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Sécurité alimentaire - Utiliser la radio pour mieux communiquer sur la sécurité alimentaire en Somalie

David Campbell - Directeur de Mediae, à Nairobi (Kenya)

Biographie

David Campbell est spécialiste des médias dans le domaine du développement agricole et de l'Environnement. Il a acquis 20 ans d'expérience professionnelle - auprès de gouvernements, d'ONG et dans le secteur privé en Afrique australe et orientale - en planification et mise en place de stratégies de communication efficaces, pour répondre aux besoins d'information des populations cibles. Il possède une solide expérience en agriculture, Environnement et développement rural, doublée de réelles compétences en production média, dans le domaine de la vidéo, la radio et l'édition. En 1996, il a créé la société Mediae Trust, une fondation britannique, spécialisée dans la production et l'utilisation des médias pour favoriser le développement en Afrique de l'Est et australe. Mediae travaille actuellement en Somalie, en Ouganda, au Mozambique et au Kenya.

Utiliser la radio pour mieux communiquer sur la sécurité alimentaire en Somalie

Les gouvernements, les donateurs, les agences pour le développement et les audiences rurales portent un regard nouveau sur le rôle important et l'efficacité de la collecte de données, ainsi que sur la façon dont sont gérés aujourd'hui l'analyse, la diffusion et la communication d'informations ayant trait à la sécurité alimentaire.

L'analyse de données sur la sécurité alimentaire a été traditionnellement menée dans les pays en développement parmi les ménages pauvres situés en milieu rural dont l'existence est menacée par de nombreux facteurs extérieurs, qu'il s'agisse de guerre, d'insécurité, de sécheresses, d'inondations, de maladies ou de flux de population dus aux migrations.

Les communautés touchées ne possèdent pas toujours les systèmes d'aide nécessaires pour faire face à de telles périodes de crise. Les partenaires au développement veulent aider et ont besoin d'informations précises sur la situation alimentaire dans les foyers ruraux et sur le terrain. Des méthodes ont été mises au point pour surveiller et mesurer les besoins présents et futurs, prenant en considération le mode de vie des populations concernées, les marchés, les aides alternatives et les mécanismes traditionnels pour surmonter les difficultés.

Le FSAU par exemple dispose en Somalie de 29 moniteurs qui ont été parfaitement formés sur le terrain pour travailler en zones rurales et dans les marchés locaux, pour y évaluer les questions de sécurité alimentaire. Ces données sont ensuite analysées et fournies aux principaux partenaires au développement afin qu'une action soit entreprise là où il le faut. Les partenaires au développement fournissent alors les moyens pour satisfaire les besoins des audiences rurales où ils peuvent. Il peut s'agir d'un peu de nourriture dans des situations d'extrême urgence ou d'apport de fonds pour constituer de façon préventive des stocks de nourriture prêts à être distribués quand cela s'avère nécessaire, en cas de pénurie.

Le FSAU était au départ géré par le Programme Alimentaire Mondial alors que la guerre en Somalie créait une insécurité importante.

Le FSAU est maintenant géré par la FAO.

Globalement, la sécurité s'est fortement améliorée et la fonction principale du FSAU demeure : rendre compte de la sécurité alimentaire. Mais, on s'intéresse maintenant davantage au « comment », c'est-à-dire à la façon dont l'information, le personnel sur le terrain, les contacts et les structures existantes du FSAU peuvent être utilisés pour aider les populations rurales de Somalie.

Selon Barbara Huddleston de la FAO, il existe une continuité entre les situations suivantes :

Pauvre

Moins pauvre mais parfois vulnérable

Moyens d'existence durables Peut survivre en cas de menaces

Riche

La FAO, en collaboration avec le FSAU, s'attache maintenant à savoir comment utiliser l'expérience et les moyens dont elle dispose pour que les « Pauvres » deviennent « Moins vulnérables » et que les « Moins vulnérables » accèdent à des « Moyens d'existence vraiment durables ».

Pour cela, il est essentiel d'aider ces différentes populations à comprendre leur place dans cette « chaîne » ainsi que les actions qu'elles peuvent mener pour progresser, tout en leur fournissant les moyens de progresser.

En matière d'aide prioritaire, particulièrement en Somalie, il convient d'utiliser la radio très largement et de façon régulière.

La Somalie utilise traditionnellement la radio pour informer. Le pays possède une langue commune, mais un réseau routier et un réseau de communication peu développés. La Somalie utilise traditionnellement le théâtre, la poésie et le chant comme outil éducatif pour communiquer.

Quels que soient les tentatives et les programmes en faveur du développement durable en Somalie, ceux-ci doivent avant tout s'appuyer sur un programme radio régulier très populaire qui agisse comme un moyen de communication régulier traitant des difficultés et des opportunités en faveur du changement.

Mediae, une société leader dans le domaine de la communication pour le développement, a acquis une expérience en matière de création de ce type de programmes dans la région, et en particulier au Kenya, au Mozambique et en Somalie.

