Previous PageTable Of ContentsNext Page

Les enjeux de la définition, de la mise en œuvre et du renouvellement des politiques forestières

N. Byron

Neil Byron est l’un des cinq commissaires indépendants qui conseillent le Gouvernement australien en matière de réforme des politiques économiques, sociales et environnementales.

En renouvelant les politiques forestières, il est essentiel de se demander: «Comment servir au mieux les intérêts à long terme de l’ensemble de la société et non pas seulement ceux d’une industrie particulière ou d’un groupe sectoriel?»

Le présent article a été adapté d’un discours liminaire prononcé lors de la Consultation d’experts sur l’établissement d’un réseau régional des politiques forestières pour l’Asie et le Pacifique, tenue par la Commission des forêts pour l’Asie et le Pacifique de la FAO à Manille, Philippines, les 2 et 3 mars 2006.

On ne formule pas les politiques forestières à partir d’une feuille blanche. Presque tous les pays ont un énoncé officiel écrit en matière de politique forestière, même ceux qui n’ont pas de politique de fait. Nombre de domaines importants font partie de cette politique: la législation et les règlements, les structures du gouvernement, les instituts de recherche et les centres de formation, les organisations industrielles et les associations professionnelles. La première question à se poser est: «Qui gèrera les forêts, et dans quel but?» Ce «qui» pourrait consister en organismes gouvernementaux, sociétés privées, groupes communautaires, populations autochtones ou particuliers ou bien, dans la plupart des cas, en un mélange de ces diverses réalités. Dans de nombreux pays le «but» a été, par tradition, essentiellement ou uniquement la production industrielle de bois. Cependant, les services écologiques (notamment la conservation de la biodiversité, la gestion des bassins versants et les loisirs), qui ont occupé depuis des siècles une place prédominante au niveau local dans certains pays, acquièrent de nos jours une portée de plus en plus ample et générale, notamment dans les pays mieux nantis. On reconnaît de manière croissante l’importance du développement rural et de la réduction de la pauvreté dans les pays plus déshérités, avec la prise de conscience généralisée que les «produits forestiers de cueillette» peuvent avoir une immense valeur pour des centaines de millions de personnes (Byron et Arnold, 1999).

Quelle que soit la politique forestière officielle en vigueur, on peut se demander:

S’agit-il d’une politique d’approvisionnement en bois – un arrangement entre le service forestier national et les industries du bois? Ou bien est-ce une politique régissant la manière dont les forêts seront gérées, par et pour qui, en vue de fournir le meilleur ensemble possible d’avantages sociaux, environnementaux et économiques dans cette juridiction? Et cette politique reconnaît-elle que même des personnes bien informées et bien intentionnées auront, à tout moment et en tout lieu, des priorités et des préférences différentes, et que ces priorités évolueront selon le moment et le lieu?

Pour servir au mieux les intérêts de leur électorat, les responsables des politiques doivent satisfaire ceux qui comptent le plus

FAO/FO-0100


COMMENT LES POLITIQUES FORESTIÈRES SONT-ELLES CONÇUES ET RÉVISÉES?

Les décisions relatives aux politiques sont prises par les gouvernements suivant leur perception de ce qui peut servir au mieux les intérêts de leur électorat. L’électorat se compose d’au moins deux éléments:

Une des caractéristiques des politiques efficaces est l’engagement de tout le gouvernement. C’est ainsi qu’une étude sur la politique de l’eau en Australie a montré que, outre les irrigateurs et les ingénieurs, interviennent un grand nombre de parties prenantes fortement intéressées; de même, les politiques et procédures du pays relatives à la conservation du patrimoine historique se sont heurtées à des obstacles tels que la sécurité des bâtiments, le rendement énergétique, l’accès aux personnes handicapées, ainsi que les droits des propriétaires. La politique en matière de chemins de fer, ignorant les intérêts et les actions des sociétés de transport routier, aérien et maritime, s’est révélée inutile et inefficace, et allant souvent à l’encontre du but recherché. Certaines politiques forestières officielles nationales paraissent présenter ces mêmes défauts. Si une politique forestière nationale se veut efficace, elle ne doit pas être simplement le fruit de décisions du département ou du ministère responsable des forêts, mais elle doit bénéficier de l’implication de tout le gouvernement et de l’appui de toute la société.


