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Pluralisme radiophonique et NTIC en Afrique de l'Ouest : l'Institut Panos-Afrique de l'Ouest face aux nouveaux enjeux

Par Diana Senghor - Directrice de I'Institut Panos-Afrique de l'Ouest

Biographie

Diana Senghor est, depuis janvier 2000, Directrice de l'Institut Panos Afrique de l'Ouest, institution internationale indépendante, membre du réseau de l'Institut Panos, basée à Dakar.

Auparavant, Diana Senghor était Directrice du Programme Afrique de l'Ouest de l'Institut Panos Paris, programme qu'elle avait fondé. Elle a également été rédactrice-en-chef de plusieurs magazines ouest-africains (Famille et Développement, Vivre Autrement), et assistante en anthropologie à l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Diana Senghor est titulaire d'un Doctorat de Philosophie de l'Université Paris I (Panthéon - Sorbonne), auteur de nombreux articles, et coordonnateur de différentes publications.

Résumé de la communication

Depuis bientôt 10 ans, l'Institut Panos a accompagné l'émergence puis le renforcement du pluralisme radiophonique en Afrique de l'Ouest, en appuyant les acteurs et les forces vives, et le plus souvent, en anticipant les enjeux et les défis.

En 1993, 1'Institut Panos organisait à Bamako, le premier colloque régional - et peut-être continental - sur le pluralisme radio. A cette époque, il existait à peine plus d'une demi-douzaine de radios qui ne fussent pas des radios d'état. En 2001, 8 ans après, le paysage radiophonique ouest-africain a connu un formidable bouleversement.

I1 y a donc aujourd'hui des centaines de centres de production locaux en Afrique de l'Ouest. Avec les résultats que l'on sait sur le rôle de ces radios dans l'enracinement d'une culture démocratique.

En effet, ces stations :

Bref, les nouvelles radios apparaissent bien comme un phénomène culturel inédit, capable de générer des dynamiques sociales aussi nouvelles qu'inattendues. Elles apparaissent comme un facteur décisif, moteur du changement et du développement.

Cependant, ce tableau idyllique doit être nuancé, et la médaille a son revers :

Comment l'Institut Panos tente-t-il de répondre aux défis que pose le pluralisme de l'information en 2001?

L'Institut Panos Afrique de l'Ouest à travers son Département Radio veut contribuer à :


Pluralisme radiophonique et NTIC en Afrique de l'Ouest : l'Institut Panos-Afrique de l'Ouest face aux nouveaux enjeux

I. L'Institut Panos face aux enjeux actuels du pluralisme de l'information

II. Les NTIC au secours des radios locales et rurales : l'expérience de l'IPAO

IV. Conclusion : Face aux nouveaux enjeux de pluralisme radiophonique: quelles technologies, quels partenaires?


PLURALISME RADIOPHONIQUE ET NTIC EN AFRIQUE DE L'OUEST : L'INSTITUT PANOS-AFRIQUE DE L'OUEST FACE AUX NOUVEAUX ENJEUX

L'Institut Panos a accompagné le pluralisme radiophonique depuis 1993. Il en a soutenu l'émergence, puis le renforcement, en appuyant les acteurs et les forces vives, et le plus souvent, en anticipant les enjeux et les défis.

En 1993, 1'Institut Panos organisait en effet, à Bamako, le premier colloque régional, et peut-être continental, sur le pluralisme radio. A cette époque, il existait à peine plus d'une demi-douzaine de radios qui ne fussent pas des radios d'état. Pas de quoi remplir une salle de réunion ! Et la plupart des participants plutôt que des animateurs ou directeurs de radio, étaient simplement des « porteurs de projets » (le vilain mot !), piétinant et piaffant dans l'attente de fréquences dont la plupart des états (11 sur 16 à 1'époque) conservaient encore, en droit ou en fait, le monopole.

En 2001, 8 ans après, le paysage radiophonique ouest-africain a connu un formidable bouleversement.

Et, s'il y a dix ans, les stations publiques en milieu rural étaient essentiellement ou exclusivement des stations-relais, assurant la diffusion des informations nationales de la chaîne mère, l'immense majorité des radios locales, à l'exception de quelques réseaux de chaînes commerciales (comme Sud FM au Sénégal, ou Horizon FM au Burkina) assurent la production de leurs propres programmes.

Il y a donc aujourd'hui des centaines de centres de production locaux en Afrique de l'Ouest. Avec les résultats que l'on sait sur le rôle de ces radios dans l'enracinement d'une culture démocratique.

Bref, les nouvelles radios apparaissent bien comme un phénomène culturel inédit, capable de générer des dynamiques sociales aussi nouvelles qu'inattendues. Elles apparaissent comme un facteur décisif, moteur du changement et du développement.

Cependant, ce tableau idyllique doit être nuancé, et la médaille a son revers. Ce pluralisme radiophonique a en effet des effets paradoxaux. Je voudrais ici en souligner quatre.

  1. La pertinence, l'utilité et l'impact social, de même que la qualité des contenus diffusés et produits par un grand nombre de radios locales apparaissent médiocres. A quoi bon tant de radios, si la musique - et quelle musique ! - occupe 80 % de la grille des programmes ! I1 y a d'autres formats radiophoniques à promouvoir. D'autre part, à force d'être locale, l'information manque d'air, s'enclave, devient répétitive, ennuyeuse et même dangereuse. Elle risque en effet, non seulement de stériliser la créativité locale, mais aussi d'entretenir un conformisme de clocher, - ou de minaret ou de municipalité - qui amplifiera les pouvoirs locaux et la tendance aux replis identitaires.


