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Module 8: Les outils d'intégration de la gestion durable (2 journées)


Projets
Politiques
Démarches sectorielles


Projets


Objectifs pédagogiques spécifiques du sous-module
Phase d'apprentissage
Phase de synthèse


Objectifs pédagogiques spécifiques du sous-module

Rendre le stagiaire capable de;

- identifier l'ensemble des compétences requises pour monter d'authentiques équipes pluri-disciplinaires et faire un travail utile avec les futurs bénéficiaires dans la préparation de projets,

- comprendre les avantages et les inconvénients, les apports et les limitations, les indications et les contre-indications des méthodes habituelles de préparation de projets,

- intégrer l'ensemble des connaissances acquises dans une approche opérationnelle a partir de l'observation des procédures en cours de mise en place,

Phase d'apprentissage

I. D'ABORD, LES BÉNÉFICIAIRES ET LES OBJECTIFS

Les projets de développement durable ne pourront se préparer qu'avec la participation active des futurs bénéficiaires.

1. L'APPROCHE GÉNÉRALE

Il est en effet hors de question de préparer des projets de la manière opaque coutumière de nos technocrates et d'y apposer par la su4,e une étiquette "développement durable"

Toutefois, la grande majorité des méthodes «sérieuses» (=celles proposées ici) de préparation de projets incluent cette participation active des futurs bénéficiaires sous une forme ou sous une autre.

Plus spécifiquement, il nous semble que la coopération devrait s'étendre à l'ensemble du cycle de projet:

Phase

Participation des bénéficiaires

Interventions de techniciens extérieurs

Identification



Diagnostic



Prospective



Stratégie



Programme/projet



Ensuite, les conceptions de projets doivent partir des objectifs (approche par la demande) et non par les actions et encore moins par les moyens (approche par l'offre)

2. EXEMPLE DE BONNE DEMARCHE:

Au Sénégal dans les années 70, plusieurs opérations de vulgarisation agricole ont connu un bon succès durable:

- introduction de la traction attelée,
- sauvetage des jeunes bovins

Dans les deux cas, les ingrédients du succès étaient les mêmes:

- observation directe des principaux problèmes des agriculteurs et éleveurs,
- recherche sur le terrain et avec les futurs bénéficiaires des solutions adaptées.
- priorité dans la recherche à des techniques simples, peu coûteuses et efficaces
- mise en oeuvre de ces solutions avec les bénéficiaires.

Cette démarche doit inspirer l'ensemble des interventions des techniciens.....

II. ENSUITE, LE MILIEU

Par rapport au milieu (environnement, société), les interventions à prévoir s'inscrivent dans la logique suivante:

PRISE EN COMPTE DU DEVELOPPEMENT DURABLE DANS LES PROJETS (OUTILS ETUDIES)

PHASES

OUTILS

OBSERVATION CONTINUE DU TERRITOIRE

MODELE POPULATION-RESSOURCES (module 3)

ETAT DE L'ENVIRONNEMENT (module 4)

CONCEPTION DE PROJETS

 

IDENTIFICATION

ANALYSE COUT-EFFICACITE (module 7)

PREPARATION-FAISABILITE

ETUDE D'IMPACT SUR L'ENVIRONNEMENT (module 4)

ANALYSE COÛT-AVANTAGES (module 7)

QUESTIONNAIRE MULTI-CRITERES/DURABILITE (module 8)

REALISATION

DIRECTIVES ENVIRONNEMENTALES (module 4)

SUIVI-EVALUATION

OBSERVATION DES INDICATEURS (module 8)

Dans tous les cas, action avec les bénéficiaires, en priorité sur leur demande.

III. ENFIN, LES MOYENS, LEUR ÉLABORATION ET L'ÉVALUATION DE LEUR PERTINENCE

1. RAPPEL SUR LE CYCLE DE PROJETS

L'intervention sur un projet ne se limite pas à une préparation effectuée une fois pour toutes. En pratique, l'intervention sur un projet est un continuum qui démarre, par exemple à la conception initiale, et se poursuit par le suivi et les évaluations ex post, évaluations elles-même utiles pour la conception de la suite des opérations,....

Gestion durable des ressourcés naturelles

2. UN OUTIL DE QUESTIONNEMENT SUR LA DURABILITÉ D'UN PROJET UNE FOIS CE PROJET CONÇU

QUESTIONNAIRE MULTI-CRITERES SUR LA DURABILITÉ

(adaptation par Jean-Roger MERCIER d'un document de travail FAO)

Durabilité environnementale

1. Le projet contribue-t-il à satisfaire les besoins humains de base (nutrition, santé, abri, éducation, emploi) dans le long terme tout en évitant les effets négatifs sur la gestion et la conservation de la base de ressources naturelles pour l'agriculture, la foresterie et les pêches (gaz atmosphériques, sols, eau, ressources génétiques végétales et animales)?

2. Le projet est-il non dégradant sur le plan de l'environnement? En particulier, contribue-t-il à: réduire les pollutions et les contaminations par les effluents agricoles, les déchets et les sous-produits, protéger la nature, conserver la diversité biologique et socio-culturelle dans les zones rurales, aider au maintien des cycles naturels?

Durabilité technologique

3. Le projet fait-il la promotion des technologies appropriées? En particulier, les technologies mises en application dans le projet reflètent-elles la nécessité d'accroître l'efficacité de l'utilisation des ressources tout en évitant, dans la mesure du possible, les effets négatifs sur l'environnement? Les technologies mises en place par le projet améliorent-elles le développement et l'utilisation des savoir-faire humains tout en améliorant les conditions de vie et de travail des personnes?

Durabilité institutionnelle

4. Le montage institutionnel retenu a-t-il la capacité (administrative, financière, technique) d'assurer la réalisation des objectifs du projet et ses résultats de telle manière que les besoins humains soient assurés de manière continue dans le long terme?

Durabilité économique et sociale

5. Le projet assure-t-il la promotion d'une utilisation optimale et rationnelle des intrants agricoles et des ressources naturelles locales tout en accroissant la productivité?

6. Le projet assure-t-il une répartition équitable des intrants et des ressources pour permettre aux individus, y compris les plus démunis, de satisfaire leurs propres besoins de base et ceux de leurs familles/communautés?

7. Le projet contribue-t-il à améliorer les conditions de vie et de travail dans les zones rurales et à créer l'emploi et les opportunités de création de revenus permettant aux ruraux d'assurer leurs conditions de vie, eux et ceux qui dépendent d'eux, dans le long terme?

8. Le projet assure-t-il la promotion d'une approche du bas vers le haut afin que les ruraux, hommes et femmes, petits agriculteurs et paysans sans terre, puissent effectivement avoir une force de proposition et des moyens de suivre et d'orienter le développement durable?

9. La participation des personnes, y compris la participation active des femmes, petits agriculteurs et paysans sans terre, est-elle une composante importante du projet?

Phase de synthèse

Les outils évoqués ci-dessus, en combinaison avec les outils habituels de préparation de projets, peuvent permettre une bonne élaboration de projets de gestion durable des ressources naturelles sous la condition expresse que ces projets soient portés par des forces politiques déterminées et importantes.

Il faudra aussi que le projet en question s'intègre dans une logique globale temporelle, sectorielle et territoriale qui doit normalement s'exprimer par des plans et politiques de développement, sujet du sous-module suivant.

Politiques


Objectifs pédagogiques spécifiques du sous-module
Phase d'apprentissage
Phase de synthèse


Objectifs pédagogiques spécifiques du sous-module

Rendre le stagiaire capable de:

- identifier le besoin d'intégrer les considérations de développement durable le plus en amont possible dans l'élaboration de plans et de politiques

- identifier les succès, et aussi les échecs relatifs, de politiques ayant tenté d'intégrer ces considérations

- connaître les conditions de suivi des impacts des politiques sur l'environnement naturel permettant d'assurer leur efficacité,

Phase d'apprentissage

I. LES OUTILS DE LA PRISE EN COMPTE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE DANS LES POLITIQUES

APPROCHES

OUTILS

PLANIFICATION LOCALE, REGIONALE OU NATIONALE

MODÈLE POPULATION-RESSOURCES (module 3)

GRILLE D'ETUDE DE LA VALORISATION DES RESSOURCES (Harvard) (module 7)

PLANS LOCAUX OU NATIONAUX D'ENVIRONNEMENT AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, GESTION DES TERROIRS (modules 4 et 8)

ANALYSE INSTITUTIONNELLE (module 5)

COMPTABILITE PATRIMONIALE (module 7)

CONCEPTION DE POLITIQUES


SECTORIELLES

ANALYSE COÛT-EFFICACITE (module 7)

ETUDE D'IMPACT SUR L'ENVIRONNEMENT DE PROGRAMMES/POLITIQUES (module 4)

GRILLE D'ETUDE DE LA VALORISATION DES RESSOURCES (module 7)

TECHNOLOGIQUES

ANALYSE MULTICRITERES (module 6)

ANALYSE COÛT-AVANTAGES OU COÛT-EFFICACITÉ (module 7)

FISCALES

INTERNALISATION DES COÛTS EXTERNES (module 7)

REALISATION

DIRECTIVES ENVIRONNEMENTALES (module 4)

SUIVI-EVALUATION

OBSERVATION DES INDICATEURS

Dans tous les cas, analyse de la durabilité socio-institutionnelle et validations de terrain

II. UNE PROCÉDURE PARTICULIÈRE: LES PLANS LOCAUX ET CHARTES D'ENVIRONNEMENT

Comme on a pu le voir, les outils d'intégration de la durabilité dans les politiques et programmes sont en substance les mêmes que pour les projets, ce qui est normal, compte tenu du peu de différences de nature et de l'interpénétration entre projets, programmes et plans.

En France, on a vu récemment se développer des plans locaux (plans à 15 ans du type Plans d'Action Environnementaux) et des chartes (programmes quinquennaux) d'environnement. Ce sont des procédures qui comprennent au minimum de 10 à 12 mois de préparation et font l'objet d'une coopération étroite entre des élus, des cadres de collectivités territoriales et d'administration d'Etat et une équipe pluri-disciplinaire extérieure. On en est actuellement en France à une centaine de plans et une dizaine de chartes. On commence donc à disposer de points de repère intéressants.

Une méthodologie relativement lourde et en tout cas très précise doit être mise en oeuvre pour préparer ces chartes et ces plans dans de bonnes conditions. Voici, en synthèse, des conseils sur la marche à suivre pour préparer des plans et chartes d'environnement. Compte tenu de la précision de ces conseils, la plupart des fiches de détail de cette explication sont fournies en annexe du présent module.

1. LA MÉTHODE INTERACTIVE

. le principe d'éphémérité du conseil stratégique

L'intervention se fait dans le cadre d'un conseil stratégique, pour aider les maîtres d'ouvrage à "faire les premiers pas" dans la direction d'une meilleure gestion de l'environnement de leur territoire.

A ce titre, l'intervention vise à aider à l'accouchement d'une politique, de programmes, voire d'avant-projets d'investissement. Mais, à un moment ou à un autre, à la fois pour des raisons de déontologie et de compétence, les conseillers disparaissent de la scène pour laisser la place à des acteurs techniquement compétents.

C'est ce que nous appelons familièrement l'"auto-destruction" des conseillers-intervenants extérieurs.

. le respect de la maîtrise d'ouvrage

Le maître à bord est le propriétaire (ou le groupe de propriétaires) des travaux qui s'effectueront dans la mise en oeuvre de la charte d'environnement. Ce maître d'ouvrage - qui peut être les chefs traditionnels dans un village ou la municipalité dans une ville moderne - doit donc à tout moment avoir le contrôle de la situation, et l'équipe d'intervenants est à son service, sans être servile.

. le principe de la transparence de la méthodologie

Afin que les travaux de préparation se déroulent de manière aussi satisfaisante et efficace que possible, il est impératif que la méthodologie suivie soit aussi transparente que possible. Cela implique qu'au delà des réunions type Comité de Pilotage, toutes les étapes au cours desquelles des décisions stratégiques sont prises soient d'un maximum de transparence, au minimum pour le maître d'ouvrage et, si possible, pour l'ensemble des bénéficiaires.

. la personnalité de l'animateur

Même si le maître d'ouvrage commande, il reste que l'animateur (intervenant unique ou coordinateur des intervenants) doit avoir une personnalité communiquante et compétente pour pouvoir suivre l'ensemble des travaux de la manière la plus efficace possible. Allier diplomatie, compétence et rigueur méthodologique n'est pas toujours facile.

. aller jusqu'au bout

Enfin, il est impératif, pour des formulateurs de plans, programmes et politiques, de s'assurer que leur action débouche sur des activités concrètes (recrutement d'un éco-conseiller, vote du budget, mise en oeuvre effective des actions,...). Faute de cette mise en oeuvre concrète, on souffre du syndrome de l'étagère (celle sur laquelle les plans et autres documents non utilisés prennent la poussière).

2. LA MISE EN APPLICATION SUR LES PLANS ET CHARTES D'ENVIRONNEMENT

La préparation d'un bon plan local d'environnement est une recette de cuisine réclamant les bons ingrédients, les bons tours de main ou outils et le bon calendrier de mise en oeuvre.

. Les ingrédients indispensables

- des représentants du maître d'ouvrage motivés et honnêtes,
- des intervenants réellement pluri-disciplinaires,
- du temps non électoral devant soi.

Ceci se passe sans doute de commentaires.

. Les outils incontournables

. analyse statistique
. cartographie
. chronogrammes

Les principaux outils statistiques à utiliser sont:

- analyses mono-variables: moyenne, variance (et donc écart-type et coefficient de variation),.....

- analyses multi-variables: régressions simples et multiples, analyses de tendances,..

.... on considère ici qu'ils sont connus par ailleurs.

On observe que, de plus en plus, les décideurs sont sensibles à la traduction des analyses statistiques en graphiques, car ils peuvent saisir très rapidement les tendances par l'observation visuelle.

La cartographie joue un rôle fondamental dans la préparation d'un plan d'environnement. Elle offre en particulier aux habitants et aux décideurs locaux une vision nouvelle de leur territoire et la mise en évidence de la part fondamentale jouée par les éléments naturels, en particulier le réseau hydrographique. Dans la vie quotidienne, ces éléments font partie du paysage négligé par l'oeil des habitués. La cartographie permet de mieux mettre ces éléments en relief, contraintes comme atouts de l'environnement local. Il est essentiel de disposer de cartes à la bonne échelle, à adapter aux besoins et aux contraintes de l'intervention. Le 1/25.000ème est une échelle convenable pour des territoires importants (plusieurs dizaines de km2). Pour des surfaces plus réduites, le 1/10.000ème est souvent adapté.

Les chronogrammes, sans être de la même importance stratégique que les deux outils précédents, jouent un rôle fondamental dans la communication sur la préparation du plan ou de la charte. Dans une version sophistiquée, on pourra aller jusqu'à un diagramme PERT. Dans la plupart des cas, cependant, un chronogramme clair et mis à jour régulièrement (tous les mois ou plus souvent) suffit largement.

. Les phases de l'intervention et leur articulation

Il est important, non seulement de bien respecter les phases de l'approche, mais également de bien enchaîner leur réalisation.

