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Les plantations de peupliers: un cadre pour l’évaluation des risques

W.J.A. Volney, R.I. Alfaro, P. Bothwell, E.H. Hogg, A. Hopkin, G. Laflamme, J.E. Hurley, G. Warren, J. Metsaranta et K.I. Mallett

Tous les auteurs travaillent, ou ont travaillé, chez Ressources naturelles Canada, au Service canadien des forêts: W. Jan A. Volney, Peter Bothwell, E.H. (Ted) Hogg et Kenneth I. Mallett sont au Centre de foresterie du Nord, à Edmonton, Alberta; Rene I. Alfaro au Centre de foresterie du Pacifique, Victoria, Colombie-Britannique; Anthony Hopkin au Centre de foresterie des Grands Lacs, Sault-Sainte-Marie, Ontario; Gaston Laflamme au Centre de foresterie des Laurentides, ville de Québec, Québec; Edward Hurley au Centre de foresterie de l’Atlantique, Fredericton, New Brunswick; et Gary Warren au Centre de foresterie de l’Atlantique, Cornerbrook, Terre-Neuve. Juha Metsaranta, auparavant au Centre de foresterie du Nord, travaille actuellement au Département des ressources renouvelables, à l’Université d’Alberta.

Un outil pour évaluer les risques, adapter la gestion et optimiser les profits des plantations.

Le Canada est le pays du monde le plus riche en peupliers indigènes (Populus spp.). Sur les 80 millions d’hectares de peupliers au monde, 28,3 millions d’hectares (35 pour cent) se trouvent au Canada (FAO, 2004). Il y a peu de temps encore, le développement économique des plantations de cultivars de peupliers dans ce pays paraissait inutile, compte tenu de l’abondance des espèces indigènes et de l’excellente qualité de leur bois, mais la superficie des peupleraies plantées va probablement augmenter pour plusieurs raisons: la distance croissante entre les peuplements naturels et les scieries et marchés; les pressions exercées pour que les forêts indigènes soient protégées; et la possibilité pour le Canada de mettre en œuvre des activités de boisement pour piéger le carbone, afin de s’acquitter de ses engagements au titre du Protocole de Kyoto. A l’heure actuelle, les plantations de peupliers et les plantations d’agrément annoncées ne couvrent que 14 300 ha, correspondant à une production d’environ 43 000 m³ par an (van Oosten, 2004). Etant donné le couvert limité de peupleraies artificielles au Canada, cette culture est encore mal connue dans la pratique, et l’incertitude concernant les risques attachés à ces plantations peut décourager les investisseurs potentiels. C’est pourquoi un groupe de spécialistes s’est réuni pour élaborer un cadre en vue d’identifier et d’atténuer les risques de perturbations et leurs impacts sur les plantations de cultivars à croissance rapide de Populus ou de Salix, entre autres espèces, au Canada. Le cadre se fondait sur les meilleures informations disponibles pour évaluer les pertes que les plantations pourraient subir, à cause des aléas climatiques (principalement la sécheresse), des incendies et des ravageurs (notamment les insectes, les maladies des arbres et les vertébrés). Les effets des multiples facteurs de risque ont ensuite été évalués à l’aide d’une simulation de Monte Carlo, qui suppose de refaire plusieurs fois un modèle en choisissant à chaque fois des valeurs des variables aléatoires tirées de leurs distributions de probabilité. Aucun modèle des interactions entre les perturbations n’a été établi.

Pépinière de clones de peupliers au Québec: le modèle d’évaluation des risques indique qu’avec un matériel végétal approprié, des clones adaptés au site et un aménagement rationnel, la plantation de cultivars de peupliers est envisageable au Canada
J. CARLE

CARACTÉRISTIQUES DU CADRE

Le cadre a été mis au point pour des zones non forestières situées le long de la frontière sud du Canada et pour des zones adjacentes aux prairies de l’ouest du Canada. Les cultivars pris en considération étaient le tremble (Populus tremuloides), le peuplier hybride Populus sp. × sp. et le peuplier baumier (Populus balsamifera), utilisés dans des essais de boisement depuis 1990. Toutes les projections ont été limitées par un horizon temporel maximal de 60 ans, considéré comme l’âge d’exploitabilité limite pour les plantations du Canada.

