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Besoins en formation de formateurs dans le domaine de la radio rurale

Par Christopher Kamlongera - Directeur du Centre de communication pour le développement communautaire en Afrique australe (SADC-CCD), Harare, Zimbabwe

Biographie

Christopher Kamlongera est titulaire d'un Doctorat en anglais de l'Université de Leeds, et d'une maîtrise en art dramatique et théâtre de la même Université. Il a été Directeur exécutif de l'Institut de Journalisme du Malawi. Depuis 1977, il est Directeur du Centre de communication pour le développement de la SADC, basé à Harare, au Zimbabwe. Il est également Professeur de théâtre et d'art dramatique et Président de l'Université du Malawi (actuellement en congés d'études pour ces deux fonctions). Les principaux centres d'intérêt du Professeur Kamlongera sont la mobilisation sociale et la communication pour le développement, les arts du spectacle dans la communication, l'art dramatique et l'enseignement de l'anglais, l'administration de l'art, la rédaction de manuels (langue anglaise, études théâtrales, culture). Le Professeur Kamlongera a travaillé avec plusieurs universités, en Tanzanie, Zambie, Zimbabwe. Il a publié de nombreux articles sur divers sujets dans son domaine de prédilection, des études de cas, monographies et livres. Il a assuré des consultations pour l'OMS, l'UNICEF, l'OXFAM, l'USAID, la FAO, le BRITISH COUNCIL, la GTZ et le FNUAP.

Résumé

La communication porte sur une étude des besoins de formation des formateurs en radio rurale, menée par le CIERRO et la SADC.

Elle dresse l'état des lieux de la formation en radio rurale en Afrique et souligne le fait que même si quelques radios se définissent comme des radios rurales, elles n'en possèdent pas les caractéristiques de base. Cette revendication de positionnement est souvent liée à ce qu'elles diffusent des programmes en langues vernaculaires avec quelques messages relatifs au développement.

La communication poursuit en montrant que jusqu'ici (à l'exception notable du CIERRO), il n'y a pas d'institution de formation spécifiquement consacrée à la radio rurale.

C'est pourquoi il n'y a pas beaucoup de formateurs spécialisés dans ce domaine.

En conclusion, le Professeur Kamlongera avance des suggestions pour améliorer la formation en radio rurale. Ces suggestions sont basées sur les besoins exprimés par l'ensemble des personnes interrogées au cours de l'enquête.


A. INTRODUCTION

B. LES RESULTATS

CONCLUSIONS

RECOMMANDATIONS


A. INTRODUCTION

1. Le contexte

Cette communication est basée sur une enquête commanditée par le CTA (Centre Technique de Coopération Agricole et Rurale) et la FAO (Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture), et mise en œuvre par le CIERRO (Centre Interafricain d'Etudes en Radio Rurale de Ouagadougou) et le SADC-CCD (Centre de communication pour le développement communautaire en Afrique australe). Cette enquête se situait dans la continuité de l'atelier organisé par la FAO à Ouagadougou en juin 1996. Cet atelier devait identifier les défis et les problèmes rencontrés par la radio rurale en Afrique. Vingt et un pays d'Afrique et de nombreuses organisations internationales y étaient représentés.

La radio rurale en Afrique est considérée comme le meilleur outil de communication avec les populations rurales. Il leur offre un support de dialogue démocratique sur les questions économiques, sociales et culturelles. Ces questions sont souvent liées à celles du développement dans les zones rurales, périurbaines et urbaines. Un tel dialogue est facilité par la nature même de la radio. C'est un outil de communication qui s'adapte particulièrement bien à la question du développement rural, en raison de son faible coût, de sa grande capacité d'adaptation (à toutes sortes de situations et de publics), de sa facilité d'accès. Ce sont ces caractéristiques qui ont conduit à la création de stations de radio rurale en Afrique (tous statuts confondus). Toutefois, de nombreuses stations ont été mises en place sans s'être dotées ni d'un cadre légal et institutionnel, ni d'équipements adéquats pour la production des programmes, ni de producteurs, techniciens et gestionnaires formés.

Après avoir identifié les insuffisances de leurs radios rurales, plusieurs pays ont sollicité l'assistance de la FAO pour surmonter ces contraintes, pour développer les infrastructures et les capacités de formation. Ces pays ont également demandé un appui en matière d'équipements.