Les principales phases (et sous-phases) de travail sont les suivantes:

DIAGNOSTIC

· ANALYSE INSTITUTIONNELLE
· CONSTITUTION ET LANCEMENT DES GROUPES DE TRAVAIL
· DIAGNOSTIC THÉMATIQUE
· SYNTHÈSE DES DIAGNOSTICS THÉMATIQUES

PROSPECTIVE

· PRÉPARER UN EXERCICE DE PROSPECTIVE
· ANIMER UN EXERCICE DE PROSPECTIVE
· GERER LES SUITES D'UN EXERCICE DE PROSPECTIVE

PLANIFICATION

· DÉTERMINER DES OBJECTIFS D'INTERVENTION
· PRÉPARER UN PROGRAMME D'ACTION

PROGRAMMATION

· PRÉPARER UNE INTERVENTION PLURIANNUELLE
· PRÉPARER LE SUIVI

Ces phases et sous-phases sont explicitées plus en détail ci-dessous:

PREMIERE PHASE: DIAGNOSTIC

. L'analyse institutionnelle

. Le territoire
. Son gestionnaire principal (maître d'ouvrage ou non)
. Les autres intervenants

Comme pour une Etude d'Impact sur l'Environnement (voir Module 4), la première étape consiste à décider des limites du territoire étudié. Ces limites doivent évidemment inclure au minimum le territoire sur lequel porte l'étude mais pourra également le déborder, par exemple à cause des impacts amont et aval des systèmes hydrographiques.

Le gestionnaire principal du territoire devra être identifié. C'est généralement le groupe qui a demandé ou initié l'intervention. Ce groupe aura en général des droits fonciers ou non, traditionnels ou modernes, sur ce territoire. C'est ce qui aura motivé son intérêt pour la gestion locale de l'environnement. Ce qui est important à remarquer, c'est que ce gestionnaire principal ne sera pas toujours (en pratique, il sera même rarement) l'unique maître d'ouvrage de l'ensemble des interventions environnementales sur le territoire.

Ainsi, une Mairie n'aura de pouvoir de maîtrise d'ouvrage que sur une partie des travaux à mettre en oeuvre. En France, par exemple, la police des eaux est du ressort de l'administration d'Etat (Equipement ou Agriculture selon les cas).

Il y aura donc d'autres intervenants, maîtres d'ouvrages, régies, sous-traitants, contrôleurs, observateurs, chefs d'entreprises, groupes militants, groupes de défense d'intérêts commerciaux ou industriels, simples citoyens,..... qui auront un intérêt financier, social, voire affectif dans la meilleure gestion de l'environnement du territoire étudié. Ces groupes constitueront l'ensemble des acteurs concernés.

. Le lancement des principaux groupes de travail

. Comité de Pilotage

. Le créer (et le structurer)
. L'animer

Créer un Comité de Pilotage: voir la fiche Al en annexe. Animer un Comité de Pilotage: voir la fiche A2 en annexe.

Pour l'animation du Comité de Pilotage, comme pour toutes procédures d'animation, il est extrêmement important de rédiger de bons comptes rendus (voir fiche A3).

. Groupes Thématiques Elargis

. Les créer
. Les animer

Les autres groupes de travail importants sont ceux qui vont examiner les problèmes de manière thématique aux différents stades de préparation du Plan ou de la Charte. On les a appelés ici Groupes Thématiques Elargis (GTE) pour bien montrer que ces groupes ne doivent pas être confondus avec des commissions de travail de municipalités, formés uniquement d'élus locaux. Au contraire, les GTE ont pour ambition de faire coopérer des personnes et organismes es qualité.

Voir la Fiche A4 en annexe.

L'animation des GTE pose des problèmes spécifiques à l'aspect technique de la gestion de l'environnement. Ceci est expliqué dans la fiche A5.

. Faire un diagnostic thématique

· découpage des thèmes
· rédaction du diagnostic

Le découpage des thèmes: il doit se faire en concertation avec le Comité de Pilotage. L'important est de bien couvrir l'ensemble des thèmes environnementaux, tout en ne débordant pas sur d'autres thèmes. Voici deux découpages expérimentés sur le terrain:

(District du Grand Angoulême, France)

· L'eau
· Les déchets
· L'air et les transports
· Les risques
· La gestion de l'espace

(Ville de Blagnac, France)

· Les nuisances (qualité de l'air, bruit, odeurs, risques industriels et naturels)
· Les flux (eau, déplacements, énergie)
· La gestion de l'espace (urbanisme, zones agricoles, espaces verts)
· La communication (formation, information, participation, éducation),

Pour un pays Africain ou du Bassin Méditerranéen, il serait sans doute bon d'ajouter des thèmes comme la gestion des sols et du foncier, ainsi que la gestion de la biodiversité. Il est en tout cas fondamental que la définition de l'environnement prise en compte dans ces travaux soit large. On a malheureusement l'exemple de certains pays dans lesquels l'environnement n'est perçu que par le petit bout de la lorgnette (propreté des rues de la capitale, par exemple), ce qui annihile tout effort de réflexion globale.

La Banque Mondiale recommande l'utilisation de la grille d'analyse des informations présentée dans la fiche A6.

La méthode de constitution du diagnostic (diagnostics thématiques, puis synthèse) repose en grande partie sur les démarches suivantes:

- analyses bibliographiques,
- enquêtes, visites et discussions de terrain,
- rencontres avec des personnes ressources,
- éventuellement, génération d'informations
- dépouillement ad hoc des informations.

Peu de commentaires à faire sur les analyses bibliographiques, sinon qu'elles doivent combiner l'approche scientifique classique avec le recueil de données plus qualitatives, recueillies par exemple dans les bulletins municipaux, journaux locaux ou équivalents. Il sera important de bien identifier la bibliographie analysée pour la lister dans le document de synthèse.

Les enquêtes, visites et rencontres de terrain sont de la plus grande importance. Beaucoup trop de diagnostics sont conçus très loin de la réalité. Une méthode comme le Rapid Rural Assessment, par exemple, recommande une approche sur les transects de territoire permettant de décrire le mode existant - avant le projet - de mise en valeur des sols et des eaux.

Les personnes ressources sont des experts du sujet, soit à partir d'une connaissance géographique, soit d'une connaissance thématique en relation avec le territoire étudié. Le nombre de personnes ressources lui-même dépendra étroitement de l'ampleur de la tâche et des moyens mis à disposition de l'intervention. Il y aura rarement moins d'une douzaine de personnes ressources et parfois jusqu'à une cinquantaine de personnes, voire plus. Plus le nombre de personnes ressources est élevé, plus la probabilité est forte de multiplier les rencontres-potions (uniquement destinées à manifester que telle personne a été effectivement rencontrée pour cause de pacification sociale ultérieure), mais ceci fait partie de la règle du jeu de l'appropriation finale. Les membres du Comité de Pilotage seront généralement des personnes ressources.

Il est impératif de rencontrer chaque personne ressource en tête à tête ou dans de toutes petites réunions (deux à trois personnes interviewées au maximum) pour une efficacité convenable de l'entretien.

L'identification des personnes ressources se fera en deux étapes:

- identification des premières personnes-ressources au cours du premier Comité de Pilotage,

- identification des autres personnes ressources par la méthode dite en grappes: on demande à chaque personne ressource rencontrée de suggérer d'autres personnes-ressource, etc.... Il faut évidemment gérer la clôture de la liste de personnes ressources effectivement rencontrées en fonction des considérations supra.

Chaque entretien avec les personnes ressources se fait à l'aide d'une grille d'entretien, remplie totalement ou partiellement au cours de l'entretien en fonction des circonstances. L'entretien donne lieu à compte-rendu écrit rédigé par l'intervenant extérieur le plus tôt possible après la rencontre et envoyé à la personne-ressource pour validation. Ce compte rendu suit dans sa forme générale les diverses rubriques de la grille d'entretien. Les comptes rendus non validés sont classés à part des comptes-rendus validés. Ces derniers sont fournis au maître d'ouvrage du Plan ou de la Charte en annexe des notes de synthèse des diagnostics.

Il est essentiel pour la rigueur de l'analyse de rencontrer les personnes ressources avec une grille d'entretien. On trouve à titre d'exemple la grille d'entretien utilisée pour la préparation de la Charte d'Environnement Urbain de la commune de Blagnac (France) en Fiche A7 en annexe du présent module.

Le cas échéant, il faudra générer des informations si les moyens et les délais le permettent:

- mesures et analyses complémentaires,
- enquêtes d'opinion.

C'est surtout dans les enquêtes d'opinion que la génération directe d'informations est la plus utile. Les opinions des habitants sont indispensables à l'analyse des thèmes environnementaux, et, le plus souvent, aucune enquête d'opinion pertinente et récente n'est disponible. Il faut donc réaliser une enquête et la dépouiller pendant la phase de diagnostic. Cette enquête alimente également le diagnostic des thèmes techniques et permet une sensibilisation préalable à la phase de prospective.

Pour les pays pauvres, il est essentiel que l'ensemble des habitants concernés soient impliqués très étroitement dans cette phase de diagnostic sous la forme de diagnostic participatif.

Le dépouillement des informations récoltées se fera au coup par coup, selon la disponibilité des informations de base et les moyens à disposition des intervenants.

Dans le domaine de l'eau, par exemple, il sera souhaitable de procéder aux dépouillements suivants:

- pluviométrie (sur une dizaine à une trentaine d'années)

Þ moyenne et écart-type annuels des pluies journalières,
Þ pluviométrie mensuelle moyenne et écart-type,
Þ pluviométrie mensuelle minimale et maximale,
Þ pluviométrie annuelle.

- hydrologie: sur au moins trois stations si possible: dans le territoire, en amont et en aval et sur au moins dix ans (période incluse dans la période d'observation pluviométrique) si possible.

Þ moyenne et écart-type annuels des débits journaliers,
Þ moyenne et écart-type annuels des débits d'étiage et de crue,
Þ évolution pluri-annuelle des débits d'étiage, moyen et de crue.

- hydro-biologie: sur les mêmes stations que ci-dessus, pour les indicateurs suivants: Demande Biologique en Oxygène (DBO), Demande Chimique en Oxygène (DCO), Oxygène Dissous, Azote total, Ammoniaque, Phosphore, Matières en Suspension (MES), métaux lourds (ajuster la liste en fonction des problèmes locaux probables),

Þ valeurs moyennes annuelles
Þ valeurs minimales et maximales annuelles avec les débits correspondants
Þ classification de synthèse (ex. grille de qualité de l'eau des Agences de Bassin françaises).

Comme on peut le voir, les données sont particulièrement abondantes et complexes à traiter pour l'eau. Dans d'autres domaines (qualité de l'air par exemple), on souffrira beaucoup plus du manque de données quantitatives que de leur surabondance.

Les principaux éléments à prendre en compte pour un diagnostic thématique sont spécifiques à chaque intervention. A titre d'exemple, on trouve la liste des éléments pris en compte pour le diagnostic thématique eau de la Commune de Blagnac en fiche A8 en annexe du présent module.

Ce qui est important, pour ce plan-type ou pour un autre, est de bien faire ressortir les principaux problèmes ou atouts environnementaux en termes d'enjeux pour les décideurs.

. Faire la synthèse de diagnostics thématiques

- mise à plat des informations
- synthèse des informations et opinions fournies par les personnes ressources
- coûts et recettes des interventions environnementales
- exigences réglementaires
- demandes sociales

Une fois les diagnostics thématiques posés, nécessaires pour pouvoir bien cerner les problèmes de manière analytique, il convient essentiellement de synthétiser les informations pour présenter aux décideurs une vue homogène des problèmes et atouts environnementaux du territoire étudié. C'est une phase essentielle, pour laquelle il n'existe pas réellement de recette de cuisine et qui doit mélanger intuition et approche rationnelle, expérience et transparence. Tout juste peut-on faire les recommandations suivantes.

La mise à plat des informations est un travail délicat et qualifié. Il s'agit, à partir de l'expérience de l'intervenant, de juger quelles sont les informations les plus importantes. Les principaux critères pouvant être utilisés à ce stade sont:

- irréversibilité des évolutions,
- risques sanitaires encourus à la suite d'une mauvaise gestion de l'environnement,
- banalisation progressive de ressources spécifiques et exceptionnelles,
- opportunité exceptionnelle d'un site ou d'un écosystème/paysage remarquable,

La synthèse des informations et opinions fournies par les personnes ressources est une démarche importante. Elle peut se faire sous forme de tableau à double entrée, du type du suivant:

Personne ressource

1

2

3

4

5

6

7

Domaine d'environnement








Qualité de l'air

X


X





Qualité de l'eau


X




X


Inondations

X





X


Sécheresse


X

X

X




Erosion




X

X

X

X

...............








...............








Les coûts et recettes des interventions environnementales doivent être chiffrés aussi précisément que possible.

Les coûts pour une collectivité doivent être appréhendés globalement:

- dans le cas de travaux effectués en sous-traitanc pour la collectivité, les coûts de gestion pour cette collectivité sont imputés directement,

- dans le cas de travaux en régie, il ne faut pas oublier d'identifier l'ensemble des charges associées à une exploitation: par exemple, pour la gestion des ordures ménagères, les charges d'achats et d'entretien des camions, ainsi que les coûts salariaux des employés municipaux sont comptabilisés à part. Il faut intégrer tous ces éléments pour calculer le coût global des opérations.

Il est souvent difficile d'estimer les recettes des opérations environnementales:

- dans les cas les plus simples, les opérations donnent lieu à recettes fiscales directes (c'est le cas, par exemple pour l'assainissement). Il convient de rapprocher les dépenses et les recettes pour étudier la couverture des unes par les autres. Il faut cependant bien distinguer les dépenses de fonctionnement et les dépenses d'investissement.

. les dépenses réelles d'une opération de gestion de l'environnement sont le total des dépenses de fonctionnement et des dépenses d'amortissement, qui sont une fraction des dépenses d'investissement. Plus exactement, on a:
Dépenses totales = dépenses de fonctionnement + amortissement
et
Amortissement = total des dépenses antérieures d'investissement dépréciées annuellement,

. les recettes doivent au moins couvrir les dépenses totales. Il ne faut pas non plus oublier que les recettes fiscales proviennent en grande partie de taxes payées par les ménages, donc hors système productif, donc peu «durables». Il n'est donc pas convenable, sauf net accroissement de la qualité de services, d'accepter des accroissements rapides et soutenus des recettes fiscales environnementales,

- dans les cas les plus complexes, les opérations ne donnent pas lieu à recettes directes. C'est notamment le cas pour la gestion des eaux pluviales. Dans ce cas, il faut recourir à des estimations des bénéfices économiques apportés par la gestion dans ce domaine (voir méthodes proposées dans le module 7).

Une synthèse de cette partie financière doit faire ressortir des ratios type:

- frais totaux par tonne de déchets gérée,
- frais totaux par tonne de pollutions aquatiques (ex. Déficit Biochimique en Oxygène -DBO) éliminée.

Ces ratios permettent de comparer l'efficacité de la gestion étudiée par rapport à d'autres installations dans des collectivités de taille comparable.

Les exigences réglementaires sont fondamentales, Dans les villes, ainsi que dans la plupart des pays les plus avancés dans la gestion de l'environnement (pays riches, mais aussi pays pauvres comme Maurice), des normes d'émission ont été fixées par les Gouvernements centraux pour les pollutions aquatiques comme aéroliques.

Les demandes sociales, enfin, sont d'une importance déterminante, mais non exclusive, pour l'établissement de la synthèse.

Ces demandes sociales auront été approchées par un sondage auprès des habitants du territoire. Selon les moyens mis à disposition des intervenants, ces sondages pourront se faire,

- soit par remise systématique à l'ensemble des habitants, le retour du questionnaire dépendant de la bonne volonté de chacun des interrogés (s'attendre à un taux de réponse de l'ordre de 3 à 5%),

- soit par enquête individuelle selon une méthode type quota.