  2. La faible qualification des animateurs radio pose également question. Donner la parole à des enfants ou animer un débat suppose d'autres qualités que la bonne volonté. Sauf à dissuader les auditeurs. Un phénomène de lassitude se profile chez certains auditeurs, aggravé par les manquements à la déontologie, auxquels certaines radios se sont livrées. Par simple ignorance quelquefois.


  3. Le déséquilibre géographique et la viabilité économique de certaines stations sont également des questions importantes. Le pluralisme radiophonique est mal réparti. Le Mali, a lui seul, rassemble avec une centaine de stations près du quart des stations de la région. Au Nigeria, il n'existe encore aucune radio associative ou communautaire. Dans les zones de certains pays, on assiste à un embouteillage radiophonique, tandis que le désert radiophonique continue d'être la règle dans d'autres. Cette concentration géographique des radios compromet l'émergence du pluralisme radiophonique dans certaines zones oubliées et leur viabilité dans les zones bénies de l'aide internationale.


  4. Un dernier effet paradoxal concerne la compétition entre acteurs du secteur radiophonique. Ce sont des journalistes qui ont financé et animé les premières stations commerciales non étatiques. En 2001, changement de tendance. Les acteurs se sont considérablement multipliés : le financement des radios est désormais majoritairement assuré par les agences de coopération internationale, non gouvernementale, ou intergouvernementale, et leur animation est assurée par des associations locales. Les stations de radios locales sont devenues, dans certaines zones, l'objet d'une véritable course. La devise olympique semble parfois devenir la loi du paysage radiophonique, dans certains pays. « Plus haut, plus fort, plus vite ». Et les pylônes apparaissent comme de nouveaux mats de Cocagne. Dans des villes de quelques milliers d'habitants, comme Ségou ou Sikasso, on trouve 4, 5, 6, radios. Un technicien de Bamako racontait comment il avait installé en même temps, à Niafounké, un village malien, 2 radios différentes pour 2 organisations différentes.

A Dakar, une dizaine de projets de radios associatives (de femmes, de droits de l'homme, etc.) sont en attente de fréquences.

On ne peut sans doute que se réjouir de cette diversification des acteurs, de l'appropriation de ce média de masse par les organisations de la société civile, et de la priorité accrue donnée par les agences de développement au secteur de la communication. Mais peut-on ne pas s'inquiéter de cet engouement, subit, simultané et massif? Et ne doit-on pas craindre que les antennes ne rejoignent un jour certains forages et autres charrues des décennies précédentes ? Quel avenir pour les 10 stations d'un Bamako radiophoniquement saturé? Mais quel destin aussi pour les antennes du Grand Nord Sahélien, au Niger ou au Mali (Kidal, Bankilaré, Menaka, etc.) ?

Ne peut-on souhaiter davantage de cohérence dans la stratégie de ces acteurs multiples, et de synergies dans leurs efforts?

I. L'INSTITUT PANOS FACE AUX ENJEUX ACTUELS DU PLURALISME DE L'INFORMATION

Comment l'Institut Panos tente-t-il de répondre aux défis que pose le pluralisme de l'information en 2001? L'Institut Panos Afrique de l'Ouest à travers son Département Radio veut contribuer à :

1. Diversifier et « socialiser » les contenus radiophoniques

L'IPAO y contribue de 2 manières : au niveau de la production et au niveau de la diffusion des programmes.

1. Des conventions avec les radios

Il s'agit là d'encourager la production de programmes d'une plus grande pertinence sociale. Pour ce faire, la BDP (Banque de Programmes du Département Radio) accorde de petites subventions à des radios.

Ces subventions sont allouées dans le cadre d'un accord éditorial. L'obligation de la radio partenaire consiste à assurer un certain volume de programme radio (2 heures au total par mois) sur certains thèmes. Les questions qui constituent des enjeux majeurs du développement, de la démocratie et de la paix ont été retenues comme prioritaires par l'IPAO. Parmi ces thèmes : les conflits, la diversité culturelle, l'équité sexuelle, la gouvernance locale.

Si certains conditions éthiques et déontologiques sont à remplir par les radios partenaires, en revanche, une très grande liberté éditoriale leur est laissée (langues utilisées, durée et forme de l'émission, programmation).

Ces subventions sont annuelles et renouvelables 2 fois.

Aujourd'hui, plus de 50 radios ont depuis 6 ans bénéficié de telles subventions. Et, le stock disponible a la BDP s'élève à 800 programmes produits dans différentes langues nationales, en français et en anglais.

Cependant, au cours de l'an 2000, certaines conventions ont constitué le lieu pour expérimenter et promouvoir de nouveaux formats radiophoniques. En 2000, l'expérimentation a porté sur le théâtre radiophonique. L'expérience sera étendue en 2001 à d'autres radios. Un accord a déjà été conclu avec l'Association ARDA pour développer un tel format au Nigeria.

