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CHAPITRE 3 - ÉTUDES DE CAS - LÉGISLATION DE L’AQUACULTURE


3.1 Madagascar
3.2 Malawi
3.3 Mozambique
3.4 Nigéria
3.5 Zambie

3.1 Madagascar


3.1.1 Loi sur l’aquaculture
3.1.2 Régime foncier
3.1.3 Lois sur l’environnement et sur l’eau

3.1.1 Loi sur l’aquaculture


3.1.1.1 État actuel de la loi
3.1.1.2 Perfectionnements souhaitables de la législation sur l’aquaculture

3.1.1.1 État actuel de la loi

À Madagascar, la principale législation régissant l’aquaculture est l’Ordonnance de 1993 sur les pêches et l’aquaculture (Ordonnance No. 93-022).

L’ordonnance a trois implications majeures du point de vue juridique. Lorsque l’établissement aquacole envisagé est situé sur des terres du domaine public, ou lorsqu’il implique l’utilisation des eaux domaniales, l’obtention d’une “autorisation domaniale” est alors obligatoire. L’autorisation domaniale permet l’octroi d’une concession d’aquaculture par le Ministère des pêches et de l’aquaculture et par le Ministère de l’environnement. Lorsque les installations prévues n’impliquent l’utilisation ni du domaine public, ni des eaux domaniales, l’obtention d’une autorisation de ces mêmes Ministères reste obligatoire, mais l‘octroi d’une concession n’est pas indispensable. L’importation d’œufs, de larves, d’alevins ou de poissons vivants doit faire l’objet d’une autorisation spéciale du Ministère des pêches et de l’aquaculture.

L’ordonnance contient donc certains des éléments essentiels d’un système de permis, sans toutefois constituer l’équivalent d’un code détaillé de l’aquaculture. La législation ainsi en vigueur présente deux défauts techniques et ne réussit pas à couvrir tous les aspects voulus pour favoriser le développement d’une aquaculture commerciale viable. Ces différents points sont traités ci-dessous.

3.1.1.2 Perfectionnements souhaitables de la législation sur l’aquaculture

L’ordonnance de 1993 doit donner lieu à un examen approfondi de son impact pratique, de ses liens avec la législation antérieure et du champ d’application de ses dispositions.

Impact pratique

Les principales dispositions restrictives concernant un établissement d’aquaculture résultent de l’obligation d’obtenir soit une concession, soit une autorisation, selon que ladite exploitation implique l’utilisation du domaine public ou des eaux domaniales. Toutefois, l’Article 14 de l’Ordonnance prévoit qu’un décret fixera les conditions d’octroi des concessions, tandis que l’article 15 stipule que la forme d’une autorisation d’exploitation aquacole doit être déterminée en vertu d’une réglementation.

Liens avec la législation antérieure

Bien que l’Ordonnance de 1993 définisse apparemment un seul et unique ensemble de règles fondamentales concernant l’aquaculture, un certain nombre de difficultés viennent de l’existence d’une législation antérieure qui définit pour l’aquaculture différents régimes juridiques pouvant s’avérer incompatibles (Van Houtte, 1996). Par exemple, il a été prévu en 1960 d’adopter des règles régissant le fonctionnement des élevages de crustacés (Arrêté n°1794 du 22.10.1960). Or, un décret de 1922 (décret de 1922, article 26) régit l’installation des pêcheries “de quelque nature que ce soit sur la mer et les rivages”. Puisque l’Ordonnance de 1993 n’abroge pas ces dispositions antérieures, il est parfaitement impossible de préciser si elles conservent une quelconque validité et dans l’affirmative, quel est leur lien avec le texte récent.

Le degré de certitude associé à une bonne législation de l’aquaculture en constitue un élément important. Un investisseur éventuel doit pouvoir connaître précisément le régime juridique applicable au projet envisagé et d’avoir la certitude qu’il ne lui faudra pas obtenir d’autres permis que ceux prévus dans la législation apparemment en vigueur. L’Ordonnance de 1993 est un bon point de départ dans ce sens, mais il serait préférable qu’il soit stipulé qu’elle représente le fondement juridique unique en vue de l’attribution du droit d’exercer une activité de pisciculture. Cet objectif pourrait être atteint si l’ordonnance en question abrogeait la législation antérieure ou la déclarait inapplicable à l’aquaculture.

Améliorations du système d’autorisation

Bien que la législation de Madagascar représente une première étape importante de la création d’un secteur commercial viable, il serait judicieux d’y ajouter certaines dispositions supplémentaires. Il faut souligner que les améliorations éventuelles présentées dans cette section n’exigent pas nécessairement une modification de l’ordonnance proprement dite; il est en effet parfaitement possible d’intégrer une modification quelconque au décret ou au règlement d’application de l’Ordonnance.

La prise en compte des trois aspects suivants permettrait d’améliorer la législation de Madagascar.

Critères d’attribution d’une autorisation

Tel qu’indiqué dans la section “Système de permis ou de licence” il est à présent largement admis qu’une législation de l’aquaculture judicieusement conçue doit énoncer les critères qui seront employés pour évaluer s’il y a lieu d’accorder une autorisation, au lieu de laisser cette décision au pouvoir discrétionnaire du responsable concerné. La définition de ces critères instaure un climat de confiance, tant du point de vue de l’investisseur qui peut ainsi connaître à l’avance les règles applicables à toute demande, que du point de vue de l’instance chargée de la réglementation, dont l’action suit des principes clairement énoncés auxquels il est possible de se référer indépendamment des modifications du climat d’investissement ou du contexte politique. L’ordonnance de 1993 ne contient aucune indication quant aux modalités d’examen d’une demande ; or, il serait intéressant d’y faire figurer l’énoncé des principes applicables aux différents types de demande mentionnés dans la section intitulée “Systèmes de permis ou de licence”. En outre, l’exigence de l’exposé des motifs de rejet d’une demande devrait également y figurer, de façon à placer le demandeur à l’abri de décisions injustes ou arbitraires.

Garantie de l’obtention des moyens techniques nécessaires

L’Ordonnance de 1993 prévoit que les autorisations et les concessions seront octroyées par le Ministère des pêches et de l’aquaculture et par le Ministère de l’environnement. Cette organisation présente l’avantage d’assurer que les décisions seront prises compte tenu des préoccupations ayant trait aussi bien à l’aquaculture qu’à la protection de l’environnement, mais ne règle aucunement les modalités concernant la prise de décision proprement dite. Les autorisations relatives aux quatre premiers projets d’élevage de crevettes de Madagascar ont été accordées à un niveau politique sensiblement identique, mais elles n’ont donné lieu qu’à des consultations réduites au minimum avec les services techniques responsables de l’aquaculture (Van Houtte, 1996). Tel qu’indiqué plus haut au chapitre 2, il est souhaitable qu’une législation moderne crée un organisme unique responsable de l’aquaculture et doté par ailleurs de compétences techniques spécialisées. Indépendamment du fait que Madagascar suive ou non ce modèle, la législation en vigueur serait améliorée si elle garantissait l’obtention des données techniques nécessaires préalablement à l’octroi de toute autorisation.

Attribution claire de droits officiels à l’exploitant

A l’instar de la plupart des systèmes de permis de la première génération, le système d’autorisation en vigueur à Madagascar permet essentiellement au propriétaire d’un l’établissement d’utiliser le domaine public ou les eaux domaniales pour exercer une activité qui sinon serait illicite. Pour favoriser le développement d’un secteur commercial, il est souhaitable que la législation attribue en outre certains droits aux pisciculteurs de façon à ce que l’investissement engagé bénéficie d’une sécurité garantie par la loi. Ce résultat peut très bien être obtenu au moyen du décret requis aux termes de l’Ordonnance pour définir les conditions d’attribution de concessions d’aquaculture utilisant le domaine public ou les eaux domaniales, au moyen du règlement qui définira les conditions d’exercice de divers types d’aquaculture.

Parmi les droits conférés à l’exploitant doivent figurer explicitement le droit d’exercer une activité commerciale d’exploitant piscicole et la confirmation de l’exclusivité du droit détenu par l’exploitant de récolter le produit de l’exploitation et de protéger son stock à l’égard d’autrui. Les droits conférés doivent offrir une protection juridique pour empêcher autrui de gêner l’exploitation de l’établissement ou l’utilisation des installations, ainsi qu’un droit garanti de disposer d’un approvisionnement en eau de la qualité requise pour l’exploitation commerciale de la ferme aquacole.

3.1.2 Régime foncier


3.1.2.1 Régime en vigueur et fonctionnement: accès à la propriété
3.1.2.2 Modifications suggérées

3.1.2.1 Régime en vigueur et fonctionnement: accès à la propriété

Madagascar est doté d’un régime foncier particulier, qui rend spécialement délicat le développement de l’aquaculture dans les zones côtières. Afin de décrire la nature des problèmes en question, il faut présenter succinctement la législation malgache correspondante.

Le domaine public

La propriété des terres du domaine public ne peut être transférée à des particuliers ou assujettie à d’autres droits de propriété, notamment à des hypothèques ou à des droits d’usufruit. Le domaine public inclut une bande de terre qui s’étend vers l’intérieur sur une distance de 80 m depuis la limite définie par les marées d’amplitude maximale. Le domaine public maritime vient accroître l’étendue du domaine public proprement dit, et comprend notamment le littoral jusqu’à la limite des marées d’amplitude maximale habituelle, les marais salants, les lagunes et les bassins d’eau salée naturellement reliés à la mer, ainsi que les parties des mers qui constituent des golfs, des baies ou d’autres zones similaires.