DÉCLENCHEURS DE CHANGEMENTS DE POLITIQUE

Le monde est en évolution permanente, du point de vue économique, social, démographique, voire climatique. Toutefois, par définition, les politiques sont établies pour un certain nombre d’années, parfois quelques décennies, jusqu’à ce qu’un facteur déclenche une importante réévaluation. Les déclencheurs potentiels peuvent être groupés en trois catégories: les erreurs de mise en œuvre, les changements dans les priorités sociales et les nouvelles occasions.


Erreurs de mise en œuvre

Il devient, à la longue, impossible d’ignorer les erreurs de mise en œuvre: la réalité l’emporte sur la rhétorique. L’auteur a observé cela personnellement lorsque la Commission de planification du Bangladesh a découvert, grâce à l’imagerie satellitaire, que 90 pour cent des forêts de plaine du pays étaient dépourvues d’arbres. Peut-être la politique nationale et les programmes de financement ont-ils naïvement supposé qu’il y avait des arbres à gérer et à protéger, et que la «forêt nationale» ne consistait pas simplement en espaces dénudés ou en terres agricoles, théoriquement administrés par le Département des forêts. De nombreux énoncés de politique forestière sont tellement fantaisistes qu’ils pourraient gagner des prix de science-fiction: conjectures concernant les taux de croissance; absence supposée d’empiètement; hypothèses selon lesquelles les grumes ne sont extraites qu’après délivrance de permis et paiement des droits appropriés; assertions selon lesquelles, dans un pays, après que l’établissement de plantations forestières, répété sur 10 ans sur un nombre donné d’hectares, s’est soldé chaque année par un échec, on se trouve en présence de 10 fois le nombre d’hectares plantés – alors qu’en fait il n’y a pas encore eu de plantations.

Deux autres faits observés personnellement ont conduit à évaluer le bien-fondé et l’efficacité des institutions et cadres stratégiques forestiers conventionnels:

Ces anecdotes soulèvent une question: était-il approprié ou possible de transplanter dans des pays n’ayant accédé que récemment à l’indépendance le modèle occidental, où la gestion de grandes superficies de forêt publique d’une valeur élevée est confiée à un personnel composé de fonctionnaires hautement qualifiés et formés? Ce modèle, qui a donné de bons résultats au Royaume-Uni, en Amérique du Nord, en Australie et en Europe de l’Ouest, par exemple, est-il réellement applicable en Indonésie, en Afrique australe, en Inde, au Bangladesh ou aux îles Salomon? Les arrangements institutionnels établis pendant l’époque coloniale sont-ils compatibles avec la réalité de ces pays? Tout comme pour le pétrole, l’or et les diamants, l’abondance des ressources forestières peut déclencher une ruée désespérée vers l’argent, si bien que les gardiens du «trésor» doivent être bien financés, bien rétribués et bien surveillés. Comment un organisme forestier peut-il exercer un contrôle efficace sur la gestion de forêts importantes mais éloignées s’il est faible, mal financé et ne dispose que d’un personnel peu formé et mal rétribué? Si les soutiens public et politique (de même que les ressources financières et le personnel) nécessaires pour mettre en œuvre correctement une politique font défaut, peut-être faudrait-il recourir à une politique forestière différente et plus réaliste. Une politique simple mais adéquate, qui soit robuste et applicable, ne conviendrait-elle pas mieux qu’une politique élégante, complexe et recherchée et des institutions impossibles à mettre en place sur le terrain?


Changement dans les priorités sociales

Les priorités changent lorsque les valeurs de la majorité des gens se sont modifiées ou lorsque ceux ayant certaines valeurs ont pu s’exprimer de façon plus forte et convaincante. Les deux domaines où les priorités des gens ont influencé sensiblement les changements de politique forestière sont l’environnement et la pauvreté.