De nouveaux formats pour la radio locale :

Un projet pilote de théâtre radiophonique au Sénégal

Le théâtre radiophonique est loin d'être un format radiophonique de la première fraîcheur ! Il a été utilisé dès les tout débuts de la radio dans le monde. En Afrique aussi, il a eu quelques beaux jours dans les radios publiques, à l'époque de leur monopole. En revanche, il est beaucoup moins utilisé par les nouvelles radios notamment associatives (Avec des exceptions comme Radio Jamanaa, avec « Le Beau et la Belle »)

Le projet expérimental de théâtre radiophonique réalisé au Sénégal entra novembre 99 et novembre 2000, visait d'une part à mesurer l'impact de ce format (le divertissement), s'agissant de thématiques plus axées sur la citoyenneté et la démocratie que sur les thèmes habituels de développement (l'hygiène, le Sida, etc.). I1 visait d'autre part à établir une méthodologie, reproductible et transmissible à d'autres radios locales.

Le projet a concerné 3 radios implantées dans 3 régions du Sénégal (Radio Oxyjeunes, une radio associative destinée aux jeunes et implantée dans la banlieue de Dakar, à Pikine; 2 stations locales de la Radiodiffusion Télévision sénégalaise (RTS), respectivement implantées à Saint Louis, au Nord du pays, et à Ziguinchor, au Sud).

Des thématiques spécifiques ont été définies pour chacune des stations, qui tiennent compte des spécificités locales de leur environnement. Radio Oxyjeunes a axé sa production sur «les droits socio-économiques des jeunes», la RTS Ziguinchor, en pleine zone d'un conflit dont on parle peu dans les médias, sinon de manière anecdotique et ponctuelle, a choisi d'aborder la thématique de la paix. Enfin, la RTS Saint Louis a choisi le thème de « l'accès à la terre pour tous » parce que, dans cette région, la question foncière est grosse de dangers, avec l'installation de barrages sur le Fleuve Sénégal et la mise en valeur des périmètres irrigués.

L'écriture des scénarios a rassemblé autour des radios plusieurs écrivains sénégalais, (dont certains de renom), des acteurs professionnels, mais aussi des représentants des organisations de défense des droits de l'homme. Une évaluation a mi-parcours a permis de corriger les scénarios dans un sens plus conforme aux contraintes radiophoniques. Les pièces, diffusées sous forme de feuilletons, ont été produites dans la langue nationale la plus répandue ou la plus populaire dans chacune des 3 régions (wolof, puular, malinké). Chaque émission était d'une durée de 25 minutes, répartie entra la diffusion de 1'épisode (15 minutes) et l'animation (interactive) avec le public (10 minutes). La diffusion en était hebdomadaire.

Quels ont été les résultats de cette expérience?

Pendant 6 mois, 144 émissions au total ont été réalisées par les 3 stations locales. L'évaluation du projet révèle que:

Des leçons instructives ont été tirées par l'IPAO de ce projet-pilote en termes stratégiques et méthodologiques.

Le théâtre radiophonique est un format que l'IPAO va promouvoir auprès des radios locales. L'utilisation d'un tel format suppose une collaboration de différentes compétences et la prise en compte des contraintes propres à la radio. En outre, un format pour avoir un impact doit inclure un volet d'animation et de débats avec le public.

A terme, pour qu'un tel genre puisse se généraliser, la formation de formateurs qui pilotent ces équipes pluridisciplinaires est incontournable. Une autre innovation quant aux contenus radiophoniques sera réalisée cette année : les émissions destinées aux enfants.

2. Les magazines hebdomadaires thématiques et régionaux, de la BDP

Il s'agit pour la BDP d'alimenter les radios de programmes à caractère régional et de qualité qui n'ont pas les moyens d'une telle production.

Les émissions sont réalisées par la BDP elle-même. Elles sont montées à partir d'éléments envoyés par un réseau de 30 correspondants répartis dans différents pays d'Afrique de l'Ouest et d'Afrique Centrale.

Les émissions couvrent les mêmes thématiques retenues comme prioritaires par l'IPAO.

Le magazine hebdomadaire semble répondre à un besoin ressenti par les radios, puisqu'il est repris et diffusé par plus de 120 stations, en Afrique, mais aussi par quelques radios associatives des pays francophones du Web.

A l'heure actuelle, 205 magazines ont été diffusés et demeurent disponibles à la BDP.

2. Renforcer les compétences au sein des radios : la formation

Le Département Radio tente d'y contribuer de 3 manières:

1. Des ateliers de formation

Les ateliers visent à la fois à assurer, séparément ou simultanément, une formation thématique (les thèmes prioritaires du programme) et/ou technique (utilisation d'un équipement radio; utilisation d'Internet, etc.).

Ces ateliers peuvent avoir lieu à l'échelle régionale (atelier thématique notamment pour les correspondants du réseau), ou nationale (pour les membres des associations de radiodiffuseurs, par exemple). Depuis 1996, près d'une vingtaine d'ateliers ont ainsi été organisés.

Désormais, la stratégie de la BDP va se réorienter dans 2 directions :

  1. a. la BDP va donner la priorité à la formation (à l'échelle régionale) des formateurs nationaux (généralement membres des associations des radios). Un tel séminaire est prévu en mars 2001, à Bamako, en partenariat avec AMARC.
  2. b. la BDP va développer des partenariats plus étroits avec les institutions ouest-africaines spécialisées dans la formation (telles que le CIERRO ou la Radio Nederland).