Le cadre prend en compte les perturbations biologiques et abiotiques qui ont causé une réduction de croissance et une mortalité partielle ou de 100 pour cent des arbres dans des peuplements indigènes. Les influences abiotiques sont les aléas climatiques, dont la fréquence et les effets sont généralement spécifiques à une écozone, et les feux incontrôlés, dont l’occurrence est aussi en corrélation avec une écozone, mais peut être modifiée par les pratiques d’aménagement de la végétation adoptées lors de l’établissement de la plantation. Les facteurs biotiques sont les ravageurs, qui peuvent être des mammifères, des champignons ou des insectes. Alors que les perturbations abiotiques affectent toutes les essences forestières, les ravageurs sont plus sélectifs, même si certains s’attaquent à plusieurs espèces.

Chaque espèce d’arbre réagit différemment à une perturbation donnée, et il faut en tenir compte dans l’évaluation des risques. Les perturbations peuvent être des événements à caractère annuel; cyclique (à récurrence au moins quasi périodique); et chronique (une fois qu’ils se sont produits, ils continuent à affecter la plantation pendant des périodes prolongées). Dans certains cas, l’apparition de maladies provenant d’une culture forestière précédemment établie sur le site peut interdire de planter son essence hôte durant la rotation suivante.

On a tenté d’identifier la distribution temporelle caractéristique de la perturbation et la distribution statistique de son occurrence dans le temps, et de déterminer si ses effets persisteraient et affecteraient la productivité de la plantation pendant plusieurs années.

L’analyse se fondait sur l’hypothèse que les plantations seraient gérées de façon rationnelle. Le changement climatique est un autre facteur qui peut affecter les rendements des plantations, mais il n’en a pas été tenu compte dans les évaluations, car il aurait fallu un processus distinct pour intégrer ce risque. Mais, des comparaisons peuvent être faites en utilisant les paramètres relatifs à des écozones plus sèches ou plus chaudes.


Qualité des données

Les données utilisées dans le modèle sont extraites d’études d’experts ou d’enquêtes, et ne se fondent pas sur des études spécifiques sur un agent ou un facteur quelconque. Le cadre représente donc la synthèse des perceptions des experts intervenus dans son élaboration. Toute entreprise comporte un risque, et un système de classement de la qualité des données pourrait être adopté pour déterminer les risques associés à l’incertitude et/ou à d’éventuelles erreurs de données.


ÉLABORATION DU CADRE


Impacts météorologiques

Un modèle simple a été mis au point pour saisir tous les aspects de la mortalité et des réductions de croissance dues à des aléas climatiques. La sécheresse est prise comme exemple, car elle est le principal type d’événement ayant des effets à l’échelle régionale sur des plantations établies sur des terres non forestières.

Le modèle englobe un grand nombre de combinaisons puisqu’il prend en considération quatre zones climatiques (différenciées selon le risque de sécheresse), trois catégories de tolérance à la sécheresse pour les espèces arborées, deux types d’impacts (réduction de la croissance et mortalité) et trois stades de développement des arbres: plantules, arbres établis et arbres plus anciens.

Premièrement, pour tenir compte de la variabilité géographique des risques et des effets probables des dégâts dus à la sécheresse on a défini quatre grandes zones de végétation (tableau 1) pour les régions du Canada où des boisements sont probables, sur la base de l’indice d’humidité du climat (CMI) de Hogg (1994, 1999). La deuxième étape a consisté à classer les cultivars proposés, en fonction de leur tolérance globale aux dégâts et à la mortalité dus à la sécheresse, déterminée par un jugement d’expert. On entend ici par «tolérance» la capacité qu’a un arbre de survivre à des phénomènes climatiques extrêmes.

La troisième étape visait à estimer les probabilités de sécheresse et d’autres phénomènes climatiques extrêmes, ainsi que leurs effets sur la croissance des arbres, pour chacune des quatre zones de végétation (tableau 2). Les réductions de croissance ont été exprimées, en pourcentage de la croissance normale prévue. On a supposé que les événements extrêmes avaient la même incidence sur la croissance de toutes les espèces arborées dans toutes les zones de végétation, ce qui a conduit à une perte de croissance cumulée de 35 pour cent de la croissance totale, étalée sur les deux années qui ont suivi l’événement (20 pour cent l’année de l’événement, 10 pour cent l’année qui suit et 5 pour cent l’année d’après).

Par exemple, pour les espèces qui croissent dans des forêts boréales, la probabilité annuelle d’une sécheresse conduisant à une réduction de la croissance a été estimée à 8 pour cent. Cette sécheresse causerait une réduction de croissance de 20 pour cent l’année de l’événement, puis des pertes de 10 et 5 pour cent respectivement au cours des deux années suivantes. Pour les arbres qui poussent dans des prairies, la probabilité annuelle d’une réduction de la croissance est de 12 pour cent.

