Les prix d'exportation sont basés sur le sorgho de référence, le Milo US n° 2 jaune. Le sorgho transigé étant presque exclusivement utilisé pour l'alimentation du bétail, les cours du marché sont étroitement associés aux mouvements des prix des autres grains de qualité fourragère, surtout le maïs, le blé et l'orge. Les prix des grains fourragers sont généralement influencés par des facteurs tels que la production mondiale, le volume des stocks de report et le nombre d'animaux alimentés au grain. Il n'y a pas de prix d'exportation publiés régulièrement et qui soient reconnus à l'échelle internationale pour le sorgho blanc destiné à l'alimentation humaine. Les prix d'exportation du sorgho blanc sont généralement cotés de façon irrégulière sur des marchés sous-régionaux. Ils ont peu de rapport avec les prix du sorgho (surtout du sorgho fourrager) cotés sur le marché international4.

4 En 1986, le sorgho s'est vendu au prix moyen de 83 $US la tonne (franc-bord US Golfe). Mais durant la même période, le Programme alimentaire mondial a acheté du sorgho à des prix qui ont varié considérablement d'un fournisseur à l'autre - 117 SUS la tonne au Soudan, 261 $US au Burkina Faso et 263 $US au Niger (Source: WFP Occasional Papers no. 11: A study of triangular transactions and local purchases in food aid, Jul 1987).

Les prix d'exportation ont été relativement bas durant les années 1960, alors que les stocks céréaliers étaient importants. Ils ont plus que doublé lors de la crise alimentaire mondiale de 1972-74, passant de 52 $US la tonne en 1971/72 à 123 $US en 1974/75. Les prix ont atteint un autre sommet de 141 $US la tonne en 1980/81, mais ils sont demeurés déprimés durant la seconde moitié de la décennie 1980 et le début des années 1990, comme ce fut le cas pour les autres céréales secondaires. Les prix ont commencé à augmenter fortement au milieu de 1995 (Fig. 7), après que la production mondiale de céréales soit demeurée inférieure à la demande pendant trois années consécutives. Les stocks céréaliers ont alors atteint leur niveau le plus bas en 20 ans.

La concurrence entre les différentes céréales fourragères dépend de leur valeur nutritive et de leur prix relatif. La valeur nutritive de chaque céréale varie d'une espèce animale à l'autre, mais quelques règles générales ont été établies. Les éléments digestibles totaux du sorgho équivalent à 95 pour-cent de ceux du maïs5. Le sorgho ne devient attrayant comme aliment du bétail que lorsque son prix s'établit à 95 pour-cent de celui du mais. Les prix internationaux du sorgho suivent donc de près ceux du maïs, la céréale fourragère la plus importante, et ils sont généralement un peu inférieurs (Fig. 7).

5 Les éléments digestibles totaux de l'orge et de l'avoine sont 10 pour-cent inférieurs à ceux du maïs et ceux du blé 5 pour-cent supérieurs.

Commerce intérieur et politiques nationales

Dans la plupart des pays du Groupe I, surtout en Asie et en Afrique, le sorgho est avant tout une culture de subsistance et une petite partie seulement de la récolte est vendue. Les ventes se font généralement dans les marchés ruraux, près du lieu où le sorgho est produit, ou encore entre des ménages voisins. Les canaux de commercialisation entre les producteurs et les grands centres urbains sont peu développés. L'Inde et la Chine font exception; l'infrastructure et les marchés y sont relativement bien développés. La majorité des paysans indiens ont accès à des marchés de gros primaires. C'est la faiblesse de la demande et non le manque d'infrastructure qui est la principale entrave à l'augmentation de la production.

Dans la plus grande partie de l'Afrique, les marchés intérieurs de sorgho sont caractérisés par un volume limité et variable, car l'offre est éparse et irrégulière, les distances sont grandes et le coût du transport élevé. Les prix varient pendant l'année. Ils sont les plus bas immédiatement après la récolte, lorsque l'offre est abondante, puis ils augmentent progressivement jusqu'à la prochaine récolte. Cette variation est plus grande dans les pays où le sorgho est la principale denrée alimentaire (ex. la zone sahélienne).

