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Chapitre 12. Les impacts du changement global sur l'agriculture, la foresterie et les sols: Le programme du projet central de l'IGBP sur le changement global et les écosystèmes terrestres


12.1. Vue d'ensemble des structures du GCTE et de Focus 3
12.2. Les effets du changement global sur les principales cultures alimentaires (une composante de l'activité 3.1)
12.3. Les pâtures améliorées et les prairies (une composante de l'activité 3.1)
12.4. Les effets du changement global sur les systèmes de cultures a espèces multiples (activité 3.4)
12.5. Etudes expérimentales sur la relation entre la diversité et la complexité basées sur la plante et la durabilité des systèmes (tache 3.4.1)
12.6. La modélisation des systèmes agricoles complexes (tache 3.4.2)
12.7. Expérimentations a long terme et banques de données agricoles comme ressources pour la recherche sur le changement global (tache 3.4.3)
12.8. Les effets du changement global sur les forets gérées (activité 3.5)
12.9. Modifications chez les ennemis des cultures et les mauvaises herbes et dans les maladies (activité 3.2)
12.10. Effets du changement global sur les sols (activité 3.3)
12.11. Conclusion
Références

Bernard TINKER en collaboration avec Jan GOUDRIAAN, Paul TENG, Mike SWIFT, Sune LINDER, John INGRAM et Siebe VAN DE GEIJN

Département des Sciences des Plantes, Université d'Oxford, Royaume Uni

Le concept de changement global est maintenant bien compris et accepté dans une large mesure par les scientifiques, les organisations et le public informé. Il est aussi couramment accepté que les forces motrices des changements sont: (i) un changement dans la composition atmosphérique; (ii) le changement du climat (qui en découle); et (iii) le changement de l'usage des terres (guidé, à la fois, par les facteurs socio-économiques et le changement de climat). Un certain nombre de matières associées telles que l'ozone/UV-B, les pluies acides et d'autres formes de pollution sont parfois comprises mais ne sont pas centrales dans la discussion de ce chapitre. Parmi ces facteurs, le changement dans la composition atmosphérique est bien documenté et une prédiction relativement bonne de son évolution future peut être faite. Le changement de climat peut avoir lieu mais il est encore possible que ce qui est observé soit une fluctuation normale (IPCC, 1992). Le changement de l'usage des terres ne peut donc pas encore être associé au changement de climat dans le sens global mais il a lieu très rapidement à cause des forces motrices socio-économiques.

On s'accorde à dire que les impacts potentiels de ces trois facteurs sont énormes et pourraient bien être catastrophiques dans certains cas mais bénéfiques dans d'autres. Cependant, l'avancement et l'impact du changement de climat sont difficiles à prédire. La composition atmosphérique peut être contrôlée dans une mesure encore inconnue par l'action humaine et l'évolution du changement de l'usage des terres dépend des facteurs démographiques, sociaux et économiques qui ne peuvent pas être prédits avec précision sur des longues périodes. Les détails des impacts sont donc extrêmement incertains, surtout pour la pluie.

Le Programme International pour la Géosphère et la Biosphère (IGBP) fut mis en place sous les auspices du Conseil International des Unions Scientifiques (ICSU) pour mener des recherches dans ces matières. Parmi les projets centraux de l'IGBP, celui sur le Changement Global et les Écosystèmes

Terrestres (GCTE) (Steffen et al., 1992) est le plus évidemment et le plus directement impliqué avec la surface des terres. Dans le projet GCTE, Focus 3 a la responsabilité pour l'agriculture, la foresterie et les sols (Tableau 12.1). Le GCTE est responsable du travail sur les impacts du changement global et, aussi, sur les réactions qui contrôlent l'ampleur du changement global. Par exemple, la modification et l'étendue de différents types de végétation ont d'importantes implications dans le climat régional. Cependant, la responsabilité majeure du GCTE concerne les études d'impacts.

Tableau 12.1. Structure du projet GCTE (Changement Global et Ecosystèmes Terrestres) Focus 3

Activité 3.1:

Effets du Changement Global sur les systèmes agricoles clé

Tâche 3.1.1:

Essais sur les principales cultures, sur différents sols, avec changement de la composition atmosphérique et du climat.

Tâche 3.1.2:

Modélisation de la croissance des principales cultures sous des compositions atmosphériques et de climats modifiés

Tâche 3.1.3:

Impact du Changement Globale sur les pâturages et prairies, ainsi que sur la production animale associée

Activité 3.2:

Changement chez les ennemis des cultures, dans les maladies et chez les mauvaises herbes

Tâche 3.2.1:

Réseau de suivi global et séries de données sur les ennemis des cultures, maladies et mauvaises herbes

Tâche 3.2.2:

Distributions, dynamiques, abondance des ennemis des cultures et des maladies sous changement global

Tâche 3.2.3:

Distribution, dynamiques et abondance des mauvaises herbes sous changement global.

Activité 3.3:

Effets du changement global sur les sols

Tâche 3.3.1:

Impact de changement global sur la matière organique du sol

Tâche 3.3.2:

Dégradation des sols sous changement global

Tâche 3.3.3:

Changement global et la biologie du sol

Activité 3.4:

Effets du changement global sur les agro-systèmes à plusieurs espèces

Tâche 3.4.1

Etudes expérimentales sur les relations entre le nombre d'espèces de plantes et leur fonction dans les systèmes agricoles.

Tâche 3.4.2:

Modélisation des systèmes agricoles complexes

Tâche 3.4.3:

Réseau d'expérimentation agricole à long terme

Activité 3.5:

Effets du changement global sur les forêts gérées

Tâche 3.5.1:

Etudes expérimentales et d'observation des forêts gérées

Tâche 3.5.2:

Modélisation de l'impact du changement global sur les fonctions, la structure, et la capacité de production des forêts gérées

Au cours d'une série d'ateliers internationaux 'ouverts', le GCTE Focus 3 a considéré soigneusement quelle recherche pouvait ou devait être faite dans une situation où les prédictions climatiques sont aussi incertaines. Etant donné cette incertitude à l'échelle mondiale, sans parler de celle basée sur un site spécifique, les priorités de recherche ont visé à améliorer la compréhension des systèmes pour développer des modèles de prédiction plus robustes. A cause de l'échelle globale du problème, il fut essentiel de baser les programmes de recherche sur une collaboration internationale afin que les résultats aient une valeur générique. Les programmes nationaux s'occuperont par après des détails plus locaux. Par conséquent, le travail engagé devait être bien soigné et préparatoire afin de simplifier- et de clarifier les tâches à entreprendre au fur et à mesure qu'il apparaît que le changement de climat a lieu ainsi que l'ampleur et la direction des changements. C'est une raison pour laquelle l'analyse des systèmes et la préparation de meilleurs modèles prédictifs apparaissent si souvent dans nos programmes.

Il semble vraisemblable que lorsque le changement de climat devient apparent, il y aura une période de turbulence croissante en agriculture. Les fermiers et les conseillers sont au courant de la possibilité de variation du temps au cours d'une ou de quelques années comme dans le cas de beaucoup de sécheresses régionales ou locales. Les deux questions auxquelles ils doivent toujours répondre pour décider sont, premièrement, ces nouvelles conditions vont-elles durer jusqu'à l'année suivante? parce qu'ils doivent prendre des décisions immédiates sur le plan des cultures; et, en second lieu, ce changement peut-il durer plusieurs années? parce qu'ils risquent de devoir ajuster leur système d'exploitation agricole. Une tendance à long terme, peut-être avec une variabilité annuelle plus grande, est cependant une chose avec laquelle les fermiers ne sont pas habitués à se débrouiller.

Beaucoup dépend du degré de confiance des prédictions du climat local. Si le climat ne peut, en fait, pas être prédit en détail à l'échelle locale, la caractéristique essentielle doit être la flexibilité et la réponse rapide. Ceci peut impliquer un changement de cultivar ou d'une variable agronomique telle que la date de semis, une différente culture ou un changement vers un tout autre système d'agriculture, par ex., d'une terre cultivée à une prairie. Dans certains cas, cela peut signifier l'abandon de l'exploitation comme cela s'est passé si souvent pendant la sécheresse des années 1930 dans le Midwest américain (Worster, 1979). Si la prédictibilité du changement de climat sur base locale s'améliore, alors les fermiers pourront planifier plus rationnellement ces changements. En tous cas, le meilleur outil pour guider leur réponse est probablement un ensemble des meilleurs modèles prédictifs de cultures, testés pour des climats, des photopériodes et des types de sols très différents.