Les taux de mortalité ont été assignés en fonction de la tolérance à la sécheresse du cultivar, les taux de mortalité augmentant de façon inversement proportionnelle à la tolérance à la sécheresse.

TABLEAU 1. Classification préliminaire des écozones et des zones de végétation selon le degré de risque de dégâts dus à la sécheresse dans les plantations

CMI

Ecozone

Zone de végétation

Risque faible (> +15)

Taïga des plaines

Boréale humide

 

Bouclier boréal

Boréale humide

 

Plaines boréales

Boréale humide

 

Cordillère montagnardea

Cordillère humide

Risque moyen (de 0 à +15)

Taïga des plaines

Boréale sèche

 

Bouclier boréal

Boréale sèche

 

Llanuras boreales

Boréale sèche

 

Cordilleraa

Cordillère sèche

Risque élevé (de -15 à 0)

Prairies

Forêt-parc

 

Cordillère montagnardea

Haute montagne

Riesgo muy alto (<-15)

Prairies

Prairie

 

Cordillère montagnardea

Basse montagne

a Difficile à définir en termes d’écorégions, en raison du relief montagneux; le risque global peut être considéré comme équivalant à celui de la zone «boréale sèche».


TABLEAU 2. Probabilités annuelles et effets estimés de phénomènes climatiques extrêmes entraînant des réductions de croissance et la mortalité (pour les plantations de plus de 3 ans)

Zone

Probabilité d’événements graves
(%)

Probabilité annuelle d’événements extrêmes entraînant des réductions de croissance
(%)

Pourcentage de mortalité par catégorie de tolérance à la sécheresse de l’espèce a

Elevé

Moyen

Faible

Forêts humides

1

4

8

10

12

Forêts boréales sèches/cordillère

2

8

8

12

15

Forêt-parc/montagne

5

12

10

15

20

Prairies/semi-aride

10

20

20

30

40

a Les valeurs indiquées correspondent au taux de mortalité total estimé, causé par l’événement extrême, mais la mortalité peut être retardée et ne survenir que quelques années après l’événement.


IMPACT DU FEU

Pour calculer la durée des cycles des feux, on divise la superficie totale pouvant être brûlée (TBA) par la superficie annuelle moyenne brûlée (AAB). L’inverse de cette fonction donne le pourcentage de la superficie annuelle brûlée (PAAB), qui est censé représenter la probabilité d’incendie dans les plantations. A l’échelon national, et en prenant les chiffres concernant la superficie brûlée sur une période prolongée, le PAAB peut être considéré comme une estimation grossière de la probabilité qu’un point choisi au hasard soit brûlé au cours d’une année donnée. Les probabilités dérivées sont généralement exactes à très grande échelle, mais elles font abstraction de nombreux facteurs qui ont une incidence notable à plus petite échelle, dont les conditions météorologiques, le combustible, la topographie et la cause du feu (incendies d’origine anthropique ou allumés par la foudre). Etant donné que la superficie brûlée varie considérablement d’une année sur l’autre, le nombre d’années pour lesquelles on dispose de données, la qualité des données et la période spécifique pour laquelle des données sont collectées peuvent avoir un impact notable sur l’estimation de la probabilité que survienne un incendie.

Les valeurs retenues pour le PAAB surestiment probablement le risque de feu auquel les plantations sont exposées, d’une part parce que beaucoup de plantations seront établies sur des terres non forestières, où le feu a moins de chances de se propager, et d’autre part parce que les plans d’aménagement des plantations incluent généralement une surveillance et des interventions en cas d’urgence plus efficaces que dans une forêt naturelle.

Dans le cadre de l’évaluation des risques, on considère que les feux causent la mortalité de 100 pour cent des arbres dans toutes les écozones et dans toutes les plantations de peupliers.

Le PAAB estimé varie entre 0,001 pour cent dans les plaines à forêts mixtes (et les prairies d’Alberta) et 1,499 pour cent dans le bouclier boréal de la Saskatchewan. La faible valeur du PAAB dans les prairies d’Alberta est lié à l’incertitude des données utilisées pour produire ces estimations. Dans le passé, aucun feu de forêt n’a été signalé dans cette zone.