2. Des publications pédagogiques

Deux manuels ont été publiés : un « Guide des radiodiffuseurs » et un « Guide de gestion à l'usage des radiodiffuseurs ». Un troisième manuel est prévu en 2001 sur « l'Utilisation de la radio numérique ».

3. L'animation d'une réflexion, régionale et nationale sur les stratégies de formation aux métiers des médias

Cette animation vise à instaurer un lieu ou « forum » d'information, de concertation et de proposition entre une offre de formation technique ou financière souvent incohérente et une demande en formation, parfois opportuniste et décalée par rapport aux besoins.

3. Contribuer à une meilleure répartition géographique et à la viabilité des radios locales : l'assistance à l'équipement

Cet appui vise à  :

Chaque année depuis 1996, des subventions sont accordées à 3 ou 5 radios. Ces subventions sont des re-financements (Panos apporta les 10 a 80 % du montant total de 1'équipement).

Pour ce faire, le Département Radio effectue conjointement avec la radio partenaire une étude de faisabilité légère, procède à l'achat, à l'acheminement et à l'installation du matériel.

Ces subventions ne sont accordées qu'aux radios associatives ou communautaires.

Depuis 1995, près de 30 radios (au Sénégal, Mali, BurLina, Niger, Tchad, Côte d'Ivoire, Bénin, Togo, Ghana) ont reçu un tel appui à l'équipement ou à la maintenance. Cela représente plus d'une radio sur 8 au total des radios associatives.

La réputation acquise par l'équipe de la BDP (pourtant très modeste : 2 personnes à temps partiel ou ponctuellement) est telle que la BDP a désormais a faire face à des demandes de services rémunérés, (5 depuis décembre). Et ces demandes proviennent même d'Afrique Centrale, en dehors même de la région. (Comme l'archevêché de Matadi en RDC).

Au cours de l'an 2001, une «Unité d'Equipement et de Maintenance» sera ouverte à Bamako, avec une personne à temps plein, qui répondra également aux demandes de services au niveau régional.

4. Créer des synergies entre les acteurs des processus de communication et pérenniser ces synergies

La multiplication des acteurs du paysage radiophonique, s'il peut avoir des effets pervers, constitue un atout qu'IPAO a voulu exploiter dès l993, en créant des synergies entre les radios et entre les collectifs et associations nationales qui les représentent. Ces synergies ont été encouragées dans le domaine du plaidoyer (en faveur d'un contexte juridique plus favorable au pluralisme radiophonique), mais aussi dans le domaine de l'échange de contenus radiophonique entre les radios, et dans le domaine de la formation des radiodiffuseurs.

Les synergies qu'il a encouragées, suscitées ou renforcées, l'IPAO veut également leur assurer une certaine pérennité.

Comment? De deux manières: le soutien aux associations nationales de radiodiffuseurs et le Festival des Ondes.

1. Le soutien institutionnel aux collectifs et associations nationales de radios

Ce soutien est apporté en priorité aux collectifs de radios associatives ou communautaires. En effet, dans tous les états, cette catégorie de radios a été la dernière à se voir attribuer des fréquences plusieurs années après les radios commerciales et religieuses (Sénégal, Cote d'Ivoire et Ghana : 96 ; Bénin et Niger : 97 ; Togo : 98). Aujourd'hui encore, l'attribution de programmes aux radios communautaires, reste parcimonieuse.

Dès 94 au Sénégal, Panos a rassemblé les « porteurs de projets » radiophoniques, a patiemment maintenu leur mobilisation et facilité les négociations avec le Ministère de la Communication. Ces efforts, en termes institutionnels, ont abouti d'une part à l'adoption par le Ministère de la Communication d'un « Cahier des charges spécifique aux radios communautaires », d'autre part en juillet 2000, à la création de l'ARPAC, l'Association des Radios et Projets de Radios Communautaires du Sénégal.

Un semblable effort de création ou de renforcement de collectifs de radios locales a été mené en Côte d'Ivoire, (URPCI) ; au Burkina, (AMC) ; au Ghana ; au Mali, (URTEL) au Niger, (CPRP). Au Togo (ORTI). En Guinée-Bissau et au Bénin où de telles associations sont en voie de constitution, avec l'appui de l'IPAO.

2. Le Festival des Ondes de Bamako

Le Festival est aussi une autre forme d'institutionnalisation des synergies entre radios, que Panos a soutenu.

L'idée d'un Festival des Ondes avait été formulée dès 1993, lors du Colloque sur le pluralisme radio organisé par le Ministère malien de la Communication et Panos.

Panos à travers son antenne à Bamako a contribué à l'organisation et à l'animation des 2 premières éditions du Festival des Ondes en 1997 et 1999.

L'édition de 99 a rassemblé au total 200 personnes. Outre la prise en charge de participants étrangers venus de pays voisins, Panos a, au cours de ces deux éditions, animé deux volets du Festival :

Dans le but de mieux assurer permanence du Festival, caractère régional, professionnalisme de l'organisation, rayonnement régional et continental, l'IPAO travaille actuellement avec le Ministère de la Communication d'un secrétariat permanent du Festival des Ondes, qui s'inspirerait du Secrétariat du FESPACO.

II. LES NTIC AU SECOURS DES RADIOS LOCALES ET RURALES : L'EXPÉRIENCE DE L'IPAO

Les NTIC peuvent-elles contribuer à relever les défis auxquels se trouvent confrontées les radios locales, et plus particulièrement rurales, que nous venons de souligner?