Voici quelques exemples de préoccupations relatives à l’environnement qui ont provoqué d’importants changements de politique:

Le refus de reconnaître l’extrême pauvreté des personnes vivant dans les forêts ou aux alentours est l’autre déclencheur social courant. Le nombre de personnes tributaires de la forêt peut être estimé à près de 500 millions, mais beaucoup d’entre elles préféreraient probablement ne pas l’être (Byron et Arnold, 1999). La dépendance vis-à-vis de produits forestiers non ligneux (PFNL) dans les pays en développement a souvent été décrite par les anthropologues comme un moyen d’existence du dernier recours. Une personne qui ne possède ni champ ni buffle ni animaux domestiques, qui n’est ni formée ni instruite et qui n’a aucun autre moyen de gagner un salaire de subsistance se rend dans la forêt pour en tirer tout ce qu’elle peut obtenir. Les responsables des politiques devront donc soit trouver une manière de rendre plus rentables les moyens d’existence axés sur la forêt (en visant une utilisation durable), soit aider les personnes victimes d’une telle situation à trouver des portes de sortie vers d’autres secteurs ou d’autres lieux. C’est ce que Wunder (2005) appelle «la conservation par la distraction»: si l’on offre aux gens d’autres endroits où aller, loin de la forêt, les impacts subis par cette dernière se réduiront.


Nouvelles occasions

De nouvelles occasions de réforme des politiques se présentent parfois, en particulier lorsque sont fournis de nouveaux soutiens extérieurs importants, comme la rétribution des services écologiques (conservation de la biodiversité, gestion des bassins versants, piégeage du carbone, par exemple), ou des programmes d’aide de donateurs en faveur de la récolte de bois de feu, de la réduction de la pauvreté ou des victimes du SIDA/VIH (étudiés ci-dessous).


Déclencheur immédiat ou cause profonde?

En examinant des exemples tels que ceux cités plus haut, il conviendrait de faire la distinction entre les causes divulguées ou immédiates d’un changement de politique et les causes profondes qui ne sont souvent pas analysées. Un événement soudain peut produire une étincelle – même un événement faux ou négligeable –, alors que sont présentes de grandes quantités de combustible sec prêtes à s’enflammer. Parfois, diverses organisations souhaitent un changement de politique forestière (ou des institutions forestières) pour des raisons très différentes. L’abolition du service forestier de Nouvelle-Zélande, par exemple, était imputable à une coalition improbable d’intérêts entre, à un extrême, les conservateurs fiscaux du Trésor, inquiets des déséquilibres du budget national et, à l’autre extrémité politique, les organisations non gouvernementales (ONG) écologistes, préoccupées par l’exploitation des forêts naturelles. De même, malgré le manque d’indices prouvant que l’exploitation était responsable des glissements de terrain en Thaïlande ou aux Philippines, cela a constitué une raison ou un prétexte pratique pour que les hommes politiques appliquent des mesures strictes déjà en cours d’examen pour d’autres objectifs.

Un exemple de préoccupation écologique publique qui a déclenché un profond changement de politique: la protection de l’habitat de la chouette tachetée dans le nord-ouest des Etats-Unis
LOS ALAMOS NATIONAL LABORATORY, USA/D. KELLER

Déclencheur immédiat ou cause profonde? Bien qu’il n’y ait guère d’indice prouvant que l’exploitation forestière provoque des glissements de terrain, ces derniers ont pu servir de prétexte pour l’application de mesures strictes déjà envisagées pour d’autres objectifs

FAO/FO-0253/T. HOFER

L’extrême pauvreté des populations vivant dans la forêt ou aux alentours est un déclencheur social fréquent du changement de politique, qui vise à assurer des moyens d’existence plus satisfaisants ou différents
FAO/FO-0182/M.L. WILKIE


QU’ADVIENT-IL ALORS?

Le présent article traitant de la formulation et de la réforme des politiques publiques, il est nécessaire de comprendre comment celles-ci sont appliquées par l’intermédiaire des organisations publiques (comme le Service forestier, qui a pour fonction de mettre en œuvre les politiques et programmes forestiers). Chaque organisation a une structure, des fonctions et des principes. Une organisation publique reçoit des intrants (ressources) et est tenue de produire des résultats qui sont utiles à la société. Parfois, la société peut décider (au travers du gouvernement qui représente ses intérêts) qu’un changement est nécessaire pour diverses raisons, à savoir:

Le gouvernement peut donc décider de changer:

Par ailleurs, un gouvernement peut décider de changer sa politique forestière pour influencer le secteur privé ou les institutions para-étatiques comme les universités, mais l’accent porte ici sur la réforme directe des organismes publics.