Ces principes garantissent que pratiquement toutes les implantations potentielles d’aquaculture côtière appartiennent au domaine public et ne peuvent faire l’objet d’une utilisation privée sans la permission des autorités compétentes. Cette permission peut être accordée sous deux formes principales: l’autorisation et la concession.

L’autorisation confère au détenteur la possibilité d’utiliser un terrain pour une période maximum de 30 ans. Elle confère au détenteur des droits très précaires dans la mesure où ils sont révocables à tout instant au nom de l’intérêt général sans dédommagement. Ils ne peuvent être transférés sans l’assentiment des autorités et ne revêtent à toutes fins pratiques aucune valeur commerciale véritable. Une concession confère au détenteur le droit d’exploiter une partie du domaine public en échange du paiement d’un droit. L’octroi d’une concession est entièrement laissé à la discrétion de l’autorité compétente, celle-ci n’étant pas tenue de justifier son refus. Le droit d’occupation obtenu en vertu d’une concession peut également être abrogé au nom de l’intérêt général, sans dédommagement. Du fait des dispositions en matière d’abrogation et sur le plan juridique, une concession ne procure au détenteur pas plus de garantie qu’une autorisation.

Terres publiques du domaine privé

Contrairement aux restrictions concernant les terres du domaine public, les terres publiques du domaine privé peuvent faire l’objet de transfert de propriété ou de contrat de location. Il est donc possible de se libérer des restrictions importantes concernant l’acquisition des terres du domaine public, si celles-ci sont déclassées et transférées au domaine privé des terres de l’Etat. Dès lors, les terres peuvent être louées, vendues ou transférées d’une autre façon à des particuliers, bien que l’Etat ait la possibilité de les récupérer pendant une période de 30 ans à partir de la délivrance du titre de propriété (Van Houtte, 1996). Cette procédure doit être justifiée par les mêmes raisons qu’une expropriation classique et impose à l’Etat le remboursement du prix d’achat, ainsi que de la valeur des éventuelles améliorations apportées au terrain.

Le déclassement des terres du domaine public et leur transfert au domaine privé des terres de l’Etat constitue semble-t-il un moyen évident de résoudre les problèmes d’acquisition de droits garantis sur des terres situées dans des zones côtières. Toutefois, l’intérêt pratique de cette méthode est limité, puisque sa mise en oeuvre ne peut intervenir qu’au terme d’un processus long, délicat et coûteux (Van Houtte, 1996). Les investisseurs potentiels dans le secteur de l’aquaculture, auraient tout intérêt à obtenir une simplification du processus de transfert des terres au domaine privé.

Le “régime de zone franche”

Outre les caractéristiques de base du régime foncier des terres domaniales, un ensemble plus souple de règles est institué uniquement pour les entreprises bénéficiant du régime de zone franche. Dans ce cas, même s’il s’agit de terres du domaine public, celles-ci peuvent être louées à un investisseur étranger pour une période renouvelable de 20 à 50 ans. L’investisseur peut utiliser les terres comme garantie des emprunts contractés, dans la mesure où la durée de la garantie ne dépasse pas la durée résiduelle du bail. Le bail peut en outre être transféré, si le gouvernement renonce à son droit normal de préemption.

3.1.2.2 Modifications suggérées

L’acquisition de droits de propriété est évidemment une préoccupation majeure des investisseurs dans le secteur de l’aquaculture à Madagascar. L’expérience acquise par les quatre premières entreprises qui ont cherché à obtenir le droit de créer une exploitation aquacole fait apparaître la mise en oeuvre de solutions très différentes et plus ou moins adaptées aux besoins du moment. La société Aqualma (Aquaculture de la Mahajanga) a mis à profit le régime de zone franche et obtenu le déclassement de terres du domaine public. Une fois déclassées, les terres ont été louées à Aqualma pour une période de 50 ans. Ralijaona & Cie a acquis des terres domaniales privées aux termes d’un contrat de vente selon lequel l’Etat conserve pendant 30 ans le droit de récupérer le terrain. Aquamas (Aquaculture de Madagascar) /Refrigepeche a obtenu un bail renouvelable de 3 ans concernant des terres dont il s’est avéré qu’elles faisaient partie du domaine public. Par conséquent, cette société détenait des droits de propriété personnels, non garantis, sans possibilité d’hypothèque ou de vente. Stedic3 par contre à souhaité créer un établissement sur des terres inoccupées qui faisaient partie du domaine public. Pendant la phase pilote du projet, l’entreprise a obtenu une autorisation provisoire, révocable à l’initiative de l’Etat (Van Houtte, 1996).

En dépit du climat politique favorable à l’aquaculture à Madagascar, il faut souligner que les incertitudes du régime foncier, comme l’absence de garanties des droits éventuellement obtenus sur des terres du domaine public, risquent à long terme de freiner les investissements commerciaux. Du fait que la plupart des terres offrant d’importantes possibilités d’aquaculture appartiennent au domaine public, un investisseur potentiel doit envisager soit la perspective d’une lutte longue et coûteuse afin d’obtenir le déclassement des terres et leur intégration au domaine privé des terres de l’Etat, soit l’obtention d’une concession ou d’une autorisation. Or, le maintien d’une concession ou d’une autorisation dépend entièrement de la volonté de l’Etat et aucun arrangement de ce type n’offre une garantie juridique vis-à-vis des personnes susceptibles de financer le projet.

Toute solution à cet important problème doit respecter le caractère spécifique du régime foncier de Madagascar, ainsi que les traditions juridiques de ce pays. Toutefois, en ce qui concerne les terres du domaine public, il est certainement indiqué de mettre sur pied un système direct de délivrance de concession ou d’autorisation irrévocable pendant une période de durée fixe et pouvant faire l’objet d’une hypothèque pendant cette même période (Van Houtte, 1996). Sinon, il n’est pas garanti que le secteur de l’aquaculture commerciale soit en mesure de réaliser pleinement ses possibilités.

3.1.3 Lois sur l’environnement et sur l’eau


3.1.3.1 Situation actuelle des lois
3.1.3.2 Améliorations suggérées

3.1.3.1 Situation actuelle des lois

Madagascar a mis en place une législation permettant de garantir la viabilité écologique de la conception des projets d’aquaculture. La Charte de l’environnement de 1990 énonce le principe général selon lequel tout projet risquant de porter atteinte à l’environnement doit faire l’objet d’une étude d’impact sur l’environnement (EIE). La Charte a été complétée par d’autres décrets exigeant une étude d’impact sur l’environnement pour les projets particulièrement vulnérables, notamment dans les mangroves (Van Houtte, 1996). Dans la mesure où elles sont appliquées plus systématiquement, ces dispositions devraient garantir la viabilité écologique des projets concernant le littoral.

Madagascar a en outre adopté récemment une loi moderne sur l’eau (Loi n°98-029) qui se rapporte en particulier à l’aquaculture dulcicole. Tous les ouvrages affectant les eaux de surface, notamment les marais et les bassins d’eau salée, doivent faire l’objet d’une autorisation, ainsi que l’utilisation des eaux souterraines, à moins qu’il ne s’agisse d’une utilisation à des fins personnelles, et ne dépassant pas un niveau qui doit être fixé par décret. En outre, l’article 24 du code autorise la surveillance de tous les établissements aquacoles en vertu d’une interdiction générale de pollution des eaux.

3.1.3.2 Améliorations suggérées

Le code présente l’avantage d’établir un ensemble bien défini de règles, de telle sorte que les investisseurs potentiels dans le secteur de l’aquaculture peuvent connaître précisément les obligations en rapport avec l’utilisation des eaux. Deux omissions laissent néanmoins perplexes. L’obligation générale de traiter les eaux énoncée à l’article 19 vise à garantir la qualité de l’eau destinée à la consommation publique et à l’agriculture, l’aquaculture n’étant cependant pas mentionnée. Le code s’abstient donc d’affirmer spécifiquement le droit des pisciculteurs à un approvisionnement en eau d’une qualité adaptée aux besoins de leur exploitation. En outre, le code n’énonce aucune règle par défaut pour résoudre les conflits au cas où les ressources en eau disponibles ne permettent pas d’approvisionner tous les utilisateurs légitimes. Aux termes de l’article 65, les conflits de ce type doivent dans un premier temps donner lieu à un arbitrage, l’autorité responsable devant concilier les intérêts de l’agriculture avec les droits des propriétaires et régler le conflit en appliquant à tout particulier les règles locales éventuellement en vigueur. Or, pour assurer à l’aquaculture un apport garanti des quantités nécessaires d’eau de qualité adéquate, il aurait été préférable de mentionner l’aquaculture à l’article 19 en tant qu’utilisation protégée et d’énoncer à l’article 65 une règle claire par défaut pour déterminer le mode de répartition des ressources en eau en période de pénurie.