Sur cette base, la FAO, en collaboration avec l'URTNA (Union des Radios et Télévisons Nationales d'Afrique), s'est engagée dans l'amélioration de la radiodiffusion en Afrique.

Au cœur de cette initiative, le CIERRO (qui est le seul centre spécialisé dans la radio rurale en Afrique), a été sollicité pour fournir un appui, avec le soutien de plusieurs partenaires de la coopération bi et multilatérale, et notamment le CTA.

L'atelier de Ouagadougou avait adopté une déclaration qui demandait la mise en œuvre de cette étude et avait dessiné les contours de la contribution du CTA autour des points suivants:

  1. infrastructures, équipements et technologie
  2. aspects institutionnels, juridiques et réglementaires
  3. développement de la recherche et de la formation
  4. amélioration de la coopération entre les partenaires de la radio rurale.

Avec l'émergence des sociétés civiles et du pluralisme de la radio, il y a un besoin urgent de personnels formés pour faire fonctionner les stations. Cela n'est possible que si on dispose d'un nombre suffisant de formateurs. Jusqu'alors, ceux qui ont assuré ces fonctions, y compris dans le domaine de la radio rurale, l'ont souvent fait de façon fortuite, sans avoir les compétences requises pour prendre en compte les spécificités psychopédagogiques qui font partie intégrante de la formation.

C'est pour satisfaire ce besoin urgent que le CTA et la FAO, en collaboration avec le CIERRO, ont proposé et réalisé cette étude sur les besoins en formation. La décision de lancer cette étude a été prise au cours d'une réunion des partenaires du CTA dans le domaine de la radio rurale tenue les 19 et 20 mars 1999.

2. Les objectifs de l'étude

Les principaux objectifs de l'étude consistent à renforcer la radio rurale en Afrique et à identifier les ressources humaines existantes sur le continent, en termes de formation et de développement de méthodes pertinentes de formation en radio rurale. Les résultats attendus de cette enquête sont les suivants :

Cette présentation va approfondir le premier aspect de ces résultats, à savoir les besoins en formation de formateurs de radio rurale.

Méthodologie

a. Clarification du concept de radio rurale

La radio rurale est un moyen de diffusion de programmes principalement destinés au monde rural. Ces programmes sont conçus pour appuyer le développement durable. Cette étude a toutefois élargi son champ aux radios urbaines ou périurbaines qui s'intéressent également au développement durable.

b. L'échantillon

Les pays couverts par l'étude ont été sélectionnés sur la base de leur participation à l'atelier sur le développement de la radio rurale en Afrique, qui s'est tenu à Ouagadougou en juin 1996 et de leur appartenance aux zones d'Afrique de l'ouest, du centre, du sud et de l'est. Un autre critère était constitué par l'existence sur leur territoire d'une masse critique de stations de radio rurale.

L'information sur le nombre de radios par pays a été fournie par les résultats d'une étude organisée par le CTA et le GRET entre 1997 et 1998 qui a débouché sur un inventaire des radios au service du monde rural dans les pays d'Afrique subsaharienne, des Caraïbes et du Pacifique. Sur la base de cette étude, les pays suivants ont été sélectionnés:

Group A: Afrique de l'ouest et du centre et du sud

Groupe B: Afrique de l'est

Bénin
Burkina Faso
Cameroun
Tchad
Congo
Gambie
Ghana
Guinée
Guinée-Bissau
Mauritanie
Mali
Niger
Nigeria
Sénégal
République Centrafricaine

Kenya
Malawi
Afrique du Sud
Tanzanie
Zambie
Zimbabwe

L'inventaire réalisé par le CTA et le GRET a également aidé cette étude à identifier les catégories d'interlocuteurs à interroger dans chacun des pays et à en arrêter le nombre. Sur cette base, le nombre de personnes suivant à été interrogé :

Pour les 8 autres pays d'Afrique de l'ouest (Bénin, Gambie, Ghana, Guinée-Bissau, Mauritanie, Niger, Sénégal), l'enquête a concerné 10 formateurs en radio rurale par pays, donc un total de 80 personnes enquêtées. Pour l'Afrique centrale (Cameroun, Congo, République Centrafricaine et Tchad), l'enquête a interrogé 5 producteurs de radio par pays soit un total de 20 enquêtés. Pour les pays d'Afrique australe et orientale (Zimbabwe, Malawi, Kenya, Zambie et Tanzanie), nous avons ciblé 5 personnes par pays, ce qui conduit à un total de 25 enquêtés.

c. Questionnaires

Trois catégories de questionnaires ont été conçus pour cet exercice :

  1. les institutions de production et de radiodiffusion (stations de radio)
  2. les institutions de formation à la radio
  3. les personnes ressources spécialisées en formation.

