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L’impact du VIH/SIDA sur l’agriculture et la sécurité alimentaire


L’évolution de l’épidémie

On peut rendre compte de l’évolution de l’épidémie au moyen de la courbe logistique, qui a une forme (extrêmement schématisée) de “S”. Pendant le premier stade de l’épidémie, la prévalence du HIV est d’abord très faible; elle s’intensifie ensuite pendant le deuxième stade, au cours lequel la contamination par le virus se poursuit à un rythme accéléré dans l’ensemble de la population. Le troisième stade se caractérise par un ralentissement de la progression de l’épidémie et par la stabilisation du nombre de nouvelles infections; à ce stade, une importante proportion de la population à risque a déjà été infectée. Enfin, on doit pouvoir enregistrer une baisse globale du nombre de nouvelles infections et de celui des personnes infectées.

Un des aspects les plus terribles de l’épidémie tient au fait que les effectifs de la population contaminée ne diminuent pas parce que les malades guérissent, mais parce qu’ils meurent, ce qui explique que la courbe qui schématise l’évolution de l’épidémie puisse être suivie quelques années plus tard par une courbe analogue, qui représente l’ensemble des décès dus aux maladies liées au SIDA.

L’évolution de l’épidémie varie selon les régions et les pays; elle peut parfois se stabiliser assez rapidement, mais parfois le plafonnement ne survient qu’après la contamination d’une importante partie de la population. En Afrique australe, par exemple, l’incidence du VIH continue de progresser et l’infection touche dans certains endroits plus de 40 pour cent des femmes enceintes. En Afrique de l’Ouest, l’apparente stabilité de l’épidémie s’est révélée n’être qu’un leurre et les taux de prévalence enregistrent de nouveau une forte croissance (ONUSIDA 2002). L’évolution de l’épidémie peut certes varier, mais il importe que le secteur agricole reconnaisse que les régions et les pays peuvent se trouver à des stades différents de l’épidémie et que les stratégies défensives doivent donc être modulées en conséquence.

Figure 1: Stades de l’épidémie

Source: Barnett, T. (2001)

Communautés rurales: pauvreté, mobilité et vulnérabilité

Selon les estimations, le virus du sida touche actuellement 42 millions de personnes dans le monde, dont 95 pour cent vivent dans les pays en développement (ONUSIDA 2002). En partant de l’hypothèse que chaque cas de VIH/SIDA a des répercussions sur l’existence de quatre autres personnes, on peut affirmer que le nombre d’individus touchés par l’épidémie s’élève au moins à 160 millions (Barnett, Whiteside 2002). Étant donné que plus des deux tiers de la population des 25 pays africains les plus touchés vivent dans les zones rurales et n’ont pratiquement que l’agriculture comme source d’existence, toute stratégie visant à atténuer les effets du VIH/SIDA se doit de tenir compte des moyens d’existence des populations rurales.

Pour faire fonctionner une exploitation, les agriculteurs exercent diverses activités; la production agricole ne constitue donc pas leur seule source de revenus. De fait, les ménages sont de plus en plus tributaires des sources de revenus extra-agricoles - en particulier des revenus en espèces ou des envois de fonds de la main-d’œuvre migrante - qui leur permettent notamment d’acheter des intrants ou de payer les frais de scolarité. C’est ainsi que se créent entre zones rurales et zones urbaines des liens dynamiques tendant à renforcer l’interdépendance entre ces deux pôles et instaurant entre eux un réseau de communication où transitent des flux d’argent et de personnes, mais qui peut véhiculer également toutes les maladies infectieuses et favoriser la transmission du VIH.

VIH/SIDA et mobilité

La population mobile regroupe les individus qui, pour toute une série de raisons, volontaires ou involontaires, quittent un lieu pour un autre, que ce soit pour une durée limitée, une saison ou une installation définitive. Sa composition est variée: chauffeurs de camions, marins, travailleurs des transports, travailleurs agricoles, hommes et femmes d’affaires, commerçants, employés de grandes industries, mineurs, fonctionnaires, agents en uniforme, travailleurs du bâtiment et prostitué(e)s.

