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2.3 Champ d’application

2.3.1 Champ d’application en dehors des pêches

ANALYSE COMPARATIVE

La plupart des accords porte exclusivement sur les pêcheries (pêche ou aquaculture). Il existe 10 exceptions [Traité de River Plate; Traité de Torres Strait; Accord Iles Féroé/Royaume-Uni; les sept traités de délimitation concernant l’Amérique centrale et les Caraïbes].

L’objectif préliminaire de chacun de ces 10 traités est d’établir une ou plusieurs frontières maritimes. Les domaines couverts par ces 10 traités, en dehors des aspects de délimitation des frontières maritimes et de pêches, concernent également: a) la navigation; b) la pollution; c) la recherche; d) l’exploitation des ressources minérales communes; e) la protection et la préservation de l’environnement marin; f) les épaves; et g) la protection des coutumes et moyens d’existence des habitants.

COMMENTAIRES

En principe, il n’existe pas de problèmes concernant la pêche entre pays voisins lorsque la gestion de celle-ci fait partie d’un agenda maritime au sens large. Dans la pratique, mis à part les traités de Torres Strait et de River Plate, les problèmes de pêche ont été considérés dans les huit autres traités au niveau général des principes. Toutefois, ce résultat est dû à la volonté politique manifestée dès le départ de trouver des solutions aux problèmes de frontières. Il n’existe pas d’obstacles pour que deux États souhaitant formaliser leur relation maritime par un traité, incluant l’aménagement de stocks partagés, ne le fassent. En effet, une telle approche de gestion conjointe est à encourager.

2.3.2 Références aux «stocks partagés»

ANALYSE COMPARATIVE

La manière dont les accords font allusion soit directement ou indirectement aux stocks partagés est illustrée au Tableau 2. En accord avec la définition du stock partagé adopté dans la Section 1.1 ci-dessus, il est à noter que les allusions aux stocks ou espèces, grands migrateurs, ne sont pas considérées dans ce tableau.

Des allusions directes aux «stocks partagés» sont faites seulement dans trois accords [Accord Australie/Indonésie; Traité sur le saumon du Pacifique; Convention de Mauritanie/Sénégal]. Une formulation similaire à celle de l’Article 63(1) est aussi utilisée uniquement dans deux accords [Accord Australie/Indonésie; Convention africaine de l’Atlantique]. Onze autres font des allusions plus indirectes aux stocks partagés, et le reste n’en fait aucune.

COMMENTAIRES

Le manque d’allusion aux stocks partagés dans quelques cas est attribuable à: a) les textes de ces accords ne faisant pas particulièrement allusion aux stocks partagés dans leur esprit (par exemple Accord Féroé/Royaume-Uni et Traité Colombie/Jamaïque [orienté sur la délimitation], Convention CPANE [orienté sur les stocks chevauchants], Convention FFA [orienté sur les espèces hautement migratrices]); b) une supposition par les rédacteurs que la recherche de coordination pour la gestion conjointe des stocks partagés était le but fondamental de l’accord (par exemple, Convention de la mer Baltique, Système de gestion du hareng, Traité de River Plate [Zone de pêche commune]) ou c) l’accord en question est subsidiaire à un accord portant sur les stocks partagés d’une façon ou d’une autre.

Il est improbable qu’un problème soit créé lorsqu’un accord, qui cherche à assurer la coordination de la gestion de tels stocks, manque de faire allusion aux stocks partagés dès lors que les parties cherchent à accomplir le même but et que les divers mécanismes fournis par l’accord aboutissent à une telle coordination. Cependant, il est toujours possible que des problèmes d’interprétation entre les parties surviennent à un moment durant le cours de vie de l’accord. Dans une telle situation, il peut devenir très utile de recourir à l’esprit d’origine de l’accord, pour aider à l’interprétation.