Chacune de ces deux méthodes a ses avantages et ses inconvénients:

- la remise systématique a l'avantage d'être souvent peu onéreuse (questionnaire glissé dans le bulletin municipal, par exemple), d'opérer en même temps une sensibilisation de l'ensemble des habitants, et de voir répondre les plus dynamiques, avec l'inconvénient d'un manque de représentativité des répondants,

- l'enquête individuelle est généralement plus coûteuse, mais plus «représentative».

Toutefois, l'atomisation actuelle des comportements, ainsi que sa volatilité chez de nombreux habitants, peuvent rendre cette représentativité aléatoire et éphémère.

Le dépouillement des demandes sociales figurera donc également dans la synthèse du diagnostic, sachant que:

- les opinions exprimées par les habitants tendent à privilégier les actions très visibles, et affectant leur environnement proche (habitat, voiture) et quotidien (peu de chance de voir «sortir» des préoccupations liées aux inondations dans les périodes de sécheresse et vice-versa, peu de chances de voir sortir des solutions «globales» également),

- certains intervenants se sont contentés de demander aux habitants de dresser une «liste d'arbre de Noël» de leurs desiderata (ex. Opération Ancrage Vert au Niger ou Plan d'Environnement de Castres en France), ce qui a abouti à des aberrations (frustrations au Niger, plan de 140 actions à Castres).

L'essentiel est que la synthèse du diagnostic fournisse absolument:

- une vision d'ensemble de toutes les approches ci-dessus,
- les éléments de réflexion sur les tendances futures affectant l'environnement sur le territoire étudié.

DEUXIEME PHASE: PROSPECTIVE

· préparer un exercice de prospective
· animer un exercice de prospective
· gérer les suites d'un exercice de prospective

. Préparer un exercice de prospective

Définition: un exercice de prospective est un travail collectif, associant des acteurs locaux et des spécialistes du sujet, fournissant un éclairage nouveau sur les événements pouvant affecter le territoire étudié dans les dix à vingt années à venir, permettant aux acteurs locaux d'être pro-actifs.

Justification: sans exercice de prospective, la seule possibilité de projeter l'équilibre offre-demande de ressources d'environnement est l'analyse de tendances (voir plus loin). Cette analyse de tendances ne permet pas de dégager les éléments qualitatifs fondamentaux du développement local, et ne permet surtout pas d'anticiper sur les ruptures de tendances.

Mode d'emploi: on peut, en France, distinguer deux grands types d'écoles de prospective:

l'une, symbolisée par le professeur Michel GODET du CNAM qui a mis l'accent sur les outils formels et la quantification du qualitatif, et

l'autre symbolisée par Hugues de JOUVENEL de l'association internationale Futuribles qui met plus l'accent sur la création d'espaces de créativité et de liberté pour les acteurs locaux, Dans les deux cas, l'exercice de prospective se prépare par une organisation de deux journées bloquées de réflexion, permettant à l'ensemble des intéressés de participer, ces deux journées pouvant si possible être précédées par la diffusion d'une synthèse du diagnostic.

. Animer un exercice de prospective

Un exercice de prospective typique se déroulera sur quatre demi-journées bloquées, c'est à dire deux jours.

On trouve dans la fiche A9, pour l'exemple, l'organisation des journées de prospective pour la préparation de la charte d'environnement de Blagnac.

Il y a peu à ajouter quant à la dynamique de groupe à orchestrer pour cet exercice de prospective. Il est pour l'essentiel le même que précédemment (nomination d'un bureau du groupe, outils audio-visuels, gestion du tour de parole,......). Dans la mesure du possible, ce seront les Groupes Thématiques Elargis déjà constitués qui travailleront pendant l'exercice de prospective.

La substance des travaux de prospective réclame cependant une explication spécifique: doudou.

Ces travaux sont organisés autour de deux phases principales:

1 - Quels sont les problèmes d'environnement qui vont apparaître, durer ou s'aggraver au terme de 10/15 ans?

Ceci étant observé au travers:

. des tendances passées et de leurs causes,
. des nouvelles causes qui pourraient apparaître,
. des impacts que cela aura sur l'environnement du territoire étudié.

Cette phase 1 appelée "Que va t'il advenir sur le territoire étudié?" correspond à la détermination des grands défis que doit relever la collectivité.

2 - Face à ces problèmes d'aujourd'hui ou futurs, quelles solutions peut-on proposer? Que peut on faire?

Ceci étant étudié en fonction:

. de la marge de manoeuvre de la collectivité sur le sujet,
. des actions en cours ou prévues qui répondent déjà au défi.

. Gérer les suites d'un exercice de prospective

Au minimum, les journées de prospective doivent donner lieu à comptes rendus permettant aux participants d'identifier leurs contributions.

L'enregistrement des présentations et des débats est la méthode la plus rigoureuse. Elle a cependant l'inconvénient de la lourdeur et du coût.

Il est parfois préférable de sacrifier sur cet aspect formel et de diffuser des notes partiellement rédigées mais n'ayant pas nécessité de travaux trop dispendieux,

TROISIEME PHASE: PLANIFICATION

. Déterminer des objectifs d'intervention

Il doit normalement «sortir» de l'exercice de prospective une liste assez hétéroclite des grands défis que veut relever la collectivité et des grandes lignes d'action qu'elle se trace pour relever ces défis.

Un défi est la manifestation d'une volonté politique: le Nouveau Larousse Universel le définit comme le refus de se soumettre. C'est essentiellement une réaction à une situation future indésirée.

Un objectif est, selon le même dictionnaire, un but à atteindre. On peut dire aussi que c'est une situation future désirée.

Il convient de remettre en cohérence ces grandes lignes d'action à partir d'une réflexion active sur les objectifs de l'action future.

Ces objectifs peuvent être interprétés comme un négatif des défis. Ils doivent être définis, ou au moins validés, par les journées de prospective (par exemple dans la synthèse finale «à chaud»).

Dans beaucoup de cas, les principaux objectifs seront:

- dans une région riche du nord:

· améliorer la qualité de l'environnement local
· améliorer la qualité de vie perçue par les habitants
· maîtriser les coûts pour la collectivité

Voici un commentaire de ces objectifs.

Le premier objectif "améliorer la qualité de l'environnement local" est de nature scientifique et technique: sa réalisation pourra être mesurée par la collecte de données " objectives " découlant d'analyses biologiques, chimiques ou physiques (ex. teneur des eaux en nitrates).

Il ne suffit cependant pas d'améliorer cette qualité, si la satisfaction des citoyens ne " suit " pas. Le deuxième objectif "améliorer la qualité de vie perçue par les habitants" est de nature sociologique: sa réalisation pourra être mesurée par la collecte de données d'enquêtes sur les modifications de perception par les habitants de la qualité de leur cadre de vie.

Enfin, il est toujours possible d'améliorer qualité de l'environnement et perceptions par les intéressés sans limitation de dépenses. Toutefois, les soucis d'une bonne gestion publique entraîne l'obligation d'un troisième objectif "maîtriser les coûts pour la collectivité".

- dans une région - ou un pays - pauvre du sud:

· améliorer les conditions sanitaires environnementales
· faire contribuer la gestion de l'environnement au développement économique et social
· gérer l'environnement au moindre coût

Voici des commentaires généraux sur ces trois objectifs.

Souvent en pays pauvre, la mauvaise qualité de l'environnement induit une diffusion très rapide des maladies contagieuses, en particulier gastriques (déchets, déjections et eaux usées aboutissant dans de l'eau de boisson, en particulier). Ainsi, améliorer les conditions environnementales peut permettre d'améliorer les conditions sanitaires, conditions essentielles au bien-être des habitants.

La beauté de l'environnement ne se mangeant pas en salade, en paraphrasant un adage populaire, il est fondamental de faire contribuer la gestion de l'environnement au développement économique et social en cherchant en priorité une gestion du patrimoine en permettant une valorisation durable, par exemple par le biais de l'éco-tourisme ou d'une exploitation rationnelle des ressources ligneuses, des sols, de l'eau.........

Enfin, en pays pauvre encore plus qu'en pays riche, il est fondamental de bien gérer les ressources financières rares en gérant l'environnement au moindre coût, ce qui conduira à privilégier les solutions appropriées à chaque cas, en particulier les luttes contre le gaspillage et la substitution capital-travail.

Une fois les objectifs fixés et validés par les intéressés, il convient de progresser vers les réalisations en préparant un plan d'action.

La Banque Mondiale recommande, sur la base de plusieurs plans urbains d'environnement préparés dans plusieurs pays, dont le Ghana (Accra) et la Tunisie (Tunis), la rédaction d'un profil environnemental selon le plan fourni dans là fiche A10 de l'annexe.

.Préparer un plan d'action

. La stratégie
. Le premier cadre de plan
. Les fiches action
. Hiérarchiser les actions

LA RECHERCHE D'UNE STRATÉGIE

La stratégie est une notion souvent difficile à cerner pour les non habitués. Elle est pourtant facile à illustrer conceptuellement.

La stratégie pour un voyageur, c'est par exemple le choix du mode de transport pour aller d'un point à un autre, la tactique étant le choix de l'itinéraire précis,

Pour un décideur, le choix stratégique est celui qui va encadrer les choix techniques précis ultérieurs.

Il est important de noter que le choix stratégique dépend de plusieurs grandes données:

- le point de départ (la situation actuelle telle que diagnostiquée),

- le point d'arrivée (l'objectif)

- les moyens dont on dispose ou que l'on peut mobiliser raisonnablement (financiers, mais aussi techniques, culturels, relationnels,......),

- les préférences individuelles (voire les préjugés).

Pour passer d'une situation actuelle à un objectif, il existe le plus souvent plusieurs stratégies, tout comme on dispose en général de plusieurs moyens de locomotion pour se rendre d'un point à un autre.

Pour un même objectif (ex. améliorer l'état d'une rivière), on disposera de plusieurs stratégies, et le choix de la stratégie reflétera les arbitrages faits entre les moyens que l'on veut mobiliser et les préférences des décideurs: on pourra par exemple décider d'investir beaucoup d'argent et relativement peu de temps pour traiter l'eau de la rivière, ou au contraire mobiliser moins d'argent; mais plus de temps pour chercher les moyens d'éliminer ou de diminuer la production de polluants en amont.

LE PREMIER CADRE DE PLAN

Les Anglo-Saxons ont exporté en France (ou les Français ont importé des Etats-Unis?) la méthode Planning, programming and budgeting system (PPBS), ainsi que la méthode LogFrame (Cadre Logique).

Ce qui est important, c'est que, dans l'une comme dans l'autre méthode, la stratégie est définie étape par étape à partir des objectifs. Selon la complexité des problèmes, on pourra passer d'objectifs à sous-objectifs et de sous-objectifs à actions (trois étapes) ou de finalités à objectifs, d'objectifs à sous-objectifs et de sous-objectifs à actions.

Les Français ont appelé cette méthode «graphe de pertinence», puisque, à chaque étape, on se pose le problème de la pertinence du sous-objectif par rapport à l'objectif, et de l'action par rapport au sous-objectif.

Voici, par exemple, page suivante le graphe de pertinence du Plan d'Action Environnemental de Madagascar (voir aussi module 5 dimension socio-organisationnelle du développement durable).

Cette définition de stratégie doit se faire dans la mesure du possible en travail de groupe alterné entre séances collectives de «remue-méninges» et construction progressive du graphe -qui peut être effectuée par un spécialiste extérieur sous le contrôle du groupe.

Quelques règles logiques simples serviront à cadrer cette recherche stratégique:

- les éléments du niveau immédiatement inférieur sont déduits des éléments d'un niveau donné (on va des objectifs vers les sous-objectifs et non l'inverse),

- à un même niveau (objectif-objectif, sous-objectif-sous-objectif,.....), il n'y a pas de contribution, les contributions ne pouvant venir que du niveau immédiatement inférieur,

- un élément de niveau supérieur doit recevoir une ou plusieurs contribution(s) du niveau inférieur: un objectif doit réclamer la mise en oeuvre au minimum d'un sous-objectif, mais peut aussi recevoir les contributions de plusieurs d'entre eux,

- au ni veau le plus bas, un élément doit contribuer à au moins un élément du niveau immédiatement supérieur: on élimine les éléments qui «ne servent à rien»,

- en première approximation, la règle empirique du 3 peut être utilisée: 3 objectifs, pour 9 sous-objectifs, etc....

PROPOSITION DE PLAN D'ACTION ENVIRONNEMENTAL MADAGASCAR JUILLET 1988

La définition de la stratégie s'arrête au niveau de la liste des grandes actions avec une précision qui dépend, là aussi, des moyens mis en oeuvre pour la définition de la stratégie. Il importe surtout que la définition de l'action puisse s'accompagner d'un minimum de quantification et de possibilité de repérage de terrain.

Ainsi, formation de 100 agriculteurs par an dans la région de...... pourra être considéré comme une action, alors que «promouvoir l'éducation primaire dans la région de....» restera au niveau des objectifs ou des sous-objectifs.

LES FICHES ACTIONS

Chaque action fera l'objet d'une description sous forme de fiche détaillant les principales caractéristiques de cette action, la situant en particulier dans l'espace, dans le temps et dans l'organisation sociale existante. Voici un exemple pratique de fiche-action dans la fiche A11 en annexe.

LA HIÉRARCHIE DES ACTIONS

Il sera souvent difficile de disposer des moyens permettant de mener à bien l'ensemble des actions cohérentes dans la stratégie.

Les contraintes sur les moyens peuvent être financières, mais elles peuvent aussi déborder ce cadre, les actions envisagées pouvent dépasser par exemple la capacité d'organisation ou de qualification des habitants.

En tout état de cause, il est souvent obligatoire d'effectuer des choix parmi les actions déterminées dans la recherche stratégique.

Il conviendra donc dans la plupart des cas de rechercher une hiérarchie entre les actions ou au moins une procédure de tri entre les actions retenues à court terme et les actions abandonnées ou renvoyées à une époque ultérieure.

Plusieurs mécanismes existent pour effectuer ces tris. Ce sont les mêmes que pour la phase de programmation, et ils seront décrits plus en détail dans ce passage situé plus loin.

CONCLUSION SUR LA PLANIFICATION

Parfois, il sera possible de se contenter de la phase de planification. C'est par exemple le cas pour les définitions de plans (ex. Plans Nationaux d'Action Environnementale). Le plus souvent, cependant, toutes les démarches ci-dessus serviront à alimenter une programmation pluri-annuelle. Celle-ci réclame plusieurs outils spécifiques qui seront décrits ci-après.

QUATRIEME PHASE: PROGRAMMATION

Préparer une série coordonnées d'interventions

. La programmation par rapport à la planification
. La fiche technico-économique
. Le budget
. Le financement
. Le calendrier

. LA PROGRAMMATION PAR RAPPORTA LA PLANIFICATION

Au contraire d'une action, une intervention est un acte élémentaire très précisément défini dans l'espace et dans le temps correspondant à un engagement ou à une opération particulière de la part du ou des maître(s) d'ouvrage. Une action est en général une suite coordonnée d'interventions. Ces interventions sont suffisamment individualisées pour pouvoir être confiées à des groupes ou individus distincts, et qu'on peut envisager un arrêt d'une action «en cours de route».

Au stade de la programmation également, il existe plusieurs options pour réaliser une action. Ainsi, pour reprendre l'exemple ci-dessus, former 100 agriculteurs par an peut se faire sous forme d'interventions diverses, éventuellement concurrentes, éventuellement complémentaires.