Plusieurs pays du Groupe 1 n'ont pas de politique nationale portant spécifiquement sur la production et les prix du sorgho. Au contraire, le sorgho est très affecté par les politiques touchant le maïs, le riz, le blé ou d'autres céréales. Traditionnellement, ces politiques permettaient au gouvernement ou une agence parapublique ayant le monopole de la commercialisation de fixer le prix des grains. Dans la plupart des cas, les prix étaient uniformes dans tout le pays et relativement stables durant toute l'année, indépendamment de l'évolution de l'offre ou de la tendance des prix. Cependant, depuis le milieu des années 1980, plusieurs pays ont commencé à libéraliser leur marché céréalier; le gouvernement cessant de soutenir les prix ou de s'impliquer directement dans la commercialisation des grains. Aussi, on peut s'attendre à ce que les prix fluctuent en cours d'année et varient d'une région à l'autre du pays.

Innovations, considérations environnementales et orientation de la recherche

Depuis les années 1960, le changement technologique le plus important de la culture du sorgho a été la mise au point et l'utilisation des semences hybrides. Les hybrides de sorgho sont actuellement cultivés dans de grandes parties du monde: dans presque tous les pays du Groupe II et dans plusieurs pays du Groupe 1 (à l'exception de l'Afrique). La productivité, le synchronisme de la croissance et la qualité du grain ont été améliorés. De plus, les hybrides de sorgho ont favorisé la mécanisation, ainsi que l'utilisation des engrais et autres intrants commerciaux. En Inde, où les hybrides occupent presque 55 pour-cent des superficies cultivées en sorgho, les rendements en grain ont presque doublé depuis leur introduction il y a 30 ans.

L'agriculture durable et l'environnement sont des sujets de plus en plus importants. Dans la plupart des pays du Groupe I, surtout en Afrique, la pression démographique a entraîné une réduction du temps de jachère et l'exploitation de terres particulièrement marginales. Ces terres, cultivées avec peu ou pas d'engrais, se sont dégradées. De plus, les changements climatiques (baisse de la pluviométrie, élévation des températures) et les sécheresses périodiques ont fait de l'agriculture une entreprise plus risquée et les paysans de certaines régions de l'Afrique ont adopté des pratiques culturales inadaptées qui ont conduit à une chute de la production et de la productivité. Ces pratiques ne sont pas viables à long terme.

Un autre facteur environnemental important est l'infestation de Striga, une plante parasite dont on dénombre plusieurs espèces en Asie et en Afrique. L'infestation des champs cultivés sur une base continue est devenue, dans plusieurs régions de l'Afrique, une contrainte majeure. Les superficies infestées et les niveaux d'infestation ont augmenté. Les années de sécheresse de la décennie 1970 et la détérioration de la fertilité des sols ont accentué le processus. Des champs ont été abandonnés dans les régions les plus touchées. On estime que le Striga menace actuellement 8 millions d'hectares en Afrique - près de 40 pour-cent des superficies totales cultivées en sorgho - et cause des pertes annuelles de rendement se chiffrant à plus de 90 millions $US. Les effets risquent de perdurer, car la plante produit plusieurs millions de graines qui peuvent rester dormantes dans le sol jusqu'à 15-20 ans6. La lutte intégrée contre le Striga (résistance de la plante-hôte et meilleure gestion des cultures) est un domaine de recherche important. Plusieurs méthodes de lutte ont été mises au point, mais la plupart d'entre elles sont, pour l'instant, trop coûteuses ou impraticables pour les petits exploitants.

6 Le Striga attaque d'autres céréales, comme le maïs et le mil pénicillaire, ainsi que certaines légumineuses, comme le niébé.

Dans les pays où des hybrides sont cultivés, il y a en place des programmes pour sélectionner les lignées parentales et évaluer les nouvelles combinaisons hybrides de sorgho grain ou de sorgho fourrager. Le secteur privé contribue pour beaucoup à ces recherches. Dans plusieurs autres pays (surtout du Groupe I), il existe des programmes publics portant sur l'amélioration des variétés à pollinisation libre. La sélection a d'abord eu comme objectif principal l'augmentation des rendements en grain, mais on cherche de plus en plus à intégrer d'autres caractéristiques comme la qualité du grain, la résistance aux maladies et aux insectes et le rendement fourrager. Ces programmes ont permis de mettre au point un grand nombre de variétés améliorées, mais leur diffusion reste faible, surtout en Afrique, car, en aval, la multiplication des semences et la vulgarisation sont insuffisantes.