Si les valeurs et principes restent inchangés, la modification de la structure et des fonctions désignées pourrait n’avoir qu’un effet limité. Fisher (1991) a parlé d’«incompatibilité institutionnelle» lorsqu’une organisation n’est pas adaptée aux tâches dont elle est censée s’acquitter. Par ailleurs, lorsque le nouvel État indien de Chhattisgarh a été créé en 2000, son Département des forêts a été mis en place dans l’intention de concevoir une série entièrement nouvelle d’objectifs et de résultats escomptés, accompagnée d’approches novatrices en matière de moyens, de buts et de personnes impliqués. Les structures incitatives ont été soigneusement créées afin de modifier les valeurs et les comportements des fonctionnaires, de façon à favoriser les nouveaux buts sociaux et environnementaux du gouvernement. Dans la mesure où le comportement des fonctionnaires a changé, les attitudes des bénéficiaires des activités du Département se sont également modifiées, car un rapport de confiance réciproque s’est établi.


CONTRIBUTIONS INTERNATIONALES

Au-delà de la perspective nationale, quel est le rôle des intérêts et organisations externes ou internationaux dans la définition, la mise en œuvre et le remaniement des politiques forestières?

Au cours des quelque 40 dernières années, la foresterie internationale et l’assistance au développement connexe ont parcouru un grand nombre d’étapes. L’accent a porté tour à tour sur la foresterie pour l’industrialisation, la création d’emplois et les recettes en devises tirées des exportations, dans les années 60; la foresterie pour le développement communautaire local, la priorité aux personnes, le bois de feu à l’usage des ruraux pauvres et la foresterie pour les besoins humains fondamentaux, dans les années 70 (Westoby, 1987); et la gestion des bassins versants et la foresterie environnementale, dans les années 80 et 90. L’intérêt manifesté pour les incendies a haussé ou baissé en fonction d’El Niño. A d’autres moments, les spécialistes et conseillers internationaux en matière forestière se sont concentrés sur la création de capacités, le renforcement des capacités, les ressources humaines et l’amélioration de la planification, la recherche et l’enseignement forestiers. Tous ces objectifs sont importants, et une attention variable leur a été accordée à des moments divers dans la plupart des pays en développement.

Peters, Gentry et Mendelssohn (1989) ont fait une percée en soutenant que, si l’on évaluait tous les PFNL et les services écologiques, on constaterait qu’il est plus profitable de conserver la forêt ombrophile amazonienne que de l’exploiter; et que les utilisations non industrielles compatibles avec la conservation de la forêt avantageaient directement les populations locales. Cela signifiait que si l’on pouvoir concevoir des moyens de tirer parti de tous les services environnementaux mondiaux non tarifés, comme la biodiversité et le piégeage du carbone, les objectifs sociaux et environnementaux seraient réalisés simultanément. Cette idée a mené à un investissement de milliards de dollars, au cours des 15 dernières années, dans des projets de conservation et de développement intégrés. On estime désormais que seul un nombre limité de projets a satisfait les attentes. La plupart ont procuré quelques avantages socioéconomiques, mais rares ont été ceux qui ont renforcé la conservation des forêts. Fondamentalement, le concept de base présentait une faille, mais il a eu tout de même un impact profond car il touchait un très grand nombre de personnes qui souhaitaient qu’il fût vrai.

Dans l’aide au développement forestier, la question ne réside pas dans le fait que les modes vont et viennent, mais que les donateurs (et souvent les pays bénéficiaires) paraissent incapables de se concentrer sur plus d’une dimension à la fois, lorsqu’en fait les problèmes sont complexes et pluridimensionnels. Le point de mire reflète les préoccupations et perceptions dominantes des donateurs. Par exemple, lorsque certains pays industrialisés ont connu une crise énergétique (pénurie de pétrole) en 1973-1974, les pays en développement ont bénéficié, dès 1975, de programmes énergétiques (plantations énergétiques et foyers à bois améliorés). Lorsque les pays développés ont mis l’accent sur la conservation de la biodiversité, les programmes d’aide ont fait de même. Après les échecs spectaculaires du gouvernement d’entreprise dans certains pays développés (comme le scandale Enron aux Etats-Unis), on demande maintenant aux pays en développement d’améliorer leur gouvernance et leur transparence, y compris en matière forestière.