On peut ainsi penser, soit à faire venir ces 100 agriculteurs dans un lycée agricole de la capitale ou régionale, soit d'aller vers ces agriculteurs pour les former «sur le tas». Ces deux interventions ne mobiliseront pas les mêmes moyens, mais n'auront pas forcément non plus la même efficacité ni la même durabilité.

Ce qui compte ici est que le responsable de programmation doit faire les choix que n'avaient pas fait les planificateurs avant lui. Ainsi, le responsable de programmation peut décider que l'action «formation de 100 agriculteurs par an dans la région de.....» réclame la mise en oeuvre des deux interventions suivantes:

- construction et fonctionnement d'une nouvelle école,
- recrutement et formation des maîtres.

Il ne faut pas confondre cette programmation avec le travail d'organisation. Ainsi, l'intervention «construction d'une école» peut encore se décomposer en actes élémentaires selon le schéma suivant:

- choix du site définitif,
- avant-projet sommaire,
- ingénierie de la construction de l'école,
- mise à disposition des moyens de fonctionnement de l'école.

Mais ceci dépasse la procédure de programmation, qui, elle, doit permettre de tracer un cadre pluri-annuel à des gestionnaires habitués à raisonner en budgets annuels.

. LA FICHE TECHNICO-ÉCONOMIQUE

Chaque intervention fait alors l'objet de la rédaction d'une fiche technico-économique qui doit contenir toutes les informations utiles à la décision des futurs gestionnaires. Cette fiche est fondamentalement la même que les fiches-actions, mais comprend également une partie de chiffrage financier (coûts et bénéfices de l'intervention). On peut aussi voir les interventions comme des phases de mise en oeuvre des actions.

.LE BUDGET

Le total des interventions représente le budget d'ensemble du programme.

Il est important pour bien préparer un budget de programme de prendre en compte les éléments suivants:

- les données financières doivent être en monnaie courante et donc intégrer l'inflation prévisionnelle,

- les données financières doivent faire la part des frais d'investissement et des frais de fonctionnement. Les frais de fonctionnement sont en effet des frais «récurrents», dont l'effet se poursuit après la période d'investissement du programme.

. LE FINANCEMENT

Le financement du budget doit être cohérent avec la structure des frais:

- des prêts à long terme doivent couvrir les investissements à longue durée de vie, les prêts à court terme les investissements à courte durée de vie (une voiture doit être financée par des prêts à quatre ou cinq ans minimum),

- des subventions doivent couvrir les investissements ne produisant pas de recettes financières nettes (par exemple, des actions de conservation de la nature ne donnant pas lieu à des recettes touristiques),

- les plans de financement peuvent faire intervenir plusieurs financiers, avec des procédures et des méthodes variées. Mais il faut garder ce nombre à une hauteur raisonnable (en première approche, pas plus de 4 co-financiers pour un projet de taille moyenne).

. LE CALENDRIER

Il convient enfin de positionner le programme dans le temps. Il sera évidemment plus facile de placer les interventions pouvant démarrer à court terme par rapport à celles devant commencer en fin de période.

Toutefois, l'aspect «logique d'enchaînement avec les autres interventions de la Charte» peut servir de guide à ce positionnement dans le calendrier, ainsi que le bon sens du responsable de la programmation.

. Préparer le suivi interactif

. La nécessité d'un suivi interactif
. Bâtir les indicateurs de suivi interactif
. Bâtir un programme de suivi interactif

. LA NÉCESSITÉ D'UN SUIVI INTERACTIF

Il est indispensable de suivre le déroulement d'un programme. C'est en effet le moyen de:

- vérifier que sa mise en place est cohérente avec les prévisions initiales (vérification administrative),.

- vérifier que les impacts du programme sont cohérents avec les objectifs initiaux (verification de substance).

On considérera ici que les techniques de suivi interactif sont connues des stagiaires. Le programme de suivi interactif spécifiera pour chaque indicateur à mesurer son positionnement dans l'espace (géographique) et dans le temps.

Voici un exemple pour la Charte d'Environnement de Blagnac

Indicateurs d'impact à mesurer dans le cadre du suivi interactif de la mise en oeuvre de la Charte

Indicateur

Localisation

Périodicité des mesures

HABITANTS:



. degré de satisfaction des conditions du cadre de vie,

C

B

. déplacements en voiture individuelle,

C

A

. utilisation des transports urbains (km-voyageurs).

C

A

EAU:



. PLUIES




- pluviométrie annuelle

C

A


- pluviométrie estivale

C

A

. HYDROLOGIE ET HYDROBIOLOGIE




- débit d'étiage journalier,

G,T,RM

A


- débit moyen journalier,

G,T,RM

A


- débit de crue journalier,

G,T,RM

A


- moyenne et maxima des principaux

G,T,RM

A

indicateurs de qualité des eaux (DBO5, DCO, MES, métaux lourds, azote, ammoniaque, phosphore)



. EAUX PLUVIALES




- teneurs moyennes et maximales en hydrocarbures et métaux lourds des eaux de ruissellement

C

B

. ZONE INONDABLE




- étendue de la zone inondée maximale de l'année

C

A

AIR:




- teneurs moyennes et maximales en NOx, CO, CO2, hydrocarbures

C

B

SOLS:




- occupation des sols dans la commune et, en particulier, espaces naturels et agricoles

C

Q


- érosion des sols

C

Q

FAUNE:




. inventaire des espèces

C

Q

FLORE:




. inventaire des espèces

C

Q

DECHETS:




. quantités collectées annuellement dans la collecte générale et dans la collecte sélective

C

A


. teneur en matières organiques

C

Q


. teneur en autres matières recyclables

C

Q

Légende: Localization: C = commune, G = Garonne, T = Touch, RM = Riou Mort
Périodicité: A = Annuelle, B = Biennale, Q = Quinquennale

GENERALITES

. L'enchaînement des phases

Dans ce qui précède, on a considéré que l'enchaînement des phases était linéaire, ce qui est à la fois logique et efficace.

On a donc normalement la séquence suivante:

DIAGNOSTIC
PROSPECTIVE
PLANIFICATION
PROGRAMMATION

, la fin d'une phase marquant le démarrage de la suivante.

Cette séquence d'ensemble devra évidemment être gardée telle quelle. En pratique, cependant, on pourra, pour des questions de calendrier d'ensemble, et à cause des itérations possibles, admettre un chevauchement des phases, en particulier de commencer la phase de prospective sans que la phase de diagnostic soit intégralement terminée.

3. LES MESURES CORRECTIVES

Dans tout ce qui précède, on a fait l'hypothèse que tout se passait comme prévu. Dans la réalité, en revanche, il se passe toujours des "pannes", plus ou moins graves, plus ou moins faciles à réparer. Voici quelques unes de ces pannes.

. Les dysfonctionnements de groupes

. Le Comité de Pilotage et les Groupes Thématiques

. inactif
. déséquilibré
. trop conflictuel

Le Comité de Pilotage ne peut être une simple chambre d'enregistrement. Les intervenants doivent effectuer leurs travaux selon une déontologie de qualité. Ils ne sont cependant pas omniscients et ne peuvent en tout cas prendre les options de politique générale à la place du Comité de Pilotage. Un Comité de Pilotage trop passif peut être révélateur de trop de tensions internes non exprimées publiquement. Il convient de placer le problème à l'ordre du jour, quitte à modifier la composition de ce Comité.

Un Comité de Pilotage déséquilibré peut être composé de trop de représentants institutionnels. Il convient de rééquilibrer avec plus de représentants de la société civile.

A l'opposé du Comité de Pilotage trop passif, on trouve le Comité trop conflictuel: le travail de synthèse des intervenants dans un délai court entraîne forcément un flou minimum dans les résultats. Le Comité de Pilotage peut réagir de deux manières, soit corriger les erreurs et passer au sujet suivant d'une manière adulte, soit attaquer les intervenants sur la qualité de leur travail de manière punitive. Ceci est le signe d'une ambiance de travail improductive et du règlement de conflits larvés. Dans ces conditions, il est probable que l'intervention ne pourra se dérouler dans une confiance réciproque, indispensable pour mener à son terme la procédure décrite ici. La situation n'est alors pas mûre pour une démarche créative. Il faut dans ces conditions:

- soit résoudre le conflit en repartant sur de nouvelles bases de confiance réciproque,

- soit limiter l'intervention à des prestations extrêmement techniques (diagnostic technico-économique seul, projections des tendances, pas de planification avec les intervenants).

Ce qui vient d'être dit pour le Comité de Pilotage peut l'être pour les Groupes Thématiques.

. Les groupes écartés et leurs réactions

Des groupes ayant des intérêts directs dans la gestion locale de l'environnement peuvent avoir été écartés de la concertation par inadvertance ou parce qu'ils refusent la coopération.

L'attitude des intervenants doit être de signaler le problème et de proposer des solutions de coopération avec ces groupes, dans des circonstances aussi transparentes que possible.

. L'équipe technico-économique d'intervenants déséquilibrée

Il est de la première importance pour l'équipe d'intervenants d'être homogène. Une équipe déséquilibrée ne pourra aller jusqu'au bout de l'assistance à la préparation de la Charte. Si les déséquilibres apparaissent en début de procédure (phase de diagnostic), il est encore temps de remplacer les intervenants défaillants pour l'exercice de prospective, et il est impératif de le faire.

. L'obtention de l'information

. Sources d'information difficiles à trouver

En France, les sources d'information sur l'environnement sont relativement bien identifiées et sont raisonnablement efficaces, malgré de fortes lacunes (qualité de l'air, par exemple).

Dans d'autres pays, en particulier du sud, l'information pertinente est difficile à trouver localement, par manque de systèmes de documentation modernes et bien équipés. Il faut aussi recourir à des méthodes participatives et informelles pour recueillir les informations contenues dans les mémoires des habitants.

Il faudra en tout état de cause insister, rien n'étant pire que de fonder une planification environnementale sur une information incomplète, ni que de devoir générer à nouveau - dans de mauvaises conditions - une information déjà générée.

. Sources d'information difficiles à traire

On trouve souvent des interlocuteurs réfractaires au partage de l'information, souvent auprès des fonctionnaires d'Etat. Il est de la première importance que le maître d'ouvrage mandate officiellement les intervenants pour récolter l'information nécessaire, et que le Comité de Pilotage puisse faire acte d'autorité pour obtenir les documents permettant aux intervenants de faire leur métier dans des conditions convenables.

. Le choix des indicateurs de qualité du milieu et de leurs caractéristiques

Il n'existe pas de normalisation de la présentation des données de l'environnement aux différentes échelles pertinentes pour un plan local ou une charte.

Il faut donc dans le concret choisir les indicateurs propres à chaque intervention. Les règles de bon sens relatives à ce choix sont:

- les indicateurs doivent faire ressortir les principaux dangers pour la santé humaine et pour le bon fonctionnement des écosystèmes. A l'inverse, il ne faut pas se laisser aller au catastrophisme,

- les indicateurs doivent être d'une lecture accessible pour les membres du Comité de Pilotage,

- les indicateurs doivent avoir une valeur représentative sur une portion significative du territoire étudié.

Ceci posé, l'interprétation des indicateurs a autant d'importance que le nombre de ces indicateurs.

. Les synthèses

. Manque de temps pour les faire

Il est peu admissible de rater une synthèse par manque de temps, et il est souhaitable d'allonger les délais si ceux-ci ne permettent pas la synthèse.

. Manque de capacité de synthèse de l'équipe d'intervenants

Ceci est une condition de rupture du contrat de travail entre Comité de Pilotage et intervenants. Des intervenants incapables d'oeuvre de synthèse sont inutiles dans un tel exercice.

. Les grands enjeux stratégiques

. La démocratie

Un exercice de planification/programmation tel qu'il est décrit dans ce qui précède, s'il est réussi, est un exercice de démocratie.

Cet exercice permet en effet, à partir d'une collaboration entre l'ensemble des parties concernées, de déterminer les engagements des uns et des autres pour une période raisonnablement longue (5 ans) dans la transparence.

. Les tentatives des sectoriels de prendre l'environnement en otage

Une des tentations contre lesquelles lutter dans ce type d'exercice est la main-mise des spécialistes sectoriels (agronomes, forestiers, en particulier), qui, selon leurs propres déclarations «font de l'environnement depuis longtemps».

Or, l'approche environnementale est par definition transversale.

Un projet de gestion d'écosystème forestier peut devenir très rapidement un projet d'exploitation forestière s'il est mis entre les mains de forestiers.

Il est essentiel de mettre les sectoriels à leur place, en tant que participants aux Groupes Thématiques Elargis plutôt que comme pilotes d'un tel exercice.

. L'équilibre des moyens (financiers, techniques, humains) à mettre en oeuvre

Les réponses aux problèmes environnementaux se font par une panoplie d'interventions allant du réglementaire au financier en passant par le socio-culturel.

Il est de la même manière essentiel que les moyens nécessaires soient mis à la disposition de cette oeuvre de planification ou programmation, et que les moyens financiers, techniques (disponibilité de l'information, en particulier) et humains (compétence, délai de travail) soient mis à la disposition de cette préparation.

Phase de synthèse

Les plans et chartes d'environnement préfigurent les plans et chartes de développement durable qui devraient voir le jour dans les années à venir.

On voit les premiers signes de ces plans de développement durable au niveau du vocabulaire, à défaut d'un réel engagement.

Ce qui a été exposé précédemment concernait plus particulièrement une collectivité territoriale en pays riche du nord. On peut toutefois adapter cette approche à des situations de pays pauvres. Les commissions paysans-forêts de Côte d'Ivoire, par exemple, créées pour tenter de freiner la deforestation, pourraient avec profit s'inspirer de ces méthodes. Il faut certainement, dans la plupart des pays pauvres, prévoir des délais d'intervention allongés, et une adaptation des méthodes.

Démarches sectorielles


Objectifs pédagogiques spécifiques
Phase d'apprentissage
Phase de synthèse


Objectifs pédagogiques spécifiques

Rendre le stagiaire capable de:

- identifier les ressources naturelles impliquées dans l'action sectorielle éventuelle du stagiaire,

- identifier des technologies, pratiques et politiques pertinentes pour une gestion plus durable des ressources naturelles concernées par son action sectorielle éventuelle,

- intégrer des principes de gestion durable des ressources naturelles dans sa pratique sectorielle éventuelle,

Phase d'apprentissage

Les responsables sectoriels doivent apporter leur propre contribution à la gestion durable des ressources naturelles. Ils ont même un rôle fondamental à jouer, car ce sont eux qui font les réalisations sur le terrain.

Cette rapide revue des mises en oeuvre sectorielles des principes du développement durable est exposée selon le schéma suivant:

- agriculture et durabilité,
- foresterie et durabilité.

I. AGRICULTURE ET DURABILITÉ

Pour l'agronome, la durabilité des systèmes de production fait partie intégrante de son approche. Deux facteurs cependant viennent renforcer le besoin d'intégrer plus étroitement les soucis de durabilité dans l'approche agronomique actuelle:

- les raisonnements des agronomes ont été de plus en plus «pollués» par les économistes au point d'occulter le plus souvent le long terme, même dans leurs approches techniques,

- l'approche «durabilité» nécessite que les impacts de l'agriculture sur son environnement, immédiat ou non, soient gérés au même titre que le système d'exploitation proprement dit.