Des recherches sur la conduite des cultures sont faites dans les pays du Groupe I et II. Ces recherches sont particulièrement importantes pour les systèmes d'agriculture de subsistance, mais l'attention est dirigée davantage vers les systèmes semi-commerciaux de monoculture. De nombreuses recherches ont été faites sur les composantes individuelles des systèmes culturaux ou sur des thèmes spécifiques comme la fertilité ou la lutte contre les ravageurs. Ces recherches sont presque exclusivement conduites par des organisations publiques. Il y aurait lieu d'intensifier les recherches sur les interactions agriculture-élevage et les problèmes liés à l'agriculture durable. Les recherches adaptatives doivent porter sur un éventail plus large de solutions, et tenir davantage compte des contraintes financières des paysans et de leur perception du risque.

Dans la plupart des pays du Groupe I, surtout en Afrique, les recherches sur l'amélioration du sorgho et la conduite des cultures ne devraient pas, à elles seules, se traduire par une augmentation sensible de la production. Des solutions techniques existent déjà pour plusieurs problèmes. Il faudra d'abord améliorer l'infrastructure commerciale, afin qu'elle puisse soutenir une production intensive et permettre d'interrompre la dégradation de la fertilité du sol et la chute des rendements. Il est important de développer le marché semencier, afin de donner aux paysans un accès fiable aux nouvelles variétés, et de renforcer le marché des intrants, afin de réduire le coût des produits agro-chimiques et d'en accroître l'accessibilité. Dans certains pays, la stabilisation des prix est importante pour favoriser l'investissement dans la production de sorgho.

Perspectives à moyen terme7

7 Couvre la période allant de 1992-94 à 2005. Les perspectives de la production se fondent sur une estimation des superficies cultivées et des rendements, prévus à partir des tendances récentes et en tenant compte de certains ajustements pour des pays individuels; on assume qu'il n'y aura pas de changements majeurs dans les politiques. Les perspectives de la demande sont basées sur les prévisions démographiques des Nations Unies et sur les taux de croissance des revenus prévus par la Banque mondiale.

Production et utilisation

La production mondiale de sorgho devrait augmenter de 1,2 pour-cent par an et passer de 64 millions de tonnes en 1992-94 à 74 millions de tonnes en 2005 (Tableau 8). La production par habitant va diminuer, car la population va augmenter plus rapidement que la production et, ce qui est plus préoccupant, cela sera surtout manifeste dans les pays où le sorgho est une culture vivrière essentielle à la sécurité alimentaire (Tableau 9).

A l'échelle mondiale, l'utilisation du sorgho ne devrait guère changer à moyen terme. Le sorgho continuera d'être surtout utilisé en alimentation humaine en Afrique et en Asie et en alimentation animale ailleurs dans le monde. Cependant, il y aura, à l'échelle régionale, des changements importants. En Afrique, l'utilisation du sorgho en alimentation humaine devrait augmenter de 39 pour-cent. Cela contribuera pour beaucoup à l'augmentation de 15 pour-cent de cette forme d'utilisation du sorgho à l'échelle mondiale. Par contre, en Asie, la tendance actuelle se poursuivra et l'utilisation du sorgho en alimentation humaine devrait chuter de 8 pour-cent. Le secteur des aliments du bétail continuera d'être dominé par les pays du Groupe II. Cependant, l'augmentation prévue de 17 pour-cent de l'utilisation mondiale du sorgho fourrager ne viendra pas des pays développés, où cette forme d'utilisation devrait chuter de 10 pour-cent, mais de marchés émergents situés en Asie et en Amérique latine.

Tableau 8. - Production, utilisation et commerce du sorgho ('000 tonnes), 1992-94 à 2005.