Les questionnaires étaient accompagnés d'un guide pour faciliter leur administration. Le troisième questionnaire ne se limitait pas aux producteurs de radio mais portait aussi sur les formateurs potentiels, à savoir :

Ces questionnaires étaient essentiellement destinés à recueillir de l'information provenant du terrain, mais les consultants devaient par ailleurs apporter leur propre approche méthodologique au travail, ceci pour respecter le taux de radios sélectionnées dans chaque pays en rapport au nombre de stations identifiées par pays.

d. Contraintes

18 pays, sur les 21 sélectionnés ont répondu au questionnaire. Trois consultants du Ghana, de Mauritanie et de Guinée Bissau n'ont pas envoyé leurs rapports et leurs questionnaires. Sur les 294 personnes interrogées, seulement 118, c'est à dire 43%, ont répondu aux questions relatives aux formateurs existants et potentiels.

La situation est à peu près similaire en ce qui concerne les radios interrogées. Sur les 314 stations de radio approchées, seulement 197 ont répondu, soit 67,2%. Comment l'expliquer ?

Le nombre de formateurs contactés est fonction des compétences disponibles au sein des stations de radio. En fait, toutes les stations interrogées ne disposent pas de personnes qualifiées pour assurer des tâches de formation. Par ailleurs, certaines parties des questionnaires sont restées sans réponses, malgré l'insistance des interviewers.

Ces quelques insuffisances n'ont toutefois pas affecté la qualité globale des résultats obtenus à partir de l'échantillon représentatif des radios rurales des pays visés.

B. LES RESULTATS

1. LES INSTITUTIONS DE PRODUCTION ET DE RADIO DIFFUSION

1.1 Types de stations de radio et personnels

On peut distinguer deux types de stations de radio dans les pays couverts par cette étude. Les radios publiques et les radios privées. Dans la plupart des pays les deux types de radios travaillent côte à côte. Dans d'autre pays, on ne trouve que des radios publiques ; celles-ci peuvent être relayées par des stations régionales, mais le gouvernement conserve le monopole de la radiodiffusion.

L'efficacité des équipes de ces radios est variable, selon leur charge de travail et le type de station pour lequel elles travaillent. Les stations publiques ont tendance à utiliser plus de personnel que les privées et donc ils ont une gamme de personnels plus variée. Les stations privées, par contre ont des effectifs réduits (de 3 à 35 personnes) et la polyvalence est de règle. Une même personne peut être à la fois producteur, présentateur et même technicien. Certaine stations font aussi appel à des bénévoles.

1.2 Existence de radios rurales au sein de stations de radiodiffusion

Toutes les radios étudiées diffusent leurs programmes en langues locales et visent principalement les communautés rurales, elles se considèrent naturellement comme des radios rurales. Toutefois, seulement quelques-unes disposent d'une structure spécifique de radio rurale. Beaucoup de station privées ont été incapables de quantifier leur production de programmes ruraux. Ceci peut s'expliquer par le fait qu'elles n'ont pas toujours bien intégré le concept de radio rurale. D'autres stations, par contre, annoncent une certaine quantité de programmes ruraux par semaine. Si l'on analyse attentivement les stations d'Afrique de l'ouest et du centre, on se rend compte qu'il s'agit des stations qui disposent de personnels directement ou indirectement formés par le CIERRO de Ouagadougou.

1.3 Equipements

Il faut noter que beaucoup de radios disposent d'équipements numériques et informatisés. Certaines stations sont même connectées à Internet ; quelques-unes disposent aussi de la messagerie électronique. Une poignée dispose d'une antenne parabolique.