Pour Mediae, une stratégie de communication qui utilise la radio comme fer de lance pourrait fournir un soutien incomparable et devenir un facteur clé de succès dans toutes les initiatives en faveur du développement rural durable en Somalie.

Afin de mieux comprendre le rôle et les genres radiophoniques recommandés pour renforcer la sécurité alimentaire, veuillez consulter la communication ci-dessous, présentée par David Campbell lors de l'Atelier international sur la radio rurale, qui s'est tenu à Rome.

Histoire d'une initiative pour doter le Kenya en production et en émissions radiophoniques durables

Je suis arrivé au Kenya en 1979 pour travailler comme fonctionnaire de coopération technique en collaboration avec le gouvernement kenyan et avec le soutien financier du gouvernement britannique (ODA).

Mon travail consistait à étudier l'utilisation des médias pour favoriser la diffusion d'informations et améliorer la communication avec les audiences rurales au Kenya. J'avais dans ma valise les scripts du feuilleton radiophonique le plus populaire du Royaume-Uni, intitulé "Archers", car je pensais que cela pouvait être une bonne façon de captiver les auditoires de façon durable, à condition que ce feuilleton soit adapté à la réalité de la vie rurale du Kenya.

Il aura fallu neuf ans pour persuader les Kenyans et les partenaires au développement du bien-fondé d'une telle approche de la communication rurale.

La principale raison de ce changement d'attitude vis-à-vis de la radio était la suivante : le gouvernement kenyan avait décidé de changer la Voix du Kenya en la faisant passer d'une entreprise de radiodiffusion totalement détenue par l'Etat à un statut semi-privé.

L'AIC, où je travaillais, n'avait plus besoin de remplir ses programmes quotidiens d'une à deux heures d'émissions radio très ennuyeuses et visant seulement à remplir la grille des programmes. Par exemple, en interviewant, une heure durant, le chef de l'institut de recherche sur le coton, émission qui était enregistrée uniquement parce que ce monsieur était toujours disponible, qu'il était le cousin du réalisateur et qu'il usait abondamment d'un jargon technique absolument incompréhensible. Ceci était donc très ennuyeux, d'autant que seulement 5 % des paysans cultivaient du coton. Il est donc évident que la radio pour les paysans n'était ni populaire, ni utile !

Passer à un statut privé signifiait pour l'AIC devoir du jour au lendemain financer son temps d'antenne, alors qu'il n'était pas en mesure de s'offrir ne serait-ce qu'une émission de 10 minutes par semaine à ce nouveau tarif.

A mon avis, ce dont on avait besoin, c'était d'une émission radio qui réponde vraiment aux besoins des auditeurs.

Cette émission devait être populaire au point que le secteur privé se batte pour y faire de la publicité et ainsi financer le temps d'antenne. Les partenaires au développement, les ONG et le gouvernement disposant de messages utiles pourraient, à faible coût, posséder un canal existant et établi pour atteindre un grand nombre d'auditeurs en zone rurale.

Nous avons commencé en 1992 à mener des recherches et à lancer un feuilleton radiophonique de genre très populaire à l'échelle locale dans la région de Meru, et ce jusqu'en 1997. Nous avons clairement montré que cette approche suivie de théâtre radiophonique était très populaire dans les zones rurales et qu'elle se traduisait chez des auditeurs fidèles par un de réels changements en Connaissances, Attitude et Pratique (CAP) sur de nombreux sujets ayant fait l'objet de recherches et de radiodiffusion.

Ce succès a permis d'obtenir un financement d'ODA en 1996 et ainsi de diffuser ce feuilleton populaire à l'échelle nationale cette fois.

Feuilleton et magazine radiophoniques "Tembea Na Majira"

Tembea Na Majira est aujourd'hui une émission de radio rurale "POPULAIRE", ou de théâtre permanent, installée dans un petit village kenyan au bord de la route. Chaque semaine, on entend des acteurs qui déclament des textes écrits par des auteurs kenyans très bien formés, mettant en scène les amours et les traumatismes d'un petit village agricole tout en faisant passer des messages sur les questions de moyens d'existence durables en zone rurale.

Ce feuilleton dure 15 minutes et est diffusé depuis janvier 1996. Il est aujourd'hui suivi d'un magazine de 15 minutes très vivant lui aussi, permettant aux auditeurs d'envoyer des courriers ou de demander la rediffusion d'un feuilleton ; des concours sont également organisés sur les questions traitées lors de l'émission. Des informations plus techniques peuvent être données lors de ce magazine radio avec des interviews en profondeur d'experts, de paysans, d'histoires à succès, etc.

L'étude menée en août 1996 (6 mois après le début de l'émission radio) a montré que l'audience dépassait les 6,9 millions de personnes parmi la population adulte.