 

Moyenne 1992-94 (situation actuelle)

2005 (situation prévue)

Production

Utilisation totale

Alimentation humaine

Alimentation animale

Bilan commercial1

Production

Utilisation totale

Alimentation humaine

Alimentation animale

Bilan commercial1

Pays en développement

44239

46679

26371

14762

-2440

53251

58327

30343

21550

-5076


Afrique

17075

16889

12660

1 197

186

23764

21 946

17633

2390

1 818



Afrique du Nord

4099

3761

2579

758

338

5925

5665

3556

1 568

260



Afrique occidentale

9256

9361

6944

341

-105

12861

13245

9843

662

-384



Afrique centrale

894

925

779

7

-31

1 100

1 120

945

13

-20



Afrique orientale

2753

2747

2276

87

6

3780

3784

3172

142

-4



Afrique australe

73

94

82

4

-21

98

131

116

5

-33


Asie

17975

18089

13244

2973

-114

18035

19674

12172

5815

-1639



Proche-Orient

639

959

459

471

-320

1007

1343

648

658

-336



Extrême-Orient

17337

17129

12785

2502

208

17028

18031

11 524

5 157

-1003


Amérique centrale et Caraïbes

4954

8265

431

7504

-3311

6348

9363

499

9123

-3015


Amérique du Sud

4234

3437

36

3088

797

5104

4645

38

4223

459

Pays développés

19659

16805

318

15807

2854

20569

15359

370

14281

5210

Monde

63898

63484

26689

30569

414

73820

73820

30713

35831

134

1 Production moins utilisation.
Source: FAO/ICRISAT

L'utilisation mondiale du sorgho fourrager devrait passer de 31 millions de tonnes en 1992-94 à 36 millions de tonnes en 2005. Toute cette croissance devrait avoir lieu dans les pays en développement, où l'utilisation du sorgho fourrager devrait augmenter de 3,2 pour-cent par an. L'Asie et l'Amérique latine compteront chacune pour environ 40 pour-cent de l'augmentation dans les pays en développement. La croissance devrait être particulièrement forte au Mexique, en Argentine, en Chine et, à un degré moindre, en Inde. L'Afrique comptera pour le reste. Sur ce continent, la demande pour le sorgho fourrager devrait doubler d'ici 2005 (mais les valeurs originelles sont plus faibles). En Afrique, les résultats dépendront en bonne partie du succès des récoltes en Egypte et au Soudan.

D'ici 2005, l'augmentation de la demande pour le sorgho devrait surtout provenir de trois régions:

· de l'Afrique, où il y aura une utilisation plus grande, consécutive à la croissance démographique;

· de l'Asie, où l'augmentation des revenus devrait stimuler l'industrie animale et l'utilisation du sorgho fourrager;

· de l'Amérique latine et des Caraïbes, où l'industrie animale, déjà bien établie, devrait continuer à se développer.

Les différences entre les pays du Groupe I et du Groupe II devraient s'estomper progressivement, car le marché des aliments du bétail se développera davantage dans les pays en développement. Il s'agit là d'une tendance importante. Néanmoins, le sorgho restera toujours une composante essentielle de la sécurité alimentaire de plusieurs pays en développement, surtout dans les régions où la pluviométrie est faible.

Dans les pays en développement, la production de sorgho devrait augmenter de 1,6 pour-cent par an et passer de 44 millions de tonnes en 1992-94 à 53 millions de tonnes en 2005. Cette augmentation se fera surtout en Afrique (Tableaux 8 et 9). Cette croissance résultera en grande partie de l'augmentation des rendements qui devraient croître de 1,2 pour-cent par an et passer de 1,1 t/ha en 1992-94 à 1,4 t/ha en 2005. Cependant, il y aura des différences régionales importantes. En Afrique, la croissance de la production proviendra de l'augmentation des superficies cultivées et des rendements (même si une grande partie de l'expansion se fera sur des terres marginales). En Asie, les superficies cultivées devraient diminuer de 1,5 pour-cent par an, car le sorgho sera remplacé par d'autres cultures. Cependant, la production se maintiendra grâce à une augmentation des rendements.

Entre 1992-94 et 2005, l'utilisation du sorgho en alimentation humaine dans les pays en développement devrait passer de 26 millions de tonnes à plus de 30 millions de tonnes. Pendant cette période, la part asiatique de la consommation mondiale passera de 50 à 40 pour-cent, alors que la part africaine passera de 47 à 57 pour-cent, ce qui montre combien le sorgho est important pour la sécurité alimentaire. En Afrique, la consommation de sorgho devrait augmenter de près de 5 millions de tonnes, soit une augmentation de près de 40 pour-cent. Même cette forte augmentation sera inférieure à la croissance démographique. On observera une légère baisse de la consommation par habitant.

Tableau 9. - Taux de croissance prévus pour le sorgho, 1992-94 à 2005.