On trouve donc ci-après quelques indications sur la relation agriculture-durabilité structurées comme suit:

- de nouveaux impératifs pour l'agriculture,
- les risques d'impacts négatifs de l'agriculture conventionnelle,
- les stratégies agricoles à mettre en place,
- les outils d'intégration de la durabilité en agriculture,
- les besoins spécifiques de grandes régions mondiales,
- les critères d'évaluation de la durabilité des projets agricoles.

1. DE NOUVEAUX IMPÉRATIFS POUR L'AGRICULTURE,

Dans les pays riches, l'agriculture a cessé depuis longtemps d'être seulement source de produits alimentaires, bruts ou transformés pour la consommation locale. L'agriculture est également productrice de matières premières industrielles, mais aussi génératrice de services comme l'entretien des paysages, l'éducation des jeunes (voire la rééducation de toxicomanes, par exemple), et même un acteur important de l'aménagement du territoire. C'est aussi, dans la plupart des pays pauvres, une source importante de devises et à ce titre un des fers de lance du commerce extérieur.

L'agriculture a des rôles multiples à jouer. Délaissée souvent dans les grands programmes de développement et d'infrastructure, l'agriculture familiale possède d'importants réservoirs de productivité lui permettant de s'adapter à de nouvelles donnes. On a vu par exemple au début des années 80 les agricultures Sahéliennes réagir très positivement à l'organisation des marchés céréaliers, montrant ainsi l'existence de ces réserves de productivité dans des territoires réputés trop secs pour un accroissement de la production agricole.

Ces réserves de productivité devraient maintenant être mobilisées dans une direction compatible avec la bonne gestion des ressources naturelles.

Dans beaucoup des pays pauvres, où les bonnes terres agricoles sont relativement rares, et où la deforestation par extension de l'agriculture itinérante est un fléau important contre l'environnement et contre l'économie, cette mobilisation devra principalement se faire dans la recherche d'un nouveau type d'intensification.

2. LES RISQUES CONVENTIONNELLE D'IMPACTS NÉGATIFS DE L'AGRICULTURE

On peut les classer dans les catégories suivantes:

- dégradation des sols,
- pollution des eaux de surface et des aquifères
- épuisement de certaines ressources en eau
- concurrence avec la faune et la flore sauvages

Dégradation des sols

Le document FAO «Protect and Produce: putting the pieces together» présente une vue d'ensemble sur les causes et les conséquences de la dégradation des sols à travers le monde. En bref, la dégradation des sols comprend les dysfonctionnements suivants:

- dégradation chimique, y compris accumulation excessive de sels

- dégradation physique, notamment érosion hydrique et éolienne

- dégradation biologique, notamment deforestation et destruction des parcours sous l'effet de surpâturage

- 3 Milliards d'hectares, soit le quart des terres émergées, sont désertiques ou risquent la désertification.

- la désertification s'accélère dans certaines parties de l'Afrique soudano-sahélienne, au Proche Orient, en Iran, au Pakistan, au nord-ouest de l'Inde.

- en l'an 2.000, la capacité potentielle de charge des terres sera dépassée dans plusieurs pays.

On estime que l'étendue de la dégradation des sols est comme suit dans trois régions du monde.

Région

Afrique

Proche Orient

Inde

Erosion hydraulique

11,6%

17,1%

30,3%

Erosion éolienne

22,4%

35,5%

16,8%

Salinization

1,4%

8,0%

2,4%

Terres sans dégradation

64,6%

39,4%

48,5%

L'érosion est largement responsable de cette dégradation. L'érosion est directement liée à des phénomènes météorologiques et pédologiques complexes, mais aussi à des décisions de mise en valeur comme le montrent les tableaux suivants.

Les principales catégories d'érosion

Processus d'érosion

Causes: sources d'énergie

Facteurs de résistance du milieu

En nappe

Gouttes de pluie

Couvert végétal
Pente
Sol
Protection

Linéaire (ravinement)

Ruissellement

Vitesse ruissellement
Volume ruissellement
Résistance du sol

En masse (glissement)

Centre gravité de la masse

Poids couverture
Humectation plan de glissement
Pente drainage milieu

Erosion mécanique

Travail sol

Fréq. & intens. travail
Pente terrain
Cohésion sol

Source: ROOSE et all. (1988)

Ordres de grandeur de l'érosion selon le couvert végétal et les modes de protection au Rwanda

Couvert végétal

Aménagement

Erosion (t/ha/an)

Sol nu

Sans

350 à 550

Manioc ou maïs/haricot/sorgho

Traditionnel

87 à 150

Idem

+haies vives

44 à 102


+ barrière herbes

26 à 149

Idem

+ haies vives

< 1


+ billons


+ patates

Manioc ou

+ paillis

1 à 0,4

Idem

+ gradins



terrasse

1 à 2,4


radicale


Pinus kesiya


0,1 à 1

Source: ROOSE et all. (1988)

Pollution des eaux de surface et des aquifères

Une agriculture intensive et, plus encore, des élevages hors sols intensifs génèrent des pollutions hydriques très significatives. Ces pollutions sont surtout liées à l'azote, qui se trouve sous différentes formes (en particulier d'ammoniaque et de nitrates dérivant dans l'organisme en nitrites, très dangereux pour les humains, particulièrement pour les nourrissons), encore que, dans le cas des intrants de culture, les autres éléments majeurs: phosphore et potasse, ainsi que des éléments actifs de biocides peuvent également se retrouver dans les eaux. Ici encore, le rôle du sol et de sa texture est important en tant que filtre de ces pollutions.

Mais filtre ne veut pas dire solution miracle.

Stérilisation des sols

En effet, des excédents d'intrants agricoles mal utilisés ou à une mauvaise période, peuvent entraîner une accumulation dans le sol d'éléments, d'abord nocifs, puis éventuellement stérilisants. C'est notamment le cas pour la salinization des sols, par exemple dans le sud du Bassin Arachidier au Sénégal.

Aux Pays-Bas, dans les années 80, on a assisté à une forte accumulation dans les sols de Phosphore et de métaux lourds comme le Cuivre, directement et indubitablement liée à un sur-épandage de lisiers dans les régions les plus grandes productrices de porcins.

Epuisement de ressources en eau

L'irrigation conventionnelle est très forte consommatrice d'eau. Dans des régions à faible pluviométrie et parfois confrontées à de forts déficits hydriques, l'eau d'irrigation peut entrer en concurrence directe avec les autres utilisations (eau pour l'abreuvement des humains, celui des animaux, pour l'industrie et l'artisanat, et une foule d'autres usages que l'on découvre à ce moment-là).

Concurrence avec la faune sauvage

Elephants ou cultures, il faut parfois choisir. Gorilles ou cultures aussi. En bordure d'aires protégées, on trouve souvent ce conflit entre agriculteurs sédentaires et faune sauvage qui vient détruire, pour son alimentation ou simplement à cause de sa taille et de ses activités, les cultures en place. C'est par exemple le cas des alentours du Parc National des Volcans au Rwanda, où la densité démographique est comparable à celle du reste du pays, soit plus de 200 hab/km2 (plus de 300 par endroits).

Il y a aussi et surtout une concurrence directe sur les habitats sauvages, l'agriculture et l'élevage étant de forts consommateurs d'espace et venant détruire directement, notamment par la culture itinérante, les espaces naturels dont a besoin la faune sauvage.

3. LES STRATÉGIES AGRICOLES DURABLES À METTRE EN PLACE

Elles sont multiples et, par dessus tout, spécifiques à chaque localisation, à chaque époque et à chaque groupe social. Il est donc ici hors de question de proposer le prêt à porter de la stratégie agricole durable. Ce sera également hors de question pour les stratégies forestières.

Ce qui suit est simplement une liste de thèmes souvent repris sur le terrain, thèmes qui, toutefois, nécessitent au minimum une validation locale et raisonnablement une combinaison ad hoc entre eux et avec d'autres thèmes locaux.

La sécurisation foncière

La sécurisation foncière regroupe tout ce qui tourne autour de la préparation d'un cadastre dans les zones péri-urbaines ou de la préparation d'un Plan Foncier Rural (ex. Côte d'Ivoire) pour, au minimum, prendre acte de l'occupation en cours des terres et en effectuer un constat collectif.

La sécurisation foncière est souvent présentée comme la clé de l'intensification agricole. C'est certainement un premier pas, à condition que ceux qui mettent en place cette sécurisation foncière le fassent jusqu'au bout, avec:

- une réelle sécurisation par une reconnaissance à la fois du pouvoir moderne et du pouvoir traditionnel,

- la perspective d'un traitement de la propriété individuelle dans son intégralité (y compris la fiscalité foncière qui va avec et décourage le chercheur sauvage de terres),

- le soutien d'un projet de développement agricole, en particulier éducatif,

Si ces conditions ne sont pas réunies, il n'est pas besoin de se lancer dans cette opération chère et politiquement courageuse.

Meilleure intégration agriculture-élevage

En pays pauvre comme en pays riche, les aberrations de la séparation agriculture-élevage, partout où elle était artificielle, ont souvent frappé les économistes agricoles s'intéressant à l'exploitation paysanne comme à un système.

L'intégration agriculture-élevage, partout où elle est possible, apporte les synergies suivantes:

- apport de force de travail (traction attelée) pour les cultures (labour, semis, sarclage, récolte) - on a même vu des vaches utilisées à cette fin dans le Sahel pour des sols légers,

- apport de fumiers et plus généralement de fumure organique sur les plantes en substitution des engrais chimiques, chers et parfois déséquilibrés,

- utilisation optimale de tous les résidus de récolte pour l'affouragement.

Recyclage de la matière organique

D'une manière plus générale, le recyclage de la matière (se rappeler qu'en analyse éco-systémique on ne parle plus de déchets) organique est la base d'une optimisation des flux matériels dans une exploitation agricole.

Dans une large mesure, moyennant un travail important, mais maîtrisable, la dite matière organique peut même venir de l'extérieur de l'exploitation (herbe sauvage, produits divers de sous-bois, bouses animales récoltées le long des pistes et des routes,....). Une partie du développement des agricultures occidentales s'explique par ces transferts de fertilité.

L'utilisation d'engrais verts ou de cultures dérobées appartient à la même logique.

Comme en pays riches, le recyclage de la matière organique, combinée à l'autres éléments comme ceux cités dans le présent chapitre, a fait évoquer la possibilité d'une agriculture biologique adaptée aux pays pauvres (les anglo-saxons parlent d'agriculture organique). C'est la thèse défendue par plusieurs agronomes, notamment Claude AUBERT (voir bibliographie). Très peu a été fait dans ce domaine par les stations de recherche officielles. Il n'est peut-être pas trop tard pour commencer.........

Renaissance des cultures associées

Voici une vingtaine d'années, les agronomes débarquaient dans les villages du Tiers Monde et expliquaient avec force arguments que le temps des cultures associées était terminé et qu'il fallait passer aux cultures pures, plus faciles à intensifier.

Dans beaucoup de cas, cet abandon a été une profonde erreur à tous les niveaux, car les cultures associées (haricots-maïs, par exemple, mais on a pu trouver jusqu'à six ou huit cultures sur une même parcelle) permettaient:

- une excellente valorisation de l'eau disponible,
- une bonne production protéique,
- un effet d'abri pour les cultures basses,
- une bonne répartition des pratiques culturales.

Il est désormais à l'ordre du jour de tenter d'améliorer le système de cultures associées plutôt que de le rejeter complètement.

Agro-foresterie

Ce point sera traité dans la partie foresterie.

Sylvo-pâturages

Toujours dans le but de mieux faire jouer la synergie entre ressources complémentaires, le sylvo-pâturage a fait les preuves de sa pertinence dans beaucoup d'endroits du globe.

Il permet de mieux valoriser les deux ressources, sylvicole et pastorale et, en bonus, apporte un nettoyage de l'étage inférieur de végétation qui est une excellente assurance anti-incendie.

Cette pratique est à conseiller partout où elle est possible et où une communication suffisamment efficace est développée entre responsables d'élevage et de foresterie pour éviter les atteintes à la forêt et gérer la ressource de manière raisonnée.

Labours conservatoires (minimum tillage)

Dans le domaine du travail des sols, les pratiques de labour peuvent être les meilleures comme les pires des choses, accroissant l'érosion lorsqu'elles sont faites dans le sens de la pente ou aidant à conserver les sols et l'eau lorsqu'elles sont perpendiculaires à cette pente. Les Etats-Unis, qui ont fortement souffert du sinistre et célèbre Dust Bowl (catastrophe écologique d'origine humaine, causée par les trop forts défrichements et arrachage d'arbres dans le Mid-West ayant entraîné plusieurs années de nuages de poussière destructeurs avant que des mesures ad hoc ne soient prises et que leurs effets se soient fait sentir) dans les années 1930, ont développé des stratégies de conservation physique de l'eau et des sols parmi les meilleures au monde.

Luttes biologique et intégrée

Enfin, la lutte biologique et la lutte intégrée sont les dernières techniques sorties des laboratoires de recherche. Le principe en est généralement simple:

- gestion préventive des attaques parasitaires, en limitant les interventions phytosanitaires conventionnelles aux interventions curatives,

- introduction d'insectes prédateurs des parasites, à la bonne période et dans la quantité permettant de ne pas aggraver le problème par la suite.

L'application pratique de ces techniques particulières dépend en grande partie de l'efficacité des dispositifs de recherche et de vulgarisation et peut-être encore plus de leur articulation.

Il est en effet fondamental, pour la bonne application de ces techniques, de disposer d'un excellent potentiel scientifique, ainsi que d'un réseau d'alerte rapide et efficace pour pouvoir suivre les phénomènes en temps réel et intervenir judicieusement. Même dans les pays riches, les conditions sont souvent à peine réunies pour lancer ces programmes à grande échelle en dehors des cultures très spécialisées et à très forte valeur ajoutée (ex. horticulture sous serre).

4. LES OUTILS D'INTÉGRATION DE LA DURABILITÉ EN AGRICULTURE

Les Etudes d'Impact sur l'Environnement (EIE)

Le milieu agricole a très mal réagi à l'introduction des considérations environnementales dans son domaine réservé.

D'une manière générale, les EIE sont un moyen très marginal de contrôler les impacts négatifs de l'agriculture sur l'environnement.

Les EIE ne sont réellement pertinentes que sur:

- les très grandes exploitations d'agriculture ou d'élevage,
- les grands aménagements (irrigation, drainage),
- les déplacements de populations et installations de nouveaux agriculteurs.

Même dans ces cas-là, le lobby agricole, traditionnellement très puissant, a toujours essayé de contourner, plutôt que d'encourager, les EIE. Les EIE de projets sont en pratique d'un effet faible sur la multitude d'impacts cumulatifs générés par un grand nombre d'exploitations agricoles familiales, souvent le plus grave danger pour l'environnement dans les pays pauvres.

La baisse des incitations aux impacts négatifs

Comme il a été montré sur l'exemple de l'Amazonie, les Gouvernements ont par le passé souvent soutenu directement les atteintes à l'environnement en subventionnant sa destruction, en particulier au travers des aides au défrichement pour installations de nouveaux agriculteurs.

Le défrichement de forêts primaires ou secondaires est souvent une tâche très coûteuse, qui rend la colonisation ultérieure peu rentable pour l'opérateur individuel. Tant mieux disent les environnementalistes. Qu'à cela ne tienne disaient les Gouvernements en subventionnant ces défrichements.

Dans le contexte international actuel, il est probable que ces incitations à la destruction de l'environnement vont sans doute diminuer.