Il existe deux types de migration: la première s’accomplit à l’intérieur du pays natal - on englobera dans ce mode de migration les flux entre zones urbaines et zones rurales et les réinstallations - et la seconde implique que le migrant quitte son pays. Si la mobilité n’est pas en elle-même un facteur de risque de contamination, les situations auxquelles elle donne lieu et les comportements que les personnes qui se déplacent peuvent être amenées à adopter peuvent quant à eux accroître la vulnérabilité à la maladie. C’est ainsi, par exemple, que:

  • les personnes mobiles et les migrants peuvent être confrontés à diverses contraintes - marginalisation, discrimination, exploitation, harcèlement - sans pratiquement aucune protection, sociale ou juridique, et sans pouvoir compter sur l’aide de la communauté de la zone d’accueil;

  • la pauvreté et le manque de ressources peuvent contraindre les personnes qui se déplacent à se prostituer - sans protection - pour obtenir des biens, des services et de l’argent;

  • les personnes mobiles ont difficilement accès aux informations sur le VIH/SIDA, aux services de santé et aux moyens de prévention (comme les préservatifs) et aux services de traitement des infections sexuellement transmissibles. Cette carence peut tenir à plusieurs raisons, dont les obstacles culturels et linguistiques, une connaissance insuffisante de la région ou le fait d’être en situation irrégulière;

  • divers facteurs peuvent favoriser une prise de risques qui augmente la vulnérabilité au VIH: solitude, séparation du partenaire habituel, modification du revenu, influence exercée par les personnes qui se trouvent dans la même situation, possibilités de loisirs, libération des contraintes et des normes sociales.

Notons enfin que les personnes mobiles risquent de contaminer ceux qui ne se déplacent pas - conjoints, enfants ou personnes âgées.

Source: PNUD (2001)

La pauvreté et la mobilité jouent un rôle déterminant dans la propagation du VIH/SIDA. Les mouvements migratoires sont en effet essentiellement dus à la pauvreté et à l’absence de sources de revenus dans les zones rurales. Or, les travailleurs migrants qui restent longtemps loin de chez eux sont plus que d’autres susceptibles d’avoir des relations sexuelles occasionnelles non protégées et donc de s’exposer à un risque accru d’infection.

Le secteur agricole exerce une forte influence sur les flux migratoires. De nombreuses exploitations agricoles emploient d’importants effectifs de saisonniers migrants. Les logements mis à la disposition de ces derniers sont généralement impropres à toute vie familiale; souvent surpeuplés, ils n’offrent aucun espace d’intimité mais créent en revanche un contexte favorable à des relations sexuelles occasionnelles ou à la prostitution. Par ailleurs, les petits agriculteurs qui pratiquent la culture commerciale doivent souvent voyager pour leurs affaires et l’achat des intrants. Les projets d’infrastructure favorisent la production et la vente des produits agricoles mais favorisent également une forte mobilité de la main-d’œuvre et suscitent d’importants mouvements migratoires temporaires.

Les groupes moins mobiles qui restent dans les zones rurales doivent quant à eux faire face aux conséquences de l’épidémie avec des ressources qui vont en se raréfiant. Il est en effet bien difficile de s’organiser efficacement pour ceux qui n’ont pas de terres, ou qui utilisent des terres marginales et des systèmes de production fragiles. Par ailleurs, l’augmentation constante du nombre de citadins infectés par le VIH qui retournent dans leur village met à rude épreuve les stratégies de survie et constitue une menace pour la sécurité alimentaire. Les populations rurales ont en outre beaucoup de difficultés à accéder aux informations et aux services de santé nécessaires et donc à apprendre ce qu’il faut faire pour éviter les risques de transmission.

On trouvera dans le tableau 2 (pp. 14-15) une liste des principales conséquences du VIH/SIDA sur la sécurité alimentaire et les moyens d’existence des communautés rurales. Nous retiendrons pour notre étude celles qui nous paraissent particulièrement importantes.