Superficie
(%/an)

Rendement
(%/an)

Production
(%/an)

Production par habitant
(%/an)

Utilisation

Totale
(%/an)

Alimentation humaine
(%/an)

Alimentation animale
(%/an)

Pays en développement

0,3

1,2

1,6

-0,3

1,8

1,2

3,2


Afrique

1,4

1,4

2,8

-0,2

2,9

2,8

5,9



Afrique du Nord

1,8

1,3

3,1

0,8

3,5

2,7

6,2



Afrique occidentale

1,3

1,5

2,8

-0,5

2,9

3,0

5,7



Afrique centrale

1,1

0,6

1,7

-1,4

1,6

1,6

4,7



Afrique orientale

1,2

1,5

2,7

-0,6

2,7

2,8

4,2



Afrique australe

2,4

0,1

2,5

-0,6

2,8

2,9

1,9


Asie

-1,5

1,6

0,0

-1,6

0,7

-0,7

5,7



Proche-Orient

2,6

1,2

3,9

1,2

2,8

2,9

2,8



Extrême-Orient

-1,7

1,6

-0,1

-1,7

0,4

-0,9

6,2


Amérique centrale et Caraïbes

1,3

0,8

2,1

0,2

1,0

1,2

1,6


Amérique du Sud

0,9

0,6

1,6

-0,1

2,5

0,6

2,6

Pays développés

0,0

0,4

0,4

-0,1

-0,7

1,3

-0,8

Monde

0,3

0,9

1,2

-0,4

1,2

1,2

1,3

Source: FAO/ICRISAT

En Afrique, les perspectives à moyen terme (et la contribution du sorgho à la sécurité alimentaire) dépendront de la capacité d'accroître la productivité de cette culture en surmontant ses diverses contraintes. En Asie, l'avenir du sorgho sera déterminé, pour une bonne part, par l'évolution des modèles de consommation, notamment le changement des préférences alimentaires, et leurs effets sur la demande des consommateurs et la rentabilité pour les producteurs. En Amérique latine, les facteurs-clés seront l'expansion des industries animales et la compétitivité du sorgho par rapport au maïs (la compétitivité de ces céréales est surtout influencée par des facteurs environnementaux, technologiques et politiques).

Dans les pays développés, la production de sorgho ne devrait que très peu augmenter entre 1992-94 et 2005 (Tableaux 8 et 9). Cette croissance proviendra presque exclusivement d'un gain de productivité. Les superficies devraient demeurer à leur niveau actuel, soit 5 millions d'hectares. Le déclin de l'utilisation du sorgho fourrager devrait se poursuivre, compte tenu de la vive concurrence du maïs et d'autres céréales secondaires, et de la stabilisation de la demande pour les produits de l'élevage et les aliments du bétail.

Les Etats-Unis comptent pour près de 90 pour-cent de la production des pays développés. Dans ce pays, la production devrait passer de 17,5 millions de tonnes en 1992-94 à environ 18 millions de tonnes en 2005. Cependant, deux facteurs pourraient entraîner une augmentation des superficies cultivées en sorgho:

· la baisse de la nappe phréatique dans les parties plus sèches des grandes plaines pourrait amener les fermiers à remplacer par le sorgho des cultures moins résistantes à la sécheresse;

· une nouvelle législation pourrait permettre au sorgho d'être plus concurrentiel sur les marchés.

Il est possible que ces facteurs et une augmentation modérée des rendements, permettent de freiner le long déclin de la production du sorgho dans les pays développés.

Commerce

En 2005, le commerce mondial du sorgho devrait récupérer un peu si la Chine importe du sorgho pour combler une partie de ses besoins en céréales secondaires8. Les pays en développement d'Extrême-Orient deviendront des importateurs nets d'environ 1 million de tonnes en 2005, alors qu'ils étaient des exportateurs nets (0,2 million de tonnes en 1992-94) (Tableau 8). Dans d'autres pays en développement, incluant ceux d'Amérique latine et Afrique, les volumes transiges ne devraient guère changer.

8 Source: Impact of the Uruguay Round on Agriculture, FAO, Rome 1995.

Le Mexique devrait maintenir sa position actuelle comme premier pays importateur de sorgho, avec un volume d'environ 4 millions de tonnes par an. Cependant, les importations mexicaines dépendront des politiques nationales et des effets de l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Dans le cadre de l'ALENA, il y aura une augmentation continue des contingents d'importation de maïs à un tarif douanier réduit. Les importations de sorgho dans le pays sont encore exemptées de douane, mais cet avantage s'érodera graduellement.