Il faut normalement du temps pour que les changements exercent un effet, et la séquence des réformes joue un rôle important. Il est souvent affirmé que les progrès scientifiques et les réformes des politiques mettent plus de temps à se réaliser dans le secteur forestier que dans la plupart des autres secteurs à cause de la lenteur de croissance des arbres. Pourtant, les forestiers internationaux parviennent souvent à leurs conclusions deux ans à peine après qu’une initiative a échoué ou réussi, et agissent en conséquence. Par ailleurs, s’il est vrai que les arbres poussent lentement, le déboisement peut être très rapide. L’inaptitude d’une politique à s’attaquer à ce problème pressant peut devenir apparente au bout de quelques années seulement, tandis qu’une réforme réussie de la politique forestière peut mettre des décennies à prouver sa validité.

Depuis la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement (CNUED), les décideurs forestiers se sont livrés à des consultations, discussions et débats apparemment infinis sur les principes forestiers, les critères et indicateurs de gestion forestière durable et le pour et le contre d’une convention forestière mondiale juridiquement contraignante. Mais à quel point ces initiatives ont-elles changé les forêts? Pour la plupart des pays, les délibérations du Groupe intergouvernemental sur les forêts (GIF), du Forum intergouvernemental sur les forêts (FIF) et du Forum des Nations Unies sur les forêts (FNUF), à Genève et à New York, ne paraissent pas avoir apporté de changements notables, et on ne comprend pas bien comment un nouveau traité international sur les forêts ou la foresterie pourrait déterminer une gestion forestière plus efficace, efficiente et équitable dans un pays quelconque, si la législation nationale s’est soldée régulièrement par un échec. Certains pays pourraient être à la recherche d’autres juridictions: ceux qui craignent que les normes de la Convention sur la diversité biologique (CDB) ou de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) risquent d’exercer un impact déplaisant sur les forêts et la foresterie pourraient souhaiter établir un organisme multilatéral différent, plus susceptible d’appliquer les normes souhaitées, même si les règles des traités internationaux portant sur divers aspects de la forêt se révèlent incompatibles ou sans fondement. Il est plus probable que l’aide aux programmes forestiers nationaux, concernant des problèmes particuliers ou partagés, donne de meilleurs résultats qu’une nouvelle loi forestière internationale.

L’influence internationale sur les politiques forestières a souvent traduit les préoccupations et perceptions dominantes des donateurs: l’accent est passé de l’industrialisation dans les années 60, au développement communautaire local dans les années 70, puis à la gestion des bassins versants et à la foresterie environnementale dans les années 80

FAO/FO-0866/S. Braatz
FAO/CFU000238/R. Faidutti
FAO/FO-0246/T. Hofer


Bien que les arbres poussent lentement, le déboisement peut être rapide – l’inaptitude d’une politique à s’attaquer à ce problème urgent se manifeste au bout de quelques années, alors qu’une réforme réussie de la politique forestière met parfois des décennies à prouver sa validité

FAO/14984/A. CONTI


COMMENT ÉVITER DE RÉPÉTER LES ERREURS DU PASSÉ?

Les défis que doit relever toute réforme des politiques forestières sont bien connus. Lors d’une réunion à Bangkok, Thaïlande, en 1992, les participants ont passé en revue les politiques forestières, les politiques relatives à d’autres secteurs (agriculture, environnement, pêche, tourisme, industrie, maîtrise des inondations, développement rural, etc.) et d’éventuelles réformes de la politique forestière pour 14 pays asiatiques (FAO, 1993). Certaines politiques nationales qui paraissaient alors très solides ont été rejetées, jugées inefficaces. Or, les erreurs identifiées par certains pays il y a plus de 12 ans sont répétées maintenant par d’autres.