Disparition des générations productives

Les projections démographiques montrent que le VIH/SIDA bouleverse radicalement la structure de la population par âge et par sexe ainsi que sa densité (figure 2). On prévoit, outre une baisse démographique globale, une modification de la composition par sexe et par âge de la population qui se traduit par une augmentation du nombre de personnes âgées et de jeunes. Dans nombre de pays, le SIDA réduit à néant tous les progrès qui ont pu être accomplis au cours des dernières décennies dans le sens d’une réduction du taux de mortalité et d’un allongement de l’espérance de vie. Celle-ci est désormais de 47 ans dans les pays d’Afrique subsaharienne, alors qu’elle aurait dû atteindre 62 ans sans la pandémie. Au Botswana, par exemple, l’espérance de vie à la naissance n’a jamais été aussi basse depuis 1950 (ONUSIDA 2002).

Figure 2: Pyramide des âges au Botswana en 2020 d’après les projections avec et sans épidémie de VIH/SIDA

Source: Bureau de recensement des États- Unis, profil de la population mondiale (2000)

Pénurie de main-d’œuvre

Le VIH/SIDA menace directement la sécurité alimentaire des ménages en touchant les membres les plus productifs. La maladie prive en effet la famille de la capacité de travail du malade mais aussi de ceux qui doivent en prendre soin. Les périodes récurrentes de maladie qui caractérisent le SIDA entraînent une interruption fréquente des activités, qui, à long terme, paralyse la production agricole et met en péril la sécurité alimentaire. La production agricole exige généralement une importante main-d’œuvre, dont les activités sont souvent concentrées sur des périodes précises de l’année. Pour cause de maladie, ou de funérailles, il peut arriver que les semis ne puissent être effectués en temps voulu et qu’une récolte entière soit dès lors compromise.

La production agricole brute est également affectée par les pénuries de maind’œuvre. La FAO estime que dans les 25 pays africains les plus touchés, 7 millions de travailleurs agricoles sont morts du SIDA depuis 1985 et que 16 millions en mourront probablement avant 2020. Les pays africains les plus affectés pourraient, en deux décennies, perdre jusqu’à 26 pour cent de leur main-d’œuvre agricole: lorsque l’on sait la place que l’agriculture occupe encore dans le produit intérieur brut de ces pays, on peut imaginer les répercussions d’une telle perte sur leur économie. (FAO 2001 b).

Tableau 1: Déficit démographique au niveau de la population totale et de la main-d’œuvre agricole imputable au SIDA entre 1985 et 2020


Population totale

Main-d’œuvre agricole

Namibie

-17%

-26%

Botswana

-30%

-23%

Zimbabwe

-23%

-23%

Mozambique

-16%

-20%

Afrique du Sud

-27%

-20%

Kenya

-16%

-17%

Malawi

-17%

-14%

Ouganda

-8%

-14%

Tanzanie

-7%

-13%

Source: FAO (2001b)

Disparition des connaissances et du savoir-faire agricoles

Les systèmes de production agricole font partie intégrante d’un patrimoine de connaissances concernant les cultures et la biodiversité locales qui est indispensable au maintien de l’exploitation. Or, la disparition de toute une génération de personnes productives rend impossible la transmission du savoir-faire et des connaissances agricoles et laisse les jeunes générations mal armées pour faire face à l’épidémie. Qui plus est, il existe dans le domaine agricole une répartition bien précise des compétences entre les sexes; qu’un homme ou qu’une femme meure, et c’est tout le système de production qui en souffre.

L’impact du VIH/SIDA sur les petites exploitations agricoles au Zimbabwe

Une étude portant sur l’impact du VIH/SIDA sur les petites exploitations agricoles de Gweru, au Zimbabwe, a révélé les éléments suivants:

  • le taux de mortalité le plus élevé est enregistré dans le groupe d’âge des 31- 41 ans;

  • chaque mois, approximativement 10 pour cent du temps de travail des agents de vulgarisation agricole est consacré aux funérailles d’un proche;

  • les agriculteurs doivent vendre leur bétail et leurs outils pour pouvoir assurer les dépenses médicales et les frais funéraires;

  • les terres cultivables sont laissées en friche, faute de main-d’œuvre, ou d’intrants comme les animaux de trait;

  • la mauvaise gestion des cultures et du bétail entraîne une perte de revenus;

  • le contrôle insuffisant du bétail entraîne des vols et des morts d’animaux, qui aggravent l’érosion des ressources;

  • les cultures irriguées étant considérées comme plus fiables, des agriculteurs, certains de rentrer dans leurs frais, sont tentés de contracter des prêts pour engager la main-d’œuvre nécessaire; ils ont malheureusement tendance à négliger toutes les activités postérieures aux semis, d’où l’inévitable réduction des rendements et des revenus.