Dans un autre registre, mais selon la même logique, les pays riches sont au début des années 90 en train d'introduire des taxes à la pollution générée par les agriculteurs, par exemple par le biais des Agences de Bassin en France.

La hausse probable des incitations à la conservation des ressources

On commence aussi à voir se développer des incitations à la conservation des ressources. En Grande-Bretagne, pays qui a depuis longtemps abandonné la recherche de son auto-suffisance alimentaire, les Management Agreements (accords de gestion) viennent rémunérer les agriculteurs qui entretiennent les paysages (en particulier par le biais de l'agriculture organique). Ce système a été dans ses grandes lignes étendu par les Communautés Européennes dans les 12 pays concernés.

Dans les pays pauvres, ces systèmes vont probablement se développer bientôt.

Les directives à l'agriculture

Les organismes chargés de gérer l'environnement peuvent également faire preuve d'une approche positive en fournissant aux responsables agricoles des grandes lignes directrices des stratégies et techniques combinant développement agricole et protection de l'environnement. Les documents correspondants peuvent prendre la forme de:

- directives (en anglais guidelines) fournissant explicitement ces grandes lignes d'un développement forestier,

- questionnaires à utiliser pour juger de la pertinence des actions agricoles par rapport à la bonne gestion environnementale,

Exemple:

QUESTIONNAIRE D'ÉVALUATION D'UN PROJET AGRICOLE

(source: Draft Guidelines for the incorporation of environmental and sustainable development considerations in FAO's field programmes, traduit par l'auteur)

Le projet est-il susceptible:


Oui


Non


Ignore


· d'être prépare sans une connaissance adéquate de l'environnement local?

· de changer d'affectation des surfaces importantes?

· d'affaiblir la conservation des ressources génétiques?

· de promouvoir un système de production déséquilibre entre les cultures et l'élevage?

· d'induire des pertes de sol superficiel par accroissement de l'érosion et des réductions de fertilité des sols, transformant ainsi une ressource renouvelable en non-renouvelable?

· d'accélérer ou d'induire des usages inefficients de l'eau ou une surexploitation des aquifères?

· de provoquer une mauvaise utilisation des produits agrochimiques, en contribuant ainsi à l'accumulation de substances toxiques dans les sols et les eaux (de surface et souterraines)? d'introduire des technologies à haute consommation d'énergie?

· d'être mis en place dans un cadre institutionnel faible, qui mettra en péril la viabilité à court et long termes du projet?

· de promouvoir de hauts niveaux d'intrants extérieurs sans suffisamment de mesures d'accroissement de la productivité ou l'utilisation des déchets animaux?

· de promouvoir les activités de groupes non ciblés?

· d'introduire la mécanisation ou d'autres intrants agricoles auprès d'une population mal ou pas préparée?

· d'accroître la capacité des agro-industries locales sans étude de marché adéquate?

· d'affecter des aires protégées ou scientifiquement importantes?

· d'accaparer une partie importante des ressources foncières locales?

· d'être incompatible avec l'utilisation initiale des sols?

· d'être inadapté à l'aptitude des sols ou aux pratiques initiales de gestion des terres?

· d'être mis en place sans la participation ou l'approbation des habitants?

· de demander des services de vulgarisation sur une longue période?

· d'être mis en oeuvre sans recours significatif aux nouvelles techniques intégrées de nutrition des plantes et de lutte intégrée?

· de créer les conditions de fortes fluctuations de productivité du système?

· d'être préparé en dehors d'un cadre cohérent de plan de développement?

· de mener à des conséquences environnementales imprévues en résultat de l'effet cumulatif avec d'autres projets?

5. LES BESOINS SPECIFIQUES SELON LES REGIONS

Voici les recommandations de la FAO dans ce domaine.

Terres à faible potentiel (21% du total des terres mondiales, dont 37% en Afrique Sub-Saharienne)

. technologies permettant de libérer le travail féminin,

. intrants auto-produits

. encouragement aux revenus extra-agricoles

. nouveaux arrangements institutionnels dans l'usage communautaire des ressources

. complémentation des systèmes alimentaires traditionnels (lutte contre les pertes, meilleure valorisation de la biomasse,...)

. intégration des arbres dans les systèmes agricoles

. meilleur suivi de l'environnement

Terres à fort potentiel (57% du total des terres mondiales, et 36% en Afrique Sub-Saharienne)

. développement de systèmes agricoles intégrés utilisant moins d'intrants et moins dangereux pour l'environnement,

. meilleure intégration entre l'aménagement des terres à haut potentiel et celui des terres, des eaux et des forêts des zones contiguës,

. réforme des régimes fonciers et des droits de propriété en faveur des paysans pauvres et des femmes chefs de famille,

. meilleure gestion hydrique pour économiser l'eau et réduire les pertes et dégradations de terres,

6. LES CRITÈRES D'ÉVALUATION DE LA DURABILITÉ DANS LES PROJETS AGRICOLES

La Conférence FAO/Gouvernement Néerlandais sur l'agriculture et la durabilité de 1991 a proposé une série de critères et d'instruments pertinents pour le développement agricole et rural durable, dont voici une synthèse.

CRITERES ET INSTRUMENTS PERTINENTS POUR LE DEVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL DURABLE


Evaluation économique

Outils réglementaires

Suivi interactif

Systèmes pastoraux

Externalités Utilisation de méthodes d'évaluation indirecte Modélisation des réponses des pastoralistes

Corriger les erreurs gouvernementales. Rôle des politiques macro-économiques, ex. moyens d'épargne alternatifs

Indicateurs physiques

Ressources forestières

Valeurs d'option et d'existence. Valeurs d'usage hors bois d'oeuvre. Effets externes.

Accès aux ressources. Politiques réglementaires. Politiques macro-économiques, ex. taxe d'abattage.

Comptes monétaires. Indicateurs physiques.

Agriculture irriguée

Evaluation des ressources en eau et impacts de la salinité et de l'engorgement des terres. Programmes de restauration.

Charges financières aux usagers de l'irrigation fondées sur la demande. Plans de gestion en commun.

Indicateurs physiques clés. Utilisation de l'Analyse d'Impacts sur l'Environnement.

Terres marginales

Dommages de l'érosion sur les sols. Externalités dans les populations itinérantes. Valuation des programmes de transfert de population. Programmes de génération d'emplois.

Politique micro-économique, ex. subventions engrais et pesticides. Politiques macro-économiques, ex. prix des produits agricoles, taxes à l'exportation, emplois hors exploitation agricole. Politiques d'Aménagement du Territoire. Lutte Intégrée.

Valuation des pertes en terres. Indicateurs physiques.

Général

Utilisation généralisée des méthodes d'évaluation. économique généralisée

Foncier. Politiques réglementaires et sociales.

Aménagement du Territoire. Accords internationaux.

II. FORESTERIE ET DURABILITÉ

La foresterie est, d'une manière générale, le temple de la durabilité. Les ingénieurs forestiers sont les derniers cadres sectoriels faisant des calculs de rentabilité sur des périodes dépassant les 10 prochaines années.

Pourtant, la foresterie doit également mieux intégrer les impératifs de la gestion durable des ressources naturelles, notamment en concevant la forêt comme un écosystème plutôt que seulement comme une source de bois.

Le présent chapitre est structuré comme suit:

- importance socio-économique et environnementale des forêts,
- avantages/inconvénients des modes de gestion actuels des forêts,
- stratégies forestières durables à mettre en place,
- outils d'intégration de la durabilité en foresterie.

1. IMPORTANCE SOCIO-ECONOMIQUE ET ENVIRONNEMENTALE DES FORETS,

Voici un tableau montrant l'importance actuelle des surfaces forestières par grande région dans le monde (données FAO 1990).

Région

Surface forestière (M ha)

Pourcentage de la surface occupée par de la forêt

Afrique

536

19%

Amérique du Nord et Centrale

531

25%

Amérique du Sud

896

51%

Asie

463

18%

Europe

140

30%

Océanie

88

10%

Ancienne URSS

755

34%

Total mondial

3.411

26%

Plus précisément, les forêts tropicales, qui contiennent une très forte biodiversité et sont actuellement, les plus menacées par la deforestation, peuvent être brièvement présentées comme suit (données FAO 1990 en millions d'hectares).

Région

Forêts Tropicales Humides

Forêts Sempervirentes Humides

Forêts Tropicales Sèches

Forêts d'altitude

Afrique

87

251

151

35

Asie & Pacifique

177

42

41

47

Amériques

454

294

46

122

La part du commerce mondial du bois dans les échanges internationaux par grande région est décrite ci-dessous (données FAO 1991).

Région

Production (Md US$)

Part du Produit Brut

Importations (Md US$)

Exportations (Md US$)

Pourcentage des échanges

Afrique

24,6

6%

4,3

1,6

2%

Amérique Nord et Centre

133,3

2%

16,9

29,6

5%

Amérique du Sud

23,7

3%

1,1

2,6

3%

Asie

108,2

2%

26,9

12,3

2%

Europe

83,9

1%

56,0

47,6

3%

Océanie

5,4

2%

1A

1,6

3%

Ancienne URSS

38,5

2%

0,9

2,8

4%

Les forêts apportent à l'humanité une série de produits et de services, à la fois commerciaux et environnementaux. Parmi ces produits et services, on peut citer ceux qui suivent, particulièrement dans une optique de gestion durable.

QUELQUES PRODUITS ET SERVICES "SECONDAIRES" DES FORETS

Des produits économiquement importants

La forêt produit des fruits comestibles, des plantes à utilisation médicinale, des fourrages et d'autres produits comme le miel. Quelques études, malheureusement trop rares, ont fait ressortir le rôle essentiel pour les habitants des régions forestières, de ces produits. Dans certains cas, on a même montré que la valeur commerciale des produits "secondaires" est supérieure à la valeur "principale" des forêts. La Tanzanie a même créé un Ministère des Forêts et de l'Apiculture. Malheureusement, ces produits ne sont pas encore reconnus. Le chiffrage de leur valeur pourrait être un fort argument pour la conservation des forêts, et donc un rempart de plus contre la deforestation.

Création d'un micro-climat

Arbre-Abri: les arbres abritent: les cultures contre l'évapotranspiration, les animaux contre les excès climatiques, les hommes contre diverses agressions.

Laissées à elles-même, battues par les vents, les cultures perdent beaucoup d'eau en transpirant et en la laissant s'évaporer. La présence d'arbres brise-vent décroît l'importance de ce phénomène: les cultures irriguées consomment moins d'eau, et les cultures non irriguées ont un meilleur rendement toutes choses égales par ailleurs.

L'influence des arbres sur le micro-climat est réputée très forte par beaucoup d'auteurs: D. SOLTNER estime que le déboisement s'accompagne d'une baisse de la pluviométrie, et qu'inversement les reboisements ou la plantation de résineux s'accompagnent d'une augmentation de la hauteur des pluies pouvant aller jusqu'à 20 %.

Max GUILLAUME cite E, CARDOT: "...dans les régions boisées, les pluies sont plus fréquentes, plus prolongées, mais moins violentes. Les régions déboisées ont des pluies rares, mais torrentielles. Des observations tendent à prouver que les orages de grêle peuvent être dans certains cas arrêtés ou en quelque sorte désarmés à leur passage au dessus des forêts..". Pour toutes ces raisons, le micro-climat créé par les arbres est un bénéfice important, qui peut même avoir des répercussions directement financières dans le cas de l'augmentation de production des cultures.

Protection contre les crues.

Tous les cours d'eau ont une tendance naturelle à s'emballer et à divaguer. Deux séries d'obstacles se dressent sur leur chemin: les zones humides-tampon et les formations arborées. Les zones humides (marais, mouillères, plaines d'épandage) disparaîssent sous les griffes des grues, au profit de bâtiments ou de prairies d'élevage. Les arbres régulent le régime de l'eau (voir plus haut), et évitent les brusques lâchures.

D'après le Manuel de l'Arbre, Alexandre SURRELL fut le premier à formuler les principes suivants: "..la présence d'une forêt sur un sol empêche la formation de torrents, la destruction d'une forêt livre le sol en proie aux torrents...". Qui se souvient des leçons sages du Manuel de l'Arbre (publié au début de ce siècle)?

Protection contre les impacts des eaux aval

Madagascar est un pays montagneux et pluvieux, pas assez cependant pour éliminer le besoin d'irriguer le riz. Les spécialistes d'irrigation ont remarqué que les ouvrages construits avaient une durée de vie particulièrement courte. Pourquoi? Parce que l'érosion qui se produit sur le haut dénudé des bassins versants se retrouve plus bas, et remplit les retenues d'eau. On raconte même que, sur certaines parcelles de riziculture, les paysans ne savent plus où est le canal d'irrigation (amont) ni où est le drain (aval).

Ce phénomène n'est pas particulier à Madagascar. Le Rwanda, baptisé pays aux mille collines, souffre des mêmes maux, et il a fallu notamment refaire à grands frais beaucoup d'adductions d'eau dont les conduites avaient été emmenées par les pluies. Ici encore, les impacts peuvent s'exprimer en données financières, mais sont comptabilisées chez les récepteurs et non chez les émetteurs d'impacts sur l'environnement.

Piège à Carbone

On parle souvent des forêts "poumons des villes", et de l'Amazonie "poumon de la planète". Les forestiers n'aiment pas ces formules qui sont en effet fausses pour des forêts primaires non exploitées pour lesquelles, par définition, les entrées sont égales aux sorties et il n'y a pas de production nette d'oxygène. Par contre, les personnes soucieuses des changements planétaires de climat notent que les forêts sont des pièges à Carbone et que la deforestation entraîne automatiquement une émission nette de Carbone dans l'atmosphère, émission qui contribue directement à augmenter la pollution atmosphérique.

Conclusion partielle sur la fonction de protection

Les forestiers et les législateurs ont compris depuis longtemps que les arbres apportaient des services non financiers. De nombreux massifs forestiers ont été ainsi désignés comme "forêts de protection", pour les distinguer des forêts de production à finalité essentiellement commerciale.

Les services

Fonction de loisirs

La forêt est un milieu riche en émotions pour le promeneur, mais aussi un milieu fragile à protéger contre tous excès. Si, dans les pays tempérés, les forêts sont source de loisirs pour d'aimables randonneurs, les forêts tropicales jouent de plus en plus un rôle d'attraction de touristes étrangers à la recherche d'observation de la faune et de la flore, attraction qui devient une source de revenus de plus en plus importante.

Patrimoine artistique et culturel

En plus de tout ce qui vient d'être dit, les arbres font partie de notre patrimoine personnel et collectif. Ils en font même tout à fait partie, si l'on en juge par les créations que les arbres ont inspiré.

Allons plus loin dans le domaine de nos acquis de fond: l'arbre est notre source d'inspiration poétique fondamentale.

Mais le rôle artistique de l'arbre ne se limite pas à l'écrit. Les peintres et les photographes aussi ont été largement inspirés. L'ORSTOM a publié un cahier sur "L'arbre en Afrique Tropicale: la fonction et le signe". La synthèse porte la signature de Paul PELISSIER, Professeur à Paris X. Il identifie plusieurs fonctions bien connues (rôle dans la formation des sols, association avec les cultures, source de produits utiles, pâturage aérien, défense des humains contre toutes agressions). Mais l'arbre a également, et peut-être surtout, valeur de signe. D'abord signe de la situation politique locale, ensuite d'organisation sociale:"... les bosquets qui peuplent le plateau Koukouya... sont surtout la carte d'identité de chaque lignage, déterminant son appartenance à une terre et à une chefferie, et finalement son intégration à une structure hiérarchique de la société incarnée par la hiérarchie des forêts..".