Impact des ravageurs

Les risques liés aux ravageurs ont été dérivés du comportement passé des ravageurs dans des peuplements naturels, même si les plantations constituées de clones de peupliers hybrides sont plus vulnérables aux insectes et aux maladies que les espèces non améliorées. En s’inspirant des documents existants, les experts ont mis en tableaux des informations sur les ravageurs qu’ils ont identifiés comme pouvant réduire fortement les rendements dans des plantations d’espèces à croissance rapide (tableau 3). Une base de données détaillée en cours d’élaboration pourra bientôt être consultée pour obtenir des détails sur un agent spécifique affectant des peuplements d’un type donné dans une écozone donnée.

L’estimation des effets des agents biotiques est très complexe vu la variation du comportement tout au long de la vie des peuplements, de la variation selon les écozones et de la variation du taux de risque en fonction du moment. Pour chaque ravageur, on a tenté d’obtenir des informations sur l’épidémiologie de l’agent concerné et de prendre en compte les variations selon les écozones. La distribution temporelle des infestations de ravageurs modélisée avec les probabilités d’occurrence annuelles a le plus souvent été considérée comme uniforme. Leurs effets – réduction de croissance ou mortalité – ont été étalés sur diverses périodes, en fonction de la nature du dommage et du cycle biologique de l’agent, comme cela a été fait pour les impacts de la sécheresse. L’impact maximal a été indiqué, en pourcentage de mortalité des arbres sur pied, au début de l’année étudiée.

La chrysomèle du liard (Chrysomela scripta) attaque parfois les peupliers, de sorte qu’elle a été modélisée avec une probabilité annuelle d’occurrence (tableau 3). Ce ravageur n’attaque que les peuplements de moins de 15 ans; la mortalité survient l’année qui suit l’infestation et l’année d’après, à raison de 20 pour cent pour chacune de ces deux années, ce qui donne une mortalité totale de 40 pour cent pour un événement. La probabilité que survienne une infestation de ce ravageur est de 1 pour cent.

Pour les agents qui ont une évolution cyclique, on a procédé de la même manière, sauf que le moment où le dommage survient et son évolution ont été mis en relation avec les conditions courantes d’évolution d’une infestation dans l’écozone. Les paramètres utilisés dans ce cadre ont été la durée de l’infestation quand les arbres sont à risque, la période entre l’événement et la réduction de la densité des peuplements quand les arbres ne sont pas à risque, le début du cycle courant et la probabilité qu’un peuplement soit infesté une fois que le cycle d’infestation commence. La caractéristique temporelle du dommage – qu’il s’agisse d’une réduction de la croissance ou de mortalité – a été reliée au moment approprié de la période d’infestation et utilisée pour calculer les effets spécifiques à la période. Par exemple, la livrée des forêts (Malacosoma disstria) est un insecte nuisible cyclique qui provoque des cas de mortalité et une réduction de croissance dans les peuplements de peupliers trembles dans les écozones de prairies, de plaines boréales et du bouclier boréal du Canada. Cet insecte infeste des peuplements âgés de 20 ans et plus. La mortalité survient de 1 à 13 ans après le début de l’infestation et se monte à 20 pour cent du volume sur pied initial (10 pour cent pendant deux années de suite). Les arbres qui survivent à l’infestation ont une croissance réduite pendant six ans, avec un impact maximal de 90 pour cent de la croissance annuelle prévue.

Les agents connus pour causer des perturbations chroniques dans les plantations ont été décrits par la probabilité d’infestation et le mode d’évolution du dommage. Par exemple, la saperde du peuplier (Saperda calcarata) est une cause de mortalité dans les peuplements de 15 ans révolus, et la mortalité survient deux ans après l’apparition de ce ravageur dans le peuplement. La mortalité est de 0,5 pour cent dans les peuplements infestés et elle dure toute la vie du peuplement. Après l’âge de 15 ans, la probabilité annuelle d’infestation est de 0,1 pour cent pendant toute la durée de vie du peuplement.

Puisque plusieurs agents attaquent un peuplement au cours de son existence, on s’est efforcé de modéliser les multiples impacts; de ce fait, seuls les volumes moyens des performances des peuplements peuvent être comparés dans les différents scénarios des perturbations.

Note sur les ravageurs étrangers. Le cadre tient compte de plusieurs ravageurs introduits qui constituent déjà une menace pour les plantations, mais il ne prend pas en considération les invasions potentielles de parasites qui ne sont pas encore établis au Canada, sauf dans un cas, le Platypus mutatus, qui fait depuis quelque temps des dégâts importants dans les peupleraies cultivées européennes. Il faudrait approfondir les recherches, et examiner notamment les listes d’interception dans les ports.