Tableau 2: Références aux stocks partagés


Accord

Texte utilisé

1

Déclaration commune Argentine/ Royaume-Uni

Aucun

2

Traité de River Plate

Aucun

3

ME Australie/Indonésie

Aucun

4

Accord Australie/Indonésie

Préambule: «Reconnaissant que les États côtiers sont obligés de chercher, soit directement ou à travers des organisations sous-régionales ou régionales appropriées, à s’accorder sur les mesures nécessaires pour coordonner et assurer la conservation et le développement des stocks partagés»

5

Traité de Torres Strait

Préambule: «Ressources halieutiques partagées»

6

Accord Japon/Chine

Préambule: «Ressources halieutiques partagées»

7

Accord Japon/Corée

Aucun

8

Convention CPANE

Aucun

9

Système de gestion du hareng

Aucun

10

Système de gestion du maquereau

Aucun

11

Accord Féroé/Royaume-Uni

Aucun

12

Accord de 1975 Norvège/Russie

Aucun

13

Accord de 1976 Norvège/Russie

Préambule: «une proportion substantielle des ressources vivantes de la Mer norvégienne et de la Mer de Barents représente un unique écosystème utilisé par les pêcheurs des deux pays»

14

Accord de 1978 Norvège/Russie

[Accord non vu.]

15

Accord de Loophole

Préambule: «une partie considérable des ressources marines vivantes de Norvège du Nord et de la Mer de Barents représente un seul stock biologique»

16

Convention de la mer Baltique

Aucun

17

Accord méditerranéen

Aucun

18

Convention de la mer Noire

Aucun

19

Accord du Golfe

Aucun

20

Accord de mise en application Canada/ Etats-Unis

Aucun

21

Convention du flétan

Aucun

22

Traité sur le saumon du Pacifique (accord amendé en 1994)

(a) Préambule: «la gestion des stocks constitue un sujet d’inquiétude commune»
(b) Annexe IV, Chapitre 5: «stock halieutique du coho partagé par Washington et la Colombie britannique du sud» et «stock du coho partagé par les pêcheries des États-Unis et du Canada»

23

Convention FFA

Aucun

24

Accord Nauru

Préambule: «stocks communs de poissons... dans les zones de pêche» (avec des mots similaires utilisés ailleurs dans le traité)

25

Accord Nioué

Aucun

26

Accord Micronésie

Aucun

27

Traité Colombie/Jamaïque

Aucun

28

Accord Colombie/ République dominicaine

Article V: «espèces qui vont plus loin que... [les parties]... zones marines respectives»

29

Traité Colombie/Costa Rica

Article IV: «espèces qui se déplacent au-delà... [chaque partie]... zone juridictionnelle»

30

Traité Colombie/Panama

Article V: «espèces qui se déplacent au-delà... [les parties]... régions marines respectives»

31

Accord Colombie/Equateur

Article 8: «espèces qui migrent de... [les parties’]... zones juridictionnelles respectives»

32

Traité Costa Rica/Panama

Article V: «espèces migratrices»

33

Traité Hollande/Venezuela

Article 10: «ressources vivantes dans les eaux adjacentes des deux parties»

34

Accord Trinité-et-Tobago/Venezuela

Aucun

35

Convention du lac Victoria

Aucun

36

Convention africaine de l’Atlantique

Article 2(d): «Les objectifs de cette Convention seront de permettre aux parties... de développer, et d’harmoniser leurs efforts et capacités dans le but de conserver, exploiter, de valoriser et de tirer profit des ressources de la pêche, considérant en particulier les stocks de poissons qui se trouvent dans les eaux sous la souveraineté ou juridiction de plus d’une partie»

37

Convention sur les droits d’accès de la CSRP

Aucun

38

Convention sur le droit de poursuite de la CSRP

Aucun

39

Convention Sénégal/Mauritanie

Préambule: «Conscients de leur appartenance commune à la même région maritime et du caractère partagé de certains stocks exploités»

2.3.3 Disposition pour les mécanismes consultatifs

ANALYSE COMPARATIVE

Neuf des accords ont comme caractéristique principale l’établissement d’un mécanisme consultatif formel [Déclaration commune Argentine/Royaume-Uni; Convention CPANE; Accord de 1976 Norvège/Russie; Convention de la mer Baltique; Accord sur la Méditerranée; Accord du Golfe; Traité sur le saumon du Pacifique; Convention FFA; Convention du lac Victoria].

Dix-neuf accords prévoient un mécanisme consultatif, mais plus de manière indirecte que directe. La formule typique de l’instrument dans ces cas est a) plusieurs dispositions qui établissent des devoirs pour les parties dont quelques-unes exigent la coopération et d’autres pas; et puis b) un dispositif sur un mécanisme consultatif. Ce mécanisme peut varier d’un pouvoir d’«appel pour les consultations» [Accord Féroé/Royaume-Uni] à un devoir d’établir une commission.