2. LES INSTITUTIONS DE FORMATION

2.1 Besoins en formation

Toutes les stations ont manifesté un besoin urgent de formation dans les différents secteurs de la radio rurale. Incapables de préciser le type de formation qu'ils attendent pour leur personnel, les responsables des stations souhaitent surtout qu'il dispose des compétences minimales en radio rurale pour faire tourner la station. Ces connaissances sont la plupart du temps acquises sur le tas et par compagnonnage avec les plus anciens. Même si des opportunités se présentent de temps en temps pour des formations à l'extérieur dans des institutions spécialisées dans le pays ou à l'extérieur, la formation est généralement limitée en raison de financements insuffisants, d'absence de formateurs qualifiés et d'équipements adéquats.

Actuellement, aucun des pays associés à cette étude n'a établi de plan de formation qui donne aux agents des radios un savoir de base pour faire fonctionner une station de radio rurale. Toutefois le besoin de ce genre de formation a été exprimé par les personnels individuellement, sans toutefois figurer dans les plans de formation formels. Les programmes de formation en radio rurale les plus demandés tournent autour de trois ou quatre grands thèmes: les techniques de production, la gestion des stations (production, présentation, gestion, administration) et une formation plus générale à la communication.

Dans beaucoup de stations, aucune disposition n'est prise pour la formation. Cette carence semble liée à l'absence de matériels de formation, de formateurs qualifiés et d'infrastructures adaptées.

2.2 Les institutions de formation

L'étude a montré que sur les 18 pays enquêtés, 14 disposaient au moins d'une institution de formation en radio. Ces institutions sont publiques ou privées. Certains pays ne disposent que d'institutions publiques (Cameroun et Congo), alors que d'autres ont à la fois des institutions publiques et privées (Afrique du sud). Dans d'autres encore les institutions publiques et privées travaillent de concert (Bénin et Kenya).

2.3 Finances et équipements

Les institutions publiques sont financées par les Etats qui leur allouent une subvention annuelle. Les institutions privées vivent des ressources fournies par le paiement des cours par leurs étudiants

Dans la plupart de ces institutions, les équipements sont limités aux infrastructures (bâtiments et véhicules). Seuls le Congo et le Malawi semblent disposer de matériels de production, de reportage, d'ordinateurs et (pour le Malawi) d'émetteurs. Il est rare que les institutions disposent de paraboles. Dans la plupart des centres, les équipements sont obsolètes.

2.4 Formateurs

Les formateurs, lorsqu'ils existent, sont généralement issus du personnel (permanent ou temporaire) des stations. Leur niveau d'éducation est très variable (du baccalauréat au doctorat). Ils ont généralement été formés dans des universités africaines, européennes, américaines, japonaises ou indiennes avec des spécialisations très variées. Ils couvrent l'ensemble des domaines de la communication, comme le journalisme, la radiodiffusion, la production télévisuelle, la maintenance radio et vidéo, la sociologie des sciences de l'information et de la communication, la déontologie, les relations internationales, l'économie des médias, etc.

2.5 Niveau de la formation

Deux types de formation sont proposés dans la plupart des institutions :

Les formations de longue durée varient de 2 à 4 ans et débouchent sur un diplôme équivalant à une licence ou à une maîtrise universitaire en communication.

Les formations de courte durée varient généralement d'une à trois semaines.

2.6 Programmes, méthodes de formation et évaluation

Toutes les institutions enquêtées indiquaient que 60% de leur enseignement est consacré à la théorie et 40% à la pratique. Les programmes comportent les matières suivantes :

La formation prend toutes sortes de formes dans ces institutions. On y trouve des conférences, des séminaires, des travaux dirigés, des travaux sur le terrain, de la recherche, des exercices pratiques. L'accent est davantage mis sur la formation pratique sous la forme d'expériences de terrain plus qu'autre chose.

Dans de nombreuses institutions, la méthodologie s'appuie sur les échanges d'expériences entre étudiants et sur leur participation. L'évaluation est basée sur un contrôle continu et des examens finaux.

Quelques institutions demandent également aux étudiants la formulation d'un projet en radio ou en télévision sous forme de mémoire de fin d'études ou de rapports de recherche.

2.7 Equipements de formation

Beaucoup d'équipements sont destinés à la documentation, la production, le reportage ou sont des aides audiovisuelles. Toutes les institutions de formation disposent d'un minimum d'équipements de cette nature. Par exemple, ils disposent tous d'un équipement de base pour la production radio et vidéo.