L'IGBP ne dispose pas de fonds spécifiques autres qu'une somme d'argent limitée à son fonctionnement administratif interne. Son travail poursuit deux directions principales: (i) le lancement de projets à collaboration majeure qui concernent directement des aspects spécifiques au Plan Opérationnel du GCTE (Steffen et al., 1992) et qui trouvent un financement national ou international; (ii) la coordination et le rassemblement de nombreux projets (habituellement financés au niveau national) qui ont des buts similaires. Cette dernière stratégie vise à construire une image globale en synthétisant ce qui est normalement une recherche basée localement. Le programme total ne peut donc pas être aussi fortement structuré et organisé que lorsqu'il y a un large flux de financement pour déterminer la recherche à faire. Nous sommes en quelque sorte guidés par la phrase de Lord Rutherford

'Nous n'avons pas d'argent, par conséquent nous devons penser!'. Cependant, ce raisonnement a produit un nombre important d'initiatives que nous expliquons ci-dessous, certaines déjà en oeuvre, d'autres encore au stade du planning.

12.1. Vue d'ensemble des structures du GCTE et de Focus 3

Le Projet Central GCTE comprend une très grande gamme de biomes et de disciplines scientifiques. Vu cette envergure, la phase antérieure de planning du GCTE a reconnu le besoin d'un programme hautement structure, à la fois, pour garantir une collaboration appropriée à l'échelle internationale et pour éviter que des domaines importants (géographiques ou thématiques) ne soient négligés ou dupliqués. Le GCTE a donc été conçu autour de quatre Focus majeurs: la fonction de l'écosystème; la structure et la composition de l'écosystème; l'impact du changement de climat sur l'agriculture, la foresterie et les sols; et la complexité écologique..

Le GCTE est de conception hiérarchique, chaque Focus est divisé en Activités qui chacune sont divisées en Tâches. Cet arrangement permet aux Tâches de même nature d'être agglomérées et de maximiser la collaboration nécessaire au niveau d'une Tâche. Cependant, il y a de nombreux cas où une matière scientifique particulière s'étend sur des Activités ou bien sur des Focus. Pour minimiser le double emploi des efforts tout en maximisant les avantages d'une étude interdisciplinaire, des aspects inter-Focus et/ou inter-Activités ont été identifiés et renforcés autant que possible. De bons exemples d'une telle collaboration sont, respectivement, la réponse du système à une hausse du CO2, et la composante des ennemis des cultures et des mauvaises herbes dans les Réseaux GCTE des cultures; ils sont tous deux décrits plus loin dans ce chapitre.

Au sein de Focus 3, quatre types majeurs de systèmes de production ont été identifiés: la monoculture, la prairie et les systèmes de pâturage, la culture de plusieurs espèces (y compris l'agroforesterie et les systèmes de rotation), et la foresterie. Ceux-ci ont été regroupés en trois Activités:

1. Les systèmes-clé de l'agriculture. Cette Activité comprend une sélection de monocultures alimentaires avec des pâturages et des prairies améliorées; l'accent dans cette Activité est mis sur le produit récoltable, c.-à-d., la partie récoltée de la culture ou de l'animal.

2. Les agro-écosystèmes à espèces multiples. Ils sont la norme dans la plus grande partie du monde qu'ils soient mélangés spatialement ou temporellement. La modélisation de systèmes agricoles spatialement complexes en est à ses débuts par rapport à la modélisation de la monoculture ou même de la rotation.

3. Les forêts gérées. Elles sont comprises dans un spectre depuis les plantations gérées intensivement jusqu'aux forêts plus naturelles qui sont coupées sélectivement ou utilisées à d'autres fins à implications socio-économiques.

Deux autres Activités transectent ces trois Activités majeures: l'une s'adresse aux effets globaux sur les ennemis des cultures, les maladies et les mauvaises herbes et l'autre à l'effet du changement global sur les sols. La liste complète des Activités de Focus 3 et de leurs Tâches associées est donnée dans le Tableau 12.1. Leurs raisons d'être et leurs plans de travail sont discutés ci-après. (Avec l'évolution du planning du GCTE, les nouvelles Activités ont suivi la numérotation séquentielle. Ceci évite une confusion possible due à la renumérotation des Activités et Tâches mais il faut souligner que le numéro d'ordre n'a rien à voir avec l'importance du sujet.)

Le besoin d'une collaboration au sein du GCTE a déjà été mis en évidence. Il y a cependant un même besoin d'établir une collaboration appropriée avec d'autres programmes internationaux qu'ils fassent partie d'autres Projets Centraux de l'IGBP (notamment IGAC¹, BAHC2 et LUCC3) ou d'initiatives étrangères à celles de l'IGBP; le rôle du GCTE est souvent celui de coordination internationale et de mise en place de collaboration en reliant de nouvelles initiatives et en synthétisant des résultats au sein d'un cadre commun approuvé internationalement. Cet aspect sera surtout nécessaire pour nouer avec la dimension humaine particulièrement appropriée pour traiter des écosystèmes d'où l'on tire une 'récolte'; l'impact du changement global sur l'agriculture et la foresterie est plus qu'un simple impact sur la biologie - c'est un impact sur l'alimentation, la richesse, le développement et les gens.

[¹International Global Atmospheric Chemistry project (Projet International de Chimie Atmosphérique Globale)]

[²Biospheric Aspects of the Hydrological Cycle project (Projet sur les Aspects Biosphériques du Cycle Hydrologique)]

[³Land Use and Land Cover Change project (Projet sur l'Usage des terres et le Changement de la Couverture du sol)]

12.2. Les effets du changement global sur les principales cultures alimentaires (une composante de l'activité 3.1)

Les changements anticipés des combinaisons globales des pluies et des températures avec la hausse établie du CO2 atmosphérique affecteront la production des cultures à travers le monde. Parmi les nombreuses cultures qui pourraient faire l'objet d'un programme de recherche dans le changement global, le GCTE en a sélectionné six pour des études initiales: le blé, le riz, les pommes de terre, le manioc, le maïs et les arachides. Les cultures furent choisies, à la fois, en fonction de leur importance dans la production alimentaire mondiale et comme représentatives d'une gamme diverse de 'types fonctionnels' de cultures. Le GCTE a introduit aussi récemment le sorgho, une culture majeure des régions marginales des tropiques.

Le GCTE lance une série de Réseaux de Cultures, un pour chacune de ces cultures. Ces réseaux mondiaux sont conçus pour promouvoir une recherche intégrée d'expérimentation et de modélisation en vue de déterminer l'effet interactif des facteurs du changement global sur ces espèces agronomiques-clé. Chacun sera conduit par un petit groupe de travail de modélisateurs, d'expérimentateurs et de spécialistes des ennemis et des maladies des cultures. Les Réseaux se construiront à partir de nombreuses expérimentations sur les cultures déjà en cours et sur les modèles déjà développés. Cependant, les modèles existants sont généralement construits et validés à partir de données d'une seule localité en sorte que l'identification d'approches de modélisation qui leur donnent une capacité générique est nécessaire. L'approche de réseaux mondiaux facilitera grandement la comparaison croisée des modèles avec des ensembles appropriés de données et tous deux, les modélisateurs et les expérimentateurs, sont essentiels au succès d'un Réseau donné. La recherche du GCTE conduira au développement de modèles de cultures qui sont robustes dans une large gamme de conditions environnementales modifiées.

Les Réseaux de Cultures sont conçus pour maximiser la compréhension de l'impact du changement global sur le système de culture. Cela signifie sur les cultures per se, et sur les ennemis des cultures, les mauvaises herbes et les sols (des aspects-clé qui sont discutés ailleurs dans ce chapitre)- c.-à-d., sur tout l'agro-écosystème. Cette approche doit considérer non seulement toutes les composantes du système mais aussi les effets interactifs des facteurs du changement global. Cette approche intégrée du GCTE est unique et le rend innovateur. Par ailleurs, en prenant l'approche systémique pour modéliser les cultures, ces Réseaux couvrent beaucoup d'aspects du GCTE et forment un forum pour la communauté du changement global afin d'entreprendre et de discuter une recherche de modélisation en collaboration.