Les pays développés continueront de fournir la plus grande partie des exportations mondiales et combleront une partie importante des importations additionnelles prévues, surtout si la récupération partielle de la production aux Etats-Unis survient. Les importations du Japon, actuellement le deuxième plus important pays importateur, continueront de diminuer, car la tendance actuelle consiste à importer des produits animaux plutôt que des grains fourragers.

Résumé et conclusion

L'économie mondiale du sorgho englobe deux secteurs distincts: un secteur traditionnel d'agriculture de subsistance regroupant de petits exploitants, où la plus grande partie de la production est destinée à l'alimentation humaine (Afrique et Asie); et un secteur moderne, mécanisé, pratiqué à grande échelle avec un fort apport d'intrants, où la production est surtout destinée à l'alimentation animale (pays développés et Amérique latine). L'avenir de l'économie du sorgho dépendra de la contribution de cette culture à la sécurité alimentaire en Afrique, de la croissance des revenus et de la diminution de la pauvreté en Asie, ainsi que de l'efficacité d'utilisation de l'eau dans des régions des pays développés prédisposées à subir la sécheresse.

Dans de grandes parties de l'Afrique, le sorgho demeure une culture essentielle à la sécurité alimentaire des régions rurales. La plus grande partie de la récolte est consommée par les ménages paysans qui la produisent; une petite partie seulement entre sur le marché commercial dans ce continent. Plusieurs régions sont périodiquement confrontées à des déficits vivriers et la production doit augmenter pour assurer la sécurité alimentaire des familles qui y vivent. Dans une avenir prévisible, sous l'effet de la pression démographique, les superficies cultivées en sorgho continueront de s'étendre et entreront dans des écosystèmes encore plus arides et plus fragiles. Depuis le début des années 1980, les rendements moyens du sorgho ont chuté de 1 pour-cent par an. Il faudra renverser cette tendance pour que la production alimentaire puisse aller de pair avec la croissance démographique.

En Afrique, l'augmentation de la productivité du sorgho repose sur le développement et la vulgarisation de nouvelles technologies, ainsi que sur des réformes institutionnelles qui permettront d'améliorer le flux des intrants agricoles et de stimuler les ventes des produits céréaliers. Des changements technologiques ont déjà été amorcés par la diffusion de nouvelles variétés, surtout au Mali et au Burkina Faso. Les programmes d'amélioration du sorgho proposent un éventail de nouvelles variétés qui augmentent les rendements et procurent plus de flexibilité dans le choix des dates de semis. Cependant, dans la plupart des pays, la multiplication des semences et la distribution de ces nouvelles variétés sont insuffisantes. Les sociétés semencières privées sont réticentes à commercialiser des variétés de sorgho à pollinisation libre et celles du secteur public sont généralement déficientes. La rentabilité des investissements faits dans l'amélioration du sorgho dépend des solutions qui seront apportées à ces problèmes.

Le principal gain de productivité devra être trouvé dans les technologies qui permettront à la plante d'avoir un accès plus grand à l'eau et aux éléments nutritifs. Sur tout le continent africain, les cultures de sorgho reçoivent peu ou pas d'engrais. L'apport de fumier est limité, car la disponibilité de ce produit est faible et il est souvent alloué à d'autres cultures. Les paysans hésitent à adopter les technologies de conservation de l'eau, car ils les estiment trop laborieuses et d'une rentabilité incertaine. Il sera nécessaire d'intensifier la production, car moins de terres sont disponibles et la démographie augmente. Cependant, cela ne se réalisera que si les paysans croient que le rendement de l'investissement dans les nouvelles technologies (ex. fertilisation et conservation de l'eau) est comparable à celui obtenu ailleurs. Les chercheurs et les vulgarisateurs agricoles peuvent encourager les paysans à investir dans les nouvelles technologies, en leur offrant un éventail plus large d'options de gestion du sol et de l'eau qui s'intègre à différentes stratégies d'investissement et différents niveaux de tolérance au risque.