3.2 Malawi


3.2.1 Situation actuelle de la Loi sur l’aquaculture
3.2.2 Aspects à améliorer
3.2.3 Loi sur les investissements

3.2.1 Situation actuelle de la Loi sur l’aquaculture

Le Malawi a l’avantage d’être doté d’une loi récente sur les pêches (N°25 de 1997) promulguée en 1997. La loi traite essentiellement des pêches de capture et contient d’excellentes dispositions générales en matière d’administration, de participation communautaire et de mise en application, qui revêtent également un intérêt à long terme du point de vue de la réglementation de l’aquaculture. La partie VIII de la loi contient un certain nombre d’éléments de base utiles pour la mise au point d’une législation moderne de l’aquaculture, mais constitue simplement la toute première étape de l’ensemble des dispositions réglementaires indispensables pour favoriser le développement d’une aquaculture commerciale viable. Dans son état actuel la loi ne résout pas les problèmes juridiques véritables soulevés par l’aquaculture et pâtit d’un défaut technique lié à sa formulation, qui en complique l’application, même en ce qui concerne ses dispositions fondamentales.

La Loi sur les pêches contient quatre éléments essentiels relatifs à l’aquaculture. Elle pose le principe selon lequel personne ne peut créer et exploiter un établissement d’aquaculture sans un permis délivré à cet effet et sans disposer d’un droit d’utilisation des eaux délivré en vertu de la loi sur les ressources aquatiques. La loi accorde au directeur des pêches des pouvoirs étendus en matière de fixation des conditions de délivrance d’un permis d’aquaculture. En outre, elle interdit à bon escient les transferts de poisson, l’introduction d’espèces exotiques et l’empoisonnement des eaux sans autorisation préalable et permet enfin au Ministre, sur recommandation du Comité consultatif des pêches de promulguer des règlements à différentes fins, notamment dans le but de promouvoir et de contrôler l’élevage de poissons et la publication par le directeur d’un code de pratique pour l’entretien et l’exploitation des établissements d’aquaculture.

3.2.2 Aspects à améliorer

Concrétisation de la Loi sur les pêches

Les dispositions de la Loi sur les pêches sont importantes dans la mesure où elles permettent au gouvernement de définir l’étendue de ses compétences à l’égard du secteur de l’aquaculture et d’exercer un certain contrôle réglementaire par la faculté de fixer les conditions de délivrance d’un permis. Toutefois, bien que la loi soit en vigueur il faut bien observer que les dispositions concernant l’aquaculture ne sont pas encore mises en pratique et qu’aucun permis d’aquaculture n’a encore été délivré. Cette situation résulte d’une formulation techniquement défectueuse de la législation.

D’après la section 20 de la Loi, l’exploitation d’une entreprise aquacole exige la délivrance d’un permis et tout droit d’utilisation des ressources en eau nécessaires doit être obtenu dans le cadre de la Loi sur les ressources aquatiques (N°15 de 1969). Cette section de la Loi est censée s’appliquer uniquement aux établissements d’aquaculture stipulés par le Ministre au Journal officiel. Or, puisque aucun établissement d’aquaculture n’a été désigné au Journal officiel, l’exigence d’un permis quelconque n’a aucun fondement juridique. De fait, les dispositions de la section 20 (1)(b) de la Loi sur les pêches selon laquelle l’exploitant doit obtenir un droit d’utilisation des eaux est également inapplicable, tant qu’un établissement n’est pas inscrit au Journal officiel. Quant à l’utilisation des eaux, l’exploitant peut néanmoins rester tenu d’obtenir un droit à cet effet, en vertu de la Loi sur les ressources aquatiques, aux termes de laquelle l’inscription au Journal officiel n’est pas indispensable pour que la législation soit applicable.

On comprend très bien que le Ministère doive dresser la liste des établissements tenus d’obtenir un permis, lorsqu’il s’agit d’appliquer la législation en vigueur aux établissements qui existaient au moment de la promulgation de la loi. Or, cette loi ne s’applique pas seulement aux fermes aquacoles existantes et plus de 3 années se sont donc écoulées pendant lesquelles toutes les nouvelles exploitations piscicoles auraient pu être assujetties à la délivrance d’un permis, alors que le gouvernement a été dans l’impossibilité d’imposer cette obligation en raison de la formulation de la section 20. En outre, aucun permis n’a été délivré puisque la loi exige que les demandes soient présentées au moyen du formulaire prescrit. Or, aucun formulaire de demande n’a semble-t-il été prescrit jusqu’à présent.

Pour établir le climat de garantie nécessaire, tant pour les entreprises existantes que pour les nouveaux investisseurs, le gouvernement devrait conjointement désigner les établissements aquacoles auxquels la loi s’applique et préciser les modalités de dépôt des demandes de permis. S’il y a lieu de différer l’application de la loi aux établissements existants, le décret pourrait s’appliquer initialement uniquement aux établissements créés après une certaine date. Ces mesures devraient également faire l’objet d’une publicité appropriée de sorte que toutes les parties puissent être informées des règles juridiques élémentaires en vigueur au Malawi.

Soulignons que, même en supposant la mise en oeuvre effective du système de permis, l’établissement d’un cadre juridique favorisant le développement d’un secteur aquacole commercial durable exige un certain nombre de mesures de base supplémentaires. Parmi ces mesures figurent l’amélioration du système de permis, l’attribution de droits garantis aux exploitants aquacoles et la réforme de la législation existante des droits sur l’eau.

Amélioration du système actuel de permis

Le système actuel de permis doit être amélioré sur les points suivants:

Critères de délivrance d’un permis

La Loi sur les pêches ne définit aucun critère de nature à orienter la décision du Directeur quant à l’opportunité de la délivrance d’un permis d’aquaculture. En cas de décision favorable du Directeur, la délivrance effective du permis est néanmoins tributaire des éléments que le directeur juge opportun de prendre en compte du point de vue de la réglementation de l’aquaculture, de la gestion des pêches ou des intérêts économiques du moment. La Loi contient ensuite une liste non exhaustive des conditions susceptibles d’être imposées à la délivrance d’un permis. En substance, sur le plan juridique, toute la procédure de délivrance de permis est à toutes fins pratiques laissée entièrement à l’appréciation du Directeur.

Pour que les initiateurs de projets d’exploitation aquacole soient à l’abri de décisions arbitraires, lesquelles seraient extrêmement préjudiciables pour le développement d’une industrie commerciale, il convient de modifier cet aspect de la législation et de définir un processus décisionnel fondé sur des critères explicites et transparents. Tel qu’indiqué plus haut, une législation valable sur l’aquaculture implique nécessairement la délivrance ou le refus d’un permis sur la base de principes d’action explicites. Il serait souhaitable que la législation du Malawi stipule la possibilité de justifier le refus d’un permis d’après les principes énoncés à la section 2.4 du présent rapport comme en fonction de toute autre considération propre au Malawi. Il est par ailleurs évident qu’il faudrait conserver la possibilité d’autoriser le refus arbitraire de délivrance d’un permis pour d’autres raisons. Les initiateurs de projets pourraient bénéficier d’une protection adéquate si la loi prévoyait en outre l’obligation pour le directeur de justifier par écrit le refus d’une demande de permis.

Autorité responsable

La loi actuelle laisse toutes les décisions concernant la délivrance d’un permis à l’appréciation du Directeur. Conformément à la recommandation selon laquelle le Malawi devrait instituer un organisme chargé uniquement de l’aquaculture (suggestion décrite de façon plus détaillée ci-après), il serait préférable de confier à l’organisme en question, plutôt qu’à une personne déterminée, la responsabilité de la délivrance des permis et de la définition des conditions à remplir.

Mesures de protection de l’environnement

Le Malawi a défini des principes de base adéquats pour garantir l’application aux exploitations aquacoles de mesures appropriées de protection de l’environnement. La Loi sur les ressources aquatiques contient des dispositions en matière de lutte contre la pollution, sans toutefois fixer de normes de qualité de l’eau (Makawa, 2000). Le déversement d’effluents dans les eaux publiques exige au préalable une demande d’autorisation ministérielle, bien que cette disposition semble concerner une source prévue de pollution des eaux, par exemple une station d’épuration, et non la pollution accidentelle éventuelle produite par une ferme aquacole. La Loi sur les pêches interdit en outre tout dommage ou nuisance infligé au poisson, du fait de l’une quelconque des activités énumérées, bien qu’aucune d’entre elles ne se rapporte directement aux problèmes de qualité de l’eau pouvant résulter d’une exploitation aquacole.

La protection contre la pollution des futures exploitations aquacoles commerciales est régie essentiellement par la Loi sur la gestion de l’environnement de 1996 (Loi n°23 de 1996). Cette loi, aux termes de laquelle le rejet ou l’émission de polluants dans l’environnement constitue une infraction, est applicable à toute pollution résultant de l’aquaculture et ne relevant pas directement de la Loi sur les ressources aquatiques ou de la Loi sur les pêches. Toutefois, l’importance majeure de la Loi eu égard à l’aquaculture, réside dans ses dispositions d’évaluation des répercussions sur l’environnement.