Les Réseaux font aussi une forte promotion pour une collaboration internationale en expérimentation. Une des techniques expérimentales-clé qui intéresse aussi bien Focus 1 que Focus 2 est l'Enrichissement en CO2 à l'Air Libre (Free Air CO2 Enrichment: FACE); les systèmes FACE sont maintenant établis dans les cultures (blé et coton) et les pâturages. (Des problèmes méthodologiques sont rencontrés quand on utilise la technique dans des systèmes de grandes tailles, c.-à-d,, les forêts, mais comme cette technique est si valable, ceux-ci sont attaqués par divers groupes autour du monde.) La valeur réelle et unique de FACE est que le microclimat du site n'est pas perturbé; de plus, les ennemis et les maladies des cultures ne sont ni exclus du, ni piégés dans le système. Un autre avantage important est sa taille; avec une superficie de 300-400 m2, les sous-traitements (par ex., l'azote ou l'eau) peuvent être incorporés et, même ainsi, l'expérience n'est pas sérieusement perturbée par un échantillonnage destructif de sol et de la végétation de tous les placeaux. La question de savoir si les chambres à toit ouvrant (Open-Top Chambers: OTCs) peuvent être 'calibrées' par rapport à FACE est importante vu que les OTCs sont largement utilisées. Le problème est actuellement étudié par les collaborateurs du GCTE.

Les Réseaux de Cultures du GCTE débutèrent avec le blé parce que les modèles sont déjà bien développés et que sa physiologie est bien comprise. Un atelier international (Ingram, 1992) a lancé le Réseau Blé du GCTE et a entamé l'évaluation des modèles actuels de production du blé en utilisant un ensemble minimum de paramètres standard d'initialisation de modèles. Un atelier suivant (Goudriaan et al., 1993) a entrepris une analyse très fine des modèles de production du blé du Réseau en utilisant un petit nombre d'ensembles convenus de données. Un résumé de la conception et des résultats de ce récent atelier est donné plus bas pour illustrer l'efficacité de travailler en collaboration de façon vraiment globale.

L'atelier (et les exercices préparatoires) a couvert trois domaines principaux et s'est basé sur une série de données qui ont circulé à l'avance:

12.2.1. L'ANALYSE DE SENSIBILITE TRES FINE (EXERCICE 1)

Cet exercice requiert des modèles requis pour traiter les données de base commune mais avec des températures artificiellement perturbées (de -6°C à +6°C par incrément de 1°C) et sept niveaux de concentration en CO2. Deux ensembles de 30 ans de données météorologiques moyennes furent distribués aux modélisateurs avant l'atelier, un ensemble pour la saison de croissance d'un blé d'hiver (données européennes), un autre pour le blé de printemps (données d'Amérique du nord). Les modélisateurs furent sollicités pour caler les coefficients génétiques qui résultaient des dates de développement phénologique standard pour la situation présente (compensation zéro°C). Les données de sortie comprenaient entre autres, le développement phénologique, l'indice foliaire et le rendement en grain.

Contrairement aux attentes, la variance des résultats des modèles fut grande même si les dates d'émergence, d'anthèse et de maturité avaient été prescrites (voir Figure 12.1). Cependant, les modèles contiennent beaucoup de boucles, ce qui rend difficile la recherche des causes de déviation. (Un bon exemple est l'itinéraire de la boucle principale pendant la croissance de la surface foliaire- une fois surestimée au début de sa croissance, la valeur élevée de la surface foliaire aura tendance à s'amplifier malgré une vitesse plus grande de la photosynthèse.) Pour cette raison, il fut décidé de 'conformer' les modèles en leur imposant à tous la même évolution de l'indice foliaire au cours du temps. Cette manoeuvre artificielle a permis d'exclure des modèles des différences morphologiques (surface foliaire spécifique, formation de surface foliaire, tallage, apparition des feuilles), ne gardant que des différences fonctionnelles au modèle (interception lumineuse, photosynthèse et respiration). Les résultats de cet exercice de forcement sont présentés à la Figure 12.2 où l'on peut voir que la variance ne fut que marginalement réduite.

Les modèles compris dans cet exercice diffèrent fort en complexité, depuis l'un d'eux avec seulement 90 lignes de code en GWBASIC jusqu'à un autre nécessitant un ordinateur Cray. Il n'y avait apparemment pas de relation entre les valeurs de sortie d'un modèle et sa complexité.

Figure 12.1. Graphique du rendement simulé en fonction de la biomasse simulée pour le site d'Amérique du Nord et pour le site en Europe

Figure 12.2. Graphique du rendement simulé, comme dans la figure 12.1, mais avec le même déroulement du temps fixé dans tous les modèles pour l'indice foliaire

12.2.2. LES ENSEMBLES DE DONNEES REELLES ET L'EVALUATION DES MODELES (EXERCICE 2)

Avec les 30 ans de données météorologiques moyennes pour l'Exercice 1, les modélisateurs ont reçu les données météorologiques, de sols, de gestion des cultures et de phénologie pour des cultures sur des sites européens (blé d'hiver) et nord américains (blé de printemps). On leur a demandé de sortir leurs données pour les cas fournis, y compris le rendement en grain. Cet exercice était conçu pour mettre en lumière les points forts et les limitations de chaque modèle et on n'avait pas l'intention d'en faire une 'course hippique'; les modèles diffèrent par leur objectif et par leur conception, par leur échelle opérationnelle et par leurs aspects géographiques, climatiques et phénologiques.

Les résultats complets des Exercices 1 et 2 seront rapportés et discutés dans deux articles scientifiques à auteurs multiples. L'un discutera l'analyse de sensibilité et l'autre analysera les antécédents précis des différences entre les modèles. Il faut souligner, cependant, que l'atelier n'avait pas pour but de dire quel est le modèle qui fait le meilleur travail; bien plutôt, il se voulait d'essayer de mieux comprendre pourquoi les modèles se comportent comme ils l'ont fait et quelles sont les composantes critiques des modèles.

12.2.3. LA COMBINAISON DES ENSEMBLES DE DONNEES DU RESEAU AVEC LES MODELES DU RESEAU (EXERCICE 3)

Cet exercice visait à promouvoir le dialogue données/modèles du Réseau en utilisant les divers ensembles de données expérimentales du Réseau pour plus de validation et de comparaison des modèles. La méthodologie nécessaire pour faire tourner chaque modèle avec chaque ensemble de données disponibles fut établie. Le but de l'exercice était de planter le décor des efforts à fournir au sein du Réseau afin d'identifier les combinaisons d'un modèle et d'un ensemble de données les plus vraisemblables pour améliorer la compréhension et développer l'intérêt de questions de recherche.

L'approche de cette série d'ateliers fut prouvée être un mode de travail très productif et les réseaux pour les autres cultures seront conçus de la même manière. En plus des ateliers, les activités du Réseau comprennent la distribution d'ensembles de métadonnées rassemblées à tous les collaborateurs officiels et autres parties intéressées. Ces métadonnées décrivent la nature des ensembles de données et des modèles du Réseau; elles n'énumèrent pas les données ou le code des modèles per se. La compilation de ces métadonnées est publiée dans le Rapport No.2 du GCTE et sera régulièrement mise à jour. Les collaborateurs officiels du Réseau partagent les données et le code des modèles actuels suivant un code de bonne conduite convenu; le format de données du IBSNAT (International Benchmark Sites Network for Agrotechnology Transfer) fut choisi et est maintenant le standard du GCTE pour tous les Réseaux de Cultures du GCTE quoique la conversion de tous les ensembles de données à ce standard ne soit pas encore complète; un poste d'agent des Réseaux du GCTE a été financé par le Programme Hollandais du Changement de Climat (NOP) pour aider à cette tâche importante.

Le Réseau Riz du GCTE fut lancé au cours d'un atelier international tenu à l'IRRI en mars 1994 (Ingram, 1994a) et les activités du réseau furent planifiées en détail lors d'un atelier cofinancé par la FAO en 1995. Des Réseaux similaires pour la pomme de terre et le manioc sont en phase avancée de planning et la liste initiale des membres du Réseau fut établie en 1995.

Ces Réseaux du GCTE représentent une étape majeure de collaboration pour la science agronomique internationale. Ils valorisent les investissements importants qui sont faits dans de nombreux pays en modélisation des cultures. Ils dynamisent à la fois le contenu et la participation scientifiques et sont tout à fait ouverts à d'autres scientifiques.

12.3. Les pâtures améliorées et les prairies (une composante de l'activité 3.1)

Les incertitudes qui entourent l'effet possible du changement global sur la production alimentaire ne sont pas limitées aux cultures. Par conséquent, pour compléter le travail de Focus 3 dans ce domaine, une Tâche importante de l'Activité 3.1 (Tâche 3.1.3) traite de l'impact potentiel du changement global sur la production du bétail. Le changement global aura des conséquences lointaines pour la production laitière, de viande et de laine, principalement à travers les impacts sur la productivité de l'herbe et des prairies; on ne s'attend pas à ce que les impacts directs sur l'animal lui-même soient grands. Ce concept étaie le plan de travail du GCTE dans ce domaine ainsi qu'il apparaît dans l'intitulé de la Tâche: 'Pour prédire les effets du changement global sur la composition et la production des pâtures et des prairies ainsi que les effets qui s'en suivent sur la production du bétail'.