Concernant deux autres accords, les consultations entre les parties se déroulent selon leur désir de se réunir annuellement [Système de gestion du hareng; Système de gestion du maquereau]; il n’existe pas de dispositions dans l’accord lui-même pour de telles réunions. Dans les deux accords [Convention d’accès de la CSRP; Convention sur le Droit de Poursuite de la CSRP], les parties se rencontrent à n’importe quel moment suivant un mécanisme préexistant. Le reste des sept accords ne prévoit pas de mécanisme consultatif pour la pêche.

COMMENTAIRES

La différence entre les accords qui établissent de manière directe une commission ou son équivalent et ceux établissant de manière indirecte un tel mécanisme peut être expliqué comme suit. Le premier type a moins de dispositions visant les parties comme individus mais comprend des dispositions portant sur les parties agissant collectivement à travers une commission. Le dernier type a plusieurs dispositions visant les parties comme individus, y compris portant inter alia sur la coopération; et l’utilisation des dispositions portant sur la commission vise a) à modeler le degré de coopération, ou b) à spécifier certaines dispositions en détail ou c) orienter la coopération dans un domaine spécifique. Au moins dans ce dernier exemple, la différence n’est pas simplement de style. Deux États peuvent souhaiter coopérer en matière de pêche à travers un traité généralement, mais peuvent souhaiter aussi réserver le traitement d’un problème relatif à une région géographique ou à un stock à une commission spécialisée. Dans ce cas, un accord qui établit une telle commission avec cette seule tâche à traiter peut être plus approprié.

Des sept accords qui ne prévoient pas du tout de mécanisme consultatif, six sont des traités de l’Amérique centrale/Caraïbes. Tous ces six incluent des dispositions sur la coopération en matière de pêche et ainsi on peut s’interroger sur le manque de clarté concernant les mécanismes de consultation. Le septième est l’Accord de Loophole. Les différentes parties sont l’Islande, la Norvège et la Russie. Un mécanisme consultatif a pu être omis pour des raisons politiques. Et il se pourrait qu’il ait été jugé inutile dès lors que les parties peuvent se réunir annuellement sur les sujets relatifs au Système de gestion du hareng et à la Convention CPANE.

2.3.4 Espèces couvertes

ANALYSE COMPARATIVE

Il y a trois cas d’accords portant sur une seule espèce [Système de gestion du hareng; Système de gestion du maquereau; Convention du flétan]. La plupart des autres accords couvrent l’ensemble des pêcheries dans la région concernée. Cependant, quelques-uns de ceux-ci mettent l’accent sur certains types de pêche (particulièrement les accords du Pacifique sud qui, expressément ou implicitement, sont orientés sur les espèces hautement migratrices). Exemples d’accords excluant des espèces sont le Traité de River Plate et la Convention CPANE. Le premier exclut expressément les mammifères marins et le dernier exclut «mammifères marins, espèces sédentaires... et, dans la mesure où ils sont négociés dans le cadre d’autres accords internationaux, espèces hautement migratrices et stocks anadromes.»

COMMENTAIRES

Dans le cas où un groupe d’États s’intéresserait à un stock (par exemple les cinq États du Système du hareng comparés aux trois États du Système de gestion du maquereau), ou quand la structure institutionnelle nécessaire est fondamentalement différente d’un stock à un autre, un accord spécifique sur l’espèce pourrait être plus approprié. Dans la plupart des accords, les problèmes d’exclusions sont l’affaire des différentes parties. Cependant, il peut être plus approprié d’exclure déjà des stocks régis par d’autres accords dont les États concernés sont contractants.

2.3.5 Droits d’accès

ANALYSE COMPARATIVE

L’objet principal de plusieurs accords concerne les droits d’accès. Dans certains cas, ceux-ci peuvent être concédés entre les parties, soit réciproquement ou à sens unique [Accord Japon/Chine; Accord Japon/Corée; Accord de 1976 entre Norvège/Russie; Accord de Trinité-et-Tobago/Venezuela]. Dans les autres cas la motivation principale pour l’accord est la coopération entre les parties eu égard aux États se livrant à la pêche en haute mer [Accord Nauru; Accord Nioué; Accord Micronésie; Convention sur les Droits d’Accès de la CSRP; Convention sur le Droit de Poursuite de la CSRP].

