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Chapitre 7 - CARACTÉRISTIQUES PHYSIQUES DU SOL


Caractéristiques liées au travail du sol
Le labour en relation avec le sol


Willem Hoogmoed, Chercheur, Département du travail du sol, Université agronomique, Wageningen, Pays-Bas

Le travail du sol implique la manipulation des matériaux du sol qui sont donc les facteurs déterminant les besoins, les possibilités et le choix des opérations ou systèmes de travail du sol. Il est alors important de connaître les caractéristiques du sol. La formation géologique comprend un nombre important de processus (désagrégation, lessivage, éluviation, podzolisation, calcification, formation de gley) influencés par la roche mère, le climat, les organismes, le relief et le temps. La formation géologique est un processus lent et en général les activités de travail du sol n'influeront pas sur ces processus, sauf dans les cas où les mouvements de l'eau sont très affectés (par exemple, un lessivage important) ou si des grosses quantités de matériaux du sol sont transportées par des activités de travail du sol comme le labour en pente ou des processus dérivés du travail du sol comme l'érosion hydrique et l'érosion éolienne.

Caractéristiques liées au travail du sol


Comment le travail du sol influence t-il le sol?


Les caractéristiques suivantes du sol en tant que matériel peuvent avoir un rapport avec les opérations de travail du sol:

La présence des horizons du sol
La texture
La structure
Les propriétés chimiques

De ces caractéristiques, la texture et les propriétés chimiques sont fixes et ne peuvent être modifiées par le travail du sol ou par exemple, très indirectement par les changements induits par le lessivage. Les horizons du sol peuvent éventuellement être modifiés par des opérations de labour profond. Toutefois le travail du sol influence fortement la structure du sol et intervient comme cause et dans les résultats. Les caractéristiques de texture, de structure et les propriétés chimiques forment les propriétés mécaniques du sol et sont responsables des propriétés du travail du sol.

Comment le travail du sol influence t-il le sol?

Avant que les aspects mentionnés ci-dessus ne soient examinés en détail, il est intéressant d'indiquer ce que le travail du sol fait au sol. D'un point de vue physique, il exerce une pression sur le système du sol. Cette pression est parfois simplement appliquée pour créer des tensions ailleurs dans la matrice du sol. Les pressions varient fortement en amplitude et en direction et dépendent des dimensions de la surface de contact outil/sol. Ces processus durent rarement plus d'une ou deux secondes et peuvent être tellement brefs qu'on les considère comme des impacts.

La façon dont le sol réagit aux pressions détermine l'effet des opérations de travail du sol. On peut distinguer les types de réactions suivants:

- compactage (réduction de volume; enracinement et infiltration insuffisants)

- coupe

- formation d'un plan de cisaillement (morcellement, pulvérisation): la terre peut s'effriter en particules très fines (poussière, boue) ou la couche supérieure du sol peut être de texture grossière (difficultés pour faire un lit de semences)

- transport

- déformation

Le compactage

Le compactage aura lieu si le sol est sujet aux pressions et que la résistance à la réduction de volume est moindre que l'énergie nécessaire pour un mouvement plastique ou d'autres réactions. Le stress, en fonction de sa durée, peut compacter un sol cohésif (l'argile, p.ex.) tandis qu'un sol à structure particulaire (le sable, p.ex.) sera compacté par des vibrations ou tassement des particules. Le compactage a lieu, par exemple, quand le sol subit l'action de rouleaux ou de roues de tracteurs. Les rouleaux sont prévus pour assurer le compactage alors que le trafic d'engins provoque un compactage non désiré.

La coupe

La coupe a souvent lieu au cours du travail du sol et fait partie d'opérations comme le labour, le labour rotatif et le désherbage. Les facteurs déterminants sont la vitesse (l'impact) et l'angle de coupe du tranchant ou de l'instrument. Si l'angle est trop large (émoussé), des problèmes tels le compactage peuvent survenir.

Formation d'un plan de cisaillement

Si le taux d'humidité du sol est favorable, la pression peut provoquer la formation de fissures et le morcellement consécutif de mottes ou agrégats. Le sol se fissurera alors le long des plans de cisaillement. Selon l'intensité du labour - le nombre de points de pression compris dans un volume spécifique de sol à un moment précis - des grosses mottes (en labourant des sols secs, faible intensité) ou des particules fines (labour rotatif, haute intensité) peuvent apparaître.