Les prés et les prairies forment un continuum. A une extrémité on trouve les pâturés, c.-à-d., des superficies où la végétation d'origine a été enlevée et le pré est entretenu par le pâturage et/ou la fauche périodiques ainsi que des applications d'engrais et/ou d'herbicides. Cette définition comprend évidemment les prés gérés intensivement (par ex. aux Pays-Bas) mais elle inclut aussi les superficies de prés semés qui sont utilisés moins intensivement pour la production de bétail. Les pâtures améliorées couvrent donc une gamme allant de simples monocultures à des mélanges complexes d'espèces.

A l'autre extrémité du continuum se trouvent les prairies. Elles existent dans des régions où les facteurs soit du climat soit du sol sont si limités que la production primaire intensive n'est pas viable. Alors que les prairies peuvent contenir des espèces introduites, cette extrémité du continuum est caractérisée par des systèmes où (i) la pâture a une composante substantielle d'espèces natives; (ii) la pâture est composée de plus de trois ou quatre espèces; et (iii) il y a peu ou pas de supplément d'engrais ou d'irrigation.

Les pâtures améliorées sont invariablement limitées à des opérations commerciales alors que les prairies sont utilisées par des fermiers pour le commerce et l'autoconsommation. Les modèles de productivité végétale et de croissance animale seront formulés pour chaque type et usage. Finalement, un modèle générique sera développé qui pourrait être appliqué aux types intermédiaires.

Les composantes de la pâture améliorée et des prairies se partagent deux objectifs généraux. Ce sont: (i) prédire les effets des modifications de la composition atmosphérique et du climat sur la production de fourrage et l'impact consécutif sur la production de bétail à l'échelle de la parcelle et du paysage; et (ii) prédire les effets en retour vers le système atmosphère-climat des modifications de gestion induites par les changements de la composition atmosphérique et du climat.

En plus de ceux-ci, les pâtures améliorées et les prairies ont, bien sûr, des objectifs individuels. Les systèmes avec intervention significative de gestion via, par exemple, le fourrage et l'amélioration du germoplasme animal ou l'irrigation fourniront des opportunités d'adaptation pour rencontrer les conditions environnementales changeantes; une recherche est nécessaire afin de préparer des stratégies adaptatives pour s'en sortir avec les effets interactifs des changements dans de telles conditions. Par ailleurs, dans des systèmes plus extensifs (où l'adaptation est difficile à mettre en oeuvre à cause de l'échelle opérationnelle), la stratégie de recherche consiste à améliorer la capacité de prédire les effets des modifications interactives des forces intrinsèques et extrinsèques.

L'approche du GCTE est de construire sur des points communs entre les types de systèmes plutôt que de mettre leurs différences en exergue. Ceci contribue à lier d'autres domaines du GCTE intéressés, par exemple, par les prairies - Focus 2 inclut une Activité qui traite de la modélisation à l'échelle de la parcelle, un aspect important dans le développement de systèmes d'aide à la décision pour les gestionnaires de prairies.

Le GCTE joue aussi un rôle important dans le lien entre les sciences naturelles et sociales dans ce domaine; la composante des prairies de cette Tâche est actuellement en train de nouer des liens de Focus 3 avec le Programme des Dimensions Humaines du changement environnemental global (HDP: Human Dimensions Programme) quoiqu'elle deviendra aussi un aspect majeur du programme de recherche en développement de l'Activité 3.4 'Effets du changement global sur les agro-écosystèmes à espèces multiples' (voir plus loin). Le point de contact essentiel est le Projet Central conjoint proposé par le IGBP-HDP, Usage des Terres/Changement du Couvert (LUCC). La Tâche ultime vise à prédire les interactions entre les facteurs biophysiques moteurs et les facteurs extrinsèques moteurs, le point central de LUCC. La compréhension socio-économique de systèmes contrastants, sur une base de région à région, aura une valeur régionale immédiate pour la planification de l'usage des terres. (Plus de détails à propos de ce programme de recherche du GCTE peuvent être trouvés dans l'article de Stafford Smith et Campbell, 1994.)

12.4. Les effets du changement global sur les systèmes de cultures a espèces multiples (activité 3.4)

Le Focus 3 du GCTE a débuté sa phase opérationnelle par une recherche sur les systèmes monoculturaux et un progrès substantiel a été rapporté ci-dessus. Maintenant, le GCTE dirige son attention sur les systèmes culturaux conçus pour des mélanges d'espèces et le planning détaillé est bien en cours après son lancement au cours d'un atelier qui s'est tenu au Kenya en 1994.

D'une certaine manière, le changement global aura un impact sur tous les systèmes agricoles. Cependant, les effets du changement global méritent d'être observés, d'abord, dans les agro-écosystèmes à espèces multiples parce que l'avantage compétitif des différentes espèces peut changer dans le système. L'effet d'ensemble résultant peut être plus prononcé que dans les systèmes monoculturaux. Il y a aussi deux autres solides raisons pour faire ressortir les systèmes agricoles à espèces multiples dans un programme de recherche sur le changement global. La première est socio-économique; la plus grande partie de la population mondiale dépend de tels systèmes pour son alimentation et ses moyens d'existence. La seconde est écologique; l'étude de tels systèmes permet de découvrir la relation entre la complexité, la stabilité et la diversité d'un écosystème et sa capacité à répondre au changement.

Outre les systèmes mélangés spatialement, l'agriculture mélangée temporellement (c.-à-d., la rotation) offre de nombreux avantages bien établis et elle a été depuis longtemps une des principales techniques de gestion agricole. Comme avec d'autres aspects de cette composante de recherche 'multi-espèces' du GCTE, les conséquences du changement global sur les systèmes de rotation seront entrepris en collaboration avec les autres Focus, Activités et Tâches du GCTE et avec les autres programmes internationaux. Les effets résiduels sur la dynamique de la matière organique du sol et des nutriments ou sur la gestion des ennemis des cultures, des maladies et des mauvaises herbes sont des exemples clairs qui exigent un maximum d'e collaboration.

Les classifications standard reconnaissent environ six ou huit types majeurs de systèmes de culture. Ils varient fortement dans la diversité des composantes végétales et animales depuis la culture itinérante et récurrente basée sur la jachère, en passant par la culture permanente mixte et la rotation, aux monocultures annuelles et pérennes. De même, la production de bétail varie du nomadisme pastoral utilisant les savanes naturelles à l'élevage intensif sur des prairies à espèces contrôlées. De plus, le bétail et la culture peuvent aussi être combinés dans une gamme de systèmes d'exploitation agricole mixte (Frissel, 1978; Grigg, 1974; Ruthenbag, 1980).

Les progrès majeurs de la suffisance mondiale dans la production alimentaire sont venus des monocultures intensives de variétés améliorées d'une petite gamme de céréales. Ces cultures sont souvent en rotation et reçoivent de fortes doses d'engrais fabriqués et une gestion du sol, en eau, et contre les ennemis des cultures et les mauvaises herbes, subsidiée au point de vue énergétique. Ce type d'agriculture est caractéristique des régions industrialisées de l'hémisphère nord et a aussi eu un impact considérable dans de nombreux pays en développement sous le nom de 'Révolution Verte'. Cependant, pour leur nourriture et leur revenu, la plupart des fermiers du monde dépendent encore des systèmes à espèces multiples d'un type ou l'autre. En comparaison avec les monocultures, ces systèmes sont moins étudiés et plus complexes à modéliser, et il y a plus d'options à considérer. Leur comportement et leur productivité lors d'un changement global est donc moins facile à prédire.

Néanmoins, au cours des dernières années, des systèmes de culture de complexité 'intermédiaire' tels que ceux basés sur l'interculture de quelques espèces de plantes y compris les arbres, ont remplacé les monocultures intensives comme cible d'une bonne part de la recherche en agriculture moderne, surtout en régions tropicales. Ce changement de stratégie est largement basé sur l'hypothèse que les systèmes à espèces multiples conviennent mieux et protègent mieux l'environnement que les monocultures. Une recherche en interculture (par ex., Francis, 1986) ou sur la culture en corridor (par ex., Kang et al., 1990) a montré que ces systèmes à deux ou trois espèces peuvent faire gagner des revenus comparables ou même plus élevés que les monocultures intensives quoique les résultats ne soient pas décisifs. On a aussi beaucoup prétendu que les systèmes interculturaux ont une stabilité de rendement plus grande (par ex., Rao et Wiley, 1980) malgré que Vandermeer et Schuitz (1990) n'ont pas trouvé de justification théorique à ce qu'il en soit nécessairement ainsi.

