LUXEMBOURG - LUXEMBURGO

Son Excellence Monsieur Jean-Claude Juncker, Premier Ministre et Ministre d'Etat du Grand-Duché de Luxembourg


Lorsque nous passerons, d'ici quelques années, du deuxième au troisième millénaire, la faim, la misère, et donc le désespoir, seront restés les sinistres compagnons de centaines de millions d'hommes, de femmes et d'enfants.

Lorsque l'histoire avancera au pas accéléré du XXIe siècle, ceux qui dirigeront le monde se verront confrontés au terrible cortège des lourds défis auxquels notre siècle n'aura apporté qu'une réponse insuffisante. Certes, depuis la Conférence mondiale de l'alimentation de 1974, des progrès ont été accomplis. Les 5,8 milliards d'habitants de la planète disposent aujourd'hui en moyenne de 15 pour cent de nourriture en plus par personne que la population mondiale qui était de 4 milliards d'habitants il y a 20 ans.

Mais le bilan de notre action passée reste globalement négatif.

Près d'un homme sur sept souffre de faim ou de malnutrition grave. Un homme sur cinq, dans les pays en voie de développement, n'est pas à même de satisfaire ses besoins alimentaires quotidiens. L'alimentation de deux milliards d'hommes présente un déficit en vitamines et en minéraux essentiels.

La situation sur le front de la guerre contre la faim est donc grave. Elle risque de s'aggraver davantage au cours du siècle à venir qui verra doubler la population mondiale. Il nous faut donc agir. Et il faut agir maintenant.

La Déclaration de Rome sur la sécurité alimentaire mondiale reflète les devoirs impératifs qui s'imposent à l'humanité et nous y adhérons pleinement. Elle sera notre charte et notre programme pour les années et les décennies à venir. Ce programme, pour être et rester crédible, doit dépasser le faible niveau d'ambitions qui caractérise les promesses creuses et les engagements simplement rhétoriques.

Nous devons traduire dans les faits les engagements que nous avons contractés lors de la Conférence mondiale sur le développement social de Copenhague. La pauvreté est en effet la cause majeure de l'insécurité alimentaire. Nous ne pouvons réaliser les objectifs du Sommet romain si nous ne réalisons pas les objectifs de Copenhague.

Les engagements sur lesquels nous mettons l'accent ici resteront lettre morte si nous oublions les conséquences qui ont découlé des travaux de la Conférence internationale sur la population et le développement. Sans politique démographique appropriée, sans système d'éducation et de soins performants dans toutes les régions du monde, notre lutte contre la faim sera vouée à l'échec.

L'éradication de la faim reste une mission impossible tant que nous nous refusons à promouvoir la condition féminine dans toutes les sociétés et toutes les économies. La Conférence mondiale sur les femmes à Beijing a dégagé les pistes que nous devons explorer pour pouvoir arriver au but qui nous réunit aujourd'hui.

Chaque pays ici représenté doit tirer les conséquences des différents sommets auxquels il a participé et dont il a accepté les conclusions.

Les pays en voie de développement, surtout les pays dont les populations démunies sont brutalement exposées aux risques et à la menace de la faim, n'ont plus le droit de se tromper de priorités. La course aux armements, la propension à résoudre les conflits ethniques ou régionaux par le recours à la violence et la force armée sont incompatibles avec le respect des droits de l'homme, récurrents à la notion de "good governance" et donc contraires aux engagements de cette Conférence. Les pays riches - dont le mien - sont dans l'obligation absolue de poursuivre et d'accroître leurs efforts en matière d'aide au développement.

Mon pays s'est engagé à relever le niveau de son aide au développement à 0,7 pour cent du produit national brut d'ici la fin du siècle.

De 1995 à 2000, nous aurons augmenté notre aide au développement de 125 pour cent. Nous le ferons parce que nous savons quels sont les défis qui nous attendent et parce que nous mesurons les conséquences désastreuses que pourrait avoir notre inaction.

Quelque 80 milliards d'êtres humains ont vécu jusqu'à présent sur notre planète. Un trop grand nombre d'entre eux a vécu dans la misère.

Un trop grand nombre d'entre eux a perdu la vie parce que l'application de la Déclaration universelle des droits de l'homme leur fut refusée, cette déclaration universelle qui exige pour toute personne le droit à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa famille, y compris une nourriture.

A l'aube du troisième millénaire, nous n'avons pas besoin de sommet et de conférence. Nous avons besoin d'une autre politique, d'une autre mentalité, d'un nouvel espoir.

Nous devons enfin donner à l'homme la place que la création lui a réservée.


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