Panos a organisé en 1997 à Dakar, un premier colloque consacré aux «médias et Internet ». L'IPAO a mis en œuvre les recommandations de ce colloque et les a enrichies au cours de ces 3 dernières années (création de sites média dans 3 pays, création d'une liste de diffusion MediActus, d'un service de facture électronique, Panos Info, etc.). Je parlerai ici, des activités menées dans le domaine de la Radio.

Je voudrais partager avec vous les leçons tirées de 2 expériences menées par l'IPAO au cours de ces deux dernières années : la BDP on line et Residel.

1. La BDP on line

La BDP on line est une expérience qui a commencé en octobre 98.

L'objectif de la BDP on line est le même que celui de la BDP traditionnelle : diversifier les contenus des radios, en les approvisionnant en programmes d'intérêt régional et de qualité.

L'utilisation de l'Internet dans ce projet vise à accélérer et à sécuriser la réception et l'échange des programmes entre les radios. Dans la BDP traditionnelle, l'expédition et l'échange des programmes se font par cassettes et par voie postale. Dans la BDP on line les stations téléchargent leurs programmes et les envoient directement au réseau. Les émissions disponibles sur le réseau sont librement accessibles à n'importe quelle radio, en Afrique et dans le monde.

La BDP on line a impliqué 12 radios, dans 12 pays, dont 2 pays d'Afrique Centrale (Burundi et RCA) et Madagascar.

Panos a :

  1. assuré la formation des radiodiffuseurs de ce réseau (utilisation du logiciel Realradio) ;
  2. complété (parfois totalement assuré) l'équipement informatique requis ;
  3. contribué à la prise en charge d'un abonnement Internet et des coûts de téléphone ;
  4. enfin et surtout assuré l'animation du réseau.

Entre octobre 98 et septembre 99, une centaine de reportages ont été produits et échangés sur la BDP on line, d'une durée de 5 à 15 minutes.

Quelles ont été les difficultés ?

Ces difficultés sont d'ordre technique et financier.

Si la maîtrise technique du logiciel par les radiodiffuseurs n'a pas été d'une difficulté considérable, en revanche, l'environnement technologique local a constitué une contrainte forte. Toutes les radios sont localisées dans les capitales. Théoriquement, ces villes disposent de bandes passantes (28.8 à 56.6 Kbps) suffisantes pour permettre une utilisation de l'ensemble des services Internet. Mais les connexions sont victimes d'interruptions fréquentes et parfois longues. Il est arrivé que l'animateur de le BDP basé à Bamako reste lui-même plusieurs jours sans pouvoir accéder au réseau. C'est ce qui a d'ailleurs conduit Panos à déménager la BDP de Bamako à Dakar. La plupart des membres du réseau ont rencontré de semblables difficultés.

L'autre difficulté est financière. D'une part les coûts, téléphoniques mais surtout de connexion sont relativement élevés dans chacun des pays concernés (de 2000 à 6000 Fcfa/heure). D'autre part, ces coûts sont encore alourdis par la durée de connexion nécessaire pour télécharger une émission : on a calculé qu'il fallait en moyenne une heure pour télécharger une émission de 15 minutes ; une heure de programme représente donc les coûts de 4 heures de connexion (de 8000 à 24.000 Fcfa donc).

Quelles leçons peut-on en tirer pour une utilisation Internet par les radios rurales?

Il est peu réaliste de penser que les radios rurales puissent utiliser Internet audio et échanger entre elles des fichiers sonores. Tout d'abord parce que l'environnement technologique bien plus défavorable dont elles disposent (réseau téléphonique provincial vétuste et bande passante très faible, ne dépassant parfois pas 12,2 Kbps). Ensuite, parce que les coûts de communication et de connexion sont généralement dans les provinces supérieurs à ceux qu'ils sont dans la capitale (la communication téléphonique n'est pas facturée au coût local dans certains pays). Par exemple, 3 minutes de communication entre Ouaga et Bobo revenaient à 140 Fcfa. L'heure revenait donc à 28.000 Fcfa ! A quoi il faut ajouter les coûts de connexion. Soit un total moyen de 30.000 Fcfa environ l'heure d'émission !

Faut-il alors définitivement faire une croix sur l'utilisation d'Internet, du moins au bénéfice des radios rurales? Non, mais à certaines conditions. Lesquelles?

L'échange des fichiers sonores peut être effectué entre des «têtes de réseaux » nationales, situées dans les capitales. Ces têtes de réseaux peuvent être des radios déjà constituées en réseau national. C'est le cas de Sud FM, ou des radios des Réseaux Jamana ou Kayira au Mali, Horizon-FM au Burkina, et bien sûr la plupart des radios publiques. Ces têtes de réseaux peuvent être également des associations ou des collectifs des radios rurales organisés à l'échelle nationale. (On a vu que de tels collectifs existaient ou étaient en voie de constitution dans plus d'une demi-douzaine de pays). Ces têtes de réseaux, peuvent alors redistribuer les programmes reçus par l'Internet, par des voies plus conventionnelles (hertzienne, voire postale) à partir de la capitale aux stations membres de leur réseau.

Un certain nombre de conditions doivent cependant être remplies pour qu'un tel dispositif puisse fonctionner.