Le transport

Des particules de sol sont transportées d'une façon ou d'une autre au cours de chaque opération de travail du sol. Ce processus est assez évident au cours du labour mais existe aussi au cours du roulement et désherbage. Le transport du sol peut être voulu et désiré pour obtenir une configuration spécifique de la surface, telle que nivellement ou formation de billons, un mélange ou une inversion. Dans certains cas, ce transport a des conséquences négatives. En effet, si le sol est très dur, les mottes ou les agrégats ne seront pas fractionnés sous la pression d'un engin mais seront déplacés plus loin ou sur les côtés, entraînant un mouvement inutile du sol qui réduit l'efficacité de l'engin (effet bulldozer).

La déformation

Cette action devrait être évitée parce qu'elle détruit la structure grumeleuse du sol. La seule exception concerne la destruction complète de la structure du sol lors de l'inondation des champs de riz en appliquant un labour intensif dans des conditions saturées. Dans tout autre cas, la déformation est négative. Le sol devient plus dense et plus dur après le séchage, causant de sérieux problèmes de perméabilité par rapport à l'eau et l'air et de résistance à la croissance racinaire. La déformation n'a lieu que lorsque le sol est dans une phase de consistance plastique.

Le labour en relation avec le sol


Indicateurs


Les propriétés mécaniques du sol sont importantes pour le labour. En effet, ces propriétés, dont la consistance est l'une des plus apparentes, peuvent fortement varier en fonction du taux d'humidité (influence climatologique) et de la densité du sol. Ces conditions mécaniques du sol sont telles qu'il faut s'attendre à des problèmes suite au labour, comme par exemple:

· la terre est trop molle: problèmes pour supporter les personnes, les animaux, les équipements
· la terre est trop compacte: besoins énergétiques plus élevés

Ces exemples montrent que la consistance de la terre est un facteur influençant fortement les résultats des opérations de travail du sol. Le terme "maniabilité" est utilisé dans ce sens pour indiquer deux choses:

a. L'adaptation du sol au labour ou pour faciliter les opérations de travail du sol. L'étendue de maniabilité optimale, exprimée en taux d'humidité, est donnée à la Fig. 6. La maniabilité est bonne quand cette étendue est importante, mais si celle-ci est étroite ou commence à un niveau où le taux d'humidité est plus bas que la capacité du champ (l'état du sol quelques jours après la pluie), la maniabilité est faible parce que le labour ne peut commencer avant que le sol n'ait séché pendant une longue période après les pluies.

b. L'état du sol à un moment donné, qui déterminera si on peut labourer le sol ou non sans l'endommager. La décision en faveur ou non du labour dépend de la maniabilité du sol mais également de la "circulation", c'est à dire de la capacité du sol à supporter le poids d'un tracteur (animal) et des machines. Si les conditions d'assèchement sont sévères, la couche supérieure du sol peut être assez sèche pour la préparation du lit de semences mais le sous-sol peut toujours être trop humide et s'avérer incapable d'assurer le passage d'engins. La maniabilité ou la circulation dépendent très fort du type de travail du sol et des équipements utilisés. Le sol aura, par exemple, une étendue de maniabilité beaucoup plus vaste pour le labour que pour la préparation d'un lit de semences.

En règle générale, on parle de maniabilité maximale lorsque le taux d'humidité se situe autour de 60% de la capacité au champ. La capacité au champ est définie comme le taux d'humidité d'un sol initialement saturé, avec un écoulement continu pendant 24 à 48 heures. Le sol peut ne pas atteindre ce taux d'humidité au cours de la saison des pluies dans les régions humides ou semi-arides bien que certaines opérations de travail du sol soient nécessaires. Dans de tels cas, les méthodes envisagées doivent causer le moins de dégâts possibles au sol.

FIGURE 6 - Limites de consistance et l'étendue de maniabilité

FIGURE 7 - Limites de maniabilité

Le taux d'humidité est considéré optimal lorsque:

- l'effort (énergie) nécessaire pour réaliser une certaine opération est peu important
- l'effet désiré est le plus important

En pratique, ces deux points ne coïncident pas et il sera nécessaire de trouver un compromis.

Les données obtenues suite aux études de sol ne contiennent normalement pas d'informations sur la maniabilité mais les données de texture du sol peuvent indiquer le type de comportement qui est attendu.