La Loi exige qu’une étude d’impact sur l’environnement soit réalisée au sujet de tous les projets (de types divers et à différentes échelles) dont la liste figure au Journal officiel. Un avis du Gouvernement (n°58, 14 août 1998) exige qu’une personne qui envisage de réaliser l’un quelconque des projets d’aquaculture énumérés doit le cas échéant différer sa réalisation jusqu’à ce qu’une étude d’impact sur l’environnement soit effectuée. Les projets ainsi énumérés comprennent: fermes de pisciculture en étang, d’une capacité de plus de 100 mètres cubes, fermes de pisciculture effectuant des rejets directs dans un plan d’eau récepteur, projets quelconques d’introduction d’espèces dans une zone où elles n’existent pas actuellement.

Les dispositions relatives à l’étude d’impact sur l’environnement garantissent jusqu’à un certain point que tous les futurs projets d’aquaculture d’une importance notable feront l’objet de contrôles appropriés. Toutefois, les deux premiers tests fondés sur des niveaux limites semblent excessivement rigides. En effet, nombre de petites fermes aquacoles exploitent peut-être un volume de plus de 100 mètres cubes ou produisent le cas échéant des rejets de faible importance dans un plan d’eau, mais ne constituent pas une réelle menace pour l’environnement. Or, la législation en vigueur impose de les soumettre à une étude d’impact sur l’environnement potentiellement onéreuse.

Il a été précisé que ces dispositions strictes étaient censées opérer une sélection et que, après présentation d’un dossier de projet, le directeur déciderait si une demande particulière devait faire l’objet d’une étude EIE complète. Or, tel ne semble pas être l’effet produit par l’application de la loi. Aux termes de la section 24, les initiateurs de tous les projets dont la nature et l’échelle sont annoncées au Journal Officiel, doivent présenter un dossier et, en vertu de la section 26 (3) aucune licence ne peut être délivrée pour le projet tant qu’il n’a pas reçu l’approbation du Ministère. Dès que le Directeur a reçu un dossier complet, il est tenu, en vertu de la section 25, d’exiger de l’initiateur du projet la réalisation d’une étude d’impact sur l’environnement. Si l’on donne à cette section l’interprétation juridique habituelle, la réalisation d’une étude EIE est dès lors obligatoire, puisque l’expression “est tenu de” signifie que le Directeur n’a pas le pouvoir de lever ladite obligation.

Le Malawi a incontestablement mis en place des procédures efficaces de contrôle de l’acceptabilité du point de vue de l’environnement des futurs projets d’aquaculture. Toutefois, ces procédures risquent de soumettre involontairement certains projets commerciaux à la réalisation d’une étude EIE complète bien qu’ils ne constituent aucune menace véritable pour l’environnement. Ce risque pourrait être atténué à condition de modifier la section 25 pour permettre au Directeur, (ou plutôt à l’organisme chargé de l’aquaculture) de lever l’obligation de réaliser une étude d’impact sur l’environnement, lorsqu’il ressort du dossier du projet qu’il ne constitue pas un danger réel. La décision du Directeur, ou de l’organisme responsable de l’aquaculture, devrait être rendue publique, les parties étant autorisées, le cas échéant, à faire appel.

Approche du guichet unique

Comme dans beaucoup d’autres pays, l’approbation d’un projet d’aquaculture au Malawi impose parfois au demandeur de se conformer aux exigences d’un certain nombre d’administrations. En présence d’un système de permis, la loi précise que l’initiateur du projet devra obtenir un droit sur l’eau en vertu de la Loi sur les ressources aquatiques. Dans de nombreux cas, il faudra réaliser une étude d’impact sur l’environnement en vertu de la Loi sur la gestion de l’environnement, et éventuellement obtenir une autorisation de rejet d’une substance polluante, en vertu de la Loi sur les ressources aquatiques ou une autorisation délivrée en vertu de la Loi sur la gestion de l’environnement. Pour éviter d’imposer au demandeur la prise en charge de coûts inutiles, il serait indiqué d’instituer formellement un système de guichet unique chargé de traiter les demandes devant faire l’objet de plusieurs approbations.

Heureusement, les responsables de la réglementation au Malawi sont parfaitement conscients de ce besoin et ont déjà mis en place certains des éléments requis selon l’approche du guichet unique. Ainsi, la possibilité de formuler une seule demande pour tous les permis et autorisations indispensables est sérieusement envisagée. A l’heure actuelle, avant la mise en place d’un système de permis d’aquaculture, un pisciculteur est essentiellement tenu d’obtenir un droit d’utilisation de l’eau en vertu de la Loi sur les ressources aquatiques. Le Ministère des pêches est d’ores et déjà représenté au sein des Comités techniques appropriés de la Commission des ressources aquatiques. Il existe donc une voie bien établie de consultations interministérielles en dépit de l’opinion persistante de certains membres du Ministère des pêches, selon laquelle la Commission des ressources aquatiques traite avec une rigueur excessive les demandes d’autorisation d’installations aquacoles.

Deux conditions doivent être réunies si l’on veut donner suite à la préférence actuelle en faveur d’un système de guichet unique. Premièrement, une fois élaboré le mode opératoire de traitement d’une demande unique pour l’ensemble des autorisations requises, le système mis au point devrait être intégré à la législation. Deuxièmement, pour que ce système puisse fonctionner, il est nécessaire de créer un organisme pilote responsable du traitement de chaque demande et chargé de veiller à ce que les autres administrations impliquées prennent leur décision avec la diligence voulue. Conformément à la recommandation générale examinée au chapitre 2 de la présente étude, au sujet d’une bonne législation sur l’aquaculture, cette tâche devrait en principe être confiée à un organisme chargé exclusivement de l’aquaculture et doté d’une personnalité juridique distincte.

Doter les exploitants aquacoles de droits garantis

Lorsque le système de permis sera mis en place au Malawi, le gouvernement sera en mesure d’établir un contrôle réglementaire du secteur. Il s’agit là d’un aspect essentiel d’une réglementation efficace de l’aquaculture, mais pour que soient réunies les conditions dans lesquelles l’aquaculture commerciale puisse prospérer, le permis devrait en outre constituer une garantie pour l’investissement engagé en conférant certains droits aux pisciculteurs. Cette exigence revêt une importance particulière à la lumière de la section 4 de la Loi sur la gestion de l’environnement, selon laquelle les ressources naturelles et génétiques du pays font partie intégrante des richesses naturelles nationales du Malawi et ne doivent pas être exploitées, sinon pour les besoins nationaux, sans autorisation écrite préalable du Gouvernement. Tous les systèmes de permis doivent clairement accorder le droit de mener une exploitation aquacole commerciale. Au Malawi, cela est d’autant plus nécessaire que l’aquaculture commerciale semble constituer sinon une exploitation illicite des ressources génétiques et naturelles du pays.

Aucun obstacle juridique n’empêche au Malawi l’initiateur d’un projet d’aquaculture d’obtenir les droits nécessaires sur les terres indispensables à sa réalisation; toutefois, une bonne législation sur l’aquaculture garantira également le droit exercé par l’exploitant sur l’animal d’élevage, ainsi que le droit à un approvisionnement adéquat en eau de bonne qualité.

Sauf disposition contraire de la législation, dans le cas d’un élevage de poissons, on peut toujours soutenir que le poisson n’appartient à personne jusqu’au moment de sa capture; la législation sur l’aquaculture doit au moins confirmer que le détenteur d’un permis possède le droit exclusif de récolter le produit de la ferme aquacole et de protéger le stock contre ceux qui seraient susceptibles de capturer le poisson d’élevage à leurs propres fins. Une disposition statutaire confère définitivement un droit à l’exploitant de la ferme aquacole ainsi qu’aux institutions éventuellement disposées à offrir un crédit garanti par la ferme et par ses actifs, notamment par le stock de poissons. Cela offrirait en outre une garantie accrue à l’exploitant, si la législation des permis considérait comme une infraction le fait pour une personne quelconque de gêner l’exploitation d’une ferme aquacole ou de son équipement, ou encore d’altérer la qualité des eaux nécessaires à son activité.

Réforme de la législation actuelle des droits sur l’eau

Jusqu’à maintenant, la Loi sur les ressources aquatiques a défini la seule instance habilitée à examiner au fond les demandes d’autorisation d’exploitation aquacole. La Loi habilite la Commission des ressources aquatiques à délivrer un droit sur l’eau permettant au projet de se réaliser et à examiner les répercussions préjudiciables éventuelles sur la qualité de l’eau.

Puisque la possession d’un droit garanti sur l’eau figure parmi les conditions essentielles pour pouvoir pratiquer l’aquaculture, outre le droit sur les terres nécessaires, le Malawi a tout intérêt à reconnaître le rôle décisif de la Loi sur les ressources aquatiques. Or, ce texte règle correctement la question de la délivrance initiale d’un droit sur l’eau, mais s’avère nettement moins efficace pour résoudre les conflits entre les différents utilisateurs en période de pénurie. Des conflits de ce type sont apparus lors des années de sécheresse, aussi bien entre détenteurs de droits sur l’eau qu’entre détenteurs de droits sur l’eau et propriétaires riverains. La Loi sur les ressources aquatiques est censée résoudre les conflits en réunissant toutes les parties et en s‘employant à trouver une solution définie d’un commun accord. Le problème se pose en cas d’échec de ces tentatives de résolution concertée des conflits, parce que la législation ne définit pas de règles précises quant au mode de répartition des ressources en eau entre les utilisateurs légitimes en période de pénurie. La réforme de la Loi sur les ressources aquatiques a fait l’objet de certains travaux, lesquels se poursuivent activement. A l’avenir, le remplacement de cette loi par une législation moderne sur l’eau serait une précieuse contribution, aussi bien à l’aquaculture commerciale qu’aux différentes industries tributaires de droits garantis sur l’eau.