2.8 Capacité d'accueil des institutions

Le nombre d'étudiants qui peuvent être accueillis par ces institutions varie de 4 à 200 comme l'indique le tableau ci-dessous.

Institution

Nombre d'étudiants

Ecole polytechnique de Harare - Zimbabwe
AGRITEX - Zimbabwe
College Evelyn Hone - Zambie

4 à 10

Collège technique - Bénin
Collège chrétien d'Afrique australe - (Zimbabwe)
College Tangaza - Kenya

10 à 20

CIERRO
ORTB - Bénin
Ministère de la communication - Burkina Faso
Ecole d'information et de communication - Cameroun
Réseau des médias communautaires - Kenya

20 à 30

IFTIC - Niger
CFTI - Burkina Faso

40 à 60

2 · Congo

90 à 100

FRCN - Nigeria
Institut des communications de masse - Kenya

200

2.9 La composante radio rurale dans les institutions de formation

Le CIERRO est la seule institution d'Afrique francophone qui dispense une formation en radio rurale. Les formateurs qui travaillent dans ces institutions ont une bonne connaissance de la radio en général mais peu de connaissances spécifiques en radio rurale. Il faut noter par ailleurs que dans les institutions des pays anglophones, notamment en Afrique australe, plusieurs cours sont spécifiquement consacrés au monde rural ou au développement rural.

3. FORMATEURS POTENTIELS EN RADIO RURALE

Les formateurs en radio rurale sont très peu nombreux, contrairement à la radio classique.

L'étude a mis en évidence le fait que les formateurs potentiels étaient pour la plupart des hommes, employés permanents dans les stations de radio. Quelques stations ont des formatrices. Les formateurs proviennent souvent de l'encadrement. Ils peuvent être des directeurs, des rédacteurs, des responsables d'animation, de production, des responsables techniques. La plupart d'entre eux ont un niveau universitaire satisfaisant et disposent de plusieurs années d'expérience professionnelle.

Ils disposent souvent de diplômes universitaires (baccalauréat, licence, maîtrise dans de nombreuses spécialités dont l'ingénierie). La plupart d'entre eux ont suivi une formation professionnelle de trois à cinq ans dans des écoles professionnelles reconnues. Parmi ces formateurs, beaucoup proviennent du CIERRO, particulièrement en Afrique de l'ouest et du centre.

3.1 Formation des formateurs

La plupart des personnes identifiées comme formateurs dans cette enquête n'ont jamais suivi de "formation à la formation". L'absence de propositions dans ce domaine est citée comme la principale raison à cet état de fait. Seuls quelques-uns ont suivi des formations de formateurs organisées par des institutions comme la Deutsche Welle à Bamako (Mali), le CIERRO (Burkina Faso) et l'Institut pour la promotion du journalisme (Université de Witwatersrand en Afrique du sud), Radio Nederland, la BBC (Royaume-Uni) et d'autres institutions de formation en Asie et aux Etats-Unis.

3.2 Formation en radio rurale

Très peu de formateurs ont bénéficié d'une formation de longue durée en radio rurale. Les seuls dans ce cas sont les anciens du CIERRO au Burkina Faso. Les pays qui ont des anciens du CIERRO sont le Bénin, le Burkina Faso, le Congo, le Mali, la République Centrafricaine, le Tchad, la Guinée, le Sénégal, le Malawi, la Gambie, le Niger, le Cameroun. Parmi ces formateurs, figurent ceux qui ont suivi la formation de longue durée (de deux ans) et ceux qui ont suivi des cycles courts (de un à trois mois).

3.3 Supervision de la formation

3.3.1 Disciplines enseignées

Dans la plupart des stations de radio, il n'y a pas de formation systématiquement organisée de façon formelle. Ceux qui ont suivi des formations sur le tas sont en général incapables d'indiquer les disciplines qui leur ont été enseignées. Souvent, il se souviennent de ce qu'ils ont appris de façon informelle: la radio rurale, le traitement de l'information, la présentation, la production, les reportage, la diffusion, la maintenance radio, la prise de son, l'animation d'antenne, la gestion, le marketing, le journalisme, les feuilletons radiophoniques, les études d'auditoire, la documentation, la recherche participative, l'élaboration des grilles de programmes, etc.