    Source: Ncube, NM. (1999)

Aggravation de l’état nutritionnel

Le VIH/SIDA exerce une influence directe sur la nutrition, tant à l’échelon de l’individu et du ménage qu’à celui de la communauté. L’infection par le VIH débouche rapidement sur la malnutrition lorsqu’elle s’accompagne d’un apport nutritionnel insuffisant. Les personnes infectées par le virus ont en effet des besoins nutritionnels supérieurs à la moyenne et devraient bénéficier, approximativement, d’un apport quotidien supplémentaire de 50 pour cent de protéines et de 10 à 15 pour cent de calories (Academy for Educational Development 2001, Woods 1999, James, Schofield 1990). Cette nécessité comporte de graves conséquences pour les pauvres, menacés par la malnutrition avant même d’être infectés par le virus. La malnutrition peut également précipiter l’apparition du SIDA, entraîner une mort prématurée et accroître le risque de la transmission du VIH de la mère à l’enfant. Les personnes infectées par le virus connaissent de fréquents épisodes de maladie qui hypothèquent lourdement le déroulement des activités agricoles et peuvent même, s’ils se prolongent, menacer directement la production vivrière du ménage et l’état nutritionnel de l’ensemble de ses membres.

Affaiblissement des institutions

L’épidémie de VIH/SIDA a des conséquences désastreuses pour la production agricole et compromet également la fourniture des services assurés par les institutions rurales. Le premier choc à supporter pour les organisations officielles est l’appauvrissement en ressources humaines. Celui-ci s’explique par les absences de plus en plus fréquentes occasionnées par les épisodes récurrents des maladies liées au SIDA. L’absence d’une partie du personnel entraîne une surcharge de travail pour les autres membres, d’où une dégradation de la qualité du service et une réduction de l’aire géographique sur laquelle le personnel mobile - comme les agents de développement agricole - peut intervenir. L’érosion des effectifs a également des effets moins immédiatement perceptibles; si certaines compétences techniques sont interchangeables, il existe un ensemble de savoirs et de pratiques propres à l’organisation qui, en revanche, sont irremplaçables. Enfin, les coûts budgétaires directs occasionnés par cet amenuisement constant des effectifs peuvent entraîner une réduction des montants qui devraient être affectés aux activités de l’organisation. Les institutions informelles sont également touchées, car elles ne peuvent plus guère compter sur la contribution des ménages frappés par le SIDA. Ces derniers ont de moins en moins de temps et de ressources à consacrer à ces réseaux communautaires; leur vulnérabilité en est accrue d’autant, car ces organisations constituent de précieux dispositifs de protection sociale.

Aggravation des inégalités entre hommes et femmes

Les inégalités entre les sexes contribuent fortement à la propagation du VIH. La résolution de ce problème nécessite que l’on prenne en considération le contexte global - social, économique, politique et culturel - dans lequel se créent et se reproduisent ces inégalités.

Chez les jeunes, il est fréquent que les taux d’infection soient entre trois et cinq fois plus élevés chez les femmes que chez les hommes. Ces écarts tiennent en partie à des facteurs biologiques qui accroissent la vulnérabilité des femmes au virus, mais s’expliquent également par des différences d’âge entre les partenaires. Les hommes sont plus âgés, ont plus de pouvoir; pour les femmes, le risque d’être contaminé est d’autant plus grand que les traditions et les contraintes sociales les privent largement des moyens de s’exprimer librement sur leur sexualité, de choisir leur partenaires et d’exiger d’eux d’avoir des rapports protégés.

Les inégalités entre sexes accroissent la vulnérabilité des femmes aux conséquences de l’épidémie de VIH/SIDA. Dans les zones rurales, la charge de travail domestique des femmes tend à augmenter, dans la mesure où c’est à elles qu’incombe généralement le soin des malades. L’accès aux ressources productives - terres, crédits, formation, technologie, etc. - donne très souvent lieu à une discrimination favorable aux hommes. Pour les femmes, l’accès à des ressources rares devient de plus en plus problématique avec la réduction croissante des biens des ménages et l’augmentation du nombre de personnes malades. Il peut en outre arriver qu’une femme qui a perdu son mari ne puisse entrer en possession des ressources du ménage et se retrouve dans une situation économique encore plus grave.