L'arbre est enfin un signe foncier, à la campagne ("... l'exploitation de l'arbre signifie le droit à l'exploitation du sol; elle en est le signe et, si nécessaire, la preuve juridique....Au demeurant, l'interdiction de planter des arbres, longtemps appliquée par beaucoup de populations, n'avait-elle pas pour objectif primordial le maintien du caractère collectif du capital foncier.."), comme en ville.

On dispose malheureusement d'insuffisamment d'études sur le rôle des produits et services secondaires la forêt. Anne Bergeret a effectué un patient recensement des nourritures de cueillette en pays Sahélien. 105 produits ont été recensés, du Cassia obtusifolia au Portulaca oleracea en passant par le Borassus aethiopum. Or, ces produits, totalement intégrés à la chaîne alimentaire locale, sont en cours de disparition: des bûcherons-charbonniers viennent et abattent tout ce qui pousse de végétal ligneux. La surface forestière a diminué de moitié depuis 1954 dans le Sahel, et une grande partie des aliments de cueillette avec elle.

En perdant les arbres, les habitants d'une région frappée par la deforestation perdent l'ensemble de ces produits et de ces services. Ceci entraîne une série (une chaîne) d'impacts locaux et en aval des zones concernées.

2. AVANTAGES/INCONVÉNIENTS DES MODES DE GESTION ACTUELS DES FORÊTS,

Les risques d'impacts négatifs de la foresterie conventionnelle

Perte de la biodiversité

L'un des grands enjeux de la gestion durable des forêts est la conservation de leur rôle écosystémique en particulier en tant qu'habitat de flore et faune.

Il se dit souvent que, malgré le manque de connaissance précise en ce domaine, il est probable que plus de la moitié du nombre mondial d'espèces - végétales et animales confondues -se trouve dans les forêts tropicales.

Si tel est le cas, les forêts tropicales doivent d'urgence être protégées, non seulement contre les modifications structurelles (abattage d'arbres adultes), mais aussi contre les prélèvements de faune et de flore, le braconnage étant un danger extrêmement élevé en Afrique où la viande de brousse est particulièrement recherchée et se vend très cher sur les marchés urbains.

Participation aux changements climatiques globaux

Les exploitations forestières conventionnelles par coupe à blanc étoc (coupe rase) sans gestion ultérieure ont également été montrées du doigt par rapport à l'impact de la deforestation sur les changements climatiques globaux, notamment pour les émissions nettes de Carbone dans l'atmosphère et, donc, l'accroissement de l'effet de serre.

Il est donc désormais hors de question de permettre les exploitations forestières non équilibrées, sans replantation ni aménagement des forêts restantes après exploitation.

Utilisation minière

Les mêmes exploitations minières ont remplacé une gestion durable (forêts en équilibre ou prélèvements supportables) par une gestion destructrice qui appauvrit le pays ou la région concerné en détériorant son patrimoine.

Ceci est également hors de propos désormais.

Les besoins spécifiques de grandes régions

Les besoins d'adaptation des interventions forestières se modifient à l'évidence d'une grande région forestière à l'autre.

En ce qui concerne la grande distinction forêts tropicales sèches et humides, voici les grandes lignes des différences d'interventions dans la logique de la gestion durable.

Forêts tropicales humides

Forêts tropicales sèches

. Aménagement plutôt qu'exploitation des forêts naturelles,
. Minimisation des déchets de l'exploitation forestière,
. Dans les cas les plus écologiquement riches, mise en réserve avec ou sans écotourisme,
. Chasse au braconnage à tous les stades de la filière,
. Pas d'incitations financières au défrichement,
. Aide à la sédentarisation de l'agriculture itinérante.

. Agro-foresterie,
. Aide à l'accroissement de l'efficacité de la filière bois-énergie (foyers à bois et charbon de bois, rendement de la carbonisation),
. Intensification des produits et services secondaires de la forêt,
. Plantations mixtes en zone forestière et hors zone forestière,
. Production ligneuse intensive,
. Dans les cas les plus écologiquement riches, mise en réserve avec ou sans écotourisme,

3. STRATÉGIES FORESTIÈRES DURABLES À METTRE EN PLACE,

. Rôle central du Plan d'Action Forestier Tropical

Les efforts internationaux n'ont pas manqué face à ces nouveaux impératifs pour la foresterie, clairement identifies depuis la parution au milieu des années 80 de «Tropical forests - A call for action».

Le Plan d'Action Forestier Tropical (P.A.F.T.) constitue une des grandes sources d'espoir pour ceux qui cherchent à lutter contre la deforestation. Il est présenté dans l'encadré ci-après.

Le Plan d'Action Forestier Tropical (PAFT)

- ce qu'il est, Un effort coordonné des pays bénéficiaires et de plusieurs organismes internationaux de situer l'urgente protection des forêts tropicales dans un cadre cohérent, efficace, dépassant les frontières nationales. "Englobant l'ensemble des forêts tropicales, des forêts humides denses aux savanes claires et à la steppe semi-aride, le Plan se propose de catalyser l'action en vue de relever le niveau de vie des populations rurales, d'augmenter la production vivrière, d'améliorer les systèmes de culture itinérante, d'assurer l'exploitation durable des forêts, d'accroître les disponibilités en bois de feu et son rendement, et de multiplier les occasions d'emploi et de revenu."

Les cinq volets du PAFT sont:

La foresterie dans l'utilisation des terres
Le développement des industries forestières
Bois de feu et énergie
Conservation des écosystèmes forestiers tropicaux
Institutions, recherche, formation

On notera qu'il existe de plus en plus de Plans Pluri-Nationaux correspondant bien à la logique «naturelle» de la gestion forestière, qui ne connaît pas les frontières administratives.

- qui le prépare et le met en oeuvre? Ce sont bien entendu les pays bénéficiaires, avec l'aide des quatre organismes associés sue sont la FAO, le PNUD, tous deux émanations directes de l'Organisation des Nations Unies, la Banque Mondiale, qui réunit actuellement environ 150 nations, et enfin l'Institut des Ressources Mondiales, dont il est beaucoup question dans le présent kit. Des organismes de coopération bilatérale se sont ajoutés aux créateurs du programme. C'est en particulier le cas de la coopération française (Fonds d'Aide et de Coopération et Caisse Française de Développement).

- quelle est son origine? le Congrès Forestier Mondial de juillet 1985, avec ses 2.500 délégués, décision ratifiée par le Conseil de la FAO deux mois plus tard.

- quels sont ses moyens? Aucun et beaucoup pourrait-on répondre. Il n'existe pas de Fonds mondial correspondant au PAFT. Cependant, les pays qui le désirent peuvent participer au PAFT. Les frais d'études externes sont entièrement pris en charge par les quatre organismes "pilotes" du Plan d'Action, ou par certains bailleurs de fonds bilatéraux. Cependant, le Gouvernement concerné doit investir des moyens humains et financier important en contrepartie sur son propre budget.

- quelles sont ses modalités d'intervention? le déroulement typique d'un exercice PAFT dans un pays donné est le suivant:

. évaluation d'ensemble du secteur forestier,
. analyse des liens entre le secteur forestier et les autres secteurs socio-économiques nationaux,
. présentation des études ci-dessus dans un séminaire et rédaction d'une synthèse,
. table ronde gouvernement-bailleurs de fonds sur la base de la synthèse,
. création d'une cellule nationale de suivi de l'application du PAFT,
. lancement des projets concrets dans le cadre cohérent du PAFT,

- quels sont ses résultats? A la mi 1993, 13 pays avaient demandé un exercice PAFT, 35 avaient l'examen du secteur forestier en cours. Pour 9 pays, cet examen du secteur forestier était achevé et enfin, pour 34 pays, la phase de planification était achevée, ce qui impliquait que des tables rondes avec des bailleurs de fonds éteient en cours, ou que des mises en oeuvre concrètes avaient été lancées. On trouve page suivante un tableau montraint l'état d'avancement des exercices PAFT dans chacun des pays Africains selon la grille de classement ci-dessus.

Pays

Exercice demandé

Examen en cours

Examen terminé

Planification terminée

Angola


X



Burkina Faso


X



Burundi


X



Cameroun




X

Cap-Vert


X



Congo



X


Côte d'Ivoire


X



Egypte

X




Ethiopie


X



Gabon


X



Gambie


X



Ghana




X

Guinée




X

Guinée Bissau




X

Guinée Equatoriale




X

Ile Maurice

X




Kenya


X



Lesotho


X



Libéria

X




Madagascar


X



Malawi

X




Mali


X



Mauritanie





Mozambique


X



Niger


X



Nigeria


X



Ouganda

X




Rép. Centrafricaine


X



Rwanda



X


Sénégal



X


Sierra Leone




X

Somalie



X


Soudan




X

Tanzanie




X

Tchad

X




Togo



X


Zaïre




X

Zambie


X



Zimbabwe

X




CILSS


X



IGADD


X



SADC


X



CILSS: Comité Inter-Etats de Lutte contre la Sécheresse dans le Sahel: Burkina Faso, Cap Vert, Gambie, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Tchad.
IGADD: Djibouti, Ethiopie, Kenya, Somalie, Soudan et Ouganda
SADC: Angola, Botswana, Lesotho, Malawi, Mozambique. Namibie, Swaziland, et Zimbabwe
OAB: Organisation Africaine des Bois: Angola, Cameroun, République Centrafricaine, Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, Guinée, Guinée Equatoriale, Libéria, Nigeria, Sao Tome et Principe, Tanzanie et Zaïre. L'OAB pourrait accueillir une réunion sous-régionale sur les PAFT.

Nouveaux impératifs pour la foresterie

Depuis plusieurs années, la perception du rôle de la forêt par les autorités nationales et internationales a subi une forte mutation. On a progressivement englobé le développement soutenu dans le développement durable. Comme l'exprime un ouvrage grand public de la FAO (The Challenge of Sustainable Forest Management):

Le concept de gestion durable de la forêt a ainsi évolué pour englober des valeurs plus globales que précédemment. On perçoit désormais celte gestion comme une action à objectifs multiples de la forêt de telle manière que sa capacité globale de produire des biens et des services n'est pas affectée. Une forêt gérée durablement produira du bois d'oeuvre avec un rendement soutenable et, en même temps, continuera à produire du bois de feu, des aliments et d'autres produits et services pour les populations locales et riveraines. Le rôle d'une telle forêt dans la préservation des ressources génétiques et de la biodiversité, ainsi que dans la protection de l'environnement sera maintenu.

Cette approche nouvelle intègre l'ensemble des caractéristiques particulières de la forêt et de la foresterie:

multiplicité des types de forêts
multiplicité des produits et des services
rotation et mode de gestion
unicité et irréversibilité des dégradations de plusieurs types d'écosystèmes (montagnes, littoral,....)

Les types de forêts sont multiples à travers le monde. Ceci est vrai à l'échelle planétaire, avec trois grands types:

- forêts boréales (souvent situées dans des quasi-déserts humains),
- forêts tempérées (souvent gérées dans des pays riches et en bon équilibre général),
- forêts tropicales (souvent situées dans les pays pauvres, peu ou mal gérées et en plein risque d'extinctions au moins localisées).

Mais ces grands types eux-mêmes cachent de très fortes variations régionales, nationales et locales, une distinction devant de toute manière être faite entre forêts tropicales humides (souvent très fermées et donnant lieu en majorité à exploitation forestière) et les forêts tropicales sèches (beaucoup plus ouvertes et fournissant bois-combustible et nombreux autres produits et services aux habitants avoisinants).

Cette multiplicité de produits et de services varie à l'évidence d'une forêt à l'autre, d'un type de forêt à un autre et selon les modes de gestion. D'une manière générale, on peut s'attendre à ce qu'une forêt - au delà du bois d'oeuvre - fournisse tout ou partie des produits et services suivants:

. produits secondaires:

- bois-combustible (utilisé directement ou pour fabriquer du charbon de bois),
- bois de service (poteaux, perches, petits outils,.....)
- fourrages pour les animaux (petites branches, feuilles, fruits),
- fruits, baies, plantes médicinales pour la consommation humaine (parfois une centaine d'aliments différents, comme l'a montré une étude scientifique du CIRED),

. services:

- protection des sols contre l'érosion,
- création d'un micro-climat,
- réserve foncière pour de futurs développements,
- habitat pour faune et flore sauvages,
- produits pour des activités naturelles spécialisées (ex. source de pollen pour l'apiculture),
- lieu d'activités de loisirs, de détente, de promenade, voire de thérapie,
- embellissement des paysages.

L'existence réelle de ces produits et services devrait être vérifiée à chaque analyse d'une forêt particulière.

La technique de gestion des forêts, durée de la rotation et mode de gestion, ont une relation directe avec la gestion de l'écosystème forêt.

Les longues durées de rotation ont, dans la plupart dès pays, une influence bénéfique sur l'écosystème en ce sens qu'elles imitent de beaucoup plus près les phénomènes naturels.

4. OUTILS D'INTÉGRATION DE LA DURABILITÉ EN FORESTERIE.

Les Etudes d'Impact sur l'Environnement

Même dans le domaine forestier, il convient de mener des Etudes d'Impact sur l'Environnement (voir module 4), en particulier lorsque l'enjeu est l'exploitation forestière dans des forêts primaires ou secondaires.

Ces EIE suivent fondamentalement les mêmes méthodes et les mêmes étapes que les EIE d'autres projets, les quelques spécificités suivantes valant la peine d'être mises en exergue:

. la durée d'étude des impacts doit se situer dans les mêmes horizons que l'exploitation forestière elle-même, ainsi que la régénération ultérieure des massifs affectés. Ceci peut requérir des études intégrant des impacts sur une durée de l'ordre de 50 ans, voire plus longue,

. il est souvent impossible de compenser les impacts négatifs de l'exploitation forestière dans des massifs primaires ou secondaires riches en biodiversité. Dans ce cas, et s'il est impossible de stopper cette exploitation, les mesures compensatoires peuvent prendre la forme d'ouvertures de réserves naturelles en dehors des forêts exploitées,

. il est indispensable qu'un spécialiste forestier soit associé à toutes les étapes de l'EIE.

QUESTIONNAIRE D'ÉVALUATION D'UN PROJET FORESTIER

(source: Draft Guidelines for the incorporation of environmental and sustainable development considerations in FAO's field programmes, traduit par l'auteur)

Le projet est-il susceptible:


Oui

Non

Ne sait pas

· d'être préparé sans une bonne connaissance de l'environnement local?

· de permettre des coupes à blanc étoc?

· d'accroître les facteurs érosifs édaphiques?

· d'accroître les pertes de matière organique, les lessivages des sols et des changements dans l'écologie microbiale des sols?

· d'affecter les eaux en aval par accroissement des matières en suspension dans les cours d'eau et les lacs?

· d'affecter les ressources en eau et, en particulier, la recharge des aquifères, les eaux de ruissellement, la turbidité et la qualité des eaux (niveaux de nutriments, conservateurs du bois,....)?

· de convertir ou d'affecter des surfaces forestières importantes?

· d'affecter la régénération des forêts ou une région connue pour sa biodiversité?

· d'affecter des aires protégées, de mettre en péril ou de détruire des habitats d'espèces protégées, ou créer des déplacements animaux intempestifs?

· d'ajouter des voies d'accès susceptibles d'encourager l'installation d'occupants illégaux, de paysans sans terres,.....?