La réforme de la Loi sur les ressources aquatiques sera certes une vaste entreprise, mais pour offrir des droits garantis aux exploitants aquacoles et aux autres utilisateurs de l’eau, une nouvelle législation doit au moins contenir des dispositions sur les points suivants: (1) définition de l’étendue exacte des droits sur l’eau détenus par les riverains et des relations entre les droits des riverains et des droits sur l’eau conférés aux autres utilisateurs en vertu de la loi; (2) détermination de règles précises d’attribution des ressources en eau entre les détenteurs de droits sur l’eau, ainsi qu’entre les détenteurs de droits sur l’eau et les riverains eu cas de pénurie affectant l’ensemble des utilisateurs à un moment quelconque; (3) définition des conditions dans lesquelles des droits sur l’eau peuvent être transférés d’un utilisateur à un autre et des modalités d’examen et d’utilisation des transferts proposés.

La réforme de la législation de l’eau met en cause beaucoup d’autres questions importantes : une législation qui règlerait les trois points fondamentaux évoqués plus haut permettrait toutefois aux exploitants aquacoles de connaître précisément les règles en vigueur en matière de garantie et de priorité de leurs droits sur l’eau. Or, la loi actuelle ne leur permet absolument pas.

3.2.3 Loi sur les investissements

Le Malawi a adopté une position favorable aux investissements consacrés aux projets d’aquaculture, de telle sorte que les investissements de ce type ne font l’objet d’aucune restriction particulière. De fait, les publications de l’Agence du Malawi pour la promotion des investissements attirent l’attention sur les investissements consacrés à l’aquaculture et le Gouvernement a, paraît-il, approuvé la suppression des droits de douane sur le matériel importé. Cette modification placera l’aquaculture à égalité avec l’aquaculture sur le plan commercial. Un comité ministériel procède, paraît-il, à l’autorisation des demandes d’investissements étrangers selon une approche informelle de type guichet unique, semblable à celle préconisée dans le chapitre de la présente étude consacrée aux demandes concernant les projets d’aquaculture.

3.3 Mozambique


3.3.1 Situation actuelle de la Loi sur l’aquaculture
3.3.2 Modifications proposées

3.3.1 Situation actuelle de la Loi sur l’aquaculture

Au moment de l’élaboration de la présente étude, il n’y avait au Mozambique aucune législation spécifique concernant un type quelconque d’aquaculture. Toutefois, un certain nombre de lois affectent l’aquaculture de manière indirecte.

La Loi sur les pêches (n°3/90) est celle dont l’incidence sur les activités aquacoles est la plus directe, bien qu’aucune de ces dispositions n’autorisent directement une personne à exercer une activité d’exploitant aquacole. La Loi autorise le Ministère des pêches à établir les directives applicables aussi bien à l’aquaculture marine, celle-ci incluant les activités aquacoles en eaux saumâtres, qu’à l’aquaculture dulcicole; elle stipule qu’un projet d’aquaculture marine ne peut être réalisé que sur autorisation préalable du Ministère des pêches, conformément aux conditions fixées par la réglementation. Or, la réglementation requise n’ayant pas encore été promulguée, la Loi n’a techniquement qu’un effet limité.

En outre, une loi de 1977 sur les pêches en eau douce (et ses amendements ultérieurs) a une incidence sur l’aquaculture dulcicole. Elle précise en effet que ses dispositions doivent être étendues à l’aquaculture dulcicole jusqu’à la promulgation d’une législation spécifique dans ce domaine (Pires, 1996). La Loi contient un premier élément de législation de l’aquaculture; elle exige l’inscription ou l’enregistrement des exploitants et interdit l’introduction d’œufs ou d’espèces, sans autorisation préalable du Ministère des pêches et des services vétérinaires compétents.

3.3.2 Modifications proposées

Adoption de la Loi sur l’aquaculture

L’absence de cadre juridique a été cité comme l’un des obstacles au développement de l’aquaculture au Mozambique (Pires, 1996). Ce problème de fond semble à présent sur le point d’être résolu, dans la mesure où un projet de réglementation de l’aquaculture est à l’étude depuis un certain temps et devrait être adopté en 2001.

L’élaboration d’une loi fondamentale représente un élément constitutif essentiel en vue de la mise en place d’une aquaculture commerciale viable. Il faut néanmoins souligner qu’il s’agit seulement d’une première étape majeure et que la promulgation d’une réglementation sur l’aquaculture ne conduira pas automatiquement au développement d’un secteur dynamique. La réglementation élimine certes un important facteur d’incertitude, mais l’investisseur en puissance risque néanmoins d’être rebuté par d’autres incertitudes et par les coûts potentiels impliqués par divers aspects de la législation du Mozambique. En particulier, les investisseurs risquent très vraisemblablement d’être dissuadés par les règles actuelles concernant les études d’impact sur l’environnement, par les coûts imposés par les systèmes d’autorisation en vigueur et par différents aspects de la Loi sur les ressources aquatiques.

Etude d’impact sur l’environnement

Une saine législation sur l’aquaculture doit sans aucun doute exiger l’examen détaillé d’une demande de permis concernant une exploitation aquacole susceptible d’avoir des effets préjudiciables sur l’environnement. Une étude d’impact sur l’environnement doit être réalisée, dès lors qu’il existe un danger effectif d’atteinte à l’environnement. La Loi sur l’environnement de 1997 va bien au-delà de ce principe en imposant une étude d’impact sur l’environnement obligatoire à tous les projets d’aquaculture marine et/ou d’aquaculture dulcicole, indépendamment de leur échelle (Menezes, 2000). Cette exigence a évidemment suscité des protestations, tant de la part des investisseurs potentiels que des responsables de la réglementation. Elle s’avère anormalement rigoureuse dans le cadre d’une législation moderne de l’aquaculture et les coûts imposés par son observation risquent fort de freiner le développement de plusieurs projets intéressants. Cette disposition va à l’encontre du principe selon lequel l’exigence d’une étude EIE doit être liée à l’introduction par le projet d’un risque réel d’atteinte à l’environnement; quant aux autres projets, elle a simplement pour effet d’imposer à tous les demandeurs un coût inutile.

L’obligation de réaliser une étude d’impact sur l’environnement étant inscrite dans la Loi sur l’environnement de 1997, toute modification exigerait l’adoption d’un amendement statutaire. En raison vraisemblablement du fait qu’elle représente la législation en vigueur, cette exigence figure également dans le projet de réglementation sur l’aquaculture. Ainsi, aux termes de l’article 12 du projet de réglementation, toutes les activités relevant de l’aquaculture doivent faire l’objet d’une étude d’impact sur l’environnement, qu’il s’agisse d’une activité de subsistance, expérimentale, commerciale, intensive, semi-intensive ou extensive, la seule exception concernant exclusivement l’aquaculture extensive de subsistance.

S’il est possible de dispenser les activités extensives d’aquaculture de subsistance de l’étude EIE imposée à tous les projets, il doit être également possible d’en dispenser d’autres types d’activités aquacoles. La législation en vigueur au Mozambique, comme en témoigne l’exemple de la Loi sur l’environnement et du projet de réglementation, doit donc faire l’objet d’un réexamen approfondi. Sous sa forme actuelle, elle aura certainement pour effet d’empêcher la réalisation de certains projets qui ne sont pas nécessairement dangereux et provoquera la dispersion des ressources publiques consacrées à l’examen de toutes les demandes, au lieu d’être axées sur les projets effectivement sujets à controverse.

Au demeurant, il faut admettre qu’il est difficile d’élaborer un texte législatif propre à garantir que les projets dangereux pour l’environnement seront évalués, tandis que d’autres seront examinés suivant le système normal d’autorisation. Certaines directives ont été proposées par le Colloque international pour une aquaculture industrielle durable, dans un document connu généralement sous le nom de “Directives Holmenkollen”, qui propose d’appliquer les procédures d’étude d’impact sur l’environnement aux aménagement aquacoles “a grande échelle” (Howarth, 1999). Cette solution a été critiquée à juste titre comme étant tributaire de l’échelle du projet et non de son potentiel d’atteinte à l’environnement. Selon les propositions avancées, une étude EIE s’avère inutile dans le cas des projets à petite échelle, en dépit des risques effectifs que peuvent comporter des projets d’aquaculture fortement intensive, situés dans une zone vulnérable ou comportant l’introduction d’espèces exotiques.