Les agricultrices et le VIH/SIDA

 

  • Au Zimbabwe, l’enquête effectuée en 2000 sur la prévalence a montré que 31,4 pour cent des femmes enceintes vivant dans les zones rurales étaient séropositives. On a enregistré un taux de prévalence de 43,7 pour cent chez les femmes qui ont déclaré vivre dans des fermes.

  • Au Swaziland, une étude de veille épidémiologique a révélé que 25 pour cent des femmes ayant déclaré exercer une activité agricole de subsistance étaient séropositives. Dans les zones rurales, le taux de prévalence chez les femmes enceintes a atteint 32,7 pour cent.

    Source: FAO (2002a)

Schéma d’analyse fondé sur les moyens d’existence

Le VIH/SIDA, l’agriculture, la sécurité alimentaire, la pauvreté et la mobilité des populations rurales entrent en interaction concurrentielle dans un faisceau complexe de relations. Toute stratégie visant à atténuer l’impact du VIH doit se situer dans une perspective globale pour que les interventions prévues aient une véritable portée. On trouvera dans la figure 3 ci-dessous un schéma qui se fonde sur les diverses ressources disponibles et constitue un outil d’analyse pour comprendre les influences réciproques des divers facteurs et leur impact sur les moyens d’existence des populations rurales. Il a également pour but d’aider les diverses parties intéressées à s’engager dans un débat structuré et cohérent. Il indique les facteurs qui ont le plus fort retentissement sur les moyens d’existence, leur importance relative et la manière dont ils se combinent dans l’élaboration des stratégies de survie.

Dans cette perspective, on considère que les ménages disposent de cinq catégories de ressources - respectivement le capital humain, le capital naturel, le capital financier, le capital social et le capital physique. Les ménages jouent avec ces ressources pour mettre au point un ensemble de stratégies visant à accroître leur bien-être et leur permettant de s’adapter au milieu social, économique et politique. Il faut cependant tenir compte de la vulnérabilité des ménages à tous les périls qui peuvent venir compromettre leurs moyens d’existence: sécheresses périodiques, inondations, ravageurs, destruction des cultures, perte du bétail, crises économiques, troubles civils, maladies et décès.

Figure 3: Le schéma d’analyse fondé sur les moyens d’existence

Source: DFID, FAO (2000)

Le VIH/SIDA (soit un des éléments figurant dans la colonne «Sources de vulnérabilité» dans le schéma de la figure 3) représente une menace potentielle considérable pour les ménages agricoles. La maladie ou la mort d’un ou plusieurs membres du ménage peut avoir un impact sur chaque catégorie de ressources et réduire ainsi la capacité du ménage à faire face aux difficultés futures. Si ce genre de situation survient dans un contexte défavorable (en fonction des facteurs retenus dans la colonne «Structures et procédures»), elle peut compromettre les stratégies de subsistance du ménage sur le long terme, fragiliser sa capacité d’adaptation et l’empêcher de d’assurer une sécurité alimentaire durable.

La situation des orphelins du SIDA est extrêmement préoccupante

· Dans de nombreux pays, la transmission du VIH s’opère essentiellement par voie sexuelle et touche le groupe d’âge des 15 à 50 ans, soit les personnes qui, souvent, ont fondé une famille. Ceux qui meurent du SIDA laissent derrière eux un grand nombre d’orphelins.

· Le nombre d’enfants ayant perdu au moins un de leurs parents à cause de l’épidémie de VIH/SIDA était estimé en 2002 à 13,4 millions. Ce chiffre devrait passer à 25 millions d’ici 2010.

· En 2001, 70 pour cent des orphelins étaient répartis dans 12 pays d’Afrique subsaharienne.

· Une étude effectuée en Zambie révèle que 68 pour cent des orphelins vivant dans les campagnes ne vont pas à l’école, contre 48 pour cent pour les autres enfants.

· Les orphelins sont déjà victimes d’une grave insécurité alimentaire dans les régions les plus touchées.