L'Activité du GCTE qui traite des systèmes à espèces multiples sous changement global va élaborer autant que possible sur cette recherche existante. Cependant, il y a un net besoin pour accroître la compréhension de base des interactions entre les cultures mélangées spatialement et temporellement. Evidemment, cela bénéficiera grandement, à court terme, à l'amélioration des rendements et à la stabilité des rendements et, à long terme, aux études sur le changement de climat.

L'Activité a trois composantes principales qu'il faut gérer individuellement mais qui sont des Tâches dépendantes l'une de l'autre:

12.5. Etudes expérimentales sur la relation entre la diversité et la complexité basées sur la plante et la durabilité des systèmes (tache 3.4.1)

Comme souligné ci-dessus, il y a beaucoup d'évidences, peu concluantes cependant, pour dire que les systèmes de culture à plus d'une espèce de plante (par ex., l'interculture ou l'agro-foresterie) ont, à la fois, une plus grande productivité et une plus forte résistance à la perturbation que les systèmes monoculturaux. Ces effets peuvent être renforcés quand le système présente une complexité structurelle et chimique ainsi qu'une diversité d'espèces. Ceci serait dû, par exemple, aux plantes qui forment des microenvironnements complexes avec des couches multiples de couverts végétaux et qui procurent une large gamme de produits allèlochimiques et d'autres substances qui influencent la fonction des autres membres de la communauté. La recherche évaluera rigoureusement l'évidence de cette hypothèse, particulièrement dans le contexte du changement global. Le programme de recherche se développera en étroite collaboration avec le Focus 4 du GCTE, 'Complexité Ecologique'.

L'influence du système végétal sur les sous-systèmes herbivores et décomposeurs sera une composante importante des études. La communauté dans le sol est essentielle au maintien de la fonction de l'écosystème à travers son rôle dans la fertilité du sol au moyen de la régulation des cycles des nutriments, du contrôle de la dynamique de la matière organique et de la modification de la structure du sol. Ceci est très important pour les systèmes agricoles où le sous-système du sol est constamment dérangé par les pratiques agricoles. L'accent sera mis dans cette recherche sur la productivité du système et la durabilité des groupes-clé de la faune et de la microflore tels que les vers de terre, les termites, les nématodes, les fixateurs d'azote et les mycorhizes. C'est un domaine où une meilleure compréhension du système sera surtout avantageuse pour améliorer la productivité actuelle et réduire la variation des rendements; il est aussi le préalable essentiel pour construire de meilleurs modèles prédictifs à la mesure du changement global.

12.6. La modélisation des systèmes agricoles complexes (tache 3.4.2)

L'échelle de temps du changement propre à la durabilité et au changement global est beaucoup plus longue que celle d'un programme expérimental réaliste et s'étend aussi au delà de l'horizon habituel de planning de l'agriculteur. Comme mentionné ailleurs dans ce chapitre, la manière la plus rigoureuse pour extrapoler les prédictions du changement au delà du court terme est celle des modèles de simulation. Alors qu'il y a, à l'heure actuelle, une série comparativement efficace (mais de toute façon pas adéquate) de tels modèles pour des cultures individuelles comme le blé, le maïs ou le riz, la modélisation de systèmes plus complexes tels que les intercultures et l'agroforesterie (avec des effets de compétition et de synergie) en est encore à ses débuts. Un effort interactif entre les modélisateurs qui s'attaqueront aux problèmes de simulation des systèmes complexes de cultures permettra une avance plus rapide que s'ils travaillaient isolément. On gagnerait encore plus de force en nouant des liens entre les activités de modélisation écologique et celles des monocultures que promeut aussi le GCTE.

Une autre dimension des activités de modélisation vient du besoin d'évaluer les implications économiques et sociales des effets sur la performance de l'agro-écosystème, qui incluent les modifications dans les pratiques agricoles résultant de l'impact du changement global. Les scientifiques du GCTE dans l'Activité 3.4 collaboreront avec les sociologues du Programme des Dimensions Humaines et le CGIAR pour développer des modèles économico-écologiques et/ou des systèmes d'aide à la décision qui lient les dimensions biologiques et socio-économiques de modification de l'agroécosystème.

12.7. Expérimentations a long terme et banques de données agricoles comme ressources pour la recherche sur le changement global (tache 3.4.3)

La seule voie non équivoque pour déterminer la relation entre les facteurs externes et la réponse dans le temps du système est celle des expérimentations à long terme. Les données d'une telle surveillance peuvent aussi être utilisées pour valider les prédictions des modèles de simulation. Une large gamme de telles expériences fut initiée en diverses périodes de ce siècle, nombre d'entre elles dans les pays en développement. Seule une minorité est encore en cours et les données de beaucoup d'entre elles n'ont jamais été publiées dans la littérature publique. Le besoin pour une publication des données, une réhabilitation d'expérimentations choisies et l'établissement d'expérimentations sur de nouveaux sites fut discuté pendant une conférence à la Station Expérimentale de Rothamsted, GB (Swift et al., 1995). Cette discussion fournit une bonne base pour développer cette Tâche; celle-ci collaborera avec la Tâche qui traite de la matière organique du sol (voir ci-dessous) et pour laquelle les ensembles de données à long terme sont cruciaux pour le développement des modèles.

12.8. Les effets du changement global sur les forets gérées (activité 3.5)

Les forêts couvrent plus des deux tiers de la surface des terres du monde et sont divisées presque pour moitié entre les régions tempérées et tropicales.

Alors que l'intensité de gestion et d'utilisation des forêts varie au sein des régions et entre elles, la forêt et les terrains boisés constituent la plus grande composante d'usage présent et futur des terres en terme de superficie et jouent un rôle important dans l'équilibre global du carbone. Le changement global a, et continuera à avoir, un impact majeur sur le couvert forestier.

D'un point de vue socio-économique, l'objectif de préserver à long terme un approvisionnement pour les industries du bois et de la pulpe est un impératif évident. Cependant, la production de biomasse dans les écosystèmes forestiers moins intensivement gérés peut être aussi importante puisqu'elle procure du combustible, du fourrage et d'autres nécessités pour une grande partie de la population du monde. Dès lors, l'expression 'forêts gérées' est utilisée ici dans un sens large qui inclut les écosystèmes forestiers gérés et utilisés à d'autres fins que la production industrielle. Les forêts gérées couvrent donc la gamme des plantations depuis celles où la gestion comprend toutes les activités sylviculturales en passant par les forêts gérées (au sens réel du mot) pour la production de bois jusqu'aux forêts naturelles exploitées simplement pour le bois d'oeuvre et autres produits.

Les forêts sont des communautés de longue existence; le changement rapide des concentrations en CO2 atmosphérique et la hausse des températures associées au changement de climat vont probablement avoir des impacts importants non seulement sur les forêts futures mais aussi sur celles déjà sur pied. Les modifications actuelles de la couverture forestière entraînées par les moteurs socio-économiques du changement global seront confondus avec celles de ces moteurs biophysiques. Pour fournir l'information nécessaire à la prédiction des effets interactifs du changement global sur les forêts ainsi que la connaissance requise pour fournir la base des programmes appropriés de gestion, nous avons besoin de programmes de recherche forestière orientés et coordonnés à travers le monde.

12.8.1. LA RECHERCHE SUR LES ECOSYSTEMES FORESTIERS AU SEIN DU GCTE

Des études sur les écosystèmes forestiers ont lieu dans tous les quatre Focus du GCTE, dans les autres Projets Centraux de l'IGBP et dans beaucoup d'autres programmes internationaux et nationaux de recherche. Cependant, il y a une Activité spécialement désignée dans le Focus 3 pour étudier les 'Impacts du changement global sur les forêts gérées'. Le but premier de cette Activité est de comprendre et d'évaluer les effets potentiels du changement global sur la structure future, la production de biomasse et le rendement des forêts gérées, et donc, d'identifier des stratégies de gestion des ressources pour une foresterie soutenable dans des conditions climatiques modifiées. Ceci requerra la prédiction, à la fois, à court terme des réponses de la forêt à un climat altéré, à une perturbation et aux pratiques sylviculturales ainsi que des effets sur une productivité et une biodiversité du site soutenables à long terme; en clair, une coopération étroite entre tous les Focus du GCTE est nécessaire. Le rôle des forêts gérées comme puits ou sources de carbone devrait être évalué aussi bien que la possibilité de piéger l'augmentation de carbone dans les écosystèmes forestiers par des pratiques sylviculturales. Cet accent à long terme requerra des avancées conceptuelles capables de caractériser la durabilité des écosystèmes et leur résistance à répondre aux altérations des flux d'intrants, de perte et de recyclage du carbone, d'eau et de nutriments minéraux.