En Asie, il faudra continuer d'investir dans les technologies permettant d'améliorer la stabilité des rendements et la qualité du grain. Les stratégies de lutte intégrée contre les maladies et les insectes seront particulièrement importantes. Les investissements passés dans la résistance aux ravageurs devraient être bientôt rentabilisés par la diffusion, dans différentes parties de l'Asie, d'hybrides résistants à la mouche des pousses et à la cécidomyie. Mais, il faudra probablement prévoir des options complémentaires de lutte. On ne croit pas pouvoir résoudre, dans un avenir prévisible, le problème des moisissures des graines par la résistance de la plante-hôte; d'autres options de lutte devront être mises au point.

Le problème de la pression parasitaire (insectes et maladies) devra être résolu par des moyens de lutte chimique, biologique et agronomique. Le Striga est de plus en plus menaçant. Les sélectionneurs cherchent à solutionner ce problème par la mise au point de nouveaux cultivars résistants. Mais, des résultats plus prometteurs seront probablement obtenus du côté de la lutte agronomique. La solution la plus prometteuse est l'amélioration de la fertilité du sol, mais elle nécessite un investissement dans les engrais ou l'adoption d'un programme de rotation culturale incluant une légumineuse. Les chercheurs doivent rendre ces solutions plus économiques. Il sera aussi nécessaire d'investir dans la mise au point de stratégies de lutte intégrée contre les ravageurs les plus importants, notamment le foreur des tiges, la cécidomyie et les punaises des panicules.

En Afrique, les perspectives d'accroissement des grains du commerce du sorgho sont limitées par la variabilité des niveaux de production et le coût élevé de la collecte et du transport du grain. Le commerce sur de longues distances est plus prometteur dans les régions où la production est plus grande et plus stable. Dans les pays où le sorgho est la principale culture vivrière, des politiques, compatibles avec les engagements pris lors des Négociations d'Uruguay, demeurent nécessaires pour réduire les fluctuations de prix sur le marché intérieur. Dans les régions où le sorgho est une culture importante, un soutien politique est nécessaire pour favoriser le flux du sorgho à partir des régions excédentaires vers les régions déficitaires. Cela peut nécessiter un renforcement des systèmes d'information sur les marchés ou un encouragement à l'investissement dans le commerce des grains. Ces interventions sont plus que justifiées, car elles devraient améliorer sensiblement la sécurité alimentaire et compenser pour le coût des secours apportés lors des sécheresses.

Les perspectives d'une augmentation de l'utilisation du sorgho en alimentation animale dépendent grandement de la localisation des industries d'échange par rapport à l'aire de culture du sorgho, ainsi que de la vitesse et expansion de cette culture. Lorsque la demande en alimentation humaine est satisfaite, les perspectives de croissance pour l'alimentation animale sont bonnes. Malgré l'intérêt suscité par l'utilisation du sorgho dans les aliments transformés et les produits de boulangerie, l'utilisation industrielle du sorgho demeure limitée. Dans plusieurs pays africains, dont l'Afrique du Sud et le Nigeria, de petites quantités de sorgho sont utilisées pour la production de malt, de fécule et de farine. Cependant, les industries alimentaires ont tendance à être conservatrices dans l'expérimentation des produits de remplacement. Dans la plupart des pays, les perspectives d'utilisation industrielle du sorgho sont des plus modestes, car l'approvisionnement est incertain et la qualité du grain variable. Dans certains pays, la réglementation interdit aux industries d'utiliser le sorgho comme produit de remplacement pour une autre céréale (ex. au Mexique, il est interdit de remplacer le maïs par le sorgho dans la fabrication des tortillas).

En Asie, le sorgho demeure une importante culture de subsistance, mais dans un système de production plus commercial. La plus grande partie de la récolte est encore consommée à la ferme, mais une part de plus en plus grande du sorgho produit est acheminé vers les marchés villageois et urbains. Sur ce continent, l'avenir du sorgho dépend de sa compétitivité par rapport aux cultures de rente. Lorsque les besoins alimentaires du ménage sont satisfaits, on se tourne vers des cultures plus rentables. Dans des pays comme l'Inde, la tendance récente suggère que des terres traditionnellement cultivées en sorgho sont maintenant allouées à des cultures plus rentables, comme les légumineuses et les oléagineux. Ces cultures sont souvent plus rentables parce que des politiques ont réussi à stimuler leur production. Cette tendance devrait se maintenir aussi longtemps que les risques de déficits alimentaires resteront faibles.