· De nombreux enfants perdent leurs parents avant que ces derniers aient pu leur transmettre les connaissances essentielles en matière d’agriculture, de nutrition ou de santé. Une étude réalisée au Kenya révèle que 70 pour cent seulement des ménages agricoles dirigés par des orphelins ont des connaissances suffisantes en ce qui concerne la production agricole.

Source: FAO (2001b) et ONUSIDA, USAID, UNICEF (2002)

Tableau 2: Les effets du VIH/SIDA sur la sécurité alimentaire et les conséquences pour les ménages et les communautés

Effets du VIH/SIDA sur la sécurité alimentaire

Conséquences

Modifications considérables de la structure démographique

Augmentation du nombre d’orphelins

Augmentation proportionnelle du nombre de personnes âgées

Augmentation du nombre de veuves et des ménages dirigés par des femmes

Baisse du nombre de travailleurs agricoles

Diminution des surfaces cultivées et réduction des activités agricoles - désherbage, élagage, paillage - entraînant une réduction de la diversité des cultures, une baisse des rendements et, à long terme, la stérilisation des sols

Augmentation des surfaces laissées en jachère peu à peu envahies par les broussailles

Appauvrissement des méthodes culturales et recul de la production animale

Diminution de la productivité des femmes accaparées par les soins aux malades

Impossibilité d’effectuer les semis au moment opportun

Maladie chronique ou décès d’un membre du ménage

Augmentation des dépenses de santé

Frais funéraires

Modification de la composition du ménage

Modifications de la structure du ménage (âge et sexe du chef de famille)

Augmentation de la charge supportée par les personnes actives

Migration des jeunes adultes

Augmentation du nombre d’orphelins

Augmentation du nombre des orphelins à prendre en charge

Réduction ou arrêt de la scolarité lorsque ces sont les enfants qui dirigent le ménage

Modification de l’état nutritionnel du ménage

Augmentation de la malnutrition chez les personnes touchées par le SIDA et les autres membres du ménage en raison d’un appauvrissement croissant

Forte baisse des revenus du ménage

Baisse des revenus agricoles et diminution des ventes

Vente des terres

Liquidation des économies et abattage du bétail pour faire face aux dépenses de santé et aux frais funéraires

Baisse de la contribution des femmes au revenu du ménage

Réduction des achats, y compris ceux de denrées alimentaires

Besoins accru de liquidités conduisant parfois à la prostitution

Besoin accru de sources de revenus non agricoles

Diminution des possibilités d’obtenir des crédits et d’en faire usage

Hausse des taux d’insolvabilité d’intérêt et augmentation des cas d’insolvabilité

Diminution des revenus et des biens de la communauté

Réduction des investissements

Diminution des montants consacrés par aux soins de santé, formels ou informels la collectivité

Disparition du patrimoine de connaissances, de savoir-faire et de compétences agricoles d’une génération à l’autre

Réduction de la main-d’œuvre qualifiée et déperdition des connaissances agricoles essentielles chez les ménages dirigés par des orphelins

Disparition des connaissances agricoles propres à chaque sexe

Difficultés accrues d’accès aux ressources naturelles, en particulier les terres

Épuisement des ressources situées dans l’environnement immédiat des ménages (en particulier l’eau et les ressources forestières)

Diminution de la biodiversité et des ressources génétiques

Aggravation des inégalités entre sexes en matière d’accès aux ressources

Augmentation des inégalités entre sexes se traduisant pour l’ensemble des femmes mais en particulier pour les veuves par des difficultés accrues d’accès aux terres, au crédit et au savoir

Appauvrissement du réseau social

Diminution du temps qui peut être consacré aux organisations et associations communautaires ou à tout autre type de réseau de soutien social

Aggravation de l’exclusion sociale

Augmentation des phénomènes d’ostracisme visant les personnes infectées par le VIH entraînant une difficulté accrue à maintenir des groupes sociaux ou des groupes d’intérêt commun

Diminution des biens matériels des ménages

Mauvaise gestion du ménage

Augmentation des ventes des biens, des équipements et des outils des ménages

Dégradation des services publics

Baisse qualitative et quantitative des services publics

Mauvais entretien des systèmes d’irrigation, des terrasses et des routes


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