Il n’y a pas de solution simple propre à garantir que les projets effectivement dangereux feront l’objet d’une étude d’impact sur l’environnement, tandis que ceux n’introduisant aucun risque en seront dispensés. Certaines administrations font appel à un tri préliminaire pour assurer que les projets potentiellement dangereux, font obligatoirement l’objet d’une étude d’impact sur l’environnement. Une autre technique consiste à définir au préalable les projets vraisemblablement inoffensifs et à les dispenser de l’étude EIE, sauf si un autre élément important de l’environnement est menacé. Le Mozambique a d’ores et déjà mis en place certains mécanismes en place permettant de suivre une procédure moins draconienne d’étude d’impact sur l’environnement. Par exemple, une étude préliminaire a identifié à l’intérieur du pays une superficie totale d’environ 33000 ha adaptée au développement de l’élevage de la crevette. Dans les zones ainsi délimitées les utilisations concurrentes sont rares, puisque ces terres ne sont pas adaptées à l’agriculture et sont peu peuplées en raison de leur exposition aux inondations (Menezes, 2000). Dès lors que les études préparatoires ont identifié de façon catégorique ces zones comme étant adaptées à l’élevage de la crevette, elles ont également résolu l’une des questions essentielles qui seraient au cœur même d’une étude d’impact sur l’environnement. A quoi bon exiger d’un demandeur de prouver par une étude d’impact individuelle que l’emplacement envisagé pour l’élevage de la crevette est approprié, si la question a déjà été réglée grâce à une étude préparatoire sérieusement effectuée.

Naturellement, le caractère effectivement adapté à l’aquaculture de l’emplacement envisagé n’est pas le seul point à examiner lors de la décision d’approuver ou non une demande de création d’une ferme aquacole. L’instance responsable de la réglementation devra en outre veiller à ce que la concentration des fermes aquacoles n’est pas excessive dans une zone particulière, à ce que le projet envisagé ne dépasse pas la capacité d’absorption du site et enfin, à ce que le demandeur envisage des méthodes d’exploitation appropriées. Toutefois, dans la plupart des cas ces différentes questions ne doivent pas conduire nécessairement à engager les dépenses liées à une étude EIE complète, compte tenu de la possibilité d’y répondre facilement lors de la décision normale d’autoriser la délivrance d’un permis. Le demandeur peut être prié de présenter toutes les informations nécessaires à cette prise de décision sans devoir soumettre son projet à une étude EIE. Dans le cas de l’aquaculture dulcicole, l’exigence d’une étude EIE a des répercussions encore plus coûteuses et risque très certainement de gêner l’apparition de petites exploitations commerciales sans aucun danger réel pour l’environnement.

A l’évidence, le Mozambique a toute latitude pour déterminer quand une étude d’impact sur l’environnement doit être imposée à un demandeur. Il est possible de se référer à nombre de modèles distincts si l’on décide de limiter les études d’impact sur l’environnement aux projets qui introduisent un risque réel d’atteinte à l’environnement. Toutefois, une analyse objective de la législation en vigueur impose la conclusion selon laquelle les exigences de cette législation sont nettement plus strictes que la plupart des pays l’ont jugé nécessaire pour garantir un niveau adéquat de protection de l’environnement. Sous sa forme actuelle, elle risque d’entraîner des coûts inutiles qui feront obstacle au développement d’une industrie viable de l’élevage commercial de la crevette et empêcheront les pouvoirs publics d’atteindre leur objectif consistant à favoriser l’apparition d’un secteur prospère de l’aquaculture.

Problème des approbations multiples

Lorsque la réglementation sur l’aquaculture sera promulguée, le Mozambique aura mis en place un certain nombre des éléments du cadre de référence indispensable d’un secteur viable d’aquaculture commerciale. Il y aura alors une législation appropriée sur l’aquaculture, le gouvernement ayant d’ores et déjà créé un climat favorable aux investissements dans ce secteur. Toutefois, même dans l’hypothèse d’une simplification des procédures d’étude d’impact sur l’environnement, la législation introduit néanmoins indirectement des obstacles au développement d’une industrie prospère.

Ces interférences viennent de la superposition des différentes juridictions dont relève l’aquaculture, ce qui est particulièrement évident dans les zones côtières (Menezes, 2000). Il est possible de mesurer l’incidence de cette organisation bureaucratique en décrivant les étapes que doit suivre un investisseur potentiel pour pouvoir mettre sur pied un projet d’aquaculture. Le traitement du projet d’un demandeur peut, le cas échéant, lui imposer les démarches suivantes: obtention de permis pour des concessions de terres auprès de la Direction nationale des services géographiques et cadastraux; autorisations du Centre de promotion des investissements pour bénéficier d’aides fiscales, notamment d’exemptions des taxes à l’importation, des taxes de transport et de consommation et des taxes sur le revenu (par exemple la taxe sur la contribution industrielle), obtention de l’approbation technique et économique du Ministère des pêches, obtention d’une licence d’innocuité pour l’environnement auprès du Ministère de l’environnement, obtention de permis du Ministère de la planification et des finances, obtention de permis du Ministère du commerce, chargé des forêts et de la faune.

La délivrance d’approbations multiples est rendue encore plus problématique du fait que chaque administration suit sa propre procédure d’évaluation des demandes. Aucun ordre n’a été défini pour la marche à suivre par les demandeurs et il existe peu de directives quant aux grands principes d’action propres à faciliter les décisions individuelles. Le processus à engager ne présente donc aucune garantie au demandeur, lequel peut même être confronté à des exigences contradictoires émanant d’administrations différentes. Plusieurs années, ou même plusieurs mois peuvent s’écouler avant de pouvoir satisfaire à toutes les exigences et il n’est guère étonnant que des investisseurs privés aient adressé de vives réclamations suite aux difficultés imputables au caractère bureaucratique des procédures et au chevauchement des juridictions.

Il importe de souligner le caractère critique de ce problème. Même si le Mozambique adopte une législation sur l’agriculture qui puisse servir de modèle pour les pays en développement, l’essor d’un secteur commercial serait gravement entravé si le coût en temps et en argent du respect d’un système d’approbations multiples constituait une contre-incitation effective à l’égard des investisseurs en puissance. Bien que les responsables officiels ne partagent pas, paraît-il les préoccupations du secteur privé quant au processus d’autorisation des exploitations aquacoles, (Menezes 2000) on constate un certain nombre de signes encourageants de changement positif. Un Ministère des pêches distinct a été créé dont le Département de l’aquaculture est placé sous l’autorité directe du Ministre. Le Gouvernement s’est engagé à simplifier les procédures bureaucratiques et le Mozambique élabore actuellement une conception intégrée de la gestion de la zone littorale.

La réalisation de réformes de ce type est essentielle. L’objectif doit consister à établir un processus d’évaluation des demandes d’approbation de fermes aquacoles et à garantir le niveau adéquat de protection de l’environnement au moindre coût pour les demandeurs. En définitive, pour atteindre cet objectif, il devrait y avoir un processus unique de demande concernant tous les aspects d’un projet d’aquaculture. Si le projet est acceptable, le demandeur devrait être en mesure d’obtenir toutes les approbations nécessaires dans un délai raisonnablement court. Il est par ailleurs essentiel que le Département de l’aquaculture soit initialement chargé de veiller à ce que les autres administrations publiques traitent les différentes autorisations nécessaires dans un délai acceptable, et de faire part au demandeur de toutes les questions soulevées à l’occasion du processus d’évaluation. On s’accorde à reconnaître que, à court terme, le nouveau Département de l’aquaculture au sein du Ministère des pêches est tout à fait en mesure de remplir parfaitement ce rôle. Toutefois, compte tenu de l’importance potentielle de l’aquaculture au Mozambique, de solides arguments militent en faveur de la création d’une administration indépendante chargée de mener à bien ces tâches, conformément à la recommandation énoncée au chapitre 2 du présent rapport.

Modifications de la législation de l’eau

Si les possibilités économiques de l’élevage de la crevette au Mozambique sont considérables, il n’en demeure pas moins que les dispositions réglementaires existantes, comme la réglementation escomptée sur l’aquaculture, s’appliquent aussi bien à l’aquaculture marine qu’à l’aquaculture dulcicole. Dans le domaine de l’aquaculture marine, les droits sont normalement obtenus pour une superficie déterminée et incluent l’autorisation d’utilisation de l’eau à cet emplacement. Dans le cas de l’aquaculture dulcicole, en particulier lorsque l’eau est tirée d’une rivière ou d’un cours d’eau pour les besoins du projet, l’obtention d’un droit distinct sur l’eau est souvent nécessaire à la création de l’exploitation aquacole. Au Mozambique, les utilisations privées des eaux sont autorisées en vertu de la Loi n°16/91 dans la mesure où elles ne portent pas atteinte à l’environnement et sont compatibles avec les zones protégées instituées par la législation des terres. Les utilisations à titre privé sont autorisées à condition d’obtenir une concession auprès des bureaux régionaux de l’administration des eaux, bien que la législation ne mentionne pas spécifiquement l’aquaculture (Pires, 1996).

Pour l’aquaculture dulcicole, il serait opportun que la législation permette à une personne d’obtenir un droit sur l’eau pour les besoins d’une exploitation aquacole et confère des droits plus catégoriques en matière d’utilisation de l’eau. Au moins, de telles dispositions doteraient l’exploitant d’une ferme aquacole en eau douce d’un droit garanti sur une quantité déterminée d’eau et de règles précises indiquant le mode de répartition des ressources en eau en période de sécheresse lorsque les disponibilités sont insuffisantes pour approvisionner tous les utilisateurs légitimes.