A l'époque, cette émission populaire était diffusée

à heure de grande écoute

à 20h45 le lundi

Elle était suivie par un magazine radio

à 20h45 le mercredi

Puis, les deux émissions étaient couplées et rediffusées ensemble

de 20h à 20h30 le dimanche.

Sponsor

A l'époque, le sponsor de l'émission s'appelait East African Industries (EAI). Cette société payait le coût de diffusion des émissions qui s'élevait à environ $ 1.000 pour une émission de 15 minutes, soit un total de $ 3.000 par semaine, qui s'avérait essentiel pour soutenir l'émission. Les coûts de production étaient financés par le Service pour le développement international (DFID) et par d'autres partenaires au développement.

Le service marketing de la société EAI ayant été changé, ces « sponsors » décidèrent de cesser de financer l'émission en février 1998. A l'époque, l'émission était également gérée par le Centre d'information agricole, un service gouvernemental : il leur était difficile de trouver les ressources financières et les partenaires avec lesquels partager les coûts de production et d'antenne.

Nouvelle gestion

Mediae, une organisation basée au Royaume-Uni, reprit la gestion des programmes et recommença à diffuser l'émission en octobre 1998 après 6 mois d'interruption d'antenne.

Au départ, "Tembea Na Majira" reprit avec un temps d'antenne fortement réduit.

L'émission était à présent diffusée une fois par semaine à une plage horaire bien moins chère et à moindre audience.

Mediae était parvenu à trouver deux annonceurs différents pour financer les coûts d'antenne.

La diffusion s'est poursuivie jusqu'en fin décembre 1999 à raison d'une fois par semaine et hors des heures de grande écoute.

Recherches

Le gouvernement britannique, par l'intermédiaire du Service pour le développement international (DFID), accepta de financer une étude sommaire en août 1999, qui serait conduite par une société indépendante d'études de marché et des médias, Steadman et Associés.

Les résultats de l'étude ont été rendus publics en novembre 1999 pour donner quelques indications quant aux habitudes des auditeurs.

Bien que l'étude ait eu quelques imperfections, l'impression générale était que l'émission radio avait perdu des auditeurs pendant cette période, ce qui ne surprendra personne.

Perte d'audience - 4,5 millions en août 1999

On estimait que le nombre d'auditeurs était tombé à 4,5 millions d'auditeurs parmi la population adulte rurale en août 1999, contre 6,9 millions en août 1996. D'autres enquêtes montraient que nous perdions également les auditeurs des milieux urbains et périurbains, en raison de la présence accrue de radios FM dans certaines villes. Bien qu'elles ne constituaient pas notre cible principale, les personnes démunies de toutes ces régions étaient considérées comme des auditoires importants à atteindre.

Le défi

En novembre 1999, nous avons décidé d'entreprendre de sérieux efforts pour retrouver notre audience.

La nouvelle direction éclairée de Cadburys était tout à fait d'accord sur ce point et pensait que nous devions nous appuyer sur l'audience existante pour créer l'émission radiophonique la plus populaire du Kenya qui rassemblerait au moins 9 millions de fidèles auditeurs.

A partir de l'enquête existante et de notre expérience, nous avons décidé que les actions suivantes nous permettraient de regagner nos auditeurs et d'en accroître le nombre.

Succès à l'heure actuelle

Nous avons démarré les deux premières actions décrites ci-dessus, avec la reprise du magazine radiophonique, le retour à des heures de grande écoute et la rediffusion du feuilleton populaire le dimanche en avril 2000.

Nous avons commencé avec les camionnettes en janvier 2001.

A l'heure actuelle, nous menons des études plus fournies en matière d'audience et en octobre 2001 nous conduirons une recherche quantitative approfondie pour poursuivre les enquêtes sommaires de 1999, 2000, l'enquête CAP ainsi que l'étude d'audience.

Cependant, selon l'étude à fin 2000, de tels changements nous permettent d'ores et déjà d'avoir 7,2 millions d'auditeurs et d'enregistrer des changements quantitatifs en Connaissance, Attitude, Pratique (CAP) sur un grand nombre de sujets liés aux moyens d'existence durables en milieu rural.

Conclusion - Feuilleton populaire et magazine radiophoniques au service de la sécurité alimentaire et des moyens d'existence durables en Somalie

Nous recommandons d'utiliser les moyens dont disposent la FAO et le FSAU au Kenya et en Somalie pour concevoir, en collaboration avec Mediae, une émission populaire et un magazine radiophoniques, en se fondant sur d'autres expériences régionales acquises dans cette zone.

Emission populaire et magazine constitueront un moyen de communication critique entre les auditeurs des zones rurales ou périurbaines, le gouvernement et les partenaires au développement qui recherchent des moyens d'existence durables pour la population de Somalie.

Au départ, des fonds seraient nécessaires pour renforcer les capacités de production et s'assurer que la programmation satisfait les besoins des auditeurs, mais selon les prévisions, d'ici deux ans environ, la programmation aura atteint un caractère durable, grâce à la publicité et à la participation des donateurs.

 

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