L'étendue de maniabilité des sols pris en masse est plus limitée que celle des sols 'normaux', et plus particulièrement des sols légers (sablonneux, limoneux). Ceci s'explique parce que la maniabilité exprimée en tant que besoin énergétique, qui est le facteur dominant de la matière sèche du taux d'humidité, s'arrête brutalement. Dans la partie humide ou mouillée de la distribution, où le critère est l'instabilité structurelle, le modèle n'est pas différent des autres sols, comme le montre la Figure 7.

L'énergie disponible et le matériel adéquat sont des facteurs critiques pour déterminer les limites de maniabilité des sols secs. Le comportement du sol influencé par les conditions météorologiques ou "stabilité" peut être considéré comme la résistance des agrégats du sol à se décomposer sous l'influence de l'eau mais aussi du gel ou de l'assèchement. Cet aspect est important pour la conservation du sol et de l'eau mais également pour l'établissement des cultures et la croissance (encroûtement).

Indicateurs

On distingue plusieurs indicateurs de l'influence du travail du sol sur (la structure) le sol:

La densité apparente et la porosité

Les opérations de travail du sol provoquent en général un ameublissement et un compactage du sol. La densité apparente (généralement exprimée en g/cm3) indique l'état ou la condition du sol. La porosité (pourcentage d'un certain volume de sol occupé par l'air) peut être calculée à partir de la densité apparente si la densité des particules est connue. Les changements intervenant dans la densité apparente sont aussi utilisés comme indicateurs du comportement du sol soumis à la pression des tests de compactage.

Les propriétés de rétention d'eau du sol

La matrice du sol est un système complexe composé d'agrégats et de particules de taille et de forme différentes. L'eau est retenue dans ce système de sol par des forces qui dépendent du diamètre et de la forme des pores, etc. Le rapport entre la force de rétention et le taux d'humidité du sol est généralement exprimé par une courbe, appelée courbe pF. Le travail du sol aura principalement une influence sur les pores plus larges (les petits se trouvant normalement dans des petits agrégats individuels qui ne sont pas facilement touchés par le travail du sol).

La conductivité hydraulique dans les sols saturés et non saturés

La conductivité hydraulique des sols saturés dépend principalement des larges pores. En effet, ceux-ci seront les premiers à être drainés si le taux d'humidité diminue. En cas de faibles taux d'humidité, seuls les pores serrés contribueront au débit de l'eau dans le sol. Le compactage du sol aura alors moins d'influence sur la conductivité saturée mais plus d'influence sur la conductivité non saturée, surtout dans les écarts plus secs. Ce phénomène est particulièrement important parce qu'il influence les mouvements d'eau proches de la surface du sol: le roulage d'un sol peut entraîner une évaporation continue à cause d'un surplus de pores serrés remplis d'eau. Les larges pores transportent efficacement des grandes quantités de pluie ou d'eau d'irrigation après un labour profond.

La perméabilité de l'air

Ce facteur est complémentaire de la conductivité hydraulique. L'espace non occupé par le sol ou l'eau est disponible pour stocker ou transporter l'air/les gas. La continuité du système spatial des pores est très importante pour le bon fonctionnement d'un système qui fournira de l'oxygène au système racinaire.

La stabilité structurelle

La stabilité de la matrice du sol est un indicateur important de la résistance aux forces externes, qu'elles soient des causes naturelles (séchage ou arrosage par le vent, la pluie) ou mécaniques (labour, circulation, tassement). Le comportement des agrégats après l'arrosage sert de test pour quantifier cette caractéristique. L'arrosage peut se faire en tamisant sous l'eau ou en appliquant des gouttes de pluie. Des tests de broyage d'agrégats naturels et artificiels sont utilisés pour déterminer la résistance aux forces mécaniques.

La résistance à la pénétration

Cette caractéristique est un indicateur de la résistance mécanique du sol aux racines ou aux instruments de travail du sol. Elle est influencée par la texture (structure particulaire), la cohésion (les forces de cohésion favorisant la formation d'agrégats) et la densité du sol. C'est une méthode de calcul assez simple qui ne donne pas beaucoup d'informations quantitatives.

Collage

Ce facteur qui n'a pas encore été mentionné est important parce qu'il influence les effets et le déroulement des opérations de travail du sol. A un certain taux d'humidité, le sol collera à l'acier ou à d'autres surfaces. Cette adhésion peut être très forte et poser des sérieux problèmes au labour si le sol ne se déplace pas le long du parcours des instruments de travail du sol. Cela entraîne une résistance plus élevée et une moins bonne performance des engins.


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