Dans les systèmes asiatiques, plus commerciaux, les perspectives d'une augmentation de la productivité du sorgho sont très prometteuses. En Chine, les rendements du sorgho sont supérieurs à 4 t/ha. En Inde, le principal pays producteur dans cette région du monde, les rendements sont encore inférieurs à 1 t/ha. La croissance devrait se réaliser en remplaçant les variétés à pollinisation libre par des hybrides. De plus, les paysans doivent augmenter la disponibilité et l'efficacité des éléments nutritifs par un apport plus grand d'engrais inorganiques. L'efficacité des engrais peut être augmentée en utilisant mieux les oligoéléments.

La poursuite de ces gains de productivité est importante, car elle se traduira directement en une augmentation de revenus pour certaines des familles les plus pauvres du continent. L'amélioration de la productivité du sorgho est un moyen de diminuer la pauvreté.

L'augmentation des rendements devrait se traduire en une meilleure compétitivité du sorgho sur les marchés industriels asiatiques. En fonction du prix et de la qualité des produits concurrents, il semble possible d'augmenter l'utilisation du sorgho dans la production de fécule, de bière et de produits de boulangerie. Cependant, la croissance la plus forte proviendra probablement de l'industrie des aliments du bétail. En Asie, les revenus augmentent, tout comme la demande pour le lait, la viande et les autres produits animaux, et conséquemment les aliments du bétail. Dans certaines régions ayant connu une forte croissance, cette demande a été satisfaite par des importations de maïs et de sorgho. La production intérieure pourrait remplacer ces importations. Dans des pays producteurs importants, comme l'Inde, la demande sur le marché des aliments du bétail pourrait être forte non seulement pour le grain, mais aussi pour les résidus de récolte.

Dans les principaux pays producteurs d'aliments du bétail, la production de sorgho semble de plus en plus variable, suite aux effets des politiques agricoles, à la demande relative pour les aliments du bétail et la position concurrentielle d'autres céréales, notamment le maïs. Dans plusieurs pays en développement où l'industrie des aliments du bétail a connu forte croissance, la production de sorgho a beaucoup augmenté, surtout dans le secteur agricole moderne et mécanisé, où les rendements sont généralement supérieurs à 3 t/ha. Dans les pays développés, bien que les rendements aient augmenté, les superficies cultivées ont été variables. Aux Etats-Unis, le premier pays producteur au monde, la tendance à la baisse des superficies cultivées en sorgho pourrait se renverser si les politiques favorisant le maïs cessaient.

Un élément-clé de l'avenir du sorgho sera sa compétitivité par rapport au maïs sur le marché des céréales fourragères. Cela dépendra surtout de l'augmentation relative de la productivité de ces deux cultures. Les sélectionneurs du maïs cherchent à mettre au point des variétés plus tolérantes à la sécheresse, mais il est peu probable qu'on arrive à atteindre les niveaux de tolérance propres au sorgho. Compte tenu des contraintes grandissantes en eau et de l'augmentation de son coût, il est prévisible qu'on alloue au sorgho une part plus grande des terres à vocation fourragère. Cette tendance pourrait être accentuée par l'amélioration de l'efficacité d'utilisation des éléments nutritifs par la plante.

En somme, dans un avenir prévisible, le sorgho demeurera, en Afrique, une culture vivrière essentielle à la sécurité alimentaire. Des gains de productivité sont nécessaires pour résorber les déficits alimentaires dans la plupart des régions semi-arides et contrer les famines périodiques qui menacent dans quelques-unes d'entre elles. Un plus grand investissement est requis dans le développement et la vulgarisation des technologies. En Asie, le sorgho demeurera important pour l'alimentation des ménages et il sera éventuellement de plus en plus utilisé en alimentation animale. Les gains de productivité permettront d'augmenter les revenus des paysans, car ils pourront se tourner vers des cultures de rente ou orienter leur production de sorgho vers le marché commercial. La plus grande partie du sorgho est encore cultivée par des paysans pauvres pratiquant généralement une agriculture à petite échelle. Les investissements dans la recherche et la vulgarisation contribueront directement à diminuer la pauvreté. Dans la plupart des pays à revenus moyens ou élevés, le sorgho demeurera une céréale fourragère importante produite, sur une base commerciale, dans les régions chaudes, sèches et prédisposées à subir la sécheresse.


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