· d'affecter la culture et l'existence traditionnelle des populations forestières?

· de créer une dépendance des habitants de la zone sur une économie externe (bois de feu, sauvagine, habitats,...)?

· d'affecter la valeur de loisirs des forêts?

· d'outrepasser les classifications de conservation forestière?

· d'ignorer la valeur scientifique de la zone de projet?

· de créer des surplus non commercialisables de produits forestiers?

· d'ignorer les droits fonciers locaux?

· de générer des déchets sans la possibilité de les gérer?

· d'affecter une portion significative des ressources forestières nationales?

· d'accélérer localement l'exode rural?

· d'introduire de nouvelles espèces ou de nouvelles technologies sans connaissance locale suffisante?

· de requérir des services de vulgarisation de gestion forestière sur une longue période ou un autre service forestier?

· de décourager les travailleurs forestiers d'utiliser les mesures de conservation (ex. système foncier inadéquat)?

· d'accroître la dépendance par rapport aux énergies non renouvelables?

· d'être prépare sans une consultation préalable et une participation des paysans affectés par le projet?

· être prépare en dehors d'un cadre de planification cohérent?

· de mener à des conséquences environnementales imprévues en résultat de l'effet cumulatif avec d'autres projets?

Les directives à la foresterie

Les EIE permettent de guider la durabilité de la foresterie au niveau de la conception et de la mise en oeuvre de nouveaux projets. Toutefois, les besoins d'intégration de la durabilité dépassent largement le seul cadre des nouveaux projets. Il convient aussi de prendre en compte les pratiques quotidiennes, ainsi que les conceptions de plans et programmes et l'intervention sur les projets existants. De plus, la durabilité devrait faire partie de la formation - initiale ou continue - de tout responsable forestier à quelque niveau que ce soit.

Il est donc impératif d'avoir recours à d'autres outils que les EIE.

Les directives à la foresterie constituent un autre outil: développées spécifiquement pour un pays ou une région donné, une directive environnementale à la foresterie sera envoyée par l'autorité chargée de la gestion de l'environnement aux services forestiers, aux exploitants ainsi qu'à tout acteur majeur de la filière bois. Ces directives devront être, une fois portées à la connaissance des intéressés, leur référence dans le domaine de l'environnement et, plus largement, de la gestion durable. A terme, ces Directives pourront être intégrées dans le Code Forestier National.

Peu de pays disposent de telles directives. Voici en encadré un digest de la directive environnementale Forêts élaborée pour le Gouvernement des Seychelles.

Digest de la directive environnementale «Forêts» pour les Seychelles

Cette directive recouvre toutes les activités liées à la foresterie, en particulier la conservation, gestion, plantation, l'entretien, la coupe des arbres, la formation des forestiers et du grand public, le contrôle de l'exploitation forestière ainsi que la gestion des arbres urbains.

Plusieurs aspects de ces activités qui sont partagés par d'autres secteurs font simplement l'objet de références croisées avec d'autres directives environnementales, notamment l'agriculture (agroforesterie), la gestion des zones côtières, les transports, l'industrie (sciage), le tourisme et l'information/éducation.

CONTEXTE

IMPORTANCE NATIONALE

La forêt recouvre 40.600 ha, soit 90 % dès surfaces terrestres des Seychelles. 90 % environ de ces forêts sont naturelles et les plantations, y compris de casuarina, couvrent environ 4.800 ha. Plus de 45 % des forêts sont dans un parc national ou une autre aire protégée. Le stock global est estimé à 3,1 Mm3, dont 0,7 accessible dans les îles principales. Le croît durable est estimé à 13.700 m3 La demande en terres et en produits forestiers croissent rapidement.

LES PERSPECTIVES A MOYEN TERME

Cette demande accrue, ainsi que les pressions de l'agriculture et de l'urbanisation menacent les formations forestières.

PROBLEMES

IMPACTS ENVIRONMENTAUX PROBABLES

Impacts positifs des forêts et des plantations.

Une gestion sage des forêts n'entraîne pas d'impact environnemental négatif, mais au contraire une bonne protection des sols et de la biodiversité. La même chose peut être dite des plantations à condition qu'elles respectent aussi les espèces endémiques. Les arbres d'ornement, en ville ou dans le pourtour des maisons, jouent également un rôle positif pour l'environnement.

Impacts négatifs de la destruction des forêts.

Une mauvaise gestion des arbres par contre, en particulier la pratique de la coupe à blanc, peut entraîner de multiples impacts négatifs, en particulier pour les sols (érosion), la gestion des eaux et la perte de protection et d'habitats intéressants pour la faune et la flore.

Impacts de l'exploitation des forêts sur le peuplement restant.

24 espèces sont actuellement exploitées aux Seychelles. Leur exploitation ne doit pas se faire au détriment des arbres restants.

Impacts sur le sol

Les feux de forêts ont eux aussi des effets très négatifs sur l'érosion en détruisant la couverture végétale et la litière protectrice du sol. Ceci est particulièrement remarquable à Praslin.

Impacts sur la santé et la sécurité des travailleurs et du public

L'exploitation forestière est une activité dangereuse:

- en forêt du fait de l'utilisation de scies à chaîne d'une part et de la masse même des arbres abattus d'autre part.

- lors du débardage et du transport du fait de l'utilisation d'engins lourds

- en scierie du fait de la présence de scies

PROBLEMES PARTICULIERS

Impacts sur les mangroves

Les mangroves sont des écosystèmes littoraux particulièrement sensibles. Leur destruction a des impacts locaux, mais aussi sur les écosystèmes voisins et sur la productivité primaire et secondaire utile aux habitants (poissons, en particulier).

Sous utilisation des capacités de la forêt

L'utilisation de matériels obsolètes entraîne des pertes d'exploitation inutiles, donc un gaspillage.

Impacts des modes de transformation du bois

Les modes de transformation du bois peuvent avoir des conséquences importantes sur les quantités consommées. Plus les équipements sont frustes, plus la quantité de déchets par m3 abattu est importante.

Synthèse des impacts négatifs potentiels d'une mauvaise gestion forestière

Activité

Air (Pous.)

Eau

Sols Eros.

Paysages

Bruits Odeurs

Flore

Faune

Santé Secur.

Climat

Socio écon.

Autre Biodiv

1.Plantation


*

**

*


***

*


*

*

***

2. Eclaircies


*

*

*

*

**

*

***


*

*

3. Exploitation

*

**

***

***

**

***

***

***

**

**

***

4. Transport

***

*

***

**

***

*

**

***


***


5. Gestion ressource


**

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***


***

**

**

**

**

***

* Significatif ** Important *** Très important

RECOMMANDATIONS

PROJETS ALTERNATIFS

De nombreuses alternatives à l'exploitation forestière «noble» existent, depuis la lutte contre le gaspillage jusqu'à la mise en oeuvre de produits de substitution du bois en passant par l'exploitation d'espèces envahissantes.

Il convient aussi de bien mettre en valeur les produits et services secondaires des forêts pour mieux rentabiliser la gestion forestière et, ainsi, mieux protéger les espaces forestiers.

IMPLICATIONS POUR LA GESTION ET LA FORMATION

Les institutions forestières nationales doivent avoir la capacité de:

. concevoir la politique forestière,

. se coordonner avec les autres agences du Gouvernement Central responsables des autres secteurs et des politiques nationales susceptibles d'affecter les ressources forestières,

. de préparer des plans de gestion forestiers et des plans de protection contre les incendies,

. entreprendre des inventaires forestiers et la rechercher sylviculturale,

. réguler et créer des marchés pour les produits forestiers,

. identifier, délimiter, financer superviser la gestion des parcs et réserves,

. développer des programmes de formation, vulgarisation et sensibilisation,

. planifier les infrastructures de transports et autres liées aux opérations forestières,

. s'assurer que les populations sont convenablement représentées et intégrées aux processus de prise de décision,
. assurer la promotion des technologies appropriées stimulant les économies locales et employant la main d'oeuvre locale,

. se coordonner et coopérer avec les ONG's.

En zone urbaine, plusieurs conditions sont indispensables pour réussir une plantation:

- Le bon arbre au bon endroit.
- Corriger les défauts du sit, e.
- Planter des arbres de qualité.
- Protéger et entretenir les plantations.

Un manque de formation et d'information existe aux Seychelles pour la gestion des arbres de ville.

SUIVI INTERACTIF

Dans le domaine des plantations, il pourra porter sur les éléments suivants:

. croît annuel de la plantation,
. présence d'adventices,
. présence de maladies et de parasites,
. calendrier de gestion,
. protection des arbres,
. distribution des revenues et bénéfices en provenance des plantations,
. changements dans les structures de coûts et de bénéfices,
. état de la biodiversité dans la plantation,
. état de la structure physico-chimique des sols.

MESURES COMPENSATOIRES

Impact sur l'avenir des forêts et la sauvegarde des espèces endémiques (exemple détaillé).

Maîtriser le défrichement,

Lister et étudier les espèces endémiques et protéger leur biotope

Etudier les moyens de multiplier les espèces les plus menacées et procéder à leur diffusion dans les reboisements forestiers et d'agrément

Créer une pépinière et un arboretum d'espèces endémiques

Interdire les feux à moins de 300m des resserves et des parcs ainsi que dans les zones sensibles (Praslin) pendant la saison sèche,

Etre prudent dans l'estimation des capacités de la forêt à survivre à l'exploitation,

Exploiter ou détruire systématiquement les exotiques mettant en peril l'avenir des forêts naturelles (ex: Albizia, cannelle, goyaviers...),

Inciter les populations à produire dans leur jardin, les plantes médicinales qu'elles vont actuellement chercher en forêt en mettant à leur disposition des plants en pépinière.

Pour le cas particulier des forêts littorales:

- interdire le défrichement des zones littorales,

- mettre en place des systèmes de protection anti érosion tel que: fixation des dunes, création d'épis en mer... quand cela s'avère nécessaire,

- dans les zones soumises aux embruns, remplacer les arbres morts par des essences plus résistantes à la salinité.

Impacts sur les ressources en eau.
Impacts sur l'air et le climat.
Impacts sur le sol.
Impacts sur la vie sauvage.
Impacts sur la santé et la sécurité des travailleurs et du public.
Impacts socio-économiques.
Impacts du défrichement.
Impacts sur les mangroves.
Impacts de la sous utilisation des capacités de la forêt.
Impact des modes de transformation du bois.

SOURCES COMPLEMENTAIRES D'INFORMATION

FAO, divisions forestières et autres institutions concernées.

les méthodes d'évaluation des opérations de foresterie

On admet désormais au niveau international (CSCE Seminar of Experts - septembre 1993) que les indicateurs de durabilité devraient inclure:

- biodiversité
- productivité
- conservation des sols
- conservation des eaux
- santé et vitalité des écosystèmes
- contribution aux cycles écologiques globaux
- aptitude de l'écosystème-forêt à remplir des fonctions socio-économiques

Voici des compléments sur chacun de ces critères:

- biodiversité

Ses critères d'évaluation comprendront:

- la diversité des espèces,
- le respect des fonctions de support inter-écosystèmes (voir module 4),
- la diversité des paysages.

- productivité

- conservation des nutriments et de la matière organique,
- préservation des mécanismes naturels de décomposition,
- maintien de la structure des sols et des mécanismes qui y sont liés.

- conservation des sols

- prévention des pertes de sols dommageables,
- maintien de la structure productive des forêts,
- replantation forestière là où sont les besoins.

- conservation des eaux

- prévention des entrées polluantes dans les cours d'eau,
- prévention de la contamination par des produits biocides,
- protection contre les crues,

- santé et vitalité des écosystèmes

- prévention des pollutions atmosphériques,
- prévention des déséquilibres dans les écosystèmes,
- maintien du niveau de régénération requis,

- contribution aux cycles écologiques globaux

- séquestration du carbone,
- prévention des émissions d'autres gaz (ex. méthane, nitrates)

- aptitude de l'écosystème-forêt à remplir des fonctions socio-économiques

- maintien de la quantité (stock) et de la qualité (diversité et qualité bois) des ressources forestières,
- durabilité des rendements forestiers, produits principaux comme produits secondaires,
- respect des contraintes écologiques au moment de l'abattage et du transport.

Quelques conseils complémentaires

. Aménagement des bassins versants en relation avec l'agriculture vivrière,

La protection des bassins versants, en particulier dans les pays montagneux et/ou à pluviométries élevées, est typiquement une affaire de forestiers, les sommets du bassin versant devant normalement être gérés avec des plantes pérennes.

Cet aménagement de bassin versant, toutefois, devra se faire en liaison étroite avec les responsables d'agriculture et de pastoralisme pour intégrer l'ensemble de la mise en valeur de ces zones, les forêts de protection étant le plus souvent peu ou pas productives.

Il convient donc d'aménager le bassin versant dans son ensemble, les éventuels surplus de l'agriculture et de l'élevage finançant l'investissement forestier protecteur.

. Promotion de l'agro-foresterie, en particulier dans les zones à bas potentiel

En particulier dans les zones à bas potentiel (voir la partie agriculture et durabilité), la promotion de l'agroforesterie est conseillée pour pouvoir tirer le meilleur parti possible des terres marginales, non aménageables pour l'agriculture seule.

L'agro-foresterie a été largement étudiée techniquement par des organismes comme l'ICRAF (International Center for Research on Agro-Forestry) à Nairobi et le réseau que ce Centre a su se constituer. Une adaptation locale de ces recherches est toujours nécessaire, dans le cadre d'une collaboration entre agronomes, zootechniciens, forestiers et économistes ruraux.

. Aménagement polyvalent des forêts,

Les forêts peuvent et doivent, dans la plupart des cas, être aménagées de manière globale. Ceci est particulièrement important lorsque des populations dépendent étroitement de ces forêts pour leur survie quotidienne. Ces populations peuvent vivre dans ou en bordure de la forêt. Cet aménagement globale est obtenu en maximisant l'ensemble des produits principaux, secondaires et services de la forêt.

Ceci ne peut être obtenu que par une étroite concertation sur le terrain entre forestiers, économistes et spécialistes des sciences humaines (sociologues, anthropologues,.,..).

De tels aménagements polyvalents des forêts existent désormais, par exemple au Ghana (en démarrage au Bénin), et leur suivi montre tout l'engouement des populations locales, mais aussi la complexité des méthodes et techniques à mettre en place.

. Protection des ressources génétiques

Enfin, une des missions centrales de la foresterie «durable» sera la conservation du pool génétique végétal, pour les espèces arboricoles ainsi que pour les espèces non arboricoles. Ceci nécessitera des services forestiers nationaux puissants et efficaces.

Malheureusement, dans le contexte actuel de privatisation généralisée et d'abandon du soutien des bailleurs de fonds aux services d'Etat, cette fonction fondamentale risque de disparaître et le secteur privé ne pourra pas reprendre toutes les attributions des services forestiers nationaux.

Ceci représente un risque important de perte de patrimoine génétique.

Phase de synthèse

La partie théorique et l'étude de cas sont terminées. Il reste à valider les connaissances par l'examen final d'évaluation des connaissances,... Puis surtout à tester les connaissances et les réflexes acquis une fois de retour sur le terrain, là où est l'action.

Le carnet de données de base du planificateur a été justement conçu pour rester en permanence à portée et à disposition du stagiaire, qui sera redevenu ingénieur, ou économiste, ou planificateur à Bétékoukou (Bénin), Dellys (Algérie) ou Santa Cruz Zezontepec (Mexique).

Bonne chance pour cette nouvelle aventure.


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