TABLEAU 3. Agents de risques affectant les peupliers et leurs hybrides

Agent de risque

Gamme de plantes hôtes

Aire de répartition de l’agent

Impact

Caractéristique temporelle

Probabilité d’impact
(%)

Impact maximal (perte de croissance ou mortalité)
(%)

Maladie

Chancre dû à Cytospora

Populus spp.

Toutes

Mortalité

Chronique

60,00

100

Maladie des feuilles due à Marsonnina

Populus spp.

Bouclier boréal

Perte de croissance

Annuelle

10,00

40

Rouille due à Melampsora

Populus spp.

Toutes

Perte de croissance

Annuelle

10,00

40

Maladie des feuilles et chancre dus à Mycosphaerella/Septoria

Peupliers exotiques et hybrides

Toutes

Mortalité

Annuelle

7,00

85

Brûlures et taches de la feuille dues à Venturia/Pollacia

Populus spp.

Toutes

Perte de croissance

Mortalité

Annuelle

10,00

5,00

50

85

Insecte nuisible

Choristoneura conflictana

Populus tremuloides

Plaines boréales

Pertes de croissance

Cyclique

40,00

60

Chrysomela scripta

Populus spp.

Toutes

Mortalité

Annuelle

1,00

40

Cryptorrhynchus lapathia

Populus spp.

Toutes

Mortalité

Annuelle

0,10

45

Malacosoma disstria

Populus tremuloides

Prairies, plaines boréales, bouclier boréal

Perte de croissance

Mortalité

Cyclique

80,00

80,00

90

10

Platypus mutatusb

Populus spp.

Maritime du Pacifique, maritime de l’Atlantique, plaines de forêts mixtes

Mortalité

Chronique

0,01

40

Saperda calcarata

Populus spp.

Toutes

Mortalité

Chronique

0,10

20

a Introduit d’Europe, établi.

b Ravageur potentiel des peupliers et des saules, pas encore établi en Amérique du Nord.


RÉCAPITULATION

Les scénarios théoriques ci-après sont présentés pour illustrer la nature des résultats dérivés du modèle. Dans les deux scénarios, les peuplements détruits ont été replantés immédiatement.


Scénario 1: peuplier hybride dans l’écozone de prairies, avec un clone ayant une faible tolérance à la sécheresse

L’exemple (figure 1) a été dérivé du modèle au moyen de 256 simulations de Monte Carlo, sur la base des données ci-après:

La croissance prévue continue d’augmenter pendant la période couverte par le modèle, mais les volumes moyens simulés plafonnent au bout d’environ 30 ans, car les augmentations de rendement prévues ne peuvent pas être atteintes à cause des effets combinés des diverses perturbations. Jusqu’à l’âge de 5 ans, la croissance moyenne simulée est à peu près la même que le rendement prévu, mais à l’âge de 10 ans, elle s’en est nettement écartée. A l’âge de 15 ans, même les 16 pour cent de peuplements les plus productifs (ceux dont l’écart type est supérieur à la moyenne) commencent à s’écarter nettement de la courbe de rendement prévue. A l’âge de 30 ans, le rendement moyen simulé est inférieur de 37 pour cent au rendement prévu.

Il ressort de ces résultats que la plupart des plantations devraient être exploitées entre 20 et 35 ans pour maximiser les rendements. La croissance culmine à l’âge de 21 ans, avec un rendement de 320 m³.

1
Croissance d’une plantation constituée d’un clone de peuplier hybride ayant une faible tolérance à la sécheresse dans l’écozone de prairies du Canada (région exposée à la sécheresse), obtenue de 256 simulations de Monte Carlo des agents de risque


Scénario 2: Peuplier hybride dans l’écozone de prairies, avec un clone très tolérant à la sécheresse

Ici, les agents et les probabilités de risque sont les mêmes que dans le premier, mais le clone planté a une tolérance élevée à la sécheresse, dont les probabilités et effets sont les suivants:

2
Croissance moyenne escomptée des clones de peupliers hybrides dont la tolérance à la sécheresse est faible ou élevée, dans l’écozone de prairies

CONCLUSIONS

En résumé, le modèle indique que la probabilité d’événements climatiques extrêmes dans des plantations de peupliers au Canada oscille entre 4 pour cent dans les forêts humides et 20 pour cent dans les prairies semi-arides. La mortalité qui en résulte peut aller de 16 pour cent dans les forêts humides à 80 pour cent dans les prairies. Le risque d’un feu «de régénération» (entraînant la mortalité de 100 pour cent des arbres) varie dans une fourchette allant de 0,01 pour cent à 1,499 pour cent. Les ravageurs peuvent entraîner une réduction de croissance allant jusqu’à 80 pour cent durant les infestations et une mortalité de 100 pour cent dérivant d’infections par des maladies chroniques. Malgré ces impacts extrêmes, l’analyse indique que la plantation de cultivars de peupliers est envisageable, à condition de suivre à la lettre un plan d’aménagement avec des opérations d’entretien et une composante de lutte contre les ravageurs, de choisir des espèces-clones adaptées au site et un matériel végétal approprié.