La Commission des forêts pour l’Asie et le Pacifique de la FAO a proposé la constitution d’un groupe de réflexion ou d’un réseau visant à aider les pays à partager leurs expériences, et à examiner ce qui a été tenté ou n’a pas bien réussi, et pourquoi. Cela fournirait la possibilité d’éviter les erreurs et de tirer parti des enseignements d’autrui. On ne s’attaquerait pas seulement aux problèmes visibles pour tous – la disparition et la dégradation constante ou croissante des forêts; ou les projets coûteux ne donnant pas de résultats fructueux. Les études prospectives sectorielles entreprises par la FAO au niveau régional, et par certains pays au niveau national, peuvent apporter aussi une importante contribution, si leur portée est suffisamment large et leurs ambitions fortes. Le plus grand échec consisterait peut-être dans l’inaptitude à réaliser pleinement la contribution que la foresterie pourrait fournir à la société, à l’environnement, au développement rural et aux économies, contribution qui, parfois, ne s’est pas concrétisée parce qu’on avait omis de saisir l’opportunité offerte.


CONCLUSIONS

Il est essentiel d’être explicite, dès le début, quant aux raisons de la réforme d’une politique. Pourquoi est-elle nécessaire? Qui en bénéficiera et comment? Que coûtera-t-elle et qui en supportera le coût? Les perdants (il y en a toujours quelques-uns) seront-ils dédommagés ou satisfaits? Qui sera responsable de la mise en œuvre de la réforme et quelles ressources ou autorité seront-elles nécessaires pour ce faire? Qui sera responsable de la non-observation ou de la non-application? Quels arrangements seront-ils conclus pour surveiller et évaluer la performance et voir si la direction et l’ampleur de l’innovation suivent encore le chemin tracé, au bout de cinq ans ou davantage?

Les forêts et la foresterie ne peuvent à elles seules assurer l’élimination de la pauvreté et de l’injustice dans un pays. De meilleures politiques forestières ne mettront pas fin d’un jour à l’autre aux erreurs de gouvernement, à la corruption et à l’anarchie. L’état de droit, des droits de propriété bien définis et des marchés performants sont des conditions essentielles du succès d’une gestion forestière durable, et non des conséquences de sa réalisation. Les programmes forestiers fondés sur la recherche biophysique et socioéconomique rationnelle peuvent faire en sorte que les ruraux souffrant d’une extrême pauvreté dans les forêts et aux alentours ne s’appauvrissent pas davantage, mais aient des occasions de redresser leur niveau de vie tout en maintenant la forêt dans un état apte à assurer l’amélioration continue de leur qualité de vie et à fournir des services écologiques locaux et mondiaux.

Une approche axée sur l’économie et la société est indispensable. Lorsque l’on analyse, formule ou met en œuvre des politiques forestières, il faudrait toujours les intégrer aux secteurs connexes, et se montrer réaliste et pratique. Promettre des résultats qui ne peuvent être obtenus compromet inévitablement la crédibilité et la légitimité de la gestion forestière.

Bibliographie

Byron, R.N. et Arnold, J.E.M. 1999. What futures for the people of the tropical forests? World Development, 27(5): 789-805.

Byron, R.N. et Shepherd, G. 1998. Indonesia and the 1997–98 El Niño: fire problems and long-term solutions. Natural Resource Perspectives no 28. Londres, Royaume-Uni, Overseas Development Institute (ODI).

FAO. 1993. Forestry policies in selected countries in Asia and the Pacific. Document FAO: Forêts no 115. Rome.

FAO. 2005. Forests and floods: drowning in fiction or thriving on facts. RAP Publication 2005/03, Forest Perspectives no 2. Bangkok, Thaïlande, Bureau régional de la FAO pour l’Asie et le Pacifique.

Fisher, R.J. 1991. Studying indigenous forest management systems in Nepal: towards a more systematic approach. EAPI Working Paper no 30. Honolulu, Hawaii, Etats-Unis, East West Center.

Peters, C.M., Gentry A.H. et Mendelssohn, R.O. 1989. Valuation of an Amazonian rainforest. Nature, 339: 655-656.

Turvey, N. 2006. Rainforest wars. Brisbane, Australie, Interactive Press.

Westoby, J. 1987. The purpose of forests: follies of development. Oxford, Royaume-Uni, Blackwell.

Wunder, S. 2005. Paying for environmental services: some nuts and bolts. CIFOR Occasional Paper no 42. Bogor, Indonésie, Centre pour la recherche forestière internationale.

Previous PageTop Of PageNext Page