3.3.2 Méthodes utilisées

Les enquêtés ont mentionné les méthodes suivantes :

Beaucoup ont également mentionné des méthodes basées sur des travaux de groupe et des discussions. D'autres techniques évoquées sont le brainstorming et l'animation.

3.3.3 Aides éducatives

L'étude ne fait pas mention d'aides éducatives spécifiques. Cependant, l'outil le plus utilisé est le tableau noir. Quelques formateurs indiquent leur familiarité avec d'autres supports comme le tableau d'images, le rétroprojecteur, la vidéo, les magnétophones, la documentation, les ordinateurs, les manuels de formation.

3.3.4 Contraintes

Les principales difficultés rencontrées dans la formation sont les suivantes:

Il convient de noter les disparités de niveau parmi les apprenants : certains disposent d'un haut niveau universitaire, alors que d'autres n'ont pas dépassé le niveau secondaire. La question des formateurs insuffisamment formés, comme indiqué précédemment, constitue une autre contrainte. En tout état de cause, les besoins les plus urgents dans ce domaine sont les infrastructures de formation.

CONCLUSIONS

1. EXPERTISE NATIONALE

Lorsqu'on examine le statut des experts nationaux, on constate qu'ils sont compétents et qualifiés, mais qu'ils ne sont présents que dans quelques stations de radio. Ils ont en général bénéficié de bonnes formations dans de bonnes institutions et universités, en Afrique et à l'extérieur. Toutefois, le nombre de femmes est très réduit. Elles ne représentent que 23% du total. Cette situation doit être améliorée.

Bien que cette expertise nationale apparaisse comme forte, expérimentée, professionnelle et intellectuellement compétente, celle-ci n'a pas été formée à former d'autres individus. Dans l'ensemble, les experts nationaux ont été bien préparés à la radio classique, mais pas à la radio rurale, ni à la formation.

Pour être efficace en radio rurale, ces experts doivent suivre une formation complémentaire en radio rurale et en formation de formateurs.

2. LES BESOINS EN FORMATION DES FORMATEURS EN RADIO RURALE

Pratiquement aucun des formateurs travaillant dans le domaine de la radio rurale n'a suivi une formation de formateurs. Ils ont pourtant une bonne expérience dans le domaine de la radio qui mériterait d'être complétée par une formation en radio rurale. Il conviendrait de les former d'abord à la radio rurale, puis à la formation.

2.1 Besoins en formation en radio rurale

2.2 Besoins en formation de formateurs

3. LE PROGRAMME DE FORMATION DES FORMATEURS

Une analyse des besoins exprimés révèle qu'un bon nombre des enquêtés devrait suivre une formation en radio rurale et aux techniques de formation. La formation des formateurs en radio rurale devrait donc couvrir deux aspects: la formation en radio rurale d'une part et la formation des formateurs de l'autre. La formation en radio rurale devrait être centrée sur un programme de radio rurale, en faisant l'hypothèse que les formateurs potentiels identifiés ont déjà une formation en radio classique.

L'objectif de cette formation en radio rurale est de permettre aux futurs formateurs d'intégrer le concept de radio rurale, de développer leur connaissance du monde rural, de passer en revue les principales approches de la communication en milieu rural et d'identifier les méthodes les mieux adaptées à ce contexte.

La formation des formateurs, quant à elle, devrait viser à développer chez les apprenants leurs aptitudes à l'andragogie et leur capacité à maîtriser les principales méthodes et les principaux outils de formation existants. Les apprenants devront également s'initier à l'identification des besoins en formation, à la préparation des modules de formation, à l'évaluation.

3.1 Programme de formation en radio rurale

Le programme de formation en radio rurale devrait comporter les modules suivants.

La radio rurale

Les objectifs spécifiques de la communication sociale

Recherche de terrain

Réalisation des programmes

Sociologie rurale

Tradition orale et communication

Connaissance des radios rurales et communautaires

Les nouvelles technologies d'information et de communication (NTIC)

La gestion des radios locales et communautaires

La gestion des ressources humaines dans une radio locale ou communautaire

Gestion financière des radios locales et communautaires

Eléments d'éthique et de déontologie du producteur/animateur de radio rurale

L'étude de l'auditoire de la radio

La communication pour le développement

3. 2 Le programme de formation des formateurs

Les modules suivants sont recommandés.