Les fonctions d'un tel «cœur» sont alors d'assurer l'animation du réseau des têtes : la formation, un service permanent et à distance (électronique) de conseil et d'assistance et sans doute aussi d'appui financier à l'équipement. C'est le rôle qu'a tenté de jouer l'IPAO avec la BDP on line.

2. Residel

Residel est la seconde expérience menée par l'IPAO afin de permettre une appropriation des NTIC par les médias locaux.

Residel veut dire « Réseau sénégalais d'Information sur le développement local ». Ce projet-pilote s'est développé entre juillet 99 et juillet 2000, avec un appui financier du CTA.

1. Residel visait d'abord à développer l'information locale et à la désenclaver.

Si le Sénégal a été le pays choisi pour cette expérience, c'est que la décentralisation y a franchi une nouvelle étape depuis 1996, avec le transfert de certaines compétences (éducation, santé, urbanisme) aux autorités locales (régions, municipalités, communautés rurales).

Or la production et la diffusion d'informations sur le développement local et la décentralisation sont encore très symboliques au Sénégal, aussi bien dans la presse locale (radios essentiellement) que dans la presse nationale.

Residel visait donc à promouvoir le développement d'une information locale sur le développement local et la décentralisation, et l'échange de ces informations entre différentes localités.

2. Residel visait ensuite à accroître et diversifier les sources d'informations locales accessibles aux médias locaux.

De telles sources existent : ce sont les autorités locales elles-mêmes, mais également les organismes locaux de développement, les institutions scientifiques, de même que les associations locales. Cependant, les informations dont elles disposent ne sont que fort peu accessibles aux médias, et partant, au public.

3. Residel visait enfin à développer une plus grande interactivité : entre les médias et leurs sources « naturelles » d'information, mais aussi entre les médias et leurs publics. Et parlait entre le public et les détenteurs locaux d'un certain savoir ou d'un pouvoir.

En résumé, Residel visait à renforcer, à travers et grâce à une information interactive sur l'actualité et les enjeux de la décentralisation et du développement, une participation citoyenne des communautés locales défavorisées.

L'originalité et le caractère pilote de ce projet résident dans l'utilisation de l'Internet pour atteindre ses objectifs.

Le projet a concerné 5 régions du Sénégal (Thies, Saint-Louis, Ziguinchor, Longa et Tambacounda).

Il a impliqué 5 stations locales (les stations locales de Sud FM dans ces régions) et 4 journaux locaux (« la Voix de la Cité » a Kaolack ; « Longa Infos »; « Kassoumay » à Ziguinchor; et « La Dépêche » de Thies).

Du côté des «sources d'informations», Residel a impliqué 3 associations paysannes ou d'appui au développement rural : le CNCR (Confédération Nationale des ruraux), le GADEC (Groupe d'Action pour le Développement Communautaire) et la FRAO (Fondation Rurale pour l'Afrique de l'Ouest). Il a d'autre part impliqué des institutions de recherche sur le développement rural : I'ISRA (Institut Sénégalais de la Recherche Agronomique) et la CASPAR (Cellule Agropastorale d'Alerte Rapide). Enfin, Residel a impliqué les élus locaux à travers la MEL (Maison des Elus Locaux), qui regroupe elle-même l'Association des Maires du Sénégal (AMS), l'Association des Présidents de Communautés Rurales (APCR) et l'Association des Présidents de Région (APR).

Quelle utilisation Residel a-t-il fait d'Internet?

a) La constitution de sources d'information à travers la « Bibliothèque virtuelle »

Une « bibliothèque virtuelle » avait été prévue sur une page Web spécialement dédiée au Residel, à l'intérieur du site d'IPAO, www.panos.sn. Cette bibliothèque devait permettre de mettre en ligne et de stocker les informations fournies par les autorités locales et scientifiques et par les associations locales impliquées.

Cette bibliothèque devait servir de « réservoir» aux journalistes pour choisir leur sujet, pour identifier leurs sources vives et réelles, et pour documenter leurs sujets.

b) La « Conférence de rédaction virtuelle » des journalistes locaux

Une conférence éditoriale en ligne, hebdomadaire, était prévue entre le « cœur » du réseau (le coordinateur Panos du projet) et les journalistes locaux membres du réseau.

c) Une liste de diffusion

Cette liste de diffusion devait être constituée d'une compilation des articles produits par les journaux, d'extraits ou résumés des informations fournies par les sources et de fiches techniques sur les émissions réalisées. Elle devrait être destinée à l'ensemble de la presse nationale, aux organisations de développement rural et ONG opérant au Sénégal, et enfin, aux élus locaux.

Quels ont été les résultats de cette expérience ?