Le Plan d'Exécution des Forêts Gérées du GCTE a été publié récemment en collaboration avec l'Union Internationale des Organisations de Recherche Forestière (IUFRO) (Landsberg et al., 1995). Ce document qui vient soutenir le Plan Opérationnel du GCTE procure un cadre de planning et de mise en oeuvre de la recherche scientifique concernées par les forêts. L'accent a été mis pour garantir la cohérence en termes de concepts, de procédures et d'enregistrement de données. Ceux-ci donneront des résultats qui pourront être comparés et utilisés pour tester et valider les modèles ainsi qu'évaluer les impacts du changement global sur la croissance et la production des forêts.

La stratégie de recherche qui sous-tend ce plan est d'échantillonner une gamme représentative de forêts types poussant sous différentes conditions dans différentes parties du monde. Dans celles-ci, l'établissement d'expérimentations identiques ou très similaires permettra l'évaluation des variations de, ou des contraintes sur, la productivité et la diversité biologique des forets. Des reseaux analogues à ceux coordonnés dans les Activités de Focus 3 (par ex., le Réseau du Blé discuté plus haut) seront installés. Au fur et à mesure que plus de projets ayant des buts suffisamment semblables ou utilisant des techniques similaires, 'se présentent', ils seront encouragés à rejoindre le réseau le plus approprié ou une autre structure du GCTE. Ceci maximisera l'effort de collaboration et aidera à la synthèse des résultats mondiaux.

Pour garantir un progrès rapide dans l'information et la compréhension, un système convenu d'enregistrement des données primaires standardisées sera développé; il sera disponible pour les échanges et les comparaisons. L'utilisation des Systèmes d'Informations Géographiques (SIG) avec des modèles est fortement recommandée pour traiter l'hétérogénéité de larges superficies de forêts et comme cadre pour l'enregistrement et l'analyse d'informations télédétectées.

Cette Activité est conçue autour de deux Tâches très proches, l'une traitant des études expérimentales et d'observation (Tâche 3.5.1) et l'autre de la modélisation (Tâche 3.5.2). Alors que cette dernière Tâche ne sera pas spécifique à la géographie, la première sera divisée entre les régions boréales et tempérées et celles tropicales et semi-arides. Une Tâche supplémentaire concernant spécifiquement la plantation des forêts est considérée et devra sans doute être divisée en composantes tropicales et tempérées.

12.8.2. SITES ET TRANSECTS D'ETUDE

Pour évaluer l'impact des conditions environnementales, et donc le changement global, sur la croissance et la performance des forêts, il est important que les sites d'étude soient localisés (i) dans des régions où l'on s'attend à un changement significatif; (ii) où il y a une raison de croire que les forêts sont probablement susceptibles de se modifier; et (iii) où les écosystèmes forestiers sont économiquement importants. Sur base de ces critères, les systèmes suivants ont reçu une priorité initiale:

· les forêts boréales qui contiennent une grande partie du bois tendre disponible dans le monde et où il est prédit un réchauffement considérable malgré que les réponses physiologiques à la hausse du CO2 puissent être limitées par une température basse et des sols infertiles;

· dans l'hémisphère nord tempérée, les forêts de conifères et les forêts mixtes de conifères et de feuillus qui constituent la base de presque toute l'industrie actuelle du bois et de la pulpe;

· les plantations de bois tendre et d'eucalyptus des régions semi-arides et subtropicales où les changements dans les précipitations peuvent avoir des effets considérables;

· les forets tropicales où les conditions de chaleur peuvent provoquer un grand effet fertilisant du CO2.

12.8.3. TRAITEMENTS EXPERIMENTAUX, MESURES ET OBSERVATIONS

Des modèles appropriés devraient servir de cadre à l'organisation et à la mise au point des mesures et des expériences. Par conséquent, la modélisation devrait être faite a priori plutôt qu'a posteriori. Le premier rôle des modèles n'est pas d'intégrer les observations faites dans les expérimentations; les paramètres peuvent être généralement ajustés pour obtenir un bon 'calage' avec l'observation sans apprendre sur le système ou le modèle. Les modèles sont aussi le seul moyen d'évaluer les conséquences probables des diverses actions de gestion, surtout celles en relation avec les incertitudes issues du changement global, Il faut noter que les modèles régressifs (qui constituent la plupart des modèles développés pour la recherche et la gestion forestière traditionnelle) sont incapables de prédire les effets des conditions changeantes du climat sur la croissance. Ils sont dérivés à partir d'observations historiques sans aucune base mécanistique. Il y a donc une nécessité urgente à lier des modèles basés sur les processus aux modèles de population d'arbres et de fournir ainsi des estimations de produit récoltable qui est l'information dont les gestionnaires forestiers ont besoin.

Le travail expérimental devrait viser non seulement à fournir des informations empiriques mais aussi à comprendre les mécanismes physiologiques de contrôle et les processus-clé qui sous-tendent les réponses des forêts aux facteurs environnementaux à deux niveaux, celui de l'arbre et celui du peuplement. A chaque site expérimental ou d'observation, l'exigence minimum est une série de mesures et d'observations de base (Niveau I) faites de préférence pendant une longue période. Là où existent des ressources, ces observations de base devraient être complétées par des études plus détaillées sur la dynamique de la communauté (Niveau II) et, sur certains sites, par des mesures des processus physiologiques qui gouvernent la croissance et la productivité forestière (Niveau III).

Le Niveau I inclut les mesures normales qui peuvent être faites avec un minimum d'infrastructure mais qui donnent une information essentielle de base sur l'état des forêts et leurs modes de croissance à long terme. De telles mesures accumulées pendant une longue période de temps sur de nombreux sites bien caractérisés constitueront une base de données extrêmement valable à partir de laquelle on peut obtenir une information considérable sur la croissance et la performance forestière ainsi que sur les effets du temps et du climat.

Les mesures de Niveau II visent à donner une information sur les facteurs qui provoquent des modifications dans la composition des espèces. De telles études sont importantes pour tous les peuplements naturels puisque la composition des espèces et, par conséquent, la biodiversité seront vraisemblablement affectées de façon significative par de nombreux aspects du changement global.

Les mesures de Niveau III concernent les processus physiologiques qui soutendent et guident la croissance et la production des arbres. Ces études devraient être menées sur des sites spécifiques lorsque des traitements expérimentaux accroissent la disponibilité en eau et en nutriments minéraux de façon semblable aux expériences de terrain qui sont en cours en Australie, en Suède et aux Etats-Unis. Là où c'est possible, les expérimentations devraient aussi comprendre des traitements à teneur élevée en CO2 et de réchauffement du sol. Les sites devraient incorporer les mêmes traitements expérimentaux et, autant que possible, suivre les mêmes protocoles.

12.8.4. BASES DE DONNEES ET SYSTEMES D'INFORMATION GEOGRAPHIQUE (SIGs)

L'objectif à long terme est de développer des bases de données pour chaque type de forêts qui fournissent des (géo) références précises sur chaque localisation de site, des données climatiques à long terme, des descriptions de sites et des enregistrements standardisés proprement documentés des données de recherche et des observations. De tels enregistrements, dans le temps et pour nombre de sites/transects, permettront d'affiner et de tester une gamme complète de modèles et de fournir une information empirique inestimable sur la productivité et les modes de croissance des forêts du monde. Ce sera un produit majeur du GCTE aussi très précieux pour surveiller la modification du couvert forestier.

La technologie a un grand potentiel: la dépense de ressources considérables est justifiée pour obtenir une documentation précise (dans les SIGs) sur la biomasse forestière, la composition des espèces et une gamme d'autres paramètres; en fait, on pourrait discuter de donner à ceci une priorité plus grande de financement qu'à beaucoup d'autres recherches puisque, sans une bonne information sur les ressources forestières et leur état, une information détaillée sur les processus est de valeur limitée pour des buts politiques et de gestion. Une fois dans des SIGs, sous formats compatibles, ces données sur beaucoup de régions du monde pourront servir à comparer la productivité et à évaluer les conséquences du changement global sur les sites autour du monde.