La plantation d’arbres est un investissement à long terme, dont le succès est subordonné à une stratégie d’établissement permettant d’éliminer ou de minimiser les risques, en les prévoyant, en les prévenant et en s’y préparant. Bon nombre de ces risques peuvent être atténués en incorporant les composantes suivantes:

Les scénarios dérivés de simulations de Monte Carlo indiquent que le modèle peut être utilisé pour évaluer les économies que l’on peut espérer réaliser grâce aux différentes interventions d’aménagement et aux plans d’exploitation. Des informations plus précises sur les courbes de rendement amélioreraient encore le modèle. Par exemple, il conviendrait de déterminer le moment auquel les accroissements marginaux de la croissance tombent en dessous du taux d’actualisation pour optimiser les calendriers d’exploitation. La rentabilité des investissements dans le domaine de la lutte contre les ravageurs ou de la sélection génétique pourrait être évaluée de façon plus objective. D’autres données, comme la lutte contre les adventices, la protection du site et les intrants sylvicoles, pourraient être intégrées dans les scénarios pour étudier leurs effets sur le rendement, le piégeage du carbone et, enfin, la viabilité de ces projets. La simulation actuelle indique que, même en sélectionnant le meilleur peuplier hybride aujourd’hui disponible pour les prairies, les rendements restent inférieurs de 23 pour cent au niveau qu’ils pourraient atteindre quand ils sont à leur maximum, à l’âge de 30 ans.

Les défaillances à corriger dans le modèle sont les incertitudes des données utilisées pour estimer la probabilité d’occurrence de perturbations, ainsi que les incertitudes relatives à la sensibilité du modèle et à ses performances, eu égard à plusieurs hypothèses. Beaucoup de variables concernant les ravageurs ont été dérivées des données ou de l’expérience concernant les conditions dans les forêts naturelles. Un programme de recherche sur les plantations est nécessaire pour bien comprendre la situation et acquérir les informations requises pour prendre des décisions plus avisées concernant l’aménagement des plantations. Le modèle, conçu à l’origine pour toutes les espèces d’arbres plantées au Canada depuis 1990, peut être utilisé dans tous les cas où le régime de perturbations d’une région peut faire l’objet d’une évaluation quantitative. Les besoins en données peuvent paraître énorme, mais des professionnels qualifiés peuvent faire des hypothèses sur l’épidémiologie et les impacts des ravageurs ou sur les probabilités et les impacts de la sécheresse et du feu. Les choix de gestion dépendront du degré d’aversion ou de tolérance de l’utilisateur vis-à-vis du risque. Le cadre fournit un outil de décision pour aider les planificateurs à expliciter clairement les raisons pour lesquelles ils choisissent les valeurs des paramètres, de façon que les résultats puissent être évalués de manière objective. En outre, et c’est là le plus important, le cadre codifie les éléments qui sous-tendent le développement des plantations et permet de classer les options offertes. C’est toujours mieux qu’un simple lancer de dés!

Bibliographie

FAO. 2004. Synthèse des rapports d’activité nationaux – Activités liées à la culture et à l’utilisation du peuplier et du saule, de 2000 à 2003. Vingt-deuxième session de la Commission internationale du peuplier, Santiago, Chili, 29 novembre–2 décembre 2004. Document de travail IPC/3. Rome.

Hogg, E.H. 1994. Climate and the southern limit of the western Canadian boreal forest. Canadian Journal of Forest Research, 24: 1835-1845.

Hogg, E.H. 1999. Simulation of interannual responses of trembling aspen stands to climatic variation and insect defoliation in western Canada. Ecological Modelling, 114: 175-193.

Van Oosten, C. 2004. Activities related to poplar and willow cultivation and utilization in Canada. Report to the 22nd session of the International Poplar Commission, Santiago, Chile. Edmonton, Alberta, Canada, Poplar Council of Canada. Disponible sur: www.fao.org/forestry/site/25654/en

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