3.4 Nigéria


3.4.1 Situation actuelle de la législation
3.4.2 Recommandations

3.4.1 Situation actuelle de la législation

Bien que l’aquaculture littorale et l’aquaculture dulcicole soient pratiquées au Nigéria à grande échelle, il n’existe pas de législation fédérale concernant l’aquaculture: le décret sur les pêches maritimes de 1992 ne la mentionne pas, en dépit de son importance, en particulier dans les zones de mangrove du delta du Niger. Certaines dispositions législatives secondaires existent au niveau de chaque Etat, mais elles concernent en général les activités d’aquaculture menées à l’échelle des ménages.

Bien qu’il n’existe aucune législation définissant les droits et les devoirs des exploitants d’installations d’aquaculture, le décret fédéral de protection de l’environnement promulgué en 1992 exige la réalisation d’une étude d’impact sur l’environnement pour tout projet d’aquaculture terrestre assorti d’une opération de défrichage des marais de mangrove sur une superficie de 20 ha ou plus. La section 3.5 de la politique nationale sur l’environnement énonçait en 1989 que “des programmes d’évaluation et de surveillance de l’impact sur l’environnement seront exécutés régulièrement afin de fournir les données et de définir les normes pratiques nécessaire à la planification et à la réalisation de projets, par exemple pour les activités de pêche, de dragage et d’extraction minière”.

Hormis ces dispositions concernant l’environnement, l’aquaculture au Nigéria est pratiquée en l’absence de tout cadre juridique, même réduit au minimum, faute de tout élément facilitant la création de celui-ci, tel que directives ou orientations ministérielles. De fait, certains aspects de la législation foncière freinent son développement. En vertu de la Loi sur l’utilisation des terres de 1978, toutes les terres du territoire de chaque Etat sont confiées au gouvernement de ce même Etat. Le gouverneur peut délivrer des droits légaux d’occupation des terres à toute personne, à toutes fins que ce soit. Ainsi, une personne désireuse d’obtenir des terres destinées à l’aquaculture doit semble-t-il obtenir au préalable du gouverneur la délivrance de droits légaux. Si le demandeur se contente d’acquérir de simples droits coutumiers d’occupation des terres, il peut les obtenir auprès d’une administration locale. Toutefois, dans les deux cas, le bénéficiaire obtient alors une garantie d’occupation limitée. En effet, un droit coutumier peut être révoqué à tout moment simplement par le paiement de la valeur résiduelle des améliorations éventuellement apportées, tandis qu’un droit légal d’occupation peut être révoqué au profit de l’intérêt général prioritaire, moyennant un droit similaire à dédommagement. Toute personne désireuse d’obtenir un financement pour un projet d’aquaculture doit obtenir un certificat attestant son droit d’occupation, puisque les prêteurs ont besoin de ce certificat en tant que condition préalable à l’octroi d’un prêt. Il est remarquable que l’aquaculture ait atteint son niveau de développement actuel dans un vide juridique pratiquement total, à l’intérieur duquel les garanties sont limitées, même celles découlant de la législation foncière de base.

3.4.2 Recommandations

Pour définir un cadre au sein duquel l’aquaculture commerciale puisse se développer et prospérer et pour résoudre les problèmes concomitants de protection de l’environnement, il importe que le Nigéria amorce le processus d’élaboration d’une législation complète et détaillée sur l’aquaculture. Le projet devrait s’employer à trouver des solutions aux problèmes abordés au chapitre 2 du présent document et constituer l’ossature d’une bonne législation sur l’aquaculture.

3.5 Zambie


3.5.1 Situation actuelle de la législation
3.5.2 Modifications proposées

3.5.1 Situation actuelle de la législation

Au moment de la rédaction du présent rapport, l’aquaculture de la Zambie est régie par la Loi sur les pêches de 1974 (Zambia Fisheries Act, cap. 314). Cette législation repose pour l’essentiel sur l’Ordonnance coloniale relative aux pêches de 1962 et remonte à une époque où l’aquaculture commerciale en Zambie était à peine envisagée. Aussi n’est-il pas étonnant que la Loi sur les pêches ne contienne aucune disposition spécifique concernant l’aquaculture. Aux termes de la section 21.2 (K) de la Loi, le ministre est doté d’un pouvoir de réglementation et de contrôle de la pisciculture, bien que ce pouvoir n’ait pas été exercé. Par ailleurs, la Loi concerne incidemment ce secteur, puisqu’elle interdit l’introduction de toute espèce de poisson ou l’importation de poissons vivants, sans l’autorisation écrite du Ministre. La Loi sur les pêches s’avère donc complètement dépassée et inadéquate pour jeter les bases d’une forme quelconque d’aquaculture. De fait le développement de ce secteur n’a pas été facilité jusqu’à présent par la législation et, la seule conclusion qui s’impose est que l’aquaculture s’est développée en dépit de la Loi sur les pêches et non grâce à elle.

De nouvelles dispositions légales concernant les pêches ont cependant été élaborées sur la base d’un rapport final de 1998, préparé par le Service droit et développement de la FAO (Kuemlangan, 1998). Le projet de Loi sur les pêches en est au dernier stade de sa mise au point; il doit être présenté au Parlement en 2001. La partie IV du projet, ainsi que le projet de Réglementation des pêches (Aquaculture) qui l’accompagne, sont à la pointe du progrès en matière de législation visant à favoriser le développement d’une aquaculture commerciale durable dans les pays de la Conférence pour la coordination et le développement de l’Afrique australe (SADC). Si elle est adoptée, cette législation répondrait à toutes les exigences énoncées au chapitre 2 du présent rapport pour favoriser le développement d’une aquaculture prospère et constituerait un bon point de départ pour l’essor de ce secteur, à condition de prendre en compte les aspects institutionnels et administratifs décrits ci-dessous.

En conséquence et afin de mettre sur pied un cadre juridique adapté à l’aquaculture, la première étape importante consiste pour le Gouvernement de la Zambie à adopter le projet de loi et la réglementation qui l’accompagne. Si le projet de Loi sur les pêches et les réglementations acquièrent force de loi, la Zambie disposera d’une base solide pour développer une aquaculture commerciale durable. Toutefois, l’aquaculture relève de plusieurs législations : en Zambie, il est donc indispensable d’envisager les autres modifications souhaitables des législations connexes, de façon à promouvoir le développement d’un secteur commercial viable.

3.5.2 Modifications proposées

Garantie de l’approvisionnement en eau

La principale législation devant faire l’objet d’un examen attentif est la Loi sur l’eau. La prospérité des exploitations aquacoles repose sur des droits garantis d’approvisionnement en eau. Bien que la Zambie dispose d’abondantes ressources hydrauliques, certaines régions présentent des signes de pénurie en saison sèche, par rapport aux besoins de tous les utilisateurs légitimes. Parfois, des pénuries saisonnières ont paraît-il conduit à demander à certaines fermes aquacoles de prélever des quantités inférieures aux besoins liés à un fonctionnement optimal.

Jusqu’à maintenant, ces conflits ont eu une importance relativement secondaire et ont été réglés généralement par des pourparlers entre les utilisateurs concernés. Toutefois, si les négociations concernant le partage des ressources en eau n’aboutissent pas, l’actuelle Loi sur l’eau n’est pas en mesure de régler les conflits lorsque les ressources sont insuffisantes pour couvrir les besoins de tous les utilisateurs. La Loi présente deux défauts majeurs : dans l’état actuel de la législation, les propriétaires riverains sont parfaitement en mesure de conserver d’importants droits d’utilisation de l’eau en vertu des dispositions du droit commun; le cas échéant ils pourraient parfaitement contester effectivement l’utilisation de l’eau par les pisciculteurs et par d’autres détenteurs de droits sur l’eau en période de pénurie. Par ailleurs, la Loi omet de définir des règles précises quant au mode de répartition de l’eau entre les différents détenteurs de droits sur l’eau, lorsque les ressources sont insuffisantes pour couvrir les besoins de tous.

La réforme de la Loi sur l’eau a été envisagée à plusieurs reprises dans le passé. Il serait particulièrement avantageux pour l’aquaculture commerciale comme pour le développement des autres industries tributaires de droits garantis sur l’eau, de remplacer la loi actuelle par une législation moderne, avant que l’utilisation de cette ressource ne crée des litiges plus difficiles à résoudre. La réforme de cette législation sera une entreprise d’envergure susceptible d’impliquer l’aide des donateurs. Elle comportera nécessairement la consultation de toutes les parties prenantes et la résolution de nombreuses questions délicates relevant des pouvoirs publics.

Pour conférer des droits garantis à l’aquaculture, aux exploitants et aux différents utilisateurs des ressources en eau, la nouvelle législation sur l’eau devra au moins contenir des dispositions relatives aux points suivants: définition de l’étendue précise des droits éventuels sur l’eau détenus par les propriétaires riverains et du lien entre droits riverains et droits sur l’eau délivrés à d’autres utilisateurs par le biais de licences; établissement d’un système de délivrance de droits effectifs au moyen de licences ou d’un instrument juridique similaire portant sur une quantité déterminée d’eau, au profit de ceux qui ont déposé une demande à cet effet, dûment approuvée par une Commission de l’eau; intégration du système actuel de droits sur l’eau à la nouvelle législation dans ce domaine et garantie des droits existants; fixation de règles précises pour la répartition de l’eau d’une part entre détenteurs de droits sur l’eau, et d’autres part entre détenteurs de droits sur l’eau et propriétaires riverains en cas d’insuffisance des ressources hydrauliques pour répondre aux besoins de tous les utilisateurs à une époque particulière; et définition des conditions dans lesquelles les droits sur l’eau peuvent être transférés d’un utilisateur à un autre, ainsi que des modalités d’examen et d’autorisation des transferts envisagés.