12.9. Modifications chez les ennemis des cultures et les mauvaises herbes et dans les maladies (activité 3.2)

Un des effets perceptibles du changement global peut être les modifications chez les ennemis des cultures et les mauvaises herbes ('ennemis des cultures' comprennent ici les insectes nuisibles et les pathogènes microbiens). En effet, le changement global affectera potentiellement les relations hôtes-ennemis des cultures/mauvaises herbes de trois façons au moins: en affectant la population ennemis des cultures/mauvaises herbes; en affectant la population de l'hôte; et en affectant l'interaction hôte-ennemi des cultures/mauvaise herbe. On suppose que l'effet net se manifestera d'une de ces manières: (i) les ennemis des cultures/mauvaises herbes actuellement de moindre importance peuvent devenir prépondérants et causer de sérieuses pertes; (ii) la distribution et l'intensité des ennemis des cultures/mauvaises herbes peuvent être affectées, ce qui mènerait à modifier les effets sur le rendement et aussi sur les techniques de compensation comme les pesticides et la gestion intégrée des ennemis des cultures; et (iii) les capacités compétitives dans les interactions plantes-mauvaises herbes peuvent être affectées par des modifications écophysiologiques. Le but de cette Activité est donc de déterminer, à travers des réseaux mondiaux de recherche, de partage des données et de modélisation, l'impact potentiel du changement global sur la distribution et la dynamique des ennemis des cultures et des mauvaises herbes et, à partir de là, le coût socio-économique d'un tel impact. Un schéma conceptuel pour générer des résultats spécifiques (évaluation d'impact) est présenté à la Figure 12.3.

Tous les effets des ennemis des cultures devraient être déterminés dans le contexte de modèles de cultures qui sont utilisés pour estimer les effets du changement global sur les cultures dans des environnements sans ennemis. Cette Activité est donc développée, main dans la main, avec l'Activité 3.1 du GCTE (Effets du changement global sur les systèmes agricoles-clé). Les ensembles de données utilisées pour modéliser les cultures et les ennemis des cultures seront, à terme, complètement intégrés malgré que l'interprétation des effets des ennemis des cultures ne devrait être faite que lorsque les effets du changement global sur les cultures sont établis. Ceci permettra de générer des buts et des résultats concrets pour une évaluation d'impact. Le Tableau 12.2 cite les combinaisons plantes/ennemis des cultures qui recevront un appui initial dans le programme de recherche du GCTE.

12.9.1 RESEAU DE SURVEILLANCE GLOBALE ET ENSEMBLES DE DONNEES POUR LES ENNEMIS DES CULTURES, LES MALADIES ET LES MAUVAISES HERBES (TACHE 3.2.1)

Cette Tâche vise à établir des ensembles de données appropriés pour soutenir le travail expérimental et de modélisation des Tâches 3.2.2 et 3.2.3 qui sont discutées ci-desseus. Le GCTE ne tentera pas d'inclure tous les ennemis des cultures ni toutes les maladies et mauvaises herbes (évidemment une tâche immense) mais se concentrera d'abord sur les ennemis des cultures, maladies et mauvaises herbes des six cultures prioritaires de l'Activité 3.1. Ce travail sera lié à plusieurs autres initiatives sur les réseaux globaux de données telles que (i) une initiative des Etats-Unis de développer une base de données globale sur les pênes de cultures; (ii) une initiative USDA-ARS de développer une base de données sur la distribution et les intensités des ennemis des cultures; (iii) les ensembles de données minimum (MDS) pour les modèles de cultures et des ennemis des cultures de l'ex-Bureau de Projet du IBSNAT (International Benchmark Sites Network for Agrotechnology Transfer) à l'Université de Hawaii; et (iv) la base globale de données de l'Université de Hanovre sur les pertes induites dans les principales cultures alimentaires par leurs ennemis.

Figure 12.3. Schéma conceptuel de l'Activité 3.2 du GCTE pour obtenir des résultats spécifiques

Tableau 12.2 Combinaison Plante-Ennemis des cultures pour l'évaluation de l'impact du changement global

Espèces agronomiques

Ennemis des cultures

Lieu

Blé

Puceron

Europe, Amérique du Nord

Rouille

Europe, les Amériques, Océanie

Seploria tritici (à déterminer après consultation avec CIMMYT)

Europe, Amérique du Nord

Riz

Cicadelle brune

Asie

Pyriculariose du riz

Asie

Mauvaises herbes (à déterminer après consultation avec IRRI)

Asie

Manioc

Cochenille du manioc

Afrique de l'ouest

Virus mosaïque de manioc (à déterminer après consultation avec IITA)

Afrique de l'ouest

Mais

(à déterminer après consultation avec CIMMYT)


Arachide

Cercosporiose de l'arachide

Amérique du Nord, Afrique de l'ouest

(à déterminer après consultation avec IITA)


Pomme de terre

Doryphore de la pomme de terre Mildiou de la pomme de terre (à déterminer après consultation avec CIP)

Amérique du Nord Les Amériques, Europe

Note: l'expression 'Ennemis des cultures' est utilisée ici pour désigner les insectes, les pathogènes et les mauvaises herbes

12.9.2. DISTRIBUTIONS, DYNAMIQUE ET ABONDANCE DES ENNEMIS DES CULTURES ET DES MALADIES DANS LE CHANGEMENT GLOBAL (TACHE 3.2.2)

II y a déjà beaucoup de publications sur les interactions entre le changement global et les ennemis des cultures quoique nombre d'entre elles soient conflictuelles. Le Tableau 12.3 (tiré de Manning et von Tiedmann, 1993) montre une interprétation de la littérature. Le GCTE vise d'abord à faire une évaluation objective d'une telle littérature pour arriver à un énoncé commun et accepté concernant les effets du changement global sur des ennemis sélectionnés des cultures. Les combinaisons plantes-ennemis des cultures du Tableau 12.2 feront initialement l'objet de recherche. Cependant, la recherche ne se limitera pas à ce nombre de combinaisons et le GCTE souhaite d'autres suggestions. Des études expérimentales et de modélisation seront développées en collaboration étroite avec les Réseaux de Cultures et des représentants de l'Activité 3.2 sont inclus dans les Groupes de Travail des Réseaux de Cultures.

Tableau 12.3. Effet des paramètres sélectionnés du changement global sur les pathogènes (tiré de Manning et von Tiedemann, 1993)

Facteur de chgt global

Type de pathogène

Nbre de cas

Nature de l'impact

CO2 élevé

Bactéries

0

Champignons nécrotrophiques

9

4 (+), 4 (0), 1 (-)

Champignons biotrophiques

7

6 (+), 0 (0), 1 (-)

UV-B

Bactéries

0


Champignons nécrotrophiques

13

9 (+), 2 (0), 2 (-)

Champignons biotrophiques

3

3 (-)

Ozone

Bactéries

4

0 (+), 1 (0), 3 (-)

Champignons nécrotrophiques

25

16 (+), 6 (0), 3 (-)

Champignons biotrophiques

14

6 (+), 2 (0), 6 (-)

12.9.3. DISTRIBUTION, DYNAMIQUE ET ABONDANCE DES MAUVAISES HERBES DANS LE CHANGEMENT GLOBAL (TACHE 3.2.3)

Des conditions environnementales changeantes altéreront l'avantage compétitif d'une espèce sur l'autre dans un système donné. Ceci affectera potentiellement la structure et la composition de l'écosystème et a des implications majeures non seulement dans les systèmes agricoles (où les fermiers s'efforcent de contrôler les mauvaises herbes) mais aussi dans les systèmes moins gérés (où des espèces envahissantes peuvent modifier la composition des espèces de façon significative). Alors que ce dernier aspect intéresse d'abord le Focus 2, le premier concerne clairement le Focus 3.

Au sein du Focus 3, une approche à double voie est planifiée. Une composante se concentrera sur les mauvaises herbes actuellement importantes pour la gamme relativement étroite des espèces culturales de l'Activité 3.1. L'autre s'occupera des mauvaises herbes au sens large et tentera de déterminer ce qui fera qu'une espèce autrement bénigne devienne économiquement importante dans le changement global. Il est évident que des espèces individuelles seront difficiles à désigner a priori mais une meilleure compréhension de ce qui déclenche un glissement dans la composition des espèces (l'aspect de Focus 2) sera une précieuse contribution.