  1. Concernant la production et la diffusion d'informations médiatiques locales. Son volume s'est effectivement accru (13 articles publiés dans les journaux locaux, 67 émissions de 20 minutes réalisées et diffusées par les stations locales et 7 émissions nationales). Cependant, cette production est restée très éloignée du volume total escompté.
  2. Concernant la constitution et la diversification des sources locales et « réservoirs » d'informations, la participation des institutions « sources » s'est révélée plutôt décevante. La bibliothèque virtuelle a été approvisionnée par un volume assez faible d'informations (14 documents en ligne). Les organisations les moins actives ont paradoxalement été les organisations scientifiques (ISRA n'a fourni aucun document électronique). Les organisations les plus motivées ont été les organisations paysannes (9 documents), et plus modestement, les élus locaux (5 documents de la MEL). Les informations disponibles revêtaient cependant un caractère et un format trop souvent institutionnels ou difficilement exploitables.
  3. Concernant l'interactivité, le rapport d'évaluation (externe) indique que « des auditeurs ont réagi en téléphonant ou en interpellant les journalistes locaux pour donner leur opinion ou demander un reportage sur leur village ou sur leur projet ». « Les journalistes sont devenus plus proches de leurs populations, qu'ils vont désormais voir ». « Les élus locaux ont été sensibilisés (à la suite des émissions de radio) où le public les a interpellés. C'est un dialogue entre élus et populations qui a été provoqué ».
  4. Mais le résultat le plus positif du projet concerne les journalistes locaux. L'interactivité suscitée par le projet a en effet d'abord concerné les journalistes et suscité une véritable synergie. Les journalistes ont trouvé une motivation nouvelle dans le fait de « travailler dans les mêmes conditions et sur les mêmes préoccupations du développement local et de la décentralisation ». La conférence de rédaction virtuelle, animée par le coordinateur Panos, a été décisive dans cette mobilisation. « Elle a plu aux journalistes pour la richesse des échanges qu'elle provoquait : idées de sujet, angles de traitement, etc. »

Quelles leçons pouvons-nous partager de cette première phase du Residel concernant l'appropriation des NTIC par les médias (radios) locaux?

  1. L'utilisation d'Internet, si elle est limitée à une de ses applications, le e-mail, est possible en milieu rural.
  2. L'utilisation du e-mail par les journalistes aussi bien que par les organisations locales se heurte plus à l'insuffisance de leur « e-compétence », qu'à des contraintes technologiques ou financières. Dans le cas du Residel, ces contraintes se sont trouvées atténuées pour des raisons liées au contexte technologique local : communications téléphoniques et connexions plus aisées que dans d'autres pays, existence de télécentres locaux privés (plusieurs centaines dans le pays), etc. Mais aussi pour des raisons liées à la nature des partenaires eux-mêmes, qui, parce qu'ils étaient les membres locaux d'organisations nationales, disposaient d'un certain équipement informatique, et de certaines ressources. De telles conditions peuvent se retrouver, ou être créées, dans d'autres pays.
  3. L'expérience de la « conférence de rédaction virtuelle » montre que, comme dans le cas de la BDP on line, un réseau électronique a besoin d'un « cœur » qui puisse assurer les mêmes services de conseil, d'assistance et d'animation. L'expérience de la « bibliothèque virtuelle » démontre que le cœur d'un réseau (qui allie des médias et des organisations locales) est incontournable dans la constitution de « réservoirs » d'informations locales, mais aussi, dans la transformation ou la formation des institutions au profit des médias, voire d'un public plus large.

IV. CONCLUSION : FACE AUX NOUVEAUX ENJEUX DE PLURALISME RADIOPHONIQUE: QUELLES TECHNOLOGIES, QUELS PARTENAIRES?

L'appropriation et l'utilisation des NTIC par les radios locales se heurtent, on le voit, à un certain nombre de contraintes. Cependant, la multiplication et la diversification des acteurs dans le paysage radiophonique ouest-africain, de même que l'émergence des NTIC (taux de progression de l'Internet : 18 % par un, particulièrement observable dans les associations ; ouverture d'un canal satellitaire à vocation sociale par WSF, etc.) constituent une chance formidable pour renforcer le rôle des radios rurales dans la construction d'une culture de la démocratie.

A certaines conditions.

Ces conditions concernent les technologies utilisées d'une part, et les acteurs impliqués dans le pluralisme radiophonique d'autre part, leurs partenaires et leurs alliances.

1- Quelles technologies?

Il est douteux que les technologies de communication et d'information les plus avancées pissent être directement utilisées par les radios rurales africaines. En revanche, il est possible d'imaginer et de mettre en place :

  1. Une combinaison des technologies les plus avancées : par exemple, I'Internet-audio-utilisé par des têtes de réseaux , combiné aux techniques de diffusion traditionnelle comme dans le relais hertzien. Cette combinaison peut jouer aussi pour la diffusion satellitaire. Notamment, à travers Afristar, et le canal éducatif de World Space Foundation. Cela suppose l'existence de réseaux nationaux de radios, ainsi que de réseaux inter-pays ou régionaux.
  2. Une utilisation des formes ou (applications) les plus élémentaires de l'Internet. L'utilisation du e-mail est non seulement possible en milieu rural aussi, mais dans bien des cas elle est déjà effective. Selon le décompte de la BDP en janvier 2001, 150 radios locales en Afrique de l'Ouest disposent d'une adresse e-mail.

L'appropriation du e-mail par les radios locales suppose néanmoins que soient prises en compte les différentes contraintes identifiées. Ces contraintes sont liées à :

a) L'équipement

Si toutes les radios locales du Sénégal sont connectées, il reste qu'un quart seulement le sont à l'échelle régionale. Par ailleurs, l'équipement se réduit souvent à un ordinateur (d'autres matériels sont parfois nécessaires). Les imprimantes par exemple, font le plus souvent défaut. Nécessaire si l'on veut limiter les coûts de consultation (notamment des listes de diffusion ou de documents volumineux), autant, sinon plus que la multiplication des antennes, l'équipement informatique des studios existant, membres de réseaux nationaux, devrait constituer une priorité.

b) La formation

Les expériences récentes montrent une ouverture et un intérêt remarquables ainsi qu'une étonnante souplesse d'adaptation chez des journalistes face aux NTIC. Certains correspondants de la BDP, dont les radios n'ont pas d'accès Internet, se sont spontanément et individuellement dotés d'adresses personnelles, généralement chez des prestataires qui les offrent gratuitement (Hotmail, Yahoo, etc.) et consultent leurs courriers dans les points d'accès publics (cybercafés, télécentres privés, télécentres communautaires).