La réforme de la Loi sur l’eau soulève certes nombre de problèmes importants, mais l’existence d’une législation capable de régler ces points fondamentaux permettrait aux exploitants de fermes aquacoles de connaître précisément les règles en vigueur concernant la garantie et le degré de priorité de leurs droits sur l’eau. Or, la législation actuelle ne permet pas de faire le point dans ce domaine.

Organisation administrative

Le Rapport publié en 1998 par le Service droit et développement de la FAO attire l’attention sur un certain nombre d’inconvénients majeurs de l’organisation administrative du Département des pêches dans son ensemble (Kuemlangan, 1998). Ces inconvénients ont été la conséquence de modifications par étapes survenues au sein du Département des pêches au fil des ans, lors de la transformation de ce dernier d’un service intégré au Ministère des parcs et de la faune en un Département distinct, au sein de ce qui est actuellement le Ministère de l’agriculture, de l’alimentation et des pêches. Initialement, les pêches constituaient l’un des 4 principaux départements du Ministère, parallèlement à l’agriculture, aux services vétérinaires et de lutte contre les maladies et enfin, aux services nationaux d’information agricole. Suite à une réorganisation du Ministère, les différents éléments des quatre départements ont été fusionnés en deux départements: le Département des services de terrain et le Département de la recherche et des experts. Les fonctions de gestion et de contrôle des pêches ont été placées sous l’autorité du Département des services locaux, tandis que toutes les fonctions de recherche touchant aux pêches ont été intégrées aux Services de la recherche et des experts. De ce fait, les activités de recherche concernant l’aquaculture et les services de vulgarisation correspondant relèvent de départements distincts.

Les personnes interrogées au cours de la mission réalisée en Zambie s’entendent généralement pour reconnaître la nécessité d’une réorganisation du cadre institutionnel des pêches. Lorsque la nouvelle Loi sur les pêches sera promulguée, le Département devra de toutes façons être réorganisé afin de mieux refléter le rôle des nouvelles structures de gestion créées pour les pêches de capture.

Dans le cadre de la réorganisation, deux changements particuliers sont indispensables pour obtenir une réglementation véritable du secteur de l’aquaculture. La répartition des rôles entre services de terrain d’une part et services de la recherche et des experts d’autre part, doit être reconsidérée. Du fait de la structure actuelle, les activités de planification et de recherche sont menées dans un département, sous l’autorité d’un directeur distinct, tandis que les résultats des activités de recherche sont évalués et éventuellement mis en application par un autre département, dont la direction incombe à un autre responsable. En raison de cette organisation, il n’est guère facile de garantir que les travaux de recherche menés dans un département guident réellement les décisions de gestion prises dans l’autre département. En principe, les décisions concernant aussi bien la recherche que la gestion devraient relever de la même structure administrative. En outre, bien que les travaux de recherche concernant l’aquaculture relèvent des services de la recherche et des experts, ils sont en rapport dans nombre de cas avec les tâches de vulgarisation, de contrôle et de travail de terrain, lesquelles relèvent d’un département distinct. Il est difficile de mettre sur pied des capacités substantielles dans le domaine de l’aquaculture lorsque les deux champs d’action sont rattachés à des départements distincts. Même en supposant l’introduction effective de toutes les modifications nécessaires de la législation, l’expérience suggère que, pour mettre en place une aquaculture commerciale prospère, il faudrait confier à une seule et même administration publique, dotée d’une identité juridique propre, la responsabilité de tous les aspects du développement de l’aquaculture. En Zambie, la répartition actuelle des responsabilités entre services de recherche et services de terrain se traduit par l’impossibilité de créer un organisme unique chargé de l’aquaculture, voire de prendre les mesures préliminaires à cet effet.

Autorisations relatives à la protection de l’environnement

Les exploitations d’aquaculture sont soumises à la Loi sur la protection de l’environnement et la lutte contre la pollution (N°12 de 1990), dont la partie IV contient des dispositions concernant toute pollution de l’eau pouvant résulter de ce type d’activité. La réglementation sur les études d’impact sur l’environnement adoptée en vertu de cette loi (1997, S.I. n°28), définit les principes imposant la réalisation d’une étude EIE relative à un projet d’aquaculture. Selon la règle générale fixée, il faut présenter un dossier de projet pour toute ferme aquacole dont la production dépasse 100 tonnes par an. La présentation d’un dossier peut également être requise si le projet doit être implanté dans ou à proximité d’une zone écologiquement vulnérable (par exemple une zone dans laquelle se trouvent des espèces rares ou menacées) ou encore un important bassin hydrographique. S’il ressort de l’examen du dossier par le Conseil de l’environnement de la Zambie que le projet risque d’avoir des répercussions notables sur l’environnement, le Conseil peut alors exiger la réalisation d’une étude complète d’impact sur l’environnement.

La définition d’un niveau limite d’activité pour la présentation d’un dossier de projet signifie que la plupart des projets d’aquaculture à grande échelle devraient faire l’objet d’une étude d’impact sur l’environnement. Toutefois, les projets à plus petite échelle et à caractère non intensif, sont en règle générale dispensés de cette obligation, à moins qu’ils ne soient implantés dans des zones écologiquement vulnérables. Actuellement, une seule ferme aquacole dans toute la Zambie a sans doute une production suffisante de poissons pour donner lieu à une sélection sur dossier. L’approche consistant à définir la nécessité d’une étude d’impact sur l’environnement en fonction du volume de la production escomptée dispense opportunément les projets non intensifs à petite échelle des coûts inutiles liés à la présentation d’un dossier de projet, mais ne garantit aucunement l’élimination de tous les projets potentiellement dangereux. Par exemple, un projet d’élevage en parc d’espèces exotiques dans un lac ne serait pas soumis à une procédure de sélection automatique, à moins que sa production annuelle ne dépasse 100 tonnes, ou dans l’hypothèse d’une classification du lac comme écologiquement vulnérable. Toutefois, les effets préjudiciables (pour le milieu lacustre) résultant de la fuite d’espèces non endémiques dans le lac, risquent d’être plus graves que la pollution d’un élevage piscicole en étang dont la production s’élève à 100 tonnes de poisson par an.

Le Département des Sciences biologiques de l’Université de Zambie travaille, signale-t-on, à l’élaboration de différentes recommandations concernant les types de projets d’aquaculture qui devraient faire l’objet d’une sélection initiale en vertu de la réglementation des études d’impact sur l’environnement. Puisque la présentation obligatoire d’un dossier n’est pas excessivement onéreuse, il est recommandé d’étendre l’obligation de sélection sur dossier et de ne pas la limiter aux exploitations d’aquaculture dont la production annuelle prévue est supérieure ou égale à 100 tonnes; elle devrait inclure au moins les exploitations qui envisagent l’élevage d’espèces exotiques ou de produits des technologies modernes, notamment des organismes génétiquement modifiés, ainsi que les exploitations d’une taille supérieure à un niveau donné dont les déchets seront déversés dans un plan d’eau public quelconque.

Agence unique et système à guichet unique

Conformément à la recommandation visant à éviter les coûts inutiles, formulée au chapitre 2 du présent rapport, une aquaculture commerciale viable devrait très certainement réussir à se développer, à condition d’accompagner les modifications préconisées de la législation par une refonte de l’organisation administrative des pêches. Ces modifications devraient au moins entraîner la création d’un département responsable de tous les aspects de l’aquaculture ; de préférence, les réformes devraient conduire à la création d’une agence unique responsable de l’aquaculture, dotée d’une personnalité juridique distincte.

Quelle que soit l’organisation administrative choisie, l’administration ou l’agence responsable de l’aquaculture devrait offrir un service à guichet unique et faciliter l’acquisition des droits nécessaires pour exploiter une ferme aquacole. L’exploitant devrait au moins être tenu d’obtenir un permis en vertu de la Loi sur les pêches dès que celle-ci sera promulguée, et dans de nombreux cas, un droit sur l’eau en vertu de la Loi sur l’eau. L’exploitant doit se conformer aux dispositions concernant la pollution de l’eau aux termes de la Loi sur la protection de l’environnement et la lutte contre la pollution et dans certains cas, sera soumis à un examen de l’innocuité de ses activités du point de vue de l’environnement. Pour ne pas imposer de coûts ou de délais inutiles, il y a tout intérêt à ce que l’initiateur du projet soit invité à fournir toutes les informations nécessaires dans une demande unique présentée à l’administration ou à l’organisme responsable de l’aquaculture qui doit alors communiquer la demande aux autres services concernés. Dans l’hypothèse où des modifications ou des renseignements complémentaires s’avèrent nécessaires compte tenu des premières informations fournies, celles-ci doivent être transmises au demandeur par l’intermédiaire du guichet unique de l’aquaculture. Le Département de l’aquaculture devrait également garder trace de la demande et éviter tout délai inutile dû aux délibérations des autres agence de réglementation.


3 Entreprise non établie.

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