L'atelier international de mai 1995 (parrainé par le gouvernement australien) a considéré les effets du changement global sur les ennemis des cultures et les maladies de ce pays et le GCTE a parrainé un colloque sur 'l'Evaluation des Effets du Changement Global sur les Ennemis des Cultures' au cours du XIIème Congrès International sur la Protection des Plantes qui s'est tenu aux Pays-Bas en juin 1995. Pendant ce temps, l'effort international actuel sur la documentation des sujets de l'Activité consiste en trois parties: (i) une liste des ensembles de données à long terme sur le temps, les facteurs du changement global, les cultures et leurs ennemis (une partie de la Tâche 3.2.1); (ii) une liste des chercheurs travaillant sur l'estimation des effets du changement global sur les ennemis des cultures pour les six cultures du Tableau 12.2 (une partie de la Tâche 3.2.2); (iii) une liste des chercheurs travaillant sur les effets changement global-mauvaises herbes (une partie de la Tâche 3.2.3).

12.10. Effets du changement global sur les sols (activité 3.3)

La science du sol constitue une question transversale évidente dans le GCTE et sera traitée dans tous les Focus suivant les besoins de leur recherche. Cependant, un certain nombre de problèmes de recherche sont spécifiques au sol et, pour cette raison, l'Activité 3.3 traite de la science du sol.

Les propriétés du sol varie du régime transitoire et rapidement variable, comme la teneur en nitrates, au virtuellement permanent, comme la texture. Le nombre de propriétés qui seront directement altérées par les changements de température, de précipitation et de concentration en CO2 est assez petit quoique certains sols sont à un équilibre morphologique et peuvent s'altérer rapidement (Sombroek, 1990). Les changements de climat affecteront les sols dans un domaine où leur potentiel d'érosion s'altérera avec la pluie, le couvert végétal et le labour; le changement de concentration en CO2 atmosphérique peut modifier la quantité et le type de matière organique du sol via son impact sur la végétation. Les sujets énumérés comme Tâches ci-dessous sont ceux où le changement global aura probablement un impact direct ou indirect sur les sols et où cet impact a des conséquences pratiques importantes.

Dans presque toute activité concernant la science du sol, on a besoin d'information spatiale référencée. Ceci n'est pas une tâche directe du GCTE mais une Base de Données géo-référencées des Sols du Monde est en voie d'être assemblée dans le cadre d'un projet de collaboration entre la FAO, l'ISRIC et l'USDA qui est coordonné par le Système de Données et d'Information du IGBP (IGBP-DIS); le GCTE soutient fortement cette initiative.

12.10.1. L'IMPACT DU CHANGEMENT GLOBAL SUR LA MATIERE ORGANIQUE DU SOL (TACHE 3.3.1)

La matière organique du sol (SOM: Soil Organic Matter) est probablement la variable la plus importante du sol. Sa teneur et ses propriétés contribuent à la fois à la structure et à la fertilité du sol. La hausse de la température et l'altération de l'état hydrique peuvent modifier la matière organique mais ces effets sont déjà bien modélisés. Les effets potentiels d'un renforcement du CO2 sur le rapport racine/pousse des plantes, l'exsudation radiculaire et la composition chimique des tissus végétaux nécessitent beaucoup plus de recherche mais pourraient être très importants pour la dynamique de la SOM. Les modèles de la SOM devront être modifiés en conséquence pour différents types de végétation et climats. Cette Tâche vise donc à déterminer les impacts du changement global sur la dynamique de la SOM, aux niveaux de la physiologie de la plante, de la végétation et de l'écosystème.

La plupart de ces sujets font déjà l'objet de recherche poussée, surtout que le changement global pris dans le sens d'une modification de l'usage des terres est évidemment, à l'heure actuelle, l'agent le plus important de perte de SOM (voir Tâche 3.3.2). Le GCTE contribuera à ce travail et aidera à sa coordination. En particulier, il fera de son mieux pour assurer que toutes les expériences majeures avec un renforcement de la concentration en CO2 -surtout dans les expérimentations de FACE- comprennent des études sur la matière organique su sol. Le GCTE met en place un réseau mondial pour comparer les modèles existants utilisant une large gamme de conditions de sol, de climat et de végétation ainsi que pour valider les modèles avec des ensembles de données d'essais majeurs réalisés à long terme dans le monde.

Le GCTE a établi des liens particuliers avec deux programmes internationaux, 'Alternatives to Slash and Burn (à la coupe et au brûlis)' et le Programme sur la Biologie et la Fertilité des Sols Tropicaux (Swift, 1991) parce que tous deux envisagent de manières différentes le système végétation-sol-biote-SOM. Tous deux sont basés dans les tropiques mais sont aussi concernés par les questions importantes du comportement de la SOM et de matériaux associés au cours de changement du climat et d'usage des terres à des latitudes plus hautes.

12.10.2. LA DEGRADATION DU SOL AU COURS DU CHANGEMENT GLOBAL (TACHE 3.3.2)

La dégradation du sol est un terme très large et passionnel. Le GCTE porte toute son attention sur l'augmentation de l'érosion hydrique, dans les tropiques humides, et éolienne, en régions semi-arides. La modification d'usage des terres et le changement de la couverture du sol dus au changement climatique en sont les causes probables. L'objectif de la Tâche est donc de développer la capacité de prédire la dégradation des sols par l'érosion causée par les changements interactifs entre l'usage des terres et le climat. Le GCTE a établi un réseau mondial de scientifiques de l'érosion (Ingram, 1994b) qui comprend des modélisateurs, des expérimentalistes et des chercheurs qui coordonnent des études de surveillance à long terme (essentielles pour la validation des modèles d'érosion). Une réunion tenue au début de 1995 (parrainée par l'US EPA et l'USDA) a détaillé le planning d'un atelier tenu en 1995 et supporté par l'OTAN; elle a aussi planifié pour 1996 une campagne majeure sur le terrain en Afrique de l'Ouest. Le GCTE s'efforcera d'entreprendre un travail purement stratégique et d'éviter des études spécifiques à un site. Pour s'assurer que la recherche progresse dans les régions où le risque est le plus élevé, le travail sera mené étroitement avec les organismes déjà impliqués dans ces régions comme l'ISRIC et la FAO.

12.10.3. LE CHANGEMENT GLOBAL ET LA BIOLOGIE DU SOL (TACHE 3.3.3)

A l'origine, cette Tâche ne s'occupait que de la production des gaz à effet de serre. On s'est progressivement aperçu que cette optique devait être élargie parce que le comportement du biote du sol allait être fort critique dans beaucoup de situations du changement global telles que la décomposition de la litière ou les nouvelles maladies provenant du sol. Les questions générales d'écologie s'appliquent aussi au biote du sol- vitesse de migration, invasion de nouvelles superficies, vitesse d'adaptation aux nouveaux climats et la classification des types fonctionnels. La microfaune du sol et les organismes symbiotiques peuvent être particulièrement intéressants. Cependant, il est absolument essentiel que le GCTE mette l'accent sur les processus mis en oeuvre par le biote du sol plutôt que sur le comptage des espèces.

Le travail sera mené en étroite collaboration avec le Focus 4 du GCTE (Complexité Ecologique) et le Projet Central du IGBP 'International Global Atmospheric Chemistry' (IGAC).

12.11. Conclusion

Le travail souligné ici n'est qu'une partie du GCTE, c.-à-d., le Focus 3. Il y a des liens et des contacts solides entre ce travail, essentiellement conçu pour la production, et celui qui traite des écosystèmes moins gérés dans le monde. Des activités couplées, comme l'effet du CO2 sur les plantes aussi bien sauvages que gérées ou l'importance des changements dans le sol et la matière organique, sont mises en oeuvre à tous les niveaux. Le Focus 2, qui traite des structures des écosystèmes, a un grand intérêt pour les écosystèmes et les paysages mixtes où certaines terres sont agricoles et d'autres sauvages. En général, il contribue beaucoup à la compréhension et à la prédiction de l'usage des terres. Le GCTE est tout à fait conscient du besoin de collaboration avec l'approche socio-économique du Programme des Dimensions Humaines qui se situe en parallèle avec le IGBP. En outre, il a besoin de l'implication de la communauté des chercheurs sur tous les aspects de la recherche globale, qu'ils appartiennent à des systèmes nationaux (des nations industrialisées et en développement), à des centres de recherche internationaux en agriculture, à des programmes et des organisations des Nations-Unies ou à d'autres organismes.

Le Focus 3 est très engagé dans l'idée que son travail devrait être utile. Avec la possibilité, en fait la probabilité, de l'occurence d'un changement de climat, il est sensé réaliser un travail préparatoire pour l'amélioration qui devra être entreprise. Ceci rentre exactement dans les tâches des Groupes de travail 2 et 3 du IPCC. Le Focus 3 ne peut pas fournir des prescriptions exactes parce que le futur est trop incertain mais nous croyons que nous pouvons clarifier quelque peu le terrain en sorte que de meilleures décisions pourront être prises aux moments nécessaires.

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