La formation à une appropriation d'Internet revêt 2 volets. D'une part la formation générale à l'utilisation du e-mail, en commençant par le traitement de texte. D'autre part, une formation spécifique à l'exploitation radiophonique du e-mail (utilisation des listes de diffusion, participation à des conférences éditoriales en ligne, etc.).

Enfin, une autre utilisation de l'Internet concerne la formation elle-même. Cette formation peut être assurée en ligne à des radiodiffuseurs, si ceux-ci sont connectés. Cette formation présente l'avantage de réduire les coûts de formation mais aussi d'avoir un effet démultiplicateur : il est possible de former des formateurs.

c) Les ressources financières

Même le e-mail peut s'avérer d'un coût insupportable rapporté aux ressources de bon nombre de radios. Il ne paraît guère possible alors, si on veut favoriser une appropriation significative du e-mail qui ne sera jamais universelle, d'avoir une approche collective (des réseaux de radios) mais aussi sélective (des radios présentant des caractéristiques clairement énoncées et prouvées).

2- Quels acteurs et quels partenaires?

La multiplication des acteurs du secteur radiophonique (professionnels, associations locales, ONG et coopération internationale) entraîne une concurrence et une compétition dont les effets stérilisants sont déjà observables dans certaines localités. Des pistes existent indiquant qu'il est possible de convertir cette compétition en partenariat. Qu'indiquent ces pistes? Quelques leçons au moins peuvent être retenues.

1. Du coté des radios locales

Appuyer les initiatives plutôt que de les susciter de manière artificielle ou arbitraire. Les nouvelles orientations prises par AIF dans le soutien aux radios communautaires sont assez exemplaires a cet égard.

Appuyer les collectifs ou associations nationales de radios locales qui existent dans différents pays. Pour autant qu'elles soient représentatives, ces organisations constituent des véhicules naturels pour des activités conjointes et communes de production, de formation et d'équipement des radios locales à l'échelle nationale. L'URTEL au Mali en est un exemple. Avec les limites que de telles organisations présentent en raison de leur extrême jeunesse et de leur inexpérience organisationnelle.

2. Du côté des organisations d'aide au développement (rural)

  1. L'enthousiasme commun et quasi-général qu'elles partagent pour les radios locales devrait susciter une meilleure concertation, voire une plus grande cohérence, et même des alliances. Un exemple en est fourni par le réseau des bailleurs de fonds aux médias, qui s'est constitué au niveau international autour des questions liées à la formation. Il existe d'autres exemples, à l'échelle des pays (réseau d'appui des bailleurs de fonds à la radio au Mali et au Niger).
  2. Plusieurs de ces institutions disposent d'un capital de savoir et d'informations utiles au public et aux radios rurales (FAO, CTA, CRDI, etc.). Mais ces informations sont sous-exploitées par leurs utilisateurs et bénéficiaires potentiels. Leur exploitation supposerait d'une part, 1·/ qu'elles soient disponibles et accessibles, 2·/ qu'elles soient «comestibles » par les radios (leçons Residel). Cela suppose d'abord que ces informations soient «formatées » non seulement pour le Web mais pour le e-mail (des listes de diffusion par exemple). Mais cela suppose aussi que les radios locales aient la capacité de transformer en langage radiophonique. Des institutions régionales existent en Afrique de l'Ouest, capables d'assurer de tels services.

3. Du côté des organisations « intermédiaires »

Enfin, il existe une troisième catégorie d'acteurs, elle aussi nouvelle dans le paysage médiatique. Ce sont ces organisations «intermédiaires ». Ces organisations jouent un rôle de médiation, de coordination et d'animation, entre des acteurs différents (entre les médias et les organisations de la société civile ou les décideurs ; entre les médias de différents pays ; entre les médias et les associations internationales de développement).

Ces institutions, telles IPAO, mais aussi INADES, SYFIA, AMARC-Afrique, etc., sont des institutions, a la fois enracinées localement, implantées à l'échelle régionale,et reconnues au plan international. Ces organisations contribuent de manière originale à relever les différents défis du pluralisme de l'information soulignés plutôt.

Le rôle que de telles organisations jouent dans la diversification des contenus médiatiques, la qualification des personnels, le renforcement institutionnel des associations de radios, est unique et irremplaçable.

Il l'est également dans l'appropriation par les médias locaux des NTIC. Ces organisations peuvent assurer la médiation entre les technologies les plus avancées (le Web ou le satellite) et les radios locales, mais aussi, entre les sources mondiales de savoir et leurs utilisateurs finaux, à travers les médias locaux. Par exemple : la sélection et le formatage des informations disponibles sur le Web ; la mise en réseau des radios et la mise en musique de leurs programmes pour une diffusion satellitaire, etc.).

Bref, ces organisations intermédiaires constituent le «chaînon manquant » du pluralisme de l'information. Leur rôle devrait être davantage reconnu, amplifié et soutenu.

 

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