COMMENTAIRES

En principe, pour entretenir la coopération dans la recherche, la conservation et la gestion, ou le suivi, le contrôle et la surveillance de stocks partagés, il apparaît pertinent de développer une coopération sur les droits d’accès ou d’utiliser cette coopération comme plate-forme politique pour une coopération future.

2.3.6 Suivi, contrôle et surveillance

ANALYSE COMPARATIVE

Un nombre de six accords traite de la coopération sur le Suivi, le Contrôle et la Surveillance (SCS) sans prévoir aucune coopération dans l’établissement de mesures de conservation et d’aménagement [ME Australie/Indonésie; Accord Canada/Etats-Unis; Accord Nauru; Accord Nioué; Accord Micronésie; Convention sur le Droit de Poursuite de la CSRP].

Mis à part les deux exceptions [ME Australie/Indonésie et Accord de mise en application Canada/Etats-Unis], ces accords sont en rapport avec un traité préexistant. Donc l’Accord Nauru, l’Accord Nioué et l’Accord Micronésie peuvent tous être mis en rapport avec la Convention FFA, et la Convention sur le Droit de Poursuite de la CSRP peut être reliée à la convention qui a établi la CSRP.

COMMENTAIRES

Un accord qui traite spécifiquement de systèmes de SCS peut être bien approprié si la coopération sur la conservation et la gestion a déjà été négociée dans le cadre d’un instrument préalable ou s’il n’y a aucune possibilité d’accord politique sur la coopération dans le domaine de la conservation et de l’aménagement. Par exemple, l’Accord de mise en application entre Canada/Etats-Unis a été appliqué dans le Golfe du Maine où il y a peu de coopération en matière de conservation et d’aménagement entre les deux parties (avant ou depuis la Décision frontalière de 1984). Cependant, dans une atmosphère politique où la coopération est faible en matière de conservation et d’aménagement, la tenue de dispositions pour un accord sur le SCS est peu probable. C’est le cas avec l’Accord de mise en application entre Canada/Etats-Unis et le ME Australie/Indonésie.

2.3.7 Conservation et aménagement

ANALYSE COMPARATIVE

Quatre accords ne prévoient pas de coopération en matière de Suivi, Contrôle et Surveillance (SCS), cependant ils ont des dispositions assez fermes sur la conservation et l’aménagement [Système de gestion du maquereau; Convention de la mer Noire; Traité sur le saumon du Pacifique; Convention du lac Victoria].

COMMENTAIRES

Dans le cas du Système de gestion du maquereau, il pourrait être retenu une certaine coopération pour le SCS dans le cadre de la Convention CPANE. Cependant, cela n’explique pas pourquoi le Système du hareng (où cinq participants sont aussi des parties contractantes de la Convention CPANE) dispose en revanche d’une coopération en matière de contrôle. Dans le cas de la mer Noire et de la Convention du lac Victoria, l’omission de la coopération sur le contrôle est en fait une lacune; dans le cas antérieur l’explication est à rechercher dans les raisons politiques. Le Traité sur le saumon du Pacifique, qui comprend des dispositions fermes et fort détaillées sur la conservation et l’aménagement et l’amélioration des ressources, n’offre pas de justification logique pour combler l’omission de la coopération en matière de contrôle. Considérant la nature des aspects politiques liés au saumon, il se pourrait que la coopération sur le contrôle ait été perçue comme un objectif difficile à atteindre. Cependant, la coopération en matière de police de pêche est actuellement prévue dans l’Accord de mise en application Canada/Etats-Unis, qui en principe s’applique à l’ensemble des pêcheries (et était en vigueur avant que l’Accord de 1999 ne soit négocié).

Dans au moins deux des quatre cas précités, la politique ou l’existence d’un accord alternatif est à la base de l’exclusion d’une coopération sur le contrôle. Dans les deux cas restant, la raison est difficilement explicable. Le système de SCS est un élément clé de l’aménagement des pêches. Toutefois, le recours à la coopération pourrait atténuer le manque d’adoption d’un système de SCS, qui a un certain effet sur le contrôle et l’échange d’information sur les captures (voir Section 2.11 ci-dessus). Cependant, l’omission d’une coopération significative en matière de contrôle dans les quatre accords de coopération cités doit être interprétée comme une faiblesse.


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