L'andragogie

Les méthodes

Les médias

L'évaluation

Les besoins en formation

La planification d'un programme de formation

Le feed-back et l'évaluation

L'interaction

Les modules de cours

L'évaluation des modules

RECOMMANDATIONS

Bien que cette enquête n'ait couvert que 18 des 21 pays identifiés, elle permet de dresser un bon aperçu de la situation de la radio rurale en Afrique occidentale, centrale, orientale et australe. La situation est proche d'un pays à l'autre. Généralement, la radio rurale n'est ni totalement appréciée, ni comprise. Les gens en parlent sans la connaître vraiment, et pas de façon professionnelle. Il semble que la radio rurale soit plus connue en Afrique de l'ouest et du centre qu'en Afrique orientale et australe. C'est grâce à l'action du CIERRO qui a formé beaucoup d'agents venant de ces deux régions depuis longtemps.

Il ressort de cette enquête que 14 des 18 pays enquêtés disposent d'au moins un centre de formation. Dans ces 18 pays confondus, il existe 41 institutions de formation qui accueillent des étudiants d'autres nationalités que celle du pays où elles sont implantées. Ces écoles ont des enseignants qualifiés et compétents qui ont bénéficié de formations dans les universités nationales ou étrangères. Ces centres proposent deux types de formations: les cycles dits longs (plusieurs années) et les cycles dits courts (au moins une semaine). Cependant, parmi ces institutions, peu proposent une formation en radio rurale. La plupart d'entre elles offrent une formation classique en radio en prenant en compte le monde rural. On ne trouve que rarement des cours centrés sur les communautés rurales, comme c'est le cas dans certaines institutions d'Afrique orientale et australe.

La seule école totalement consacrée à la radio rurale est le Centre Interafricain d'Etudes en Radio Rurale de Ouagadougou (CIERRO). Le Centre de communication pour le développement communautaire en Afrique australe (SADC-CCD), au Zimbabwe, commence seulement à développer des modules sur ce thème.

Notons également que 14 des 18 pays ont à la fois des radios publiques et privées. Les autres n'ont que des stations publiques. Sur les 197 radios identifiées, 43 sont publiques et 154 sont privées. Ce dernier groupe comprend des radios communautaires, confessionnelles ou commerciales. Toutes ces stations, publiques comme privées, se définissent comme des radios rurales, parce qu'elles produisent des programmes en langues nationales et à ce titre elles revendiquent une proximité avec l'environnement rural. Il est clair que la notion de radio rurale n'est pas bien intégrée.

Les programmes produits par ces stations sont souvent similaires. Ils suivent le même schéma de production. Ils sont produits directement par la radio conformément à son mandat, ou par les partenaires au développement et diffusés par les émetteurs de la station. Leur impact sur les auditeurs est mesuré avec des outils classiques par les partenaires d'une radio à l'autre indépendamment des moyens de la radio (financiers, matériels ou en termes de compétences). Quelques stations disposent de matériel numérique alors que les autres exploitent toujours, pour réaliser leurs programmes, des équipements de reportage et de production obsolètes.

Les équipes varient d'une station à l'autre en fonction de leur politique. Les personnels permanents sont plus nombreux que les vacataires. Les radios privées et communautaires ont un personnel plus polyvalent en raison de leurs faibles effectifs. Dans l'ensemble, ces structures ont un grand besoin de formation, particulièrement dans trois ou quatre domaines concernant le fonctionnement de la radio et sa gestion.

Malgré le caractère pressant de ces besoins, la plupart des radios privées n'ont pas les moyens d'investir dans la formation. Pourtant, dans la plupart des radios nationales, l'expertise en formation existe et pourrait être exploitée. Sinon, il convient de la susciter, car cette expertise s'appuie souvent sur une solide expérience accumulée au long des années. Ce qui manque, ce sont des compétences pédagogiques et une connaissance de la radio rurale. Il existe un besoin de perfectionnement dans ces deux domaines. Cette enquête constitue un premier pas en ce sens.

Cette étude propose un programme de formation qui recommande spécifiquement